Vu la requête, enregistrée le 24 avril 1984 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Nicole X..., demeurant ... à Brétigny-sur-Orge 91220 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du tribunal administratif de Versailles, en date du 2 février 1984, en tant que, par ce jugement, le tribunal a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1972, 1973 et 1974 ainsi que de la cotisation supplémentaire à la majoration exceptionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1973, dans les rôles de la commune de Brétigny-sur-Orge ;
- lui accorde la décharge sollicitée,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu la loi du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984, notamment son article 93-II ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Toutée, Maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Latournerie, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme Nicole X..., qui exploite à Brétigny-sur-Orge un magasin de vêtements féminins, ayant opté pour le régime du bénéfice réel simplifié, était tenue, en vertu des dispositions de l'article 54 du code général des impôts, applicable aux impositions contestées, de "représenter... tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans sa déclaration" ; qu'il est constant que, lors d'une vérification de sa comptabilité intervenue en 1976, elle n'a pas été en mesure de présenter les livres enregistrant ses opérations journalières ; que, dans ces conditions, et sans qu'y fasse obstacle la circonstance que ces documents auraient été détruits dans une inondation, la requérante, quelle que soit sa bonne foi, se trouvait en situation de voir ses déclarations rectifiées d'office en application des dispositions de l'article 58 du code général des impôts ; qu'il lui appartient, par suite, pour obtenir par la voie contentieuse, la décharge ou la réduction de ces impositions, d'apporter la preuve de l'exagération de l'évaluation faite par l'administration de ses bases d'imposition ;
Considérant que, Mme X... fait valoir à cet effet que l'administration, pour évaluer son chiffre d'affaires réel et déterminer son bénéfice imposable, s'est bornée à appliquer aux achats revendus un coefficient de 2, ramené à 1,7 pour tenir compte des soldes, puis à déduire les charges justifiées, sans que ce coefficient ait été dégagé d'un examen des données propres à l'entreprise ; que l'administration n'a pas été en mesure devant le Conseil d'Etat de préciser sur quelles bases ce coefficient a été déterminé ; que, dans les circonstances de l'espèc, Mme X... démontre ainsi que la méthode de reconstitution suivie est excessivement sommaire ; qu'elle apporte dès lors la preuve qui lui incombe de l'exagération des impositions supplémentaires contestées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Versailles en date du 2 février 1984, est annulé.
Article 2 : Mme Nicole X... est déchargée des impositions supplémentaires auxquelles elle a été assujettie à l'impôt sur le revenu au titre des années 1972, 1973 et 1974, et à la majoration exceptionnelle au titre de l'année 1973.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Nicole X... et au ministre de l'économie, des finances et du budget.