Vu la requête enregistrée le 16 février 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le DEPARTEMENT DE L'ALLIER, représenté par le président du conseil général en exercice à ce dûment autorisé par délibération en date du 23 janvier 1984, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1- annule le jugement du 9 décembre 1983 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a condamné à verser à M. René X... d'une part une indemnité de 21 600 F en réparation du préjudice causé à sa propriété par la réalisation de travaux sur le CD 241, d'autre part une indemnité de 100 000 F du fait du non respect par le département d'un engagement pris à l'égard de M. X... de lui fournir une quantité de 20 m3 d'eau par jour ;
2- rejette la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Pêcheur, Maître des requêtes,
- les observations de Me Vincent, avocat du DEPARTEMENT DE L'ALLIER et de Me Cossa, avocat de M. René X...,
- les conclusions de M. Fornacciari, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les travaux de rectification du tracé du chemin départemental 241 sur le territoire de la commune de Vaux Allier devant conduire à priver M. X... de l'usage d'un puits desservant sa propriété sise dans cette commune, le DEPARTEMENT DE L'ALLIER s'est engagé le 16 septembre 1976 à ouvrir à ses frais un nouveau puits pour les besoins de l'intéressé et à réaliser une installation permettant d'assurer l'alimentation du nouveau puits au moyen d'une canalisation de 50 mm de diamètre débitant 20 m 3 par jour "en temps de sécheresse" ; qu'à la demande de M. X... le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, par jugement en date du 9 décembre 1983 dont il est fait appel, condamné le DEPARTEMENT DE L'ALLIER à réparer le préjudice causé par l'insuffisance du débit en eau de cette nouvelle installation réalisée par le département ; que celui-ci a en outre été condamné à indemniser M. X... pour la remise en état de sa propriété à la suite des travaux effectués sur le CD 241 ;
Sur les conclusions de l'appel du DEPARTEMENT DE L'ALLIER :
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant d'une part, que la convention passée le 16 septembre 1976 entre le DEPARTEMENT DE L'ALLIER et M. X... a eu pour objet de prévenir un litige tendant à la réparation d'un dommage causé par des travaux publics et a, par la même, le caractère d'un contrat administratif ; que d'autre part, les dommages causés à la propriété de M. X... ont été provoqués par les travaux de rectification du CD 241, qui ont en eux-mêmes le caractère de travaux publics ; qu'il suit de là que le DEPARTEMENT DE L'ALLIE n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand n'était pas compétent pour connaître de la demande de M. X... ;
Sur le principe de la responsabilité du DEPARTEMENT DE L'ALLIER en ce qui concerne la réduction du débit d'eau disponible pour l'exploitation de M. X... :
Considérant que, par la convention précitée du 16 septembre 1976, le DEPARTEMENT DE L'ALLIER s'était engagé envers M. X... à réaliser un nouveau puits débitant 20 m 3 par jour "en temps de sécheresse" ; que par cette clause, la collectivité publique s'engageait à garantir une alimentation en eau de 20 m 3 par jour durant toute l'année ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que le nouveau puits, tel qu'il a été aménagé par le DEPARTEMENT DE L'ALLIER, n'assure qu'un débit quotidien de 14,6 m 3 par jour ; que le département ne saurait utilement se prévaloir pour s'exonérer des obligations contractées à l'égard de M. X... de ce que les besoins quotidiens en eau de l'exploitation de l'intéressé n'auraient pas excédé en temps normal les 14,6 m 3 fournis par le nouveau puits et qu'ainsi M. X... n'aurait subi de ce fait aucun préjudice direct du fait de la méconnaissance de l'engagement portant sur la fourniture de 20 m 3 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précéde que le DEPARTEMENT DE L'ALLIER n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif l'a condamné à verser à M. X... une indemnité correspondant à la valeur de la différence entre le volume d'eau que l'équipement construit par la commune fournit effectivement et celui qu'elle s'était engagée à assurer ;
Sur le montant des réparations dues au titre des autres dommages :
Considérant que les travaux de rectification du tracé du CD 241, au regard desquels M. X... a la qualité de tiers, rendent nécessaire la réalisation sur la propriété de l'intéressé de travaux de nivellement de terrain et d'aménagement des berges et clôtures ; qu'il n'est pas établi que les désordres ainsi constatés par l'expert ont été aggravés par le fait de M. X..., ni que l'évaluation du coût des travaux de remise en état à laquelle s'est livrée l'expert ait été exagérée ; qu'ainsi c'est à bon droit que le tribunal administratif a fixé à 21 600 F le montant des réparations dues à ce titre par le DEPARTEMENT DE L'ALLIER ;
Sur les conclusions de l'appel incident de M. X... :
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus le déficit en eau constaté par l'expert s'élève à 5,6 m 3 par jour ; que sur la base du prix de l'eau facturé aux usagers par le syndicat de distribution, l'expert à évalué à 6 867,84 F le préjudice subi en une année par M. X... ; qu'il résulte de l'instruction qu'en allouant au requérant une indemnité de 100 000 F équivalant dans les conditions économiques du moment, au capital productif d'un revenu annuel de 6 867,84 F, le tribunal administratif n'a pas fait une insuffisante appréciation du préjudice subi par le requérant ; que celui-ci n'est dès lors pas fondé à demander par la voie du recours incident que l'indemnité de 100 000 F allouée par le tribunal administratif soit portée à 825 098 F ;
Sur la capitalisation des intérêts :
Considérant que M. X... a demandé le 11 juillet 1984 la capitalisation des intérêts afférents à l'indemnité que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand lui a accordée avec intérêts du 29 octobre 1980 ; qu'à cette date, au cas où le jugement attaqué n'aurait pas encore été exécuté, il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article ler : La requête du DEPARTEMENT DE L'ALLIER est rejetée.
Article 2 : Les intérêts afférents à l'indemnité de 121 600 F que le DEPARTEMENT DE L'ALLIER a été condamné à verser à M. X... par le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 9 décembre 1983 et échus le 11 juillet 1984 seront capitalisés à cette date pour produire eux-même intérêts.
Article 3 : Les conclusions du recours incident de M. X... sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au président du conseil général de l'Allier, à M. X... et au ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports.