ARRET N°20 du 11/04/13 J/337/RG/11 21/12/11 Administrative ------- - Fortesa International Sénégal LDC es nom et es qualité de Ad Ap (Me Guédel Ndiaye & associés) Contre :
-Etat du Sénégal (Agent judiciaire de l’Etat) - La Société nationale d’Electricité dite SENELEC (Me Mayacine Tounkara & associés)
PRESENTS :
Fatou Habibatou Diallo, Président de Chambre, Président ;
Abdoulaye Ndiaye,
Mahamadou Mansour Mbaye, Abibatou Babou Wade,
Seydina Issa Sow, Conseillers, RAPPORTEUR :
Abdoulaye Ndiaye, PARQUET GENERAL:
Abdourahmane Diouf; GREFFIER :
Af Aq, AUDIENCE :
11 avril 2013
MATIERE :
Administrative
RECOURS :
Excès de pouvoir REPUBLIQUE DU SENEGAL AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS ----------------- COUR SUPREME ----------------- CHAMBRE ADMINISTRATIVE ----------------- A l’audience publique ordinaire du Jeudi onze avril de l’an deux mille treize ;
ENTRE : - Fortesa International Sénégal LDC (filiale de la société Américaine FORTESA International), ayant son siège social au 4th floor, Harbour Centre P.O Box, 613, Ai Aj Grand Aa, Aa Ae, Ak Ab Am et ses bureaux à Dakar, Cité des cadres Lebous, villa n°73 bis Ac As Ao, poursuites et diligences de ses représentants légaux, agissant es nom et es qualité de Ad Ap, faisant élection de domicile en l’Etude de Maître Guédel Ndiaye & associés, SCP d’Avocats, 73, bis, Rue Ah Al Ar à Dakar;
D’UNE PART ;
ET :
- L’Etat du Sénégal pris en la personne de Monsieur l’Agent judiciaire de l’Etat, en ses bureaux sis au Ministère de l’Economie et des Finances, building Peytavin, Avenue de la République x Carde à Dakar ; - La Société nationale d’Electricité dite A, prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social à Dakar, 28, Rue Vincent, élisant domicile … l’étude de Maître Mayacine Tounkara, avocats à la cour, 15, Boulevard Ag x Rue Thann, Immeuble An, 1er étage à Dakar ;
D’AUTRE PART ; Vu la requête reçue au Greffe central de la Cour suprême le 21 décembre 2011 par laquelle Fortesa International Sénégal Ldc es nom et es qualité d’opérateur de l’Association Petrosen/Fortesa, élisant domicile … l’Etude de Maître Guédel Ndiaye et associés, avocats à la cour, sollicite l’annulation du décret n°2011-529 du 26 avril 2011 fixant les modalités d’utilisation du gaz naturel obtenu à partir des puits du sous sol national et la décision implicite de rejet du recours gracieux du 24 juin 2011 adressé au Président de la République ; Vu le Traité de l’UEMOA du 10 janvier 1994 ; Vu le Protocole additionnel n°1 relatif aux organes de contrôle de l’UEMOA ; Vu le Règlement n°2/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002 relatif aux pratiques anticoncurrentielles à l’intérieur de l’UEMOA ; Vu la Directive n°2/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002 relative à la commission et aux structures nationales de concurrence des Etats membres ; Vu la loi organique n°2008-35 du 8 août 2008 sur la Cour suprême ; Vu la loi n°98-05 du 8 janvier 1998 portant code pétrolier ; Vu le décret n°98-810 du 6 octobre 1998 fixant les modalités et conditions d’application du code pétrolier ; Vu l’exploit du 17 février 2012 de Maître Aloyse Ndong, huissier de justice à Dakar portant signification de la requête ; Vu le reçu du 22 décembre 2012 attestant du paiement de l’amende de consignation ; Vu le mémoire en défense de l’Agent judiciaire de l’Etat reçu au greffe le 16 avril 2012 ; Vu le mémoire en défense de la SENELEC reçu au greffe le 17 avril 2012 ; Vu le décret attaqué ; Vu les autres pièces du dossier ; Ouï Monsieur Abdoulaye Ndiaye, Conseiller, en son rapport ; Ouï Monsieur Abdourahmane Diouf, Avocat général, en ses conclusions tendant au renvoi préjudiciel devant la Cour de justice de l’UEMOA ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que la requérante soutient avoir signé le 02 février 2001 avec l’Etat du Sénégal un contrat de recherche et de partage de production d’hydrocarbures ; que par décret du 5 juillet 2004, l’Etat lui a accordé une concession d’exploitation sur le périmètre de Gadiaga , puis le 02 octobre 2006, il a conclu, avec elle un autre contrat de recherche en lui accordant une concession d’exploitation sur le bloc de Tamna ; que par ces deux concessions, elle est devenue le fournisseur en gaz naturel de la SENELEC depuis 2002 et de la SOCOCIM depuis 2009 ; que le 26 avril 2011, l’Etat a pris le décret attaqué fixant les modalités d’utilisation du gaz naturel produit à partir des puits du sous-sol Sénégalais, lequel réserve exclusivement ce gaz à l’approvisionnement des centrales de la SENELEC ; Sur la recevabilité du recours ;
Considérant que la SENELEC soulève l’irrecevabilité du recours au motif, d’une part, que la demande administrative préalable a été directement adressée au Président de la République et non à l’Agent judiciaire de l’Etat qui n’en a reçu qu’ampliation en violation de l’article 39 du texte relatif à l’Agence judiciaire de l’Etat et, d’autre part, qu’ il s’est écoulé plus de sept mois entre la publication du décret le 27 avril 2011 et la date du recours en annulation en violation des dispositions de l’article 73-1 de la loi organique sur la Cour suprême et qu’enfin la requérante prétendant agir es qualité d’opérateur de l’association Petrosen/Fortesa ne justifie aucunement de mandat pour la représentation en justice de ladite association ; Considérant qu’en matière administrative, le recours gracieux est adressé à l’auteur de la décision qui, en l’espèce, est le Président de la République ; Considérant que le recours gracieux ayant pour effet de prolonger le délai du recours contentieux, le décret attaqué ayant été publié le 27 avril 2011 et la requête gracieuse reçue le 24 juin 2011 à la Présidence de la République, le recours en annulation introduit le 21 décembre 2011 l’a été dans le délai prévu par la loi, soit dans les deux (2) mois suivant la décision implicite de rejet obtenue à l’issue du silence gardé plus de quatre mois par l’autorité ; Considérant qu’il ressort des dispositions des articles 4-1 et 4-6 de l’Accord d’association conclu entre Petrosen et Fortesa International Sénégal Ldc, filiale de Fortesa International, que la requérante, en tant qu’opérateur désigné, sera chargé de l’exécution et de la conduite de toutes les opérations communes visées à l’Accord et que tous litiges ou réclamations non couverts par les assurances souscrites concernant les opérations prévues pourront être transigés, réglés ou défendus par l’opérateur sous réserve que ce dernier ne puisse engager, à ce titre, un montant supérieur à l’équivalent de cent mille dollars ;
Qu’ainsi, elle est fondée à agir en justice au nom de l’association ; Qu’il s’ensuit que le recours de Fortesa International Sénégal Ldc est recevable ; Sur le renvoi préjudiciel :
Considérant que l’Agent judiciaire de l’Etat invoque les dispositions de l’article 06 du Règlement n°02/CM/UEMOA du 23 mai 2002 qui, selon lui, exigent la saisine de la Cour de justice de l’UEMOA, en cas de contentieux portant sur la concurrence et sollicite le renvoi préjudiciel devant ladite Cour en vertu de l’article 12 du protocole additionnel n°1 relatif aux organes de contrôle de l’UEMOA ; Considérant qu’en l’espèce, le litige ne porte pas sur le contentieux de la concurrence dévolu selon la Directive n°2/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002 relative à la Commission et aux structures nationales de concurrence des Etats membres, à la Commission de l’UEMOA qui, aux termes de l’article 6-4 du Règlement susvisé, est seule habilitée à saisir la Cour de justice ; Considérant que selon l’article 12 du Protocole Additionnel n°1 relatif aux organes de contrôle de l’UEMOA, la Cour de justice statue à titre préjudiciel sur l’interprétation du traité de l’Union, sur la légalité et l’interprétation des statuts des organismes crées par un acte du Conseil, quand une juridiction nationale ou une autorité à fonction juridictionnelle est appelée à en connaitre à l’occasion d’un litige ; Considérant qu’en l’espèce, le litige ne porte pas sur un des cas de saisine de la Cour prévu par le texte susvisé ; Qu’il n y’a donc pas lieu à renvoi à la Cour de justice de l’UEMOA ; Sur la recevabilité du moyen :
Considérant que la SENELEC soutient que le moyen tiré de la violation des dispositions des articles 30 et 54 du code pétrolier doit être déclaré irrecevable pour avoir violé l’article 35-1 de la loi organique en mettant en œuvre plusieurs cas d’ouverture ; Considérant que l’article 35-1 de la loi organique susvisée concerne le moyen de cassation et non le moyen d’annulation présentement développé ; qu’il y a lieu de déclarer ledit moyen recevable ; Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens,
Sur le premier moyen tiré de la violation des dispositions des articles 30 et 54 du code pétrolier, en ce que l’Etat impose à la requérante des restrictions et réserve l’exclusivité de la production à la SENELEC, alors que selon ces textes, elle est propriétaire des hydrocarbures produites en tête de puits et seule une priorité pour la couverture des besoins de la consommation intérieure est prévue et non une exclusivité ; Considérant qu’en vertu des textes visés au moyen, le titulaire d’une concession d’exploitation acquiert la propriété des hydrocarbures produites en tête de puits ; que les exploitants de gisements d’hydrocarbures peuvent être tenus dans des conditions fixées dans la convention ou le contrat de service, d’affecter par priorité les produits de leur exploitation à la couverture des besoins de la consommation intérieure du pays, le prix de cession, dans ce cas devant refléter le prix du marché international et la part de production revenant aux exploitants, après satisfaction des besoins intérieurs du pays, pouvant être exportée librement et en franchise de tous droits et taxes à l’exportation ; Considérant que le décret attaqué, se fondant sur le code pétrolier, dispose en ses articles 1 et 2 que, d’une part, le gaz naturel obtenu à partir des puits du sous-sol national est exclusivement réservé à l’approvisionnement des centrales de la SENELEC et, d’autre part, suivant des conditions fixées en accord avec A, les producteurs indépendants d’électricité fournisseurs exclusifs de SENELEC peuvent s’approvisionner en gaz naturel provenant des puits nationaux ; Considérant ainsi, qu’en réservant exclusivement le gaz naturel obtenu à partir des puits du sous-sol national à la SENELEC et à ses fournisseurs, alors que la loi prévoit d’affecter par priorité ce gaz à la couverture des besoins de la consommation intérieure du pays, le décret viole la loi ;
Qu’il échet de l’annuler ;
PAR CES MOTIFS :
Déclare le recours de Fortesa International Sénégal Ldc recevable ; Dit n y avoir lieu à renvoi devant la Cour de justice de l’UEMOA ; Annule le décret n°2011-529 du 26 avril 2011 fixant les modalités d’utilisation du gaz naturel obtenu à partir des puits du sous-sol national ; Ordonne la restitution de l’amende consignée ; Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême, Chambre administrative, en son audience publique ordinaire tenue les jour, mois et an que dessus et où étaient présents :
Fatou Habibatou Diallo, Président de Chambre, Président ;
Abdoulaye Ndiaye,
Mahamadou Mansour Mbaye, Abibatou Babou Wade,
Seydina Issa Sow, Conseillers,
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président de Chambre, Président, les Conseillers et le Greffier.
Le Président de Chambre, Président :
Fatou Habibatou Diallo Les Conseillers :
Abdoulaye Ndiaye Mahamadou Mansour Mbaye,
Abibatou Babou Wade Seydina Issa Sow Le Greffier :
Af Aq