Vu 1°), sous le n° 137834, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 mai 1992 et 28 septembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la VILLE DE TOULOUSE, représentée par son maire en exercice ; la VILLE DE TOULOUSE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 20 mars 1992 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a, sur la demande de MM. Jean-Jacques X..., Christian Y... et Albert B..., annulé l'arrêté du 23 juin 1989 de son maire accordant à MM. Z... et A... le permis de construire un immeuble à usage d'habitation collective sur un terrain sis ... ;
2°) rejette la demande présentée par MM. X..., Y... et B... devant le tribunal administratif de Toulouse ;
Vu 2°), sous le n° 137835, la requête enregistrée le 27 mai 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la VILLE DE TOULOUSE, représentée par son maire en exercice ; la VILLE DE TOULOUSE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 25 mai 1992 par lequel ce dernier a, d'une part, décidé qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juin 1989 accordant à MM. Z... et A... le permis de construire un immeuble à usage d'habitation collective sur un terrain sis ..., d'autre part, annulé l'arrêté du 7 juillet 1989 par lequel le maire de Toulousea transfèré à la S.C.I. "Entre Deux Mers" le permis de construire délivré le 23 juin 1989 à l'indivision Moncamp-Salesses ;
2°) rejette le déféré du préfet de la Haute-Garonne contre cet arrêté du 7 juillet 1989 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Medvedowsky, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de la VILLE DE TOULOUSE, et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. Jean-Jacques X..., de M. Christian Y... et de M. Albert B...,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les deux requêtes de la VILLE DE TOULOUSE présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 23 juin 1989 du maire de Toulouse accordant à MM. Z... et A... le permis de construire un immeuble à usage d'habitation sur les lots n° 6, 8, 9, 17 et 18 d'un terrain en copropriété sis à l'angle du boulevard de la Marguette et de la rue Prouardel, ainsi que l'arrêté du 7 juillet 1989 transférant ce permis de construire à la société civile immobilière "Entre Deux Mers", au motif que l'octroi de ce permis n'avait pas été précédé d'une autorisation de lotir ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 315-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de l'article 1er du décret du 26 juillet 1977 : "Constitue un lotissement, au sens du présent chapitre, toute division d'une propriété foncière en vue de l'implantation de bâtiments qui a pour objet ou qui, sur une période de moins de dix ans, a eu pour effet de porter à plus de deux le nombre de terrains issus de la propriété" ; que le terrain ayant fait l'objet du permis de construire délivré en 1989 à MM. Z... et A..., puis transféré à la SCI "Entre Deux Mers", résulte de divisions et de cessions opérées depuis le 27 septembre 1967, date d'un règlement de copropriété qui a autorisé les copropriétaires à édifier ou à céder à des tiers le droit d'édifier des bâtiments et parkings et divisé, à cette fin, le terrain en 19 lots, les propriétaires de ces lots ayant la jouissance exclusive et perpétuelle des parties privatives des immeubles à y construire ; que la SCI "Résidence des Deux Mers", titulaire du permis de construire initial délivré le 3 juin 1965 sur un tènement unique, a immédiatement appliqué le règlement de copropriété en cédant à deux autres sociétés des lots dont elle ne souhaitait pas conserver la propriété et, ce faisant, procédé à une division volontaire de la parcelle d'origine ; que cette opération, qui a conféré à chacun des trois bénéficiaires un droit exclusif de construction sur son lot, les a placés dans la situation prévue par les dispositions susrappelées du code de l'urbanisme, alors même que la propriété du sol est restée indivise entre eux ; que, par suite et contrairement à ce que soutient la VILLE DE TOULOUSE, le terrain d'assiette de l'immeuble que MM. Z... et A..., puis la SCI "Entre Deux Mers" ont été autorisés à construire en 1989 relevait bien du régime des lotissements ; que la VILLE DE TOULOUSE ne peut utilement se prévaloir de ce que les bâtiments édifiés sur les autres lots de la copropriété étaient achevés depuis le 29 septembre 1971, c'est à dire depuis plus de dix ans à la date du permis contesté, pour soutenir que l'immeuble ayant fait l'objet de ce permis ne pouvait être regardé comme faisant partie d'un lotissement ;
Considérant en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 315-2.c du code de l'urbanisme : "Ne constituent pas des lotissements et ne sont pas soumises aux dispositions du présent chapitre.. les divisions de terrains en propriété ou en jouissance lorsque les terrains issus de la division constituent l'assiette d'un immeuble ... dont la construction par une société régie par le titre III de la loi n° 71-579 du 16 juillet 1971, modifiée, a été autorisée." ; qu'en admettant, comme le soutient la VILLE DE TOULOUSE, que la société civile immobilière "Résidence des Deux Mers" ait été régie par le titre III de ladite loi, qui vise les sociétés coopératives à capital et personnels variables, il est constant, ainsi qu'il a été dit, qu'elle a renoncé, en 1967, à construire elle-même la totalité des bâtiments autorisés par le permis de construire initial du 3 juin 1965 et que les divisions et cessions auxquelles elle a alors procédé, au profit d'autres constructeurs n'ayant pas, d'après les pièces du dossier, le statut juridique de sociétés régies par le titre III de la loi du 16 juillet 1971, ont eu pour effet de replacer l'ensemble de l'opération hors du champ d'application des dispositions précitées de l'article R. 315-2.c du code de l'urbanisme ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la VILLE DE TOULOUSE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, et de condamner la VILLE DE TOULOUSE à payer à MM. X..., Y... et B... une somme globale de 12 000 F, au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes de la VILLE DE TOULOUSE sont rejetées.
Article 2 : La VILLE DE TOULOUSE paiera à MM. X..., Y... et B... une somme globale de 12 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la VILLE DE TOULOUSE, à M. Jean-Jacques X..., à M. Christian Y..., à M. Albert B... et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme.