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03/11/1986 | FRANCE | N°48159

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 03 novembre 1986, 48159


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 janvier 1983 et 18 mai 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE "PELLEMELLE ET COMPAGNIE", dont le siège est au Pont de l'Ecluse à Noirmoutier 85330 , représentée par son gérant en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 18 novembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et en pénalités, du supplément d'impôt sur les sociétés et de

contribution exceptionnelle au titre respectivement des années 1970, 1971...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 24 janvier 1983 et 18 mai 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE "PELLEMELLE ET COMPAGNIE", dont le siège est au Pont de l'Ecluse à Noirmoutier 85330 , représentée par son gérant en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 18 novembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et en pénalités, du supplément d'impôt sur les sociétés et de contribution exceptionnelle au titre respectivement des années 1970, 1971, 1972, 1973, 1974 et de l'année 1974 et de l'impôt sur le revenu au titre des années 1970, 1971, 1972, 1973 et 1974 auxquels elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Noirmoutier,
2° lui accorde la décharge ou la réduction des impositions contestées et des pénalités correspondantes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu l'article 93-II de la loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. d' Harcourt, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Le Bret, de Lanouvelle,, avocat de la SOCIETE "PELLEMELLE ET COMPAGNIE",
- les conclusions de M. Racine, Commissaire du gouvernement ;

En ce qui concerne les impositions dont le dégrèvement a été accordé :
Considérant que, par décision du 17 avril 1981, postérieure à l'enregistrement des demandes devant le tribunal administratif, le directeur des services fiscaux du département de la Vendée a accordé à la Société à responsabilité limitée "PELLEMELLE ET COMPAGNIE" un dégrèvement, en droits et pénalités de 460 F sur le montant de l'imposition supplémentaire à l'impôt sur les sociétés qui lui a été assignée au titre de l'année 1972 et de respectivement 2 336 F, 1 800 F et 7 080 F sur le montant de l'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre des années 1970, 1971 et 1972 ; que dès lors, les conclusions de la société requérante, qui tendaient à la décharge des impositions contestées à concurrence des montants susindiqués étaient devenues sans objet ; que, c'est par suite, à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a statué sur ces conclusions ; qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'annuler sur ce point ledit jugement, d'évoquer les conclusions dont s'agit et de décider qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés et la contribution exceptionnelle restant en litige :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Société "PELLEMELLE ET COMPAGNIE" -actuellement en liquidation-, qui exploitait dans l'île de Noirmoutier un fonds de commerce de mareyeur en gros, a fait l'obje d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos le 31 décembre des années 1971, 1972, 1973 et 1974, étendue à l'exercice clos le 31 décembre 1970, en vertu de l'article 1974 bis du code général des impôts alors en vigueur ; qu'au cours de cette vérification le service s'est fait communiquer par la brigade nationale des enquêtes économiques les documents constituant les éléments d'une comptabilité occulte saisie par celle-ci et qui mettaient en évidence d'importantes minorations de recettes ; que le défaut de caractère probant de la comptabilité produite par l'entreprise résultant de cette comptabilité occulte a entraîné, en vertu de l'article 58 du code alors en vigueur, la rectification d'office des résultats déclarés par la société au titre des exercices clos en 1970, 1971, 1972 et 1973, tandis que la société a, en application de l'article 59 dudit code, été taxée d'office au titre de l'année 1974, faute d'avoir souscrit pour ladite année la déclaration de son bénéfice réel ;

Considérant qu'en raison des procédures d'imposition d'office dont elle a ainsi fait régulièrement l'objet, la société requérante ne peut obtenir la décharge ou la réduction des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution exceptionnelle qui lui ont été assignés respectivement au titre des cinq années énumérées ci-dessus et de l'année 1974 qu'en apportant la preuve de l'exagération de l'évaluation faite par l'administration des bases d'imposition ;
Considérant, d'une part, que, pour arrêter le bénéfice imposable de la société au titre de chacun des exercices en litige, le service a reconstitué son chiffre d'affaires par addition aux sommes déclarées du montant des ventes dissimulées, et a appliqué aux chiffres ainsi obtenus un taux de bénéfice net de 5 % ; que ce taux, retenu au titre des exercices clos en 1971, 1972 et 1973 par comparaison avec les résultats d'autres entreprises vérifiées du même secteur d'activité, a été étendu aux exercices clos en 1970 et en 1974 ; que l'administration ayant exposé la méthode qu'elle avait suivie dans un mémoire en date du 27 avril 1982 produit en exécution du supplément d'instruction prescrit par un jugement avant dire-droit du tribunal administratif de Nantes, en date du 7 janvier 1982, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en raison du caractère prétendument insuffisant des indications alors données par l'administration lesquelles ont, d'ailleurs, été ultérieurement complétées devant le juge d'appel, elle ne serait pas en mesure d'établir l'exagération des bases d'imposition ;
Considérant, d'autre part, que, si la société requérante met en doute la pertinence du choix des entreprises de mareyage situées aux Sables d'Olonnes retenues comme termes de comparaison par l'administration, elle se borne à faire état sur ce point d'observations générales relatives aux différences d'ordre économique et technique qui existeraient selon elle entre la situation des mareyeurs exerçant leur activité dans l'île de Noirmoutier et celle des exploitants installés sur le continent sans fournir de précisions, notamment chiffrées, qui établiraient l'inadéquation de la méthode comparative suivie par l'administration, ni l'existence d'erreurs dans l'application de cette méthode ; qu'ainsi, la société requérante ne peut être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'exagération des bases d'imposition ;
En ce qui concerne l'impôt sur le revenu restant en litige :

Considérant qu'en application de l'article 109 du code général des impôts, les sommes correspondant au montant des recettes occultes réintégrées dans les résultats de la Société "PELLEMELLE ET COMPAGNIE" doivent être regardées comme des revenus distribués ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, invitée par l'administration, conformément aux dispositions de l'article 117 du code, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition, à désigner le ou les bénéficiaires des distributions, la société requérante a, dans sa réponse du 11 juillet 1975, désigné, pour la période du 1er janvier 1970 au 31 mars 1972, M. Y..., son gérant, principal porteur de parts et M. A..., associé minoritaire, à concurrence respectivement de 55 % et 45 % des distributions et, pour la période du 1er avril 1972 au 31 décembre 1974, le même M. Y... et un nouvel associé, M. Z..., dans les mêmes proportions ;
Considérant que la société requérante, qui conteste elle-même devant le Conseil d'Etat la qualité d'associé, du 1er janvier 1970 au 31 mars 1972, de M. A..., n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été imposée à tort à l'impôt sur le revenu selon les modalités prévues à l'article 117 du code, au titre des année 1970 et 1971, à concurrence d'une fraction limitée à 45 % du montant des bénéfices sociaux desdites années réputés distribués ;
Considérant, en revanche, que la société ayant répondu à la demande qui lui a été adressée en ce qui concerne les années civiles 1972, 1973 et 1974 en désignant comme bénéficiaires des distributions à concurrence respectivement de 55 % et 45 % de leur montant MM. Y... et Z... est fondée à soutenir que l'administration, qui n'allègue pas n'avoir pas été mise en mesure d'identifier les bénéficiaires, n'était pas en droit, au seul motif qu'elle n'avait pas précisé dans sa réponse les montants et les dates des distributions, de l'assujettir à l'impôt sur le revenu au titre de chacune de ces années à raison de 45 % du montant des bénéfices réputés distribués ;

Considérant que, de ce qui précède, il résulte que la Société "PELLEMELLE ET COMPAGNIE" est seulement fondée à demander la décharge, d'une part, de l'impôt sur le revenu restant à sa charge au titre de l'année 1972 et, d'autre part, des impositions à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1973 et 1974 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 18 novembre 1982 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions des demandes de la Société à responsabilité limitée "PELLEMELLE ET COMPAGNIE" devenues sans objet à raison des dégrèvements prononcés par l'administration.

Article 2 : Il n'y a lieu de statuer sur les conclusions des demandes de la Société à responsabilité limitée "PELLEMELLE ET COMPAGNIE" à concurrence des sommes de 460 F au titre de l'année 1972en matière d'impôt sur les sociétés et de respectivement 2 336 F, 1 800 F et 7 080 F au titre des années 1970, 1971 et 1972 en matière d'impôt sur le revenu.

Article 3 : La Société à responsabilité limitée "PELLEMELLE ET COMPAGNIE" est déchargée, en droits et pénalités, d'une part, de la cotisation d'impôt sur le revenu restant à sa charge au titre de l'année 1972 et, d'autre part, des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1973 et 1974.

Article 4 : Le surplus du jugement susmentionné du tribunal administratif de Nantes est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la Société à responsabilité limitée "PELLEMELLE ET COMPAGNIE" est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la Société à responsabilité limitée "PELLEMELLE ET COMPAGNIE" par M. X..., syndic de la liquidation et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 48159
Date de la décision : 03/11/1986
Sens de l'arrêt : Réformation non-lieu à statuer décharge
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-03-01-01-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - REVENUS DES CAPITAUX MOBILIERS ET ASSIMILABLES - REVENUS DISTRIBUES - NOTION DE REVENUS DISTRIBUES - IMPOSITION DE LA PERSONNE MORALE DISTRIBUTRICE -Distributions occultes - Demande de désignation du bénéficiaire [article 117 du C.G.I.] - Contenu de la réponse de la personne morale.

19-04-02-03-01-01-01 Une société qui, en application des dispositions de l'article 117 du C.G.I. a donné les noms des personnes bénéficiaires de revenus réputés distribués en vertu de l'article 109 de ce code, mais n'a pas précisé les montants et les dates des distributions, ne peut être regardée comme n'ayant pas répondu à la demande de l'administration, dès lors que celle-ci n'allègue pas n'avoir pas été mise en mesure d'identifier les bénéficiaires. En conséquence, décharge de l'imposition sur le revenu à laquelle l'administration l'a assujettie à raison du montant de ces bénéfices.


Références :

CGI 1974 bis, 58, 59, 109, 117


Publications
Proposition de citation : CE, 03 nov. 1986, n° 48159
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. M. Bernard
Rapporteur ?: M. d'Harcourt
Rapporteur public ?: M. Racine

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1986:48159.19861103
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