Vu la requête, enregistrée le 27 août 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Abdoulaye X..., demeurant Cikiné, rue n° 10 Parcelle n° 1777 à Dakar, (Sénégal) ; M. X... demande au président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 juillet 1993 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 28 juillet 1993 par lequel le préfet de l'Isère a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la nationalité ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990 et la loi du 26 février 1992 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. Descoings, Commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir soulevée par le préfet de l'Isère :
Considérant que la circonstance que M. X... ait quitté le territoire français à destination du Sénégal n'a pas pour effet de priver de son objet son recours déposé en appel à l'encontre du jugement du 30 juillet 1993 du tribunal administratif de Grenoble et de l'arrêté du préfet de l'Isère du 28 juillet 1993 décidant sa reconduite à la frontière ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête :
Considérant que pour demander l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 28 juillet 1993 décidant sa reconduite à la frontière, M. X... soutient qu'il est de nationalité française ; qu'il résulte des pièces du dossier, et notamment du jugement du tribunal de grande instance de Grenoble daté du 9 novembre 1994, que M. X... est français par filiation, son père ayant conservé sa nationalité française d'origine après l'indépendance du Sénégal, où il a vécu, par application des dispositions de l'article 153 du code de la nationalité alors en vigueur ; qu'en prenant l'arrêté attaqué, le préfet de l'Isère a méconnu les dispositions de l'article 22-I qui permettent exclusivement la reconduite des ressortissants étrangers ; qu'ainsi, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa requête dirigée contre ledit arrêté ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 10 000 F sur le fondement des dispositions de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'allouer la somme de 5 000 F à M. X... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble du 30 juillet 1993 et l'arrêté du préfet de l'Isère du 28 juillet 1993 sont annulés.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. X... la somme de 5 000 F au titre des frais irrépétibles.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Abdoulaye X..., au préfet de l'Isère et au ministre de l'intérieur.