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30/06/2022 | OHADA | N°120/2022

OHADA | OHADA, Cour commune de justice et d'arbitrage, 30 juin 2022, 120/2022


Texte (pseudonymisé)
ORGANISATION PF POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Troisième chambre
Audience publique du 30 juin 2022
Pourvoi : n° 365/2020/PC du 02/12/2020
Affaire : GABON AUTOSUR S.A.
(Conseil : Maître L.C. NOUNGUI KOUMANGOYE, Avocat à la Cour)
Contre
- Société Civile Immobilière PARAMELLE
-PIECES EQUIP’AUTO
(Conseil : Haymard MAYINOU MOUTSINGA, Avocat à la Cour)
ARRET N° 120/2022 du 30 juin 2022
La Cour Commune de Justice et d’A

rbitrage (CCJA), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Troisième Cham...

ORGANISATION PF POUR L’HARMONISATION
EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES
(OHADA)
COUR COMMUNE DE JUSTICE
ET D’ARBITRAGE
(CCJA)
Troisième chambre
Audience publique du 30 juin 2022
Pourvoi : n° 365/2020/PC du 02/12/2020
Affaire : GABON AUTOSUR S.A.
(Conseil : Maître L.C. NOUNGUI KOUMANGOYE, Avocat à la Cour)
Contre
- Société Civile Immobilière PARAMELLE
-PIECES EQUIP’AUTO
(Conseil : Haymard MAYINOU MOUTSINGA, Avocat à la Cour)
ARRET N° 120/2022 du 30 juin 2022
La Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA), de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Troisième Chambre, a rendu l’Arrêt suivant en son audience publique du 30 juin 2022 où étaient présents :
Messieurs Mahamadou BERTE, Président
Djimasna N’DONINGAR, Juge, rapporteur
Sabiou MAMANE NAISSA, Juge,
et Maître Louis Kouamé HOUNGBO, Greffier ;
Sur le pourvoi enregistré au greffe de la Cour de céans le 02 décembre 2020 sous le n°365/2020/PC et formé par Maître Larissa NOUNGUI KOUMANGOYE, Avocat à la Cour, dont le Cabinet est sis à Libreville, BP 111, agissant au nom et pour le compte de la société GABON AUTOSUR, S.A. ayant son siège social à Libreville, zone industrielle, BP 7662, dans la cause qui l’oppose à la SCI PARAMELLE, société civile immobilière dont le siège est à Libreville, B.P. 2220, et à la société PIECES EQUIP’AUTO, S.A. dont le siège social est à Libreville, zone industrielle d’Oloumi, BP 407, les deux ayant pour conseil Maître Haymard MAYINOU MOUTSINGA, Avocat à la Cour, dont le cabinet est sis au 1” étage de l’Immeuble 2HB, BP 206, Libreville,
en cassation de l’arrêt n°21/2019-2020 rendu le 11 juin 2020 par la Cour d’appel Judiciaire de Libreville et dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort :
En la forme :
Déclare recevable l’appel interjeté par la société GABON AUTOSUR ;
Déclare tout aussi recevable l’intervention volontaire de la société PIECES EQUIP’AUTO ;
Au fond :
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du 07 mars 2017 ;
Y ajoutant :
Déboute la société GABON AUTOSUR en ses demandes de :
o Nullité de la vente conclue entre la SCI PARAMELLE et la société PIECES EQUIP’AUTO ;
o Paiement de dommages-intérêts pour le préjudice subi ;
Déboute tout aussi la société PIECES EQUIP’AUTO en ses demandes reconventionnelles ;
Condamne la société GABON AUTOSUR aux dépens. » ;
La requérante invoque à l’appui de son pourvoi les trois moyens de cassation, tels qu’ils figurent à la requête annexée au présent arrêt ;
Sur le rapport de Monsieur le Juge Djimasna N’DONINGAR ;
Vu les dispositions des articles 13 et 14 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ;
Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l'OHADA ;
Attendu qu’il ressort des pièces du dossier de la procédure qu’en date du 1°" janvier 2009, la société GABON AUTOSUR concluait un contrat de bail sur un immeuble à usage professionnel avec la SCI PARAMELLE, bailleresse ; qu’en date du 27 février 2013, la société GABON AUTOSUR, exerçant son droit au renouvellement, sollicitait de la bailleresse un nouveau bail auquel celle-ci s’opposait, au motif qu’elle entendait démolir et reconstruire les locaux loués ; qu’estimant que sa cocontractante, qui était, entretemps, sur le point de vendre l’immeuble à la société PIECES EQUIP’AUTO, ne justifiait pas de la nature et de la description des travaux envisagés, GABON AUTOSUR l’assignait devant le Tribunal de première instance de Libreville en paiement d’indemnité d’éviction ; que, par jugement n°12/2016-2017 du 07 mars 2017, ledit tribunal la déboutait et ordonnait son expulsion des lieux ; que la Cour judiciaire de Libreville, sur appel de la société GABON AUTOSUR, confirmait le jugement entrepris, par arrêt n°21/2019-2020 rendu le 11 juin 2020, objet du présent pourvoi ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches
Vu l’article 127 de l’Acte uniforme du 15 décembre 2010 portant sur le droit commercial général ;
Attendu que la requérante fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 127-2° de l’Acte uniforme portant droit commercial général en ce que, pour la débouter de sa demande en paiement de l’indemnité d’éviction, la cour d’appel a énoncé, d’une part, que les dispositions de l’article susvisé « ne déterminent pas le moment de la remise des documents justificatifs de la nature et de la description des travaux envisagés » et, d’autre part, que l’analyse des plans de reconstruction était prématurée pour conclure à une incompatibilité avec l’activité exploitée dans les locaux par le preneur alors, selon le moyen, que la justification de la nature des travaux et leur description doivent être transmises au moment même où le refus de renouvellement du bail est notifié par le bailleur ou dans un délai raisonnable, et ce, afin de permettre au locataire d’analyser les plans pour savoir si les travaux projetés sont compatibles ou non avec son activité ;
Attendu qu’aux termes de l’article 127 de l’Acte uniforme susvisé, « Le bailleur peut s’opposer au droit au renouvellement du bail à durée déterminée ou indéterminée, sans avoir à régler d’indemnité d’éviction, dans les cas suivants :
2°) s’il envisage de démolir l’immeuble comprenant les lieux, et de le reconstruire.
Le bailleur doit dans ce cas justifier de la nature et de la description des travaux projetés.
Le preneur a le droit de rester dans les lieux jusqu’au commencement des travaux de démolition, et il bénéficie d’un droit de priorité pour se voir attribuer un nouveau bail dans l’immeuble reconstruit.
Si les locaux reconstruits ont une destination différente de celle des locaux objets du bail, ou s’il n’est pas offert au preneur un bail dans les nouveaux locaux, le bailleur doit verser au preneur l’indemnité d’éviction prévue à l’article 126 ci- dessus. » ;
Attendu qu’il résulte de cet article que le bailleur doit, à l’appui de son opposition au droit au renouvellement du bail, présenter les justificatifs objectifs des travaux envisagés sur les lieux loués, pour permettre d’apprécier si les locaux reconstruits offrent au preneur les mêmes conditions d’exploitation que celles qu’il avait dans le premier local ; qu’en décidant que «les dispositions de l’article 127 de l’'AUDCG ne déterminent pas le moment de la remise de ces documents » et que de «simples analyses des différents plans ne peuvent présager une incompatibilité [entre les locaux à construire et l’activité commerciale du preneur] », la Cour d’appel a commis le grief visé au moyen et expose ainsi son arrêt à la cassation, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens ;
Sur l’évocation
Attendu que, par acte en date du 29 mars 2017, la société GABON AUTOSUR relevait appel du jugement n°12/2016-2017 rendu le 07 mars 2017 par le Tribunal de première instance de Libreville dont le dispositif suit :
« Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en premier ressort ;
- Déboute la société GABON AUTOSUR de l’ensemble de ses demandes ;
- Ordonne son expulsion des lieux loués sous astreinte de 1.000.000 FCFA par jour de retard, à compter de la signification de la présente décision ;
- Ordonne l’exécution provisoire de la présente nonobstant toutes voies de recours ;
- La condamne en outre aux dépens. » ;
Qu’au soutien de son appel, elle expose avoir conclu le 1" janvier 2009 un bail à usage professionnel avec la SCI PARAMELLE, pour l’exploitation d’activité de contrôle technique des véhicules ; que ce bail était renouvelé en 2011 pour une durée de trois ans ; que six mois avant l’expiration du bail, elle avait exercé son droit au renouvellement du bail ; que le bailleur s’est opposé à ce renouvellement, par courrier en date du 10 avril 2013, au motif qu’il entendait démolir les locaux pour les reconstruire ; que, conformément à l’article 127 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général, elle avait vainement exigé du bailleur les pièces justificatives indiquant la nature et la description des travaux projetés ; que ce n’était qu’au cours de l’audience de mise en état de son action en paiement d’indemnité d’éviction que le bailleur a produit un permis de construire de la Mairie et divers documents qui révèlent par ailleurs que le nouvel édifice projeté était incompatible avec son activité commerciale ; qu’elle fait grief au premier juge d’avoir fait une mauvaise application de l’article 127 susmentionné car, plaide-t-elle, c’est au moment où le bailleur s’oppose au renouvellement du bail qu’il doit non seulement indiquer le motif de ce refus, mais aussi qu’il doit justifier, avec des documents appropriés, la nature et la description des travaux envisagés ; qu’elle sollicite le paiement d’une indemnité d’éviction de 535.916.340 FCFA, tenant compte de son chiffre d’affaire, des investissements réalisés, de la situation du local et des frais de déménagement ;
Attendu qu’intervenant volontaire, la société PIECES EQUIP’AUTO, se substituant à la SCI PARAMELLE, précise, en réplique, que c’est à son initiative que ladite SCI a notifié à GABON AUTOSUR le congé motivé par la démolition de l’immeuble et sa reconstruction, suite à leurs pourparlers entamés en 2012 pour le rachat des locaux loués ; que depuis le 29 novembre 2013, la SCI PARAMELLE a transmis non seulement le permis de construire mais également la description des travaux ; qu’elle conclut à la confirmation du jugement attaqué aux motifs que l’article 127 de l’AUDCG n’encadre pas le délai de transmission des pièces justificatives, encore moins le moment, et que la société GABON AUTOSUR ne pouvait présumer arbitrairement que les locaux auraient une destination différente alors que les travaux n’avaient même pas commencé ;
Attendu que, pour les mêmes motifs que ceux développés lors de l’examen du moyen de cassation, il y a lieu d’infirmer le jugement n°12/2016-2017 rendu le 07 mars 2017 par le Tribunal de Première Instance de Libreville et de statuer à nouveau sur les demandes des parties ;
Sur la demande de l’indemnité d’éviction
Attendu qu’aux termes du congé daté du 10 avril 2013 donné à la société GABON AUTOSUR, la démolition était envisagée pour «une modification et surélévation à un bâtiment R+1 à usage de garage et d’entrepôt », tel qu’il ressort du permis de construire délivré par la Mairie le 26 novembre 2013 ; que, non seulement, les justificatifs sur la nature et la description de ces travaux ont été produits après coup, lors de l’instance en paiement d’indemnité d’éviction, mais nulle part, la relocation de la société GABON AUTOSUR, qui exerce une activité de contrôle technique des véhicules, n’a été offerte; que dès lors, la société GABON AUTOSUR est fondée à obtenir une indemnité d’éviction, préalable à son expulsion qui a été effective depuis le 26 novembre 2020, tel qu’il ressort du procès-verbal d’expulsion dressé par huissier de justice ;
Sur le montant de l’indemnité d’éviction
Attendu que la société GABON AUTOSUR sollicite le paiement d’une indemnité d’éviction qu’elle estime à la somme de 535.916.340 FCFA, tenant compte de son chiffre d’affaires, des investissements réalisés, de la situation du local, de la perte d’exploitation de son activité et des difficultés de se reloger depuis son expulsion ;
Attendu que la SCI PARAMELLE et la société PIECES EQUIP’AUTO n’ont fait aucune observation sur le montant de l’indemnité réclamée ; qu’il y a lieu d’y faire droit ;
Sur les dommages-intérêts sollicités par la société GABON AUTOSUR
Attendu que la société GABON AUTOSUR sollicite la condamnation de PIECES EQUIP’AUTO au paiement de la somme de 50.000.000 FCFA de dommages-intérêts pour résistance abusive à une action bien fondée, sur le fondement des articles 96 et 6 du Code de procédure civile gabonais ;
Mais attendu que rien, dans la présente procédure, ne démontre le caractère abusif de la défense opposée par la SCI PARAMELLE et l’acquéreur PIECES EQUIP’AUTO aux prétentions de la demanderesse ; qu’il y’a lieu de rejeter cette demande ;
Sur les dépens
Attendu qu’ayant succombé, la SCI PARAMELLE et la société PIECES EQUIP’AUTO seront condamnées aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après en avoir délibéré ;
Casse l’arrêt n°21/2019-2020 rendu le 11 juin 2020 par la Cour d’appel judiciaire de Libreville ;
Evoquant et statuant sur le fond :
Infirme le jugement n°12/2016-2017 rendu le 07 mars 2017 par le Tribunal de première instance de Libreville ;
Statuant à nouveau :
Condamne la SCI PARAMELLE et la société PIECES EQUIP’AUTO solidairement à payer à la société GABON AUTOSUR la somme de 535.916.340 FCFA à titre d’indemnité d’éviction ;
Déboute la société GABON AUTOSUR du surplus de sa demande ;
Condamne la SCI PARAMELLE et la société PIECES EQUIP’AUTO aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé :
Le Président
Le Greffier


Synthèse
Numéro d'arrêt : 120/2022
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ohada;cour.commune.justice.arbitrage;arret;2022-06-30;120.2022 ?
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