Vu l'ordonnance en date du 11 mars 1992, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 11 mars 1992 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à cette Cour par Mlle Danielle Y..., épouse X..., demeurant aux "Forêts" à Chatillon d'Azergues (69380) ;
Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 11 février 1992 présentée par Mlle Y... et tendant :
1° à l'annulation du jugement du 14 novembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre les décisions du 9 mai et du 26 juin 1989 du maire de la ville d'Asnières-sur-Seine lui refusant le versement d'indemnités pour perte d'emploi ;
2° à l'annulation pour excès de pouvoir de ces décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Lallemand, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 351-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 84-198 du 21 mars 1984, des allocations d'assurance, qui comprennent une allocation de base et une allocation de fin de droits, sont attribuées aux travailleurs involontairement privés d'emploi qui satisfont à des conditions d'âge et d'activité antérieure ; que, selon l'article L. 351-8 du même code, les mesures d'application de ce régime d'assurance font l'objet d'un accord conclu et agréé dans les conditions définies aux articles L. 352-1 et L. 352-2 ; qu'aux termes de l'article L. 351-12 dans sa rédaction résultant de la loi n° 87-588 du 30 juillet 1987 : "Ont droit aux allocations d'assurance dans les conditions prévues à l'article L. 351-3 : les agents ( ...) des collectivités locales ( ...) : la charge et la gestion de cette indemnisation sont assurées par les employeurs mentionnés au présent article ..." ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le régime des allocations auxquelles ont droit les agents des collectivités locales involontairement privés d'emploi est défini par les stipulations de l'accord prévu à l'article L. 351-8 précité, dès lors qu'un tel accord est intervenu et a été agréé ;
Considérant que le ministre chargé de l'emploi a agréé la convention en date du 26 février 1988, publiée au Journal officiel du 29 avril 1988 relative à l'assurance chômage et le règlement annexé à cette convention ; que l'une et l'autre étaient en vigueur à la date du 31 août 1988 à laquelle Mlle Y... a cessé ses fonctions ; qu'en vertu des dispositions des articles 1er, 2 et 3 f) dudit règlement, les salariés qui ont démissionné pour un "motif reconnu légitime par la commission paritaire de l'Association pour l'Emploi dans l'Industrie et le Commerce" sont assimilés aux travailleurs involontairement privés d'emploi et bénéficient des prestations de l'assurance chômage ; que, s'agissant de la démission d'un agent d'une collectivité territoriale, il appartient à l'autorité administrative compétente d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les motifs de cette démission permettent d'assimiler celle-ci à une perte involontaire d'emploi ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que Mlle Y... a quitté le 31 août 1988 son emploi d'animatrice de la ville d'Asnières-sur-Seine pour suivre la personne avec laquelle elle vivait depuis plusieurs années en concubinage notoire et qui était mutée pour raisons professionnelles à Bordeaux ; que, quelle que soit la portée de la délibération n° 10 de la commission paritaire nationale, un tel motif est un motif légitime au sens des dispositions précitées ; qu'ainsi le maire d'Asnières-sur-Seine n'a pu légalement refuser à Mlle Y... le bénéfice desdites allocations ; qu'il résulte de ce qui précède qu'elle est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 9 mai et 26 juin 1989 du maire d'Asnières-sur-Seine ;
Article 1er : Le jugement du 11 mars 1992 du tribunal administratif de Paris et les décisions des 9 mai et 26 juin 1989 du maire d'Asnières-sur-Seine sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Danielle Y... épouse X..., au maire d'Asnières-sur-Seine, au ministre du travail et des affaires sociales, au ministre de l'intérieur et au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.