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03/02/1989 | FRANCE | N°83294

France | France, Conseil d'État, 6 ss, 03 février 1989, 83294


Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires enregistrés les 24 novembre 1986 et 5 janvier 1987 et le 30 mars 1987, au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société OLIDA, dont le siège social est ..., représentée par son président-directeur général et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 7 octobre 1986 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 17 septembre 1985 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a annulé

les décisions du 20 mars 1985 de l'inspecteur du travail autorisant cet...

Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires enregistrés les 24 novembre 1986 et 5 janvier 1987 et le 30 mars 1987, au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société OLIDA, dont le siège social est ..., représentée par son président-directeur général et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 7 octobre 1986 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 17 septembre 1985 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a annulé les décisions du 20 mars 1985 de l'inspecteur du travail autorisant cette société à procéder au licenciement pour cause économique de Mme Y... et de M. X...,
2°) annule pour excès de pouvoir cette décision,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-935 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Falque-Pierrotin, Auditeur,
- les observations de Me Pradon, avocat de la société anonyme OLIDA,
- les conclusions de M. de la Verpillière, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 425-1 du code du travail : "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ... la même procédure est applicable au licenciement des anciens délégués du personnel pendant les six premiers mois qui suivent l'expiration de leur mandat ou la disparition de l'institution ; qu'aux termes de l'article L. 436-1 du même code tout licenciement envisagé par l'employeur d'un membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise ou d'un représentant syndical prévu à l'article L. 433-1 est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement. La même procédure est applicable aux anciens membres des comités d'entreprise ainsi que des anciens représentants syndicaux qui, désignés depuis deux ans, ne seraient pas reconduits depuis deux ans dans leurs fonctions lors du renouvellement du comité, pendant les six premiers mois qui suivent l'expiration de leur mandat ou la disparition de l'institution" ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 236-11, les dispositions de l'article L. 436-1 sont applicables aux salariés qui siègent ou ont siégé en qualité de représentants du personnel dans un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; qu'aux termes de l'article R. 436-6 du même code, le ministre compétent peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet ;

Considérant que, par décision du 20 mars 1985, l'inspecteur du travail compétent a autorisé le licenciement de M. X... dont les mandats de membre du comité d'établissement de Levallois, de membre du comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail et par suite le mandat de membre du comité central d'entreprise avaient pris fin le 31 octobre 1984, date de la fermeture de l'établissement de Levallois ;
Considérant que l'expiration du délai de protection spéciale instituée par les dispositions précitées ne saurait avoir pour effet de priver le ministre du travail du pouvoir qui lui appartient, en vertu des dispositions de l'article R. 436-6 du code du travail et en qualité de supérieur hiérarchique de l'inspecteur du travail, de contrôler une autorisation de licenciement accordée par ce dernier avant l'expiration dudit délai de protection ; qu'il suit de là que le ministre du travail, régulièrement saisi d'un recours hiérarchique contre la décision de l'inspecteur du travail du 20 mars 1985, n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence en annulant, par décision du 17 septembre 1985, la décision de l'inspecteur du travail ;
Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L. 236-11, L. 412-18, L. 425-1 et L. 436-1 du code du travail, les salariés siégeant ou ayant siégé en qualité de représentants du personnel dans un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, les délégués syndicaux, les délégués du personnel, titulaires ou suppléants, et les membres, titulaires ou suppléants, du comité d'entreprise bénéficient dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la factulté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou à l'autre des intérêts en présence ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que les demandes d'autorisation de licenciement de Mme Y..., sertisseuse, déléguée suppléante du personnel, membre du comité d'entreprise et déléguée syndicale et de M. X..., préparateur, membre suppléant du comité d'établissement, du comité central d'entreprise et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, étaient motivées par la fermeture de l'unité de production de Levallois-Perret de la société OLIDA et par le refus des intéressés d'accepter l'offre de reclassement qui leur avait été faite respectivement en qualité d'employée de bureau au siège social de la société à Neuilly-sur-Seine et de magasinier à l'usine de Lyon ; que, pour annuler les décisions de l'inspecteur du travail accordant l'autorisation sollicitée et refuser, en conséquence, ladite autorisation, le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle s'est fondé, d'une part, sur ce que la société n'avait pas procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement et, d'autre part, sur ce qu'il existait un lien entre la mesure envisagée et les mandats détenus par les intéressés ;
Considérant qu'en se bornant à une seule proposition qui emportait modification substantielle du contrat de travail de Mme Y... et de M. X..., et alors qu'elle n'établit pas qu'elle aurait été dans l'impossibilité d'assurer leur reclassement dans de meilleures conditions, notamment, dans des emplois équivalents de ses établissements d'Epinay et de Saint-Ouen l'Aumône, la société OLIDA ne peut être regardée comme ayant fait les efforts nécessaires de reclassement lui incombant ; que le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle était, dans ces conditions, et pour ce seul motif, tenu de refuser l'autorisation sollicitée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société OLIDA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 17 septembre 1985 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a annulé les décisions du 20 mars 1985 de l'inspecteur du travail l'autorisant à licencier pour cause économique Mme Y... et M. X... ;
Article 1er : La requête de la société OLIDA est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société OLIDA, à Mme Y..., à M. X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle


Type d'affaire : Administrative

Analyses

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - BENEFICE DE LA PROTECTION - Membres du comité d'hygiène - de sécurité et des conditions de travail.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - MODALITES DE DELIVRANCE OU DE REFUS DE L'AUTORISATION - RECOURS HIERARCHIQUE - Pouvoirs du ministre de contrôler - postérieurement à l'expiration du délai de protection spéciale - l'autorisation de licenciement accordée par l'inspecteur du travail avant l'expiration dudit délai (article R436-6 du code du travail).

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - OBLIGATION DE RECLASSEMENT - Obligation non satisfaite - Absence de recherches sérieuses des possibilités de reclassement - Illégalité de l'autorisation administrative.


Références :

Code du travail L425-1, L436-1, L236-11, R436-6, L412-18


Publications
Proposition de citation: CE, 03 fév. 1989, n° 83294
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Falque-Pierrotin
Rapporteur public ?: de la Verpillière

Origine de la décision
Formation : 6 ss
Date de la décision : 03/02/1989
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 83294
Numéro NOR : CETATEXT000007733657 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1989-02-03;83294 ?
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