Vu la requête enregistrée le 6 septembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Jacqueline B..., demeurant au Lieudit "La Borderie" à Saint-Mathieu (87440), M. Didier CHEYROUX, demeurant au Lieudit "Fontendreau à Saint-Mathieu (87440), M. Pascal VERGER, demeurant au Lieudit "La Forge" à Saint-Mathieu (87440), M. Denis MOUSNIER, demeurant au Lieudit "La Brousse" à Saint-Mathieu (87440) ; les requérants demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 8 août 1995 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé en son article 2, les opérations électorales du 18 juin 1995 dans la commune de Saint-Mathieu (Haute-Vienne) ;
2°) de rejeter la protestation de M. Claude E... et de Mme Malou A... contre ces opérations électorales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Dayan, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'après que le procès-verbal du premier tour des opérations électorales s'étant déroulées le 11 juin 1995 en vue de la désignation du conseil municipal de la commune de Saint-Mathieu, a proclamé élue Mme Z..., et constaté que trois sièges restaient à pourvoir au second tour, le maire de cette commune a, le 12 juin, fait procéder à la rectification de ce document, au motif qu'une erreur de décompte s'était produite en ce qui concerne les suffrages obtenus par Mme Z..., a ainsi rayé celle-ci de la liste des candidats élus au premier tour, et décidé que le second tour serait en conséquence organisé en vue de l'élection de quatre conseillers municipaux ; que, par jugement du 8 août 1995, le tribunal administratif de Limoges a constaté que la rectification dont s'agit était irrégulière, a annulé la proclamation de Mme Z... comme conseiller municipal, et, par l'article 2 de son jugement, a annulé les opérations électorales du second tour auxquelles il avait été procédé le 18 juin 1995 ; que les requérants, proclamés élus au terme de ces dernières élections, doivent être regardés comme demandant l'annulation de l'ensemble de ce jugement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 200 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Les jugements et arrêts mentionnent que l'audience a été publique ... Mention y est faite que le rapporteur et le commissaire du gouvernement et, s'il y a lieu, les parties, leurs mandataires ou défendeurs ... ont été entendus ..." ; qu'alors que le jugement attaqué fait état d'observations orales de M. Y..., il ressort des témoignages versés au dossier que ce dernier n'assistait pas à l'audience ; que les requérants sont ainsi fondés à soutenir que le jugement qu'ils attaquent a été rendu en méconnaissance des dispositions précitées ; qu'il y a donc lieu, pour le Conseil d'Etat, d'annuler ce jugement et, le délai imparti au tribunal administratif pour se prononcer sur les protestations étant expiré, de statuer sur lesdites protestations ;
Considérant, en premier lieu, que la protestation formée par Mme A... contre la rectification susmentionnée du procès-verbal a été déposée à la préfecture avant le terme du délai fixé par l'article R. 119 du code électoral ; que, se référant aux résultats du dépouillement tels qu'ils avaient été transcrits dans le procès-verbal établi initialement, cette protestation était motivée ; que les requérants ne sont ainsi pas fondés à soutenir que cette protestation n'était pas recevable ;
Considérant, en second lieu, que la lettre adressée au sous-préfet par M. D..., alors maire de la commune, le 12 juin 1995, lui exposant qu'en raison d'une erreur de décompte, le procès-verbal de l'élection avait été notifié, doit être regardée comme constituant une protestation formée contre l'élection de Mme Z... proclamée élue par le procès-verbal initial ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison des articles R. 67, R. 118 et R. 119 du code électoral qu'il appartient à la seule juridiction administrative saisie d'une protestation, de rectifier les résultats proclamés d'une élection municipale, dès qu'ils ont été transcrits au procèsverbal signé des membres du bureau de vote ; que par suite, et quelqu'erroné qu'il ait pu luiparaître, le maire de la commune ne pouvait légalement, après cette proclamation, apporter au procès-verbal la moindre rectification ;
Mais considérant qu'il résulte des pièces du dossier qu'à l'issue du premier tour de scrutin, Mme Z... a obtenu 426 voix ; que c'est par suite d'une pure erreur matérielle de transcription que le total des suffrages qui lui a été attribué a été arrêté par le bureau de vote à 462 ; qu'il y a donc lieu, pour le juge de l'élection, de le ramener à 426, et, ce nombre étant inférieur à la majorité absolue des suffrages exprimés, d'annuler l'élection de Mme Z... ;
Article 1er : Le jugement, en date du 8 août 1995, du tribunal administratif de Limoges est annulé.
Article 2 : L'élection de Mme Z... en qualité de conseiller municipal de la commune de Saint-Mathieu est annulée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Jacqueline B..., à M. Didier X..., à M. Pascal F..., à M. Denis C..., à M. Claude E..., à Mme Malou Z..., à M. D... et au ministre de l'intérieur.