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23/09/1988 | FRANCE | N°94788

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 23 septembre 1988, 94788


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 février 1988 et 26 février 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jésus X...
Y..., actuellement détenu à la maison d'arrêt de Mende (Lozère), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le décret en date du 11 janvier 1988 accordant son extradition aux autorités espagnoles ;
2° ordonne qu'il sera sursis à l'exécution de ce décret,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le pro

tocole signé à New-York le 31 janvier 1967 ;
Vu la convention européenne d'extradition d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 février 1988 et 26 février 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jésus X...
Y..., actuellement détenu à la maison d'arrêt de Mende (Lozère), et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le décret en date du 11 janvier 1988 accordant son extradition aux autorités espagnoles ;
2° ordonne qu'il sera sursis à l'exécution de ce décret,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New-York le 31 janvier 1967 ;
Vu la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;
Vu le code pénal ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu la loi du 10 mars 1927 ;
Vu la loi du 11 juillet 1979 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Rossi, Auditeur,
- les observations de la SCP Lemaître, Monod avocat de M. X...
Y...,
- les conclusions de M. Vigouroux, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité externe du décret attaqué :

Considérant, d'une part, que si le requérant allègue à l'appui de sa demande en annulation que le décret attaqué serait intervenu à la suite d'une procédure irrégulière en la forme méconnaissant les articles 9 et suivants de la loi du 10 mars 1927, il n'apporte à l'appui de ce moyen aucun élément de fait ou de droit de nature à permettre d'en apprécier la portée ; que par suite le moyen ne saurait être retenu ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 22 de la Constitution : "Les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution" ; que l'exécution d'un décret d'extradition ne requiert l'intervention d'aucune décision d'application relevant de la compétence d'autres ministres que le ministre de la justice, qui a effectivement contresigné le décret attaqué ; que dès lors celui-ci n'est pas entaché d'illégalité faute d'avoir été contresigné par d'autres ministres ;
Considérant, enfin, que le décret du 11 janvier 1988 autorisant l'extradition de M. X...
Y... énumère les différentes infractions pour lesquelles il est recherché par la justice espagnole et précise que ces infractions répondent aux exigences de l'article 2 de la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957, qu'elles sont punissables en droit français, ne sont pas prescrites et n'ont pas un caractère politique et qu'il n'apparaît pas que la demande d'extradition ait été présentée aux fins de poursuivre ou de punir M. X...
Y... pour des considérations de race, d'opinions politiques, de nationalité ou de religion ni que sa situation risque d'être aggravée pour l'une ou l'autre de ces raisons ; que ledit décret répondait ainsi aux exigences de l'article 3 de la loi du 1er juillet 1979 ;
Sur la légalité interne du décret attaqué :

Considérant, en premier lieu, que M. X...
Y... est poursuivi pour "fournitures d'explosifs ayant servi à commettre un attentat terroriste dont sont résultés la mort, des blessures et des dommages" et pour "appartenance à bandes armées, détention d'explosifs, attentats, tentatives d'assassinats et dégâts" ; que la circonstance que ces crimes, qui ne sont pas politiques par leur nature, auraient été commis dans le cadre d'une lutte pour l'indépendance du pays basque et au sein d'une organisation armée ne suffit pas, compte tenu de leur gravité, à les faire regarder comme ayant un caractère politique ; qu'il n'apparaît pas que la demande d'extradition ait été présentée aux fins de poursuivre ou de punir M. X...
Y... pour des considérations de race, de religion, de nationalité ou d'opinions politiques ni que sa situation risque d'être aggravée pour l'une ou l'autre de ces raisons ;
Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas de l'examen des pièces du dossier que, ainsi qu'il le soutient, le requérant pourrait être poursuivi ou puni en Espagne pour une infraction autre que celle pour lesquelles l'extradition a été accordée par le décret attaqué ;
Considérant enfin, qu'aux termes du paragraphe F-2° de l'article 1er de la convention de Genève sur les réfugiés : "Les dispositions de cette convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser ... b) qu'elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d'accueil avant d'y être admises comme réfugiés" ; qu'eu égard à la gravité des infractions de droit commun qui lui sont reprochées et au sérieux des présomptions qui pèsent sur lui, M. X...
Y... n'est pas fondé à se prévaloir de la qualité de réfugié au sens de la convention précitée pour soutenir qu'il ne pourrait être extradé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X...
Y... n'est pas fondé à demander l'annulation du décret attaqué ;
Article 1er : La requête de M. X...
Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X...
Y... et au Garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 2 / 6 ssr
Numéro d'arrêt : 94788
Date de la décision : 23/09/1988
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME - QUESTIONS GENERALES - MOTIVATION - MOTIVATION SUFFISANTE - EXISTENCE - Décret d'extradition.

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME - QUESTIONS GENERALES - CONTRESEING - Décret d'extradition - Ministre de la justice.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ETRANGERS - REFUGIES - APATRIDES - ETRANGERS - QUESTIONS COMMUNES - EXTRADITION - DECRET D'EXTRADITION - LEGALITE INTERNE.


Références :

Constitution du 04 octobre 1958 art. 22
Convention Genève du 28 juillet 1951 art. 1 F 2°
Convention européenne du 13 décembre 1957 extradition art. 2
Décret du 11 janvier 1988 extradition décision attaquée confirmation
Loi du 10 mars 1927 art. 9 et suivants
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 3


Publications
Proposition de citation : CE, 23 sep. 1988, n° 94788
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Rossi
Rapporteur public ?: Vigouroux

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1988:94788.19880923
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