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09/12/1988 | FRANCE | N°49135

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 09 décembre 1988, 49135


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 mars 1983 et 13 juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE DE VILLEMADE, représentée par son maire en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°/ annule le jugement en date du 8 décembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser les sommes de 56 000 F et 28 500 F respectivement à M. Gérard X... et à son fils Christophe en réparation du préjudice subi du fait de la mort accidentelle de Mme X..., et a rejeté la deman

de tendant à ce qu'elle soit garantie par l'Etat des condamnations pro...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 mars 1983 et 13 juin 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COMMUNE DE VILLEMADE, représentée par son maire en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°/ annule le jugement en date du 8 décembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à verser les sommes de 56 000 F et 28 500 F respectivement à M. Gérard X... et à son fils Christophe en réparation du préjudice subi du fait de la mort accidentelle de Mme X..., et a rejeté la demande tendant à ce qu'elle soit garantie par l'Etat des condamnations prononcées contre elle,
2°/ rejette la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Chantepy, Auditeur,
- les observations de Me Boullez, avocat de la COMMUNE DE VILLEMADE et de Me Luc-Thaler, avocat de M. X... agissant en son nom personnel et en qualité d'administrateur légal de son fils mineur Christophe-Henri X...,
- les conclusions de Mme Laroque, Commissaire du gouvernement ;
Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 2 mars 1981, Y... Antonio s'est noyée à la suite de sa chute dans un dépôt d'ordures municipal, situé sur le territoire de la COMMUNE DE VILLEMADE, et dont l'ouverture avait été autorisé par arrêté préfectoral du 25 février 1972 ; que cette décharge était constituée d'une tranchée de 39,50 mètres de longueur, sur 3,70 mètres de largeur et 2,50 mètres de profondeur, et se trouvait remplie d'eau au moment de l'accident ;
Considérant que si l'article 2 dudit arrêté dispose que l'accès à ce dépôt n'est permis qu'au personnel communal, et s'il est constant que la victime ne faisait pas partie de ce personnel, cette circonstance n'est pas de nature à lui faire perdre la qualité d'usager de l'ouvrage public ; qu'eu égard à ses caractéristiques, cette tranchée présentait un danger justifiant une signalisation appropriée ; qu'en l'absence de toute signalisation et de toute clôture, pourtant imposées par l'arrêté autorisant l'ouverture du dépôt, la commune ne justifie pas de l'aménagement ni de l'entretien normaux de l'ouvrage public ; qu'ainsi la responsabilité de la COMMUNE DE VILLEMADE se trouve engagée du fait du décès de Mme X... ;
Considérant toutefois, qu'il résulte de l'instruction que Mme X..., qui connaissait les lieux, a commis une imprudence en s'engageant sur la décharge et en s'éloignant de l'endroit où elle avait déposé ses ordures pour aller explorer à quelques mètres de cet endroit les ressources de la décharge ; que ces circonstances sont de nature à exonérer la COMMUNE DE VILLEMADE d'une part de la responsabilité qui lui incombe ; que dans les circonstances de l'affaire, il sera fait une exacte appréciation des responsabilités encourues, en laissant à la charge de la victime le tiers des conséquences dommageables de l'accident ; qu'il y a lieu de réformer sur ce point le jugement attaqué ;
Sur la demande en garantie présentée par la COMMUNE DE VILLEMADE :

Considérant que la commune demande à être garantie par l'Etat des condamnations prononcées à son égard, pour la raison que le préfet du Tarn-et-Garonne aurait négligé de procéder au contrôle de l'exécution de son arrêté du 27 février 1972 autorisant la création du dépôt d'ordures ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le préfet ait commis une faute lourde de nature à engager la responsabilité de l'Etat vis à vis de la commune ; qu'il y a lieu en conséquence de rejeter la demande en garantie susanalysée ;
Sur la réparation des préjudices subis par M. Antonio et son fils Christophe :
Considérant que Mme X... assurait un complément de revenu à sa famille ; que M. Antonio et son fils Christophe, âgé de six ans au moment de l'accident ont droit à la réparation du préjudice résultant de la perte de ce complément de revenu et dont il sera fait une juste appréciation en l'évaluant à 150 000 F pour ce qui concerne M. X... et à 43 000 F pour ce qui concerne son fils ; que le préjudice résultant des troubles dans les conditions d'existence subis par M. X... et par son fils doit être évalué à 30 000 F pour chacun d'entre eux ; qu'il y a lieu, dans les circonstances en l'espèce, de porter de 12 000 F à 20 000 F l'appréciation de la douleur morale subie tant par M. X... que par son fils ; que compte tenu du partage de responsabilités opéré ci-dessus il y a lieu de porter à 134 000 F et à 62 000 F les sommes accordées par le tribunal administratif respectivement à M. X... et à son fils ;
Sur les intérêts :

Considérant que M. X... et son fils ont droit respectivement aux intérêts des indemnités qui leur sont allouées à compter du 21 septembre 1981 ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 27 janvier 1984 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1er : Les sommes de 56 000 F et 28 500 F que la COMMUNE DE VILLEMADE a été condamnée à verser respectivement à M. X... et à son fils Christophe par le jugement en date du 8 décembre 1982 du tribunal administratif de Toulouse sont portées à 134 000 F et 62 000 F, avec intérêts au taux légal à compter du 21 septembre 1981. Les intérêts échus le 27 janvier 1984 seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Le jugement en date du 8 décembre 1982 du tribunal administratif de Toulouse est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : La requête de la COMMUNE DE VILLEMADE est rejetée, ainsi que le surplus des conclusions du recours incident de M. X....
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE VILLEMADE, à M. X... et au ministre de l'intérieur.


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