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23/11/1988 | FRANCE | N°56249

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 23 novembre 1988, 56249


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 janvier 1984 et 11 mai 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jacques X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision en date du 15 novembre 1983 par laquelle la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes lui a infligé la sanction d'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de 10 semaines à compter du 15 janvier 1984 ;
2°) renvoie l'affaire devant la section

des assurances sociales du conseil national de l'ordre des chirurgie...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 12 janvier 1984 et 11 mai 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jacques X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision en date du 15 novembre 1983 par laquelle la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes lui a infligé la sanction d'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de 10 semaines à compter du 15 janvier 1984 ;
2°) renvoie l'affaire devant la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi du 4 août 1981 portant amnistie ;
Vu la loi n° 88-828 du 20 juillet 1988, portant amnistie ;
Vu la nomenclature générale des actes professionnels ;
Vu le décret du 26 octobre 1948, modifié par le décret du 17 octobre 1956 et par le décret du 28 avril 1977, relatif au fonctionnement des conseils de l'ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes et des sections disciplinaires des conseils nationaux de l'ordre des médecins, et de l'ordre des chirurgiens-dentistes ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Chantepy, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de M. Jacques X..., de Me Roger, avocat de l'Ordre National des Chirurgiens-Dentistes et de Me Ravanel, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de Nantes ,
- les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de la décision attaquée :

Considérant, d'une part, que si aux termes de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ratifiée par la France en vertu de la loi du 31 décembre 1973 et publiée au Journal officiel de la République française par décret du 3 mai 1974 : "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle", les juridictions disciplinaires ne statuent pas en matière pénale et ne tranchent pas de contestations sur des droits et obligations de caractère civil ; que, dès lors, les dispositions précitées de l'article 6-1 de la Convention européenne susvisée ne leur sont pas applicables ; qu'aucun principe général du droit n'impose la publicité des débats dans le cas où une juridiction statue en matière disciplinaire ; qu'il suit de là que M. X... n'est pas fondé à soutenir que la décision de la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, prise après que les débats aient eu lieu, conformément à l'article 26 du décret du 26 octobre 1948, en audience non publique serait intervenue dans des conditions irrégulières ;
Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment du mémoire complémentaire et de la requête déposés par M. X... devant la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, que celle-ci ait omis de répondre à l'un quelconque des moyens soulevés par lui ;
Sur la légalité interne :

Considérant qu'il n'est pas contesté que le requérant a, à de nombreuses reprises entre le 10 juillet 1979 et le 24 décembre 1981, établi des feuilles de soins portant la cotation "S.C.P. 9" à l'occasion de traitements d'orthopédie dentofaciale ; que la cotation ainsi retenue correspond, en vertu de la nomenclature générale des actes professionnels, à des soins d'obturation d'une dent ; qu'il est établi que le docteur X... n'a pas pratiqué de tels soins ;
Considérant qu'en retenant que les traitements effectués par l'intéressé font l'objet d'une cotation S.C.P. 90 forfaitaire par période de 6 mois incluant tous les actes préparatoires, la section des assurances sociales, qui n'a pas dénaturé la portée de la nomenclature, en a fait une exacte application ;
Considérant, par ailleurs, que si l'intéressé se prévaut également de ce que les actes de remplacement et de rescellement de bagues ainsi que de réparation d'appareils fixes ne seraient pas inclus dans le forfait semestriel et ne figureraient pas à la nomenclature générale des actes professionnels, la section des assurances sociales, en relevant, notamment, qu'aucune des formalités d'entente préalable prévue à ladite nomenclature n'avait été accomplie dans le cas litigieux, a souverainement apprécié les faits comme lui permettant d'écarter l'hypothèse soutenue par le docteur X... et selon laquelle il aurait entendu effectuer des cotations par assimilation ; qu'ainsi en jugeant que les faits susrappelés, qui enfreignent les dispositions du chapitre VI de la nomenclature, étaient constitutifs d'un abus de cotation, justifiant comme tels une sanction disciplinaire, la section des assurances sociales a pu légalement fonder sa décision ;

Considérant, en outre, que les faits reprochés à l'intéressé, antérieurs au 22 mai 1981, sont contraires à la probité et à l'honneur ; que les autres faits retenus à son encontre sont postérieurs au 22 mai 1981 ; que c'est ainsi à bon droit que la section d'assurances sociales les a exclus soit du bénéfice soit du champ d'application de la loi du 4 août 1981 portant amnistie ;
Considérant enfin que l'appréciation à laquelle se livre la section pour décider d'une sanction déterminée, compte tenu des faits reprochés à l'intéressé, n'est pas susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes du 15 novembre 1983 ;
Sur le recours incident de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Nantes :
Considérant que ce recours, qui tend à ce que le Conseil d'Etat ordonne l'exécution de la sanction prise par la section des assurances sociales du conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes devient sans objet par suite de l'intervention de la présente décision ;

Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : Il n'y a lieu de statuer sur le recours incident de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Nantes.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X..., au conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, à la caisse primaire d'assurance maladie de Nantes et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - TRAITES - CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME ET DE SAUVEGARDE DES LIBERTES FONDAMENTALES - Inapplicabilité de l'article 6-1 - Publicité des débats devant les juridictions disciplinaires.

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - PRINCIPES GENERAUX DU DROIT - PRINCIPES REGISSANT L'ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DES JURIDICTIONS - Ne constitue pas un principe général du droit - Publicité des débats devant les juridictions disciplinaires.

PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - DISCIPLINE PROFESSIONNELLE - SANCTIONS - FAITS DE NATURE A JUSTIFIER UNE SANCTION - CHIRURGIENS-DENTISTES - Abus de cotation.

PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - DISCIPLINE PROFESSIONNELLE - SANCTIONS - AMNISTIE - FAITS CONTRAIRES A LA PROBITE - AUX BONNES MOEURS OU A L'HONNEUR - CHIRURGIENS-DENTISTES - Abus de cotation.


Références :

. Décret 48-1671 du 26 octobre 1948 art. 26
. Loi 81-736 du 04 août 1981
Convention européenne du 04 novembre 1950 sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales art. 6-1
Décret 74-360 du 03 mai 1974
Loi 73-1227 du 31 décembre 1973


Publications
Proposition de citation: CE, 23 nov. 1988, n° 56249
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Chantepy
Rapporteur public ?: Daël

Origine de la décision
Formation : 4 / 1 ssr
Date de la décision : 23/11/1988
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 56249
Numéro NOR : CETATEXT000007755430 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1988-11-23;56249 ?
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