Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 31 août 1994 et 2 janvier 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DE L'YONNE, représenté par le président en exercice du conseil général ; le DEPARTEMENT DE L'YONNE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 14 juin 1994 par lequel le tribunal administratif de Dijon a, sur la demande de M. Bernard X..., annulé la délibération du 9 décembre 1991 du bureau du conseil général, accordant une subvention de 100 000 F à l'association "Club Sport Aventure" ;
2°) rejette la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Dijon ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu les lois n° 82-6 du 7 janvier 1982 et n° 82-213 du 2 mars 1982 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Hourdin, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Brouchot, avocat du DEPARTEMENT DE L'YONNE,
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant que, contrairement à ce que soutient le DEPARTEMENT DE L'YONNE, la décision prise par une collectivité publique d'attribuer une subvention à une personne physique ou morale déterminée est un acte susceptible de faire grief, indépendamment du fait que les crédits nécessaires au paiement de la subvention ont été préalablement inscrits dans le budget voté par la collectivité, cette inscription ne comportant par elle-même aucune obligation d'effectuer la dépense correspondante ; que, par suite, le DEPARTEMENT DE L'YONNE n'est pas fondé à soutenir que M. X..., qui a la qualité de contribuable départemental, n'était pas recevable à demander l'annulation de la délibération du 9 décembre 1991 par laquelle le bureau du conseil général a décidé d'accorder à l'association "Club Sport Aventure" une subvention de 100 000 F, imputée sur le crédit ouvert au budget du département pour financer des opérations de "parrainage" ;
Sur la légalité de la délibération attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article 48 de la loi du 2 mars 1982 :" ... sous réserve de la liberté du commerce et de l'industrie, du principe de l'égalité des citoyens devant la loi ainsi que des règles de l'aménagement du territoire définies par la loi approuvant le plan, le département peut intervenir en matière économique et sociale dans les conditions prévues au présent article I - Lorsque l'intervention du département a pour objet de favoriser le développement économique, il peut accorder des aides directes et indirectes dans les conditions prévues par la loi approuvant le plan." ; qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 7 janvier 1982, approuvant le plan intérimaire 1982-1983 : "les collectivités territoriales peuvent, lorsque leur intervention a pour objet la création ou l'extension d'activité économique, accorder des aides aux entreprises ..." ; que les modalités d'intervention ainsi autorisées sont, sous réserve d'habilitations législatives expresses données aux collectivités locales, exclusives de toute autre forme d'aide ;
Considérant que l'objet de l'association "Club Sport Aventure" est défini par ses statuts comme étant "la promotion, les opérations publicitaires et la médiatisation des opérations de sponsoring en faveur de Sport aventure SARL" et "la promotion de l'écurie Duc de Bourgogne", équipe engagée par cette SARL dans le "rallye Paris-Le Cap" ; que le fait que, postérieurement à la délibération contestée, l'association "Club Sport Aventure" ait conclu une convention avec le département prévoyant l'apposition du "logo" de ce dernier sur divers supports de communication, ne permet pas, en tout état de cause, de regarder la subvention accordée comme ayant pour contrepartie une prestation de "promotion" ; que la subvention consiste, en réalité, en une aide versée à "Sport aventure SARL", qui en est le bénéficiaire effectif par l'intermédiaire de l'association "Club Sport Aventure" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas allégué, que l'aide accordée à "Sport aventure SARL" aurait eu pour objet "la création ou l'extension d'activité économique" ; que l'octroi de la subvention litigieuse n'entrait pas, dès lors, dans le champ des prévisions de l'article 4 de la loi du 7 janvier 1982 ; qu'aucune autre disposition législative n'autorisait son versement ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le DEPARTEMENT DE L'YONNE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a, sur la demande de M. X..., annulé la délibération du 9 décembre 1991 du bureau de son conseil général ;
Article 1er : La requête du DEPARTEMENT DE L'YONNE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DE L'YONNE, à M. X... et au ministre de l'intérieur.