Vu la requête, enregistrée le 29 novembre 1988 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Claude X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 29 septembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la Société nationale des poudres et explosifs, confirmée par la lettre du 24 juin 1987, de ne pas accorder le "pont" du 13 juillet 1987, aux ouvriers d'Etat détachés au sein de la société nationale des poudres et explosifs ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
3°) de condamner la société nationale des poudres et explosifs à lui accorder une journée de repos compensateur en remplacement du préjudice subi le 13 juillet 1987 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970, ensemble le décret n° 71-571 du 9 juillet 1971 ;
Vu le décret n° 70-209 du 12 mars 1970 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de Bellescize, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Richard, Mandelkern, avocat de la société nationale des poudres et explosifs,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions d'excès de pouvoir de la requête de M. X... :
Considérant qu'en vertu du paragraphe II de l'article 5 de la loi du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et substances explosives, à compter de la date de la constitution de la société visée à l'article 3 de la loi, les ouvriers sous statut des établissements apportés à la société seront mis à la disposition de celle-ci, puis, dans un délai d'un an, recrutés par elle dans les conditions du droit du travail, sauf s'ils optent pour : "a) Leur maintien à la disposition de la société avec conservation de leur statut ..." ; qu'il est spécifié qu'en pareil cas, les intéressés continueront à être régis "par les textes qui s'appliquent ou s'appliqueront aux personnels placés sous statut d'Etat, employés dans les établissements relevant du ministre ... chargé de la défense nationale" ; que le paragraphe IV de l'article 5 de la loi du 3 juillet 1970 dispose que les modalités d'application de la mise à disposition de la société des diverses catégories de personnels visées aux paragraphes précédents seront fixées par décret ; que, sur ce fondement, le décret du 9 juillet 1971 énonce dans le premier alinéa de son article 2 que les ouvriers sous statut mis à la disposition de la société nationale des poudres et explosifs "conservent le bénéfice de ce statut avec toutes conséquences de droit" ; que, cependant, le deuxième alinéa de l'article 2 du décret dispose que : "La notation, l'avancement, la discipline et, d'une façon générale, l'administration de ces ouvriers sont assurés, dans le cadre des dispositions réglementaires en vigueur, par le président de la société ou par toute personne déléguée par lui à cet effet" ; que, selon le troisième alinéa de l'article 2 du décret, en matière disciplinaire, le président de la société "assume" les pouvoirs non expressément réservés au ministre de la défense par le décret du 12 mars 1970 portant modification des décrets fixant le régime statutaire des ouvriers du ministère de la défense nationale ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les ouvriers qui ont exercé l'option prévue par le a) de l'article 5-II de la loi du 3 juillet 1970 restent soumis aux textes qui s'appliquent aux personnels placés sous statut d'Etat employés dans les établissements relevant du ministre chargé de la défense ; que ces personnels n'ont pas la qualité de fonctionnaires ; que les décrets des 26 février 1897, 1er avril 1920 et 8 janvier 1936, qui ont fixé les statuts applicables à certaines catégories d'ouvriers du ministère de la défense, n'excluent pas que ces statuts puissent être complétés par des dispositions prises par le ministre dans l'exercice du pouvoir qui lui appartient, en l'absence de tout texte de loi ou de règlement en disposant autrement, de réglementer la situation des agents placés sous ses ordres, y compris ceux qui, mis à la disposition de la société nationale des poudres et explosifs, ont exercé l'option définie à l'article 5-II a) de la loi du 3 juillet 1970 ;
Considérant qu'il suit de là, qu'après avoir rappelé par l'article 1er de son arrêté du 7 avril 1976 relatif au régime applicable aux ouvriers d'Etat du ministère de la défense mis à la disposition de la société nationale des poudres et explosifs que les intéressés "conservent, en application de l'article 2 du décret n° 71-571 du 9 juillet 1971, le bénéfice de leur statut", le ministre de la défense avait compétence pour poser en principe, par l'article 4 du même arrêté que les prescriptions de la convention nationale des industries chimiques et des accords d'entreprise en vigueur dans la société peuvent, à l'exception de celles ayant trait à la rémunération et ses accessoires, être appliquées à ces ouvriers "dans la mesure où elles ne sont pas en contradiction avec les dispositions et garanties du statut des ouvriers d'Etat relatives à l'emploi et au régime des retraites" ;
Considérant que si le renvoi ainsi opéré exclut que le chapitre IX "Rémunération" de l'accord d'entreprise du 24 septembre 1973 modifié soit applicable aux personnels ayant conservé le statut des ouvriers d'Etat, il en va différemment du chapitre XIV du même accord relatif aux "congés payés et jours fériés" ; qu'au nombre des stipulations de ce dernier chapitre figurent celles de l'article 32-3 de l'accord d'entreprise en vertu desquelles ce n'est qu'au cas où le nombre des jours fériés légaux actuellement en vigueur qui tombent un "jour oeuvré" est inférieur à neuf, qu'un "pont chômé et payé" sera accordé en plus" ; qu'il est constant que cette condition n'était pas remplie au cours de l'année 1987 ; que c'est par suite à bon droit, qu'agissant dans le cadre de l'habilitation donnée à la société nationale des poudres et explosifs pour l'administration des ouvriers ayant choisi l'option de l'article 5-II a) de la loi du 3 juillet 1970, le directeur général délégué de cette société, chargé du personnel, a refusé à M. X..., l'octroi du jour de congé chômé et payé qu'il sollicitait pour le lundi 13 juillet 1987 ; que le requérant ne saurait, en tout état de cause, se prévaloir des dispositions d'une circulaire du 24 décembre 1986 du ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la fonction publique, relative au calendrier des jours fériés de l'année 1987, qui est dépourvue de valeur réglementaire ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à ce que lui soit accordée une journée de repos compensatoire pour réparer le préjudice subi du fait que le 13 juillet 1987 n'a pas été chômé et payé :
Considérant qu'en dehors du cas prévu par l'article 77 de la loi du 8 février 1995, dont les conditions d'application ne sont pas remplies en l'espèce, il n'appartient pas au juge administratif, d'adresser des injonctions à l'administration ; que, dès lors, les conclusions susanalysées sont irrecevables ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Claude X..., à la société nationale des poudres et explosifs et au ministre de la défense.