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17/04/1985 | FRANCE | N°48096

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 17 avril 1985, 48096


1° l'annulation du jugement du 18 novembre 1982, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes en réduction de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie dans les rôles de la ville de Strasbourg Bas-Rhin , au titre des années 1979, 1980 et 1981, à raison des installations de son siège à Strasbourg et des salaires versés à son personnel ;
2° l'annulation des décisions des 4 mai 1981 et 26 janvier 1982, par lesquelles le directeur des services fiscaux du département du Bas-Rhin a rejeté ses réclamations ;
3° la réduction des im

positions contestées ;
4° à titre subsidiaire, à ce qu'une expertise ou ...

1° l'annulation du jugement du 18 novembre 1982, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes en réduction de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie dans les rôles de la ville de Strasbourg Bas-Rhin , au titre des années 1979, 1980 et 1981, à raison des installations de son siège à Strasbourg et des salaires versés à son personnel ;
2° l'annulation des décisions des 4 mai 1981 et 26 janvier 1982, par lesquelles le directeur des services fiscaux du département du Bas-Rhin a rejeté ses réclamations ;
3° la réduction des impositions contestées ;
4° à titre subsidiaire, à ce qu'une expertise ou un supplément d'instruction contradictoire soit ordonné afin de déterminer les bases de la réduction à laquelle elle est fondée à prétendre ;
Vu le code général des impôts ; la loi n° 75-678 du 29 juillet 1975 ; le décret n° 75-975 du 23 octobre 1975 ; la loi n° 72-1 du 3 janvier 1972 ; le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977.
Considérant que la société anonyme Interimest, qui exerce l'activité d'entrepreneur de travail temporaire, et qui a été assujettie à la taxe professionnelle, au titre des années 1979, 1980 et 1981, dans les rôles de la ville de strasbourg Bas-Rhin , à raison des installations de son siège social sis dans cette ville et des salaires qu'elle a versés à son personnel, a demandé devant le tribunal administratif de Strasbourg une réduction de taxe correspondant à l'exclusion des bases taxables des salaires versés, pendant les années de référence, aux personnels qu'elle avait mis à la disposition d'entreprises établies à l'étranger ; qu'elle fait appel du jugement, en date du 18 novembre 1982, par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur l'étendue du litige : Cons. que, par décision en date du 6 avril 1984, le directeur des services fiscaux du département du Bas-Rhin a accordé à la société anonyme Interimest, au titre de l'année 1980, et à concurrence d'une somme de 23 471 F en droits un dégrèvement des cotisations de taxe professionnelle en litige correspondant à l'exclusion de la base taxable les salaires que ladite société avait versés, pendant l'année de référence 1979, à ses personnels mis à la disposition, pour une durée supérieure à six mois, d'entreprises établies à l'étranger ; que les conclusions de la requête de la société Interimest sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur le bien-fondé de l'imposition au regard de la loi fiscale ;
En ce qui concerne l'entreprise redevable de taxe : Cons. qu'aux termes de l'article 1448 du code général des impôts : " La taxe professionnelle est établie suivant la capacité contributive des redevables appréciée d'après des critères économiques en fonction de l'importance des activités exercées par eux sur le territoire de la collectivité bénéficiaire " ; qu'aux termes de l'article 1467 du code, dans les rédactions successives de ce texte applicables au cours de la période d'imposition : " La taxe professionnelle a pour base : ... b ... les salaires, au sens de l'article 231-1 ... versés l'année précédente versés pendant la période de référence ... , à l'exclusion des salaires versés aux apprentis sous contrat et aux handicapés physiques ... " ; qu'aux termes de l'article 231 du même code : " 1. Les sommes payées à titre de traitement, salaires, indemnités et émoluments, y compris la valeur des avantages en nature, sont soumis à une taxe sur les salaires, égale à 4,25 % de leur montant, à la charge des personnes et organismes ... qui paient des traitements, salaires, indemnités et émoluments " ;
Cons. que, s'il résulte des dispositions de l'article 1448 du code général des impôts que la taxe professionnelle est établie en fonction de l'importance de l'activité exercée par les redevables sur le territoire de la collectivité bénéficiaire, ce principe doit être appliqué sous réserve des règles posées, en ce qui concerne la détermination de la base taxable, par les dispositions précitées de l'article 1467 du même code, et par celle du 1. de l'article 231 de ce code auxquelles renvoie l'article 1467 ; qu'en vertu des dispositions précitées du 1 de l'article 231, la taxe sur les salaires est due par tout employeur à raison des rémunérations qu'il paye à son personnel salarié ; qu'il suit de là que la part de la base taxable à la taxe professionnelle constituée par les salaires doit s'entendre des salaires qui sont versés par l'employeur à son personnel salarié ;
Cons. qu'il est constant que la société anonyme Interimest était l'employeur du personnel salarié qu'elle mettait temporairement à la disposition d'entreprises utilisatrices et qu'elle versait elle-même leurs salaires à ces personnels ; que, dès lors, et nonobstant la circonstance que la charge de ces salaires aurait été, en définitive, supportée par les entreprises utilisatrices, elle était seule redevable de la part de la taxe professionnelle assise sur les salaires dont s'agit ;
En ce qui concerne la prise en compte, dans l'assiette de la taxe professionnelle, des salaires versés aux personnels mis à la disposition d'entreprises étrangères : Cons. qu'aux termes de l'article 1473 du code général des impôts : " La taxe professionnelle est établie dans chaque commune où le redevable dispose de locaux ou de terrains en raison de la valeur locative des biens qui y sont situés ou rattachés et des salaires versés au personnel " ; qu'aux termes de l'article 5-1 de la loi n° 75-678 du 29 juillet 1975, reproduit à l'article 1471 du code : " Des décrets en Conseil d'Etat déterminent les modalités d'application de la taxe professionnelle aux entreprises qui exercent une partie de leur activité en dehors du territoire national " ; qu'aux termes de l'article 6 du décret n° 75-975 du 23 octobre 1975, pris en exécution de la disposition législative précitée, et reproduit à l'article 310 HH de l'annexe II au code général des impôts : " Pour les entreprises mentionnées au I de l'article 5 de la loi du 29 juillet 1975 qui disposent de locaux ou de terrains en France : 1° la valeur locative des immeubles et installations situés sur le territoire national, ainsi que de leurs équipements, biens mobiliers et véhicules qui y sont rattachés, est intégralement prise en compte. Celle des immeubles et installations situés à l'étranger, ainsi que de leurs équipements, biens mobiliers et véhicules qui y sont rattachés, n'est pas prise en compte. Les mêmes règles valent pour les salaires versés au personnel " ;
Cons. qu'il résulte des dispositions combinées des articles 1448 et 1473 du code général des impôts, d'une part, que la capacité contributive des redevables est appréciée en fonction de l'importance des activités exercées par eux au lieu de l'exercice desdites activités, et, d'autre part, que ce lieu est celui où le redevable dispose de locaux ou de terrains ; que, si l'article 1471 renvoie à un décret en Conseil d'Etat les modalités d'application de la taxe " aux entreprises qui exercent une partie de leur activité en dehors, du territoire national ", aucune disposition de ce texte législatif ou du décret en Conseil d'Etat pris pour son exécution n'implique que le terme " activité " devrait être pris dans un sens différent de celui des articles 1448 et 1473 précités du code ; qu'il suit de là qu'une entreprise de travail intérimaire dont les installations sont au lieu de son siège social sis en France, dont l'ensemble des personnels sont direc- tement rattachés à ce siège social, qui y conclut les contrats de prestation de personnels qui constituent son objet social, et qui ne dispose d'aucune installation à l'étranger, doit être regardée comme exerçant l'ensemble de ses activités exclusivement au lieu de son siège social, et que, dès lors, les salaires qu'elle verse à ses personnels, quel que soit le lieu où ils sont affectés, doivent être pris en compte pour le calcul de la taxe professionnelle dont elle est redevable ; que, tel étant le cas de la société Interimest, qui ne dispose d'autres installations ou terrains que ceux de son siège social de Strasbourg, le moyen tiré par elle de ce que les salaires qu'elle verse aux personnels mis à la disposition d'entreprises étrangères n'auraient pas dû être inclus dans ses bases d'imposition à la taxe professionnelle doit être écarté au regard des dispositions de la loi fiscale ;
Sur le moyen tiré d'interprétations administratives : Cons. que la société anonyme Interimest invoque, sur le fondement des dispositions de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, applicable en l'espèce, une instruction administrative du 10 février 1976 complétant une précédente instruction du 30 octobre 1975 ; que, dans le dernier état de ses conclusions, elle invoque également une instruction du 14 janvier 1976, en ce qui concerne seulement les impositions afférentes aux années 1979 et 1980 ;
En ce qui concerne l'instruction du 10 février 1976 : Cons. que l'instruction du 30 octobre 1975 prévoit, en son § 164, que les salaires versés par une entreprise de travail temporaire sont rattachés aux locaux de cette dernière et imposables à son nom ; que, si l'instruction du 10 février 1976 a complété le § 164 de l'instruction du 30 octobre 1975 par une disposition visant les règles de convenance adoptées pour la gestion de certains groupes en matière de versement des salaires du personnel, il ressort de l'examen de ce dernier texte qu'il n'est pas applicable aux entreprises de travail temporaire ; que, dès lors, la société requérante ne saurait se prévaloir, de manière pertinente, de cette instruction ;
En ce qui concerne l'instruction du 14 janvier 1976 : Cons. que la société Interimest est fondée à invoquer l'interprétation administrative, dont le ministre ne conteste d'ailleurs pas l'applicabilité en l'espèce, contenue dans le § 162 de l'instruction du 30 octobre 1975, dans la rédaction de ce texte résultant de l'instruction du 14 janvier 1976, aux termes de laquelle : " sous leur propre responsabilité, les employeurs sont autorisés à retrancher les rémunérations allouées aux salariés détachés hors de France pour une durée supérieure à six mois au cours de l'année de référence " ; que la société requérante est, dès lors, en droit de demander, sans préjudice de dégrèvement partiel prononcé à son profit par la décision du 6 avril 1984 susmentionnée, la réduction des cotisations à la taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1979 et 1980, et correspondant à l'exclusion des bases taxables des salaires versés à ceux de ses salariés qui ont été mis à la disposition, pour une durée supérieure à six mois, d'entreprises utilisatrices établies hors de France au cours de l'année 1978, laquelle constitue l'année de référence des impositions des années 1979 et 1980 en vertu des rédactions successives des articles 1467 et 1467-A du code général des impôts pendant la période d'imposition ; qu'il résulte de l'instruction que ces salaires ont représenté en 1978 une somme non contestée de 68 631 F ; qu'il y a lieu, dès lors, de réduire les bases taxables de chacune des années 1979 et 1980 du cinquième de cette somme, soit de 13 726 F, et de rejeter le surplus des conclusions de la requête susvisée de la société anonyme Interimest ;
Cons. qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Interimest est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté, en totalité, sa demande en réduction des impositions contes- tées ;

non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête de la société anonyme Interimest tendant à la réduction de la cotisation à la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie, au titre de l'année 1981, d'une somme de 23 471 F en droits, dont il a été accordé dégrèvement, réduction des cotisations à la taxe professionnelle au titre des années 1979 et 1980 résultant de la réduction des bases taxables, au titre de chacune de ces deux années, d'une somme de 13 726 F ; rejet au surplus des conclusions de la requête, réformation du jugement en ce sens .


Synthèse
Formation : 9 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 48096
Date de la décision : 17/04/1985
Sens de l'arrêt : Réformation non lieu à statuer
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - OPPOSABILITE DES INTERPRETATIONS ADMINISTRATIVES - OPPOSABILITE SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE L - 80 A DU LPF - INTERPRETATION FORMELLE - Instruction administrative du 14 janvier 1976 - Exclusion des salaires versés à des personnels mis à disposition d'entreprises étrangères pour le calcul de la taxe professionnelle.

19-03-04-01 S'il résulte des dispositions de l'article 1448 du code général des impôts que la taxe professionnelle est établie en fonction de l'importance de l'activité exercée par les redevables sur le territoire de la collectivité bénéficiaire, ce principe doit être appliqué sous réserve des règles posées, en ce qui concerne la détermination de la base taxable, par les dispositions de l'article 1467 du même code, et par celles du 1. de l'article 231 de ce code auxquelles renvoie l'article 1467. En vertu des dispositions du 1 de l'article 231, la taxe sur les salaires est due par tout employeur à raison des rémunérations qu'il paye à son personnel salarié. Il suit de là que la part de la base taxable à la taxe professionnelle constituée par les salaires doit s'entendre des salaires qui sont versés par l'employeur à son personnel salarié. Application de ces principes à une entreprise de travail temporaire qui était l'employeur du personnel salarié qu'elle mettait temporairement à la disposition d'entreprises utilisatrices et qui versait elle-même leurs salaires à ces personnels. Dans ces conditions, nonobstant la circonstance que la charge de ces salaires aurait été, en définitive, supportée par les entreprises utilisatrices, elle était seule redevable de la part de la taxe professionnelle assise sur les salaires dont s'agit.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - PROFESSIONS ET PERSONNES TAXABLES - Redevable - Entreprise de travail temporaire mettant des personnels à la disposition d'entreprises étrangères.

19-03-04-04 Il résulte des dispositions combinées des articles 1448 et 1473 du code général des impôts, d'une part, que la capacité contributive des redevables est appréciée en fonction de l'importance des activités exercées par eux au lieu de l'exercice desdites activités, et, d'autre part, que ce lieu est celui où le redevable dispose de locaux ou de terrains. Si l'article 1471 renvoie à un décret en Conseil d'Etat les modalités d'application de la taxe "aux entreprises qui exercent une partie de leur activité en dehors du territoire national", aucune disposition de ce texte législatif ou du décret en Conseil d'Etat pris pour son exécution n'implique que le terme "activité" devrait être pris dans un sens différent de celui des articles 1448 et 1473 du code. Il suit de là qu'une entreprise de travail intérimaire dont les installations sont au lieu de son siège social sis en France, dont l'ensemble des personnels est directement rattaché à ce siège social, qui y conclut les contrats de prestation de personnels qui constituent son objet social, et qui ne dispose d'aucune installation à l'étranger, doit être regardée comme exerçant l'ensemble de ses activités exclusivement au lieu de son siège social. Dès lors les salaires qu'elle verse à ses personnels, quel que soit le lieu où ils sont affectés, doivent être pris en compte pour le calcul de la taxe professionnelle dont elle est redevable.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - ASSIETTE - Base d'imposition - Salaires à inclure dans la base d'imposition - Existence - Salaires versés par une entreprise de travail temporaire à des personnels mis à la disposition d'entreprises étrangères.

19-01-01-03-03-05 Sur le fondement de l'article 1649 quinquies E du C.G.I., une entreprise de travail intérimaire peut demander le bénéfice d'une instruction administrative du 30 octobre 1975 modifiée [par. 162] par une instruction du 14 janvier 1976 pour obtenir la réduction des cotisations à la taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie, correspondant à l'exclusion des bases taxables des salaires versés à ceux de ses salariés qui ont été mis à la disposition, pour une durée supérieure à six mois, d'entreprises utilisatrices établies hors de France.


Références :

CGI 1448
CGI 1467 b, 1467 A
CGI 1471
CGI 1473
CGI 1649 quinquies E
CGI 231 1
CGIAN2 310 HH
Décret 75-975 du 23 octobre 1975 art. 6
Instruction du 30 octobre 1975 1976-01-14 1976-02-10 direction générale des impôts
Loi 75-678 du 29 juillet 1975 art. 5 I


Publications
Proposition de citation : CE, 17 avr. 1985, n° 48096
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. de Bresson
Rapporteur ?: M. Teissier du Cros
Rapporteur public ?: M. Racine

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1985:48096.19850417
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