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18/11/1987 | FRANCE | N°72127

France | France, Conseil d'État, 7 / 9 ssr, 18 novembre 1987, 72127


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 septembre 1985 et 8 janvier 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Roger X..., entrepreneur de travaux publics et de dragages, demeurant ... 74100 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule le jugement du 28 juin 1985 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu au titre des années 1973, 1974, 1975 et 1976 et à la majoration exceptionnelle au titre des années 1973 et 197

5 auxquelles il a été assujetti dans les rôles de la commune d'Anne...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 septembre 1985 et 8 janvier 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Roger X..., entrepreneur de travaux publics et de dragages, demeurant ... 74100 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
°1 annule le jugement du 28 juin 1985 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu au titre des années 1973, 1974, 1975 et 1976 et à la majoration exceptionnelle au titre des années 1973 et 1975 auxquelles il a été assujetti dans les rôles de la commune d'Annemasse ;
°2 lui accorde la décharge des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Querenet Y... de Breville, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité qui a porté, en matière d'impôts directs, sur les exercices clos les 31 décembre des années 1973, 1974, 1975 et 1976, M. X..., qui exploite à Annemasse Haute-Savoie une entreprise de travaux publics et de dragages, a été assujetti, à des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu au titre de ces quatre années et à la majoration exceptionnelle au titre des années 1973 et 1975 ; que les bases ont été fixées conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs saisie du désaccord ; qu'il appartient à M. X..., qui conclut à la décharge de ces impositions, d'apporter sur les questions de fait la preuve de l'exagération des bases ainsi fixées ;
Sur la réintégration dans les résultats de l'entreprise d'une partie des achats de vins fins :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : "I- Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... 1- Les frais généraux de toute nature ... 5. Lorsque les dépenses énumérées aux catégories ci-après excèdent des chiffres fixés par arrêtés ... elles ne sont déductibles que si elles figurent sur le relevé visé à l'article 54 quater. Les dépenses visées à l'alinéa qui précède sont : ... e Les cadeaux de toute nature à l'exception des objets de faible valeur conçus spécialement pour la publicité ... Les dépenses ci-dessus ... peuvent être réintégrées dans la mesure ... où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise ..." ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration, alors que M. X... avait déduit à ce titre des sommes comprises entre 9 118 F en 1973 et 13 687 F en 1976, n' a admis, en se conformant sur ce point à l'avis de la commission départementale des impôts directs, la déduction d'achats e vins fins faits par M. X... à titre de cadeaux de l'entreprise que dans la limite de 4 618 F en 1973, 6 910 F en 1974, 5 507 F en 1975 et 6 887 F en 1976 ; que le requérant n'apporte pas la preuve que, pour le surplus, les achats dont s'agit ont été engagés dans l'intérêt direct de son entreprise ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, pour le calcul de ses revenus imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, les réintégrations qu'il conteste sont exagérées ;
Sur la réintégration d'une fraction des dépenses de fonctionnement des véhicules de l'entreprise :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X..., dont il n'est pas contesté que lui-même, son épouse et son fils n'utilisaient, pour leurs besoins personnels, que les véhicules de l'entreprise, n'apporte pas la preuve de l'exagération des redressements résultant de ce que l'administration a refusé d'admettre la déduction de l'intégralité des dépenses de fonctionnement et d'entretien des véhicules de l'entreprise qu'il avait déclarées ;
Sur la réintégration d'une fraction des frais financiers de l'entreprise :

Considérant, d'une part, que l'administration établit que M. X... a fait financer par son entreprise de dragages et de travaux publics, sur un terrain appartenant à son fils Jean-Pierre, la construction de divers bâtiments à usage professionnel, utilisés par l'entreprise moyennant le paiement d'un loyer, ainsi que d'un local d'habitation destiné à constituer la résidence principale de M. Jean-Pierre X... ; que l'administration établit également que l'entreprise n'a exigé aucun remboursement de sa créance et n'a pas réclamé d'intérêts ; que l'administration démontre ainsi que M. Jean-Pierre X... a pu, de la sorte, acquérir la jouissance gratuite de sa résidence principale et devenir, en outre, créancier des loyers correspondant à l'usage des locaux professionnels ; que cette situation, révélatrice d'un acte anormal de gestion, autorisait l'administration à réintégrer le montant des intérêts qui auraient dû normalement être demandés par M. X... sauf pour celui-ci à prouver que, en agissant ainsi, il a eu en vue l'intérêt bien compris de son entreprise ou, subsidiairement, que le taux d'intérêt retenu par l'administration est excessif ;
Considérant que M. X..., en faisant valoir que son attitude a eu pour objet d'attacher son fils à l'entreprise afin d'assurer la pérennité et le développement de celle-ci n'établit pas qu'en renonçant à percevoir les intérêts des prêts consentis, il a agi dans l'intérêt propre de l'entreprise, alors que, dans le même temps, celle-ci a dû procéder à des emprunts et accroître son découvert bancaire ; que M. X..., qui n'apporte pas la preuve que le taux des intérêts retenus par l'administration était excessif, n'est, par suite, pas fondé à soutenir que les réintégrations correspondantes ont été faites à tort ;
Sur les provisions :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : "Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant... notamment... °5 Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges précises et que des évènements en cours rendent probables à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice et figurent au relevé des provisions prévu à l'article 54" ; qu'aux termes de l'article 54 : "Les contribuables visés à l'article 53 sont tenus de fournir, en même temps que la déclaration dont la production est prévue audit article, sur des imprimés établis par l'administration, un tableau des résultats de l'exercice comportant... le bilan et un relevé des... provisions présentés conformément à des modèles qui sont fixés par décret" ;
Considérant que, s'agissant de la provision pour remise en état des sols réintégrée dans les bénéfices de l'année 1973, M. X..., qui exploite des carrières, était en droit, à raison des engagements qu'il avait pris de remettre en état les terrains en fin d'exploitation, de constituer, pour ce motif, des provisions ; que, toutefois, en vertu des dispositions précitées du 1. °5 de l'article 39 du code, ces provisions n'étaient déductibles qu'à la condition que leur montant fût calculé de manière aussi précise que possible eu égard aux charges prévisibles de remise en état des sols ; que M. X... pouvait notamment, à cette fin, procéder à une évaluation de ces charges futures à partir de la superficie et de la profondeur de chaque parcelle exploitée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour déterminer le montant de la provision qu'il a constituée à cet effet, M. X... a procédé à une évaluation globale du coût de la remise en état des terrains à partir d'un nombre forfaitaire d'heures d'utilisation d'engins dont la valeur a été estimée par lui au prix de facturation de l'heure d'engin aux clients ; qu'en procédant ainsi, sans tenir compte de la superficie de chacune des parcelles exploitées au cours de chaque exercice, à partir d'un prix supérieur au prix de revient des travaux, M. X... n'a pas respecté l'obligation faite par la loi aux contribuables de calculer les provisions avec une précision suffisante ; que c'est, par suite, à bon droit que l'administration a reintégré cette provision dans les résultats de l'année 1973 ;
Considérant que, si M. X... se prévaut, sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code, repris à l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales d'une instruction de la direction générale des impôts en date du 18 mai 1981, celle-ci est postérieure à l'imposition litigieuse et, dès lors, en tout état de cause, ne peut être utilement invoquée ;
Considérant, en ce qui concerne la provision pour remise en état des sols constituée en 1974, qu'il résulte de l'instruction que M. X... n'a souscrit sa déclaration de résultats de l'exercice 1974 ainsi que le relevé de provisions correspondant qu'après l'expiration du délai légal ; que, dès lors, l'administration était en droit de réintégrer dans ses bénéfices imposables cette provision même si celle-ci figurait dans ses écritures comptables et était mentionnée dans le relevé tardivement produit ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête susvisée de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X... et auministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et dela privatisation, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 7 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 72127
Date de la décision : 18/11/1987
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

CGI 39 5°, 54, 1649 quinquies A, L80-A
Instruction du 18 mai 1981 DGI


Publications
Proposition de citation : CE, 18 nov. 1987, n° 72127
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Querenet Onfroy de Breville
Rapporteur public ?: Fouquet

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1987:72127.19871118
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