Vu la requête enregistrée le 22 février 1994 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat et présentée pour Mme Daloba X..., domiciliée à l'Association de Solidarité avec les Travailleurs Immigrés ... ; Mme X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°/ d'annuler le jugement du 17 septembre 1993 par lequel le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 10 septembre 1993 par lequel le préfet du département de la Gironde a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°/ d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 23 août 1993 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Delarue, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Bordeaux :
Considérant qu'aux termes de l'article 22 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée : "1°/ La requête doit être enregistrée au greffe du tribunal administratif dans les vingt-quatre heures suivant la notification de l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 10 septembre 1993 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... a été notifié à l'intéressée le 15 septembre 1993 à 17 h 00 par lettre recommandée avec accusé de réception ; que, dès lors, la demande d'annulation de cet arrêté, qui a été enregistrée le 16 septembre 1993 à 14 h 55 au greffe du tribunal administratif de Bordeaux, soit dans le délai de vingt-quatre heures fixé par l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée, était bien recevable ; que, par suite, Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 17 septembre 1993, le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté comme tardive sa demande d'annulation de la mesure d'éloignement prise à son encontre le 10 septembre 1993 ;
Considérant qu'il appartient au juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif, d'examiner les moyens présentés par Mme X... contre l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière ;
Considérant que, selon les dispositions combinées du 3ème alinéa et du 1er alinéa bis de l'article 25-5° de l'ordonnance modifiée du 2 novembre 1945, ne peut faire l'objet d'une reconduite à la frontière "l'étranger qui est père ou mère d'un enfant français résidant en France à la condition qu'il exerce, même partiellement, l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le 10 septembre 1993, date à laquelle est intervenu l'arrêté attaqué ordonnant la reconduite à la frontière de MmeGASSAMA, celle-ci était la mère d'un enfant français sur lequel elle exerçait l'autorité parentale comme l'atteste le certificat de nationalité française établi le 12 août 1993 par le juge d'instance de Bordeaux ; qu'ainsi le préfet a commis une erreur de droit en prenant le 10 septembre 1993 à l'encontre de Mme X... un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... est fondée à demander l'annulation de la mesure d'éloignement prise à son encontre le 10 septembre 1993 ;
Article 1er : Le jugement susvisé du président du tribunal administratif de Bordeaux en date du 17 septembre 1993 est annulé.
Article 2 : L'arrêté attaqué du préfet du département de la Gironde en date du 10 septembre 1993 est annulé.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Daloba X..., au préfet de la Gironde et au ministre de l'intérieur.