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25/10/1993 | FRANCE | N°122966

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 25 octobre 1993, 122966


Vu la requête, enregistrée le 6 février 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE VALENCIENNES, représentée par son directeur en exercice ; la caisse demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt en date du 4 décembre 1990 de la cour administrative d'appel de Nancy en tant qu'il a condamné la commune de Quiévrechain à lui verser la somme de 79 908 F au titre des frais et débours avancés pour les soins de l'enfant José X... ;
2°) condamne, réglant l'affaire au fond, la commune de Quiévrechain

lui verser la somme de 99 816,31 F avec intérêts au taux légal capitalis...

Vu la requête, enregistrée le 6 février 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE VALENCIENNES, représentée par son directeur en exercice ; la caisse demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt en date du 4 décembre 1990 de la cour administrative d'appel de Nancy en tant qu'il a condamné la commune de Quiévrechain à lui verser la somme de 79 908 F au titre des frais et débours avancés pour les soins de l'enfant José X... ;
2°) condamne, réglant l'affaire au fond, la commune de Quiévrechain à lui verser la somme de 99 816,31 F avec intérêts au taux légal capitalisés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale, notamment son article L.397 en vigueur à la date de l'arrêt attaqué ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Jactel, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Peignot, Garreau, avocat de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE VALENCIENNES et de la S.C.P. Rouvière, Boutet, avocat de la commune de Quiévrechain,
- les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale, en vigueur à la date de l'arrêt attaqué : "Si la responsabilité du tiers est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d'agrément" ; qu'il résulte de ces dispositions que, s'agissant de l'indemnité allouée en réparation des troubles dans les conditions d'existence, seule peut être comprise dans la part mise à la charge du tiers sur laquelle peut s'imputer la créance de la caisse, la fraction de ladite indemnité qui couvre les troubles physiologiques subis par la victime ;
Considérant en premier lieu, d'une part, que la cour administrative, par l'arrêt attaqué, après avoir retenu le taux d'incapacité permanente partielle de 30 % évalué par l'expert, a déclaré qu'il sera fait une juste appréciation de l'atteinte portée à l'intégrité physique de l'intéressé, en évaluant à 180 000 F ce chef de préjudice, dont 120 000 F représentent l'indemnité de caractère personnel en vertu de l'article 397 de l'ancien code de la sécurité sociale auquel la cour s'est référée par erreur, mais dont la rédaction était la même que celle de l'article L.376-I du nouveau code ; d'autre part, que la cour n'a inclus, avant application du partage d responsabilité, dans la part d'indemnité mise à la charge de la commune, sur laquelle pouvait s'imputer la créance de la caisse, que la fraction de l'indemnité allouée en réparation du préjudice résultant de l'incapacité permanente partielle ne présentant pas un caractère personnel au sens des dispositions précitées du code de la sécurité sociale ;

Considérant que, si la cour a évalué à 180 000 F "l'atteinte portée à l'intégrité physique de l'intéressé", il résulte tant du partage qu'elle a opéré de cette somme que de la référence expresse qu'elle a faite à l'indemnité de caractère personnel visée à la disposition précitée du code de la sécurité sociale qu'elle a, en réalité, jugé que le préjudice résultant de l'incapacité permanente partielle se décomposait, d'une part, en des troubles physiologiques évalués à 60 000 F, somme qui, seule, doit être regardée comme réparant l'atteinte portée à l'intégrité physique et, d'autre part, en un préjudice à caractère personnel, tel que défini à l'article L.376-1, évalué à 120 000 F, somme qui ne peut donc être regardée comme réparant l'atteinte portée à l'intégrité physique ; que c'est donc par une exacte application de l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale que la cour, dans le calcul de la part d'indemnité sur laquelle pouvaient s'imputer les droits de la caisse, a inclus la seule somme de 60 000 F ;
Considérant, en second lieu, que la part d'indemnité sur laquelle peut s'imputer la créance de la caisse comprend les indemnités allouées en remboursement de la totalité des frais médicaux et pharmaceutiques y compris ceux qui restent à la charge de la victime ; que la cour a ainsi commis une erreur de droit en n'incluant pas de tels frais, dont le montant s'élève à 6 194,40 F, dans la part d'indemnité sur laquelle pouvait s'imputer la créance de la caisse ; que la caisse requérante est, dès lors, fondée à demander l'annulation de l'article 1er de l'arrêt attaqué par lequel la cour a condamné la commune à lui payer la somme de 79 908 F ;

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice l'exige" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la créance de la caisse requérante ne peut s'imputer que sur la part de la condamnation de la commune assurant la réparation de l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, c'est-à-dire sur les indemnités allouées en remboursement des frais médicaux et pharmaceutiques supportés tant par la caisse que par l'intéressé, dont le montant non contesté s'élève à la somme de 106 010,71 F et sur la fraction de l'indemnité allouée en réparation des troubles dans les conditions d'existence recouvrant les troubles physiologiques subis par la victime, dont le montant est de 60 000 F ; que, compte tenu du partage de responsabilité, la part de l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage sur laquelle peut s'imputer la créance de la caisse d'assurance maladie s'élève à la somme de 83 005,35 F ; qu'il n'est pas contesté que la créance de la caisse s'élève à la somme de 99 816,31 F ; qu'il y a, dès lors, lieu de condamner la commune de Quièvrechain à payer à la caisse requérante la somme de 83 005,35 F ;
Considérant que l'arrêt attaqué a fixé le point de départ des intérêts afférents à cette dernière somme à la date non contestée du 13 février 1984 ; que, devant le Conseil d'Etat, pour le cas où celui-ci, après cassation, règlerait l'affaire au fond, la caisse primaire d'assurance maladie a demandé, le 6 février 1991, qu'il soit procédé à la capitalisation des intérêts ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1er : L'article 1er de l'arrêt en date du 4 décembre 1990 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé.
Article 2 : La commune de Quièvrechain est condamnée à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE VALENCIENNES la somme de 83,005,35 F avec intérêts au taux légal à compter du 13 février 1984.Les intérêts échus le 6 février 1991 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE VALENCIENNES, à la commune de Quièvrechain et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 122966
Date de la décision : 25/10/1993
Type d'affaire : Administrative

Analyses

PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - CASSATION - CONTROLE DU JUGE DE CASSATION - REGULARITE INTERNE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - TROUBLES DANS LES CONDITIONS D'EXISTENCE - TROUBLES DANS LES CONDITIONS D'EXISTENCE SUBIS PAR LA VICTIME D'UN ACCIDENT.


Références :

Code civil 1154
Code de la sécurité sociale L376-1
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11


Publications
Proposition de citation : CE, 25 oct. 1993, n° 122966
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Jactel
Rapporteur public ?: Daël

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:122966.19931025
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