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06/10/1983 | CJUE | N°299/82

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mancini présentées le 6 octobre 1983., Horst W. Steinfort contre Commission des Communautés européennes., 06/10/1983, 299/82


CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. G. FEDERICO MANCINI,

PRÉSENTÉES LE 6 OCTOBRE 1983 ( 1 )

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1.  Le recours du 1er décembre 1982, par lequel la présente affaire a été introduite, a pour objet la demande de promotion au grade A 2 que Monsieur Horst W. Steinfort, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, présente à cette institution.

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CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. G. FEDERICO MANCINI,

PRÉSENTÉES LE 6 OCTOBRE 1983 ( 1 )

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1.  Le recours du 1er décembre 1982, par lequel la présente affaire a été introduite, a pour objet la demande de promotion au grade A 2 que Monsieur Horst W. Steinfort, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, présente à cette institution.

Résumons les faits. Le requérant a été engagé par la Commission le 27 mars 1961 en qualité d'administrateur principal de grade A 4. Du 9 septembre 1964 au 5 juillet 1967, il a été détaché pour remplir les fonctions de chef de cabinet de Monsieur Margulies, membre de la Commission Euratom, en occupant un poste de grade A 2. A la fin du détachement, il a travaillé à la direction générale des recherches Euratom et, depuis 1968, ayant été promu au grade A 3, il a exercé ses fonctions auprès de la
direction générale XIII «Marché de l'information et innovation».

Par une lettre du 18 février 1982, M. Steinfort a demandé au président de la Commission d'être promu au grade A 2. Il a fondé sa demande sur la décision de la Commission relative à «la réintégration des fonctionnaires détachés à un cabinet suite à la promotion» et adoptée le 28 juillet 1981 (doc. COM(81) PV 615). Plus précisément, le requérant a fait référence au paragraphe 1 de cette source qui dispose: «Les fonctionnaires de la catégorie A qui sont promus à un poste d'une carrière différente
pendant la période de détachement dans un cabinet, réintégreront leur service où la promotion leur est assurée dans un certain délai: promotion vers le grade A 1 — A 2 ou A 3: 3 mois; promotion vers le grade A 5: à la fin du mandat actuel de la Commission».

Selon le requérant, ce paragraphe a codifié la pratique sur la base de laquelle les ex-chefs de cabinet, parvenus à la fin du détachement, étaient promus à un grade au moins équivalent à celui prévu pour la fonction accomplie auprès du membre de la Commission.

N'ayant pas reçu de réponse à sa demande, le requérant a adressé une réclamation administrative contre la décision implicite de rejet (24 juin 1982). Mais, l'autorité investie du pouvoir de nomination l'a rejetée par une mesure du 9 novembre 1982. La source invoquée par le requérant — a-t-elle relevé — a un but bien différent de celui qu'il lui attribue. En effet, elle vise à réglementer les délais dans lesquels les fonctionnaires promus durant leur détachement dans le cabinet d'un membre de la
Commission rejoignent leurs services respectifs.

2.  Examinons la thèse du requérant. Comme nous l'avons dit, il estime que la décision de qua accorde aux ex-chefs de cabinet un droit de promotion à l'issue de la période de détachement, en fixant également les périodes dans lesquelles l'institution doit y pourvoir. Sa lettre et surtout l'incise «où la promotion leur est assurée» militent en ce sens. Le refus de promouvoir est donc illégal, parce que: a) il viole le principe de la confiance; b) il constitue une discrimination de traitement par
rapport à d'autres fonctionnaires détachés dans les cabinets; c) il réunit les éléments constitutifs du détournement de pouvoir.

Cette interprétation n'est cependant nullement fondée. Comme l'observe la défense de l'institution défenderesse, la décision du 28 juillet 1981 entend modifier une décision précédente, adoptée par la Commission le 20 juin 1979, relative, elle aussi, à la réintégration des fonctionnaires détachés auprès d'un cabinet après la promotion. La nouvelle mesure vise surtout à réduire les délais prévus par l'ancienne décision pour l'affectation au nouveau service. Le délai maximal de trois mois qu'elle
fixe pour la promotion en A 1, A 2 et A 3 entend donc concilier deux exigences, l'une et l'autre importantes: pourvoir rapidement des postes de direction de responsabilité étendue et permettre aux cabinets de se réorganiser et de choisir le nouveau personnel.

Les travaux préparatoires de la décision (doc. PERS.(81) 171) et, à bien y regarder, son texte même confirment la thèse de la Commission. Il est évident qu'il est mal rédigé (et l'incise invoquée par le requérant, incompréhensible au point de faire penser à une coquille, le démontre per tabulas. Mais la lecture qu'en donne M. Steinfort — selon laquelle le fonctionnaire promu pendant le détachement devrait, une fois qu'il a été réintégré dans son service, obtenir une «seconde» promotion que
l'institution «lui assure», est absurde et en contradiction manifeste avec le statut. Qu'on le lise avec moins de hâte et l'on s'apercevra qu'il existe un lien précis entre les termes «dans un certain délai» et «réintégreront leur service»; il s ensuit que le délai de trois mois ne peut que signifier la période dans laquelle le fonctionnaire est tenu d'occuper son nouvel emploi. De toute façon, il est certain que le texte en question vise expressément le cas du fonctionnaire de catégorie A promu
durant le détachement auprès d'un cabinet. Or, comme nous le savons, M. Steinfort a été promu ultérieurement: il ne pourrait donc tirer aucun avantage de la décision, même si l'interprétation qu'il en donne était exacte.

3.  La décision du 28 juillet 1981 n'attribue, donc, au fonctionnaire détaché auprès d'un cabinet d'un membre de la Commission ni une expectative ni, et moins encore, un droit à être promu. Du reste, comme vous l'avez plusieurs fois souligné, ce droit est étranger au système de la fonction publique communautaire, parce que la promotion dépend de l'appréciation discrétionnaire de l'autorité investie du pouvoir de nomination.

Il s'ensuit qu'aucun des griefs du requérant n'atteint son objectif. Puisque la décision ne contient pas de promesse de promotion, il n'est pas possible de dire que le principe de la confiance légitime a été violé. Ensuite, le grief relatif à un traitement discriminatoire par rapport aux fonctionnaires détachés dans les cabinets est dépourvu de fondement: en effet, les promotions éventuelles qu'ils ont obtenues ne sont pas en contradiction avec le principe d'égalité dans le déroulement de la
carrière (article 5, paragraphe 3, du statut des fonctionnaires), au moins dans la mesure où l'autorité investie du pouvoir de nomination y a procédé en respectant les règles statutaires. Enfin, l'accusation de détournement de pouvoir est gratuite. Ni le dossier ni la procédure orale n'ont fait apparaître d'éléments qui permettent de considérer le refus de promotion comme une sanction simulée ou comme le résultat d'une attitude vexatoire à l'égard de M. Steinfort.

4.  Pour toutes les considérations développées jusqu'ici, nous concluons en vous proposant de rejeter le recours présenté le 1 er décembre 1982 par M. Horst W. Steinfort contre la Commission. Quant aux dépens, conformément à l'article 70 du règlement de procédure, nous estimons que chacune des parties doit supporter les siens.

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( 1 ) Traduit de l'italien.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 299/82
Date de la décision : 06/10/1983
Type de recours : Recours de fonctionnaires - non fondé

Analyses

Fonctionnaire: promotion.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Horst W. Steinfort
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mancini
Rapporteur ?: Koopmans

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1983:275

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