Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 août 1986 et 4 décembre 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Yves de X..., demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 23 avril 1986 par lequel le tribunal administratif de Nantes a, sur renvoi du conseil des prud'hommes de Nantes, déclaré non fondée l'exception d'illégalité soulevée à l'encontre de la décision du 18 juin 1985 de l'inspecteur du travail accordant à la société anonyme Saupiquet l'autorisation de licencier le requérant pour motif économique ;
2°) annule la décision du 18 juin 1985 susvisée,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Spitz, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Tiffreau, Thouin-Palat, avocat de M. Yves de X... et de la S.C.P. Waquet, Farge, avocat de la société Saupiquet,
- les conclusions de M. de la Verpillière, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L 436-1 du code du travail "tout licenciement envisagé par l'employeur d'un membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise ou d'un représentant syndical prévu à l'article L 433-1 est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement" ;
Considérant qu'en vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis d'un mandat de membre du comité d'entreprise ou, dans les entreprises comportant des établissements distincts, d'un mandat de membre du comité d'établissement, bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ;
Considérant que la décision du 18 juin 1985 de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de M. X... à la demande de la société Saupiquet n'était entachée d'aucune irrégularité ; qu'en rappelant les deux motifs invoqués par l'employeur à l'appui de son recours gracieux, à savoir la réalité du motif invoqué et l'absence de lien entre le mandat de l'intéressé et son licenciement, pour conclure au bien-fondé de l'autorisation de licenciement, l'inspecteur du travail de Nantes a suffisamment motivé sa décision ; que la circonstance que ladite décision n'a pas été notifiée à M. de X..., contrairement aux dispositions de l'article R 436-4 du code du travail, est sans influence sur la légalité de cette décision ;
Considérant, comme l'a estimé le tribunal administratif de Nantes, devant lequel le requérant a pu répondre, contrairement à ce qu'il soutient en appel, aux "différents mémoires adverses" qu'il ressort des pièces du dossier que le poste de travail occupé par M. de X..., responsable de l'approvisionnement en légumes frais de l'usine de la société Saupiquet de Saint-Sébastien sur Loire, a été supprimé et remplacé par un nouveau poste nécessitant une qualification différente ; que la restructuration de cet établissement, consécutive à sa spécialisation dans la préparation de plats cuisinés à base de viande et de charcuterie justifiait la demande de licenciement de M. de X... pour motif économique ; que par suite, l'inspecteur du travail de Nantes n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il a donc, à bon droit, rapporté sur recours gracieux, lequel n'était pas tardif, la décision du 14 mars 1985 refusant d'autoriser le licenciement de l'intéressé ; qu'au surplus, ce dernier ne peut valablement se plaindre de n'avoir pas été reclassé dans l'entreprise, dès lors qu'à deux reprises des propositions de reclassement dans des postes équivalents lui ont été faites et ont été refusées par lui ; qu'enfin, aucune pièce du dossier ne vient corroborer l'allégation du requérant selon laquelle son licenciement serait lié à son mandat de membre du comité d'établissement ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. de X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a écarté l'exception d'illégalité soulevée par lui à l'encontre de la décision de l'inspecteur du travail en date du 11 juin 1985 autorisant son licenciement et a rejeté sa requête ;
Article ler : La requête de M. de X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. de X..., à la société Saupiquet et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.