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03/02/2025 | LUXEMBOURG | N°52297R

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 03 février 2025, 52297R


Tribunal administratif N° 52297R du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:52297R Inscrit le 28 janvier 2025 Audience publique du 3 février 2025 Requête en institution d’une mesure provisoire introduite par Monsieur (A), …, contre une décision du ministre de la Mobilité et des Travaux publics, département de la mobilité et des transports, en matière de carte de conducteur de taxis

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 52297R du rôle et déposée le 28 jan

vier 2025 au greffe du tribunal administratif par Maître Rabah LARBI, avocat à la Cour,...

Tribunal administratif N° 52297R du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:52297R Inscrit le 28 janvier 2025 Audience publique du 3 février 2025 Requête en institution d’une mesure provisoire introduite par Monsieur (A), …, contre une décision du ministre de la Mobilité et des Travaux publics, département de la mobilité et des transports, en matière de carte de conducteur de taxis

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 52297R du rôle et déposée le 28 janvier 2025 au greffe du tribunal administratif par Maître Rabah LARBI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), demeurant à …, conducteur de taxis, tendant à voir ordonner une mesure provisoire, à savoir l’instauration d’un sursis à exécution, par rapport à une décision du ministre de la Mobilité et des Travaux publics, département de la mobilité et des transports, du 28 octobre 2024 ayant procédé au retrait définitif ainsi qu’au non-renouvellement de sa carte de conducteur de taxis avec effet immédiat, un recours en réformation, sinon annulation dirigé contre la décision ministérielle, inscrit sous le numéro 52296, introduit le même jour, étant pendant devant le tribunal administratif ;

Vu l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu la note de plaidoiries déposée le 30 janvier 2025 par Monsieur le délégué du gouvernement Tom HANSEN pour l’Etat ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée au fond ;

Maître Rabah LARBI et Monsieur le délégué du gouvernement Tom HANSEN entendus en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 31 janvier 2025.

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Il résulte du dossier administratif que le ministère de la Mobilité et des Travaux publics, département de la mobilité et des transports, se vit informer en date du 27 juillet 2024 par le biais d’un mail lui adressé par le gérant de l’auberge de jeunesse d’… de divers faits reprochés à Monsieur (A), titulaire d’une carte de conducteur de taxis lui délivrée le ….

Par convocation sous pli recommandé du 26 août 2024, Monsieur (A) fut invité à se présenter le 25 septembre 2024 devant la Commission des taxis telle que prévue à l’article 19 (2) de la loi du 5 juillet 2016 portant organisation des services de taxis, convocation dont Monsieur (A) sollicita le report pour cause de maladie par courriel du 20 septembre 2024, en y annexant un certificat de maladie daté du 19 septembre 2024 et portant sur la période du 21 septembre au 30 septembre 2024, et ce par rapport à un accident survenu le 5 janvier 2024.

Le ministère de la Mobilité et des Travaux publics, département de la mobilité et des transports, accusa le même jour réception de cette demande en informant Monsieur (A) que « Le report de la convocation à la Commission de taxis est possible une seule fois. Toutefois, si vous ne vous présentez pas à la prochaine Commission des taxis à laquelle vous avez été convoqué, les membres prendront une décision en votre absence ».

Une nouvelle lettre de convocation lui fut dès lors adressée le 3 octobre 2024 pour le 24 octobre 2024.

Par courriel du 10 octobre 2024, Monsieur (A) accusa réception de cette convocation tout en précisant « Je demanderai aussi d’arrêter de me harceler en me forçant de venir à cette Convocation. Je vous transmettrai un certificat médical qui justifiera mon absence ».

Par courriel en retour du même jour, le ministère de la Mobilité et des Travaux publics, département de la mobilité et des transports, attira encore l’attention de Monsieur (A) sur le fait que « Comme indiqué dans nos dernières communications, votre cas sera traité devant la commission même en votre absence. Je vous rappelle que vous avez une suspension de votre carte de conducteur depuis 2018 et que votre dossier est sujet à de multiples questions. Il serait donc judicieux d’y comparer ».

Face au défaut de Monsieur (A) de se présenter devant la Commission des taxis, celle-

ci, dans son avis du 24 octobre 2024, conclut au retrait de la carte de conducteur de taxis délivrée à Monsieur (A) ainsi qu’à son non-renouvellement pour infraction et violation des articles 7, 8 et 16 de la loi du 5 juillet 2016 portant organisation des services de taxis.

Par arrêté ministériel du 28 octobre 2024, le ministre de la Mobilité et des Travaux publics, en se ralliant à l’avis de la Commission des taxis du 24 octobre 2024, décida du retrait définitif de la carte de conducteur de taxis délivrée à Monsieur (A) ainsi qu’à son non-

renouvellement, décision basée sur les considérations suivantes :

« Vu l’article 7 de la loi du 5 juillet 2016 portant organisation des services de taxis ;

Vu l’article 8 de la loi du 5 juillet 2016 portant organisation des services de taxis ;

Vu l’article 16 de la loi du 5 juillet 2016 portant organisation des services de taxis ;

Vu l’article 19 de la loi du 5 juillet 2016 portant organisation des services de taxis ;

Vu l’article 15 du règlement grand-ducal du 23 juillet 2016 fixant les modalités d’application de la législation portant organisation des services de taxis ;

Considérant que Monsieur (A), né le … et demeurant à …, est détenteur d’une carte de conducteur de taxis n° … ;

Considérant que l’intéressé a été convoqué le 25 septembre 2024, ainsi que le 24 octobre 2024 pour être entendu dans ses explications et moyens de défense par la Commission des taxis prévu à l’article 16, paragraphe 1 du règlement grand-ducal du 23 juillet 2016 fixant les modalités d’application de la législation portant organisation des services de taxis, convocations auxquelles il n’a pas donné suite ;

Considérant que l’intéressé est ainsi censé avoir renoncé à faire valoir ses explications et moyens de défense et qu’il y a lieu de statuer par défaut ;

Considérant les pièces présentes dans le dossier relatives aux faits reprochés à Monsieur (A);

Vu l’avis unanime du 24 octobre 2024 de la Commission des taxis précitée ;

Arrête :

Art. 1er. La carte de conducteur de taxis n° …, délivrée à Monsieur (A) préqualifié, fait l’objet d’un retrait définitif ainsi que le non-renouvellement pour infraction et violation des articles 7, 8 et 16 susvisés de la loi du 5 juillet 2016 portant organisation des services de taxis.

Art. 2. L’intéressé devra remettre la carte de conducteur de taxis n° … au Service des taxis dès réception de l’arrêté ministériel.

Art. 3. Le présent arrêté devient effectif le jour de l’acceptation du courrier recommandé. A défaut de retirer la décision, celle-ci sera notifiée par la Police Grand-Ducale à la demande de la ministre.

Art. 4. Le présent arrêté est susceptible d’un recours gracieux à présenter par écrit à la Ministre de la Mobilité et des Travaux publics. Il est en outre susceptible d’un recours en réformation devant le Tribunal administratif, à exercer par ministère d’avocat à la Cour endéans les trois mois à partir du jour de la notification du présent arrêté. » Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 28 janvier 2025, inscrite sous le numéro 52296 du rôle, Monsieur (A) a introduit un recours en réformation sinon annulation contre la décision ministérielle précitée.

Par requête séparée déposée en date du même jour, inscrite sous le numéro 52297 du rôle, il a encore introduit une demande en institution d’une mesure provisoire, tendant à voir surseoir à la décision déférée, le dispositif de cette requête étant libellé comme suit :

« PLAISE AU TRIBUNAL Déclarer recevable la présente requête en sursis à exécution, Au fond la dire fondé et justifié, Par reformation de la décision entreprise Partant, assortir la décision prise par la Ministre de la Mobilité et des Travaux publics en date du 28 octobre 2024 du sursis à l’exécution de l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 19999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, Ordonner tous devoirs de droit, Condamner l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg aux frais et dépens de l’instance sur base de l’article 32 de la loi modifiée du 21 juin 19999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, Réserver au requérant tous autres droits, dus et actions ».

Après avoir rappelé avoir exercé la profession de conducteur de taxi sous couvert d’une carte de taxi n° … lui délivrée par le ministère de la Mobilité et des transports et d’un contrat à durée indéterminée conclu avec la société (AA), il expose que lors de ses tournées et durant ses pauses, il aurait fréquenté régulièrement une auberge de jeunesse à … dans laquelle il aurait pris ses collations.

Sur cette toile de fond, il aurait eu en date 26 juillet 2024, en soirée, une altercation avec un veilleur de nuit de l’auberge de jeunesse pour un sujet futile, Monsieur (A) affirmant n’avoir toutefois à cette occasion proféré aucune insulte et avoir quitté les lieux aussitôt que le veilleur de nuit l’y aurait invité.

Si le gérant de cette auberge de nuit aurait dénoncé cet incident par courriel du 27 juillet 2024 à son employeur et à la Commission des taxis, les faits y dénoncés seraient toutefois exagérés et ne refléteraient pas la réalité, le requérant contestant plus précisément le fait lui imputé dans ce courriel qu’il aurait fréquenté régulièrement l’auberge sans y consommer.

Monsieur (A) expose ensuite être soumis à un risque grave et définitif résultant du fait que suite à la décision ministérielle ayant ordonné le retrait de la carte de conducteur de taxis, il ne pourrait plus exercer son activité professionnelle.

Il estime encore que les moyens soulevés dans le cadre de son recours au fond seraient de nature à entraîner une réformation de la décision du 28 octobre 2024, laquelle ne serait ni fondée ni justifiée.

Estimant que le ministre de la Mobilité et des Travaux publics aurait procédé au retrait définitif de sa carte de conducteur de taxis sur base d’une dénonciation du gérant de l’auberge de jeunesse qu’il aurait fréquenté et où il aurait eu une altercation verbale avec le veilleur de nuit de l’auberge de jeunesse, il affirme que les faits dénoncés seraient exagérés et ne reflèteraient pas la réalité.

Il conteste ainsi, en substance, avoir proféré une quelconque menace ou insulte, tout comme il conteste être un fauteur de trouble qui consommerait rarement les produits proposés par l’auberge, le requérant considérant qu’il s’agirait d’un mensonge éhonté alors qu’il se serait rendu régulièrement dans cette auberge pour y prendre des collations.

Il soutient dès lors qu’une simple altercation verbale sans la moindre insulte ou menace proférée ne serait pas de nature à discréditer indubitablement son honorabilité et ainsi compromettre le niveau de prestations, le sérieux du conducteur ou le standard élevé de sécurité pour les clients, le requérant soulignant encore n’avoir jamais reçu le moindre avertissement d’un client ou de son employeur dans le cadre de son travail de conducteur de taxi.

Le représentant de l’Etat, pour sa part, conclut au rejet du recours au motif qu’aucune des conditions légales ne serait remplie en cause.

Il expose ainsi, notamment, que suite à une réclamation formulée par l’exploitant de l’auberge de jeunesse située à …, le ministère de la Mobilité et des Travaux publics, département de la mobilité et des transports, aurait initié une analyse du dossier de Monsieur (A), laquelle aurait révélé plusieurs irrégularités administratives et factuelles, notamment, l’existence de nouvelles mentions figurant au bulletin n° 2 du casier judiciaire du requérant, notamment une condamnation à une peine privative de liberté de 24 mois dont 12 mois avec sursis partiel prononcée par jugement du 11 novembre 2021, des discordances entre le permis de conduire initialement déposé lors de la demande de carte de conducteur de taxi et les informations actuelles, ainsi que des incohérences relatives à l’adresse de résidence communiquée par le requérant.

Il convient en premier lieu de constater qu’il se pose encore directement la question de la recevabilité même de la requête telle que libellée, question soulevée conformément à l’article 30 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administrative, ci-après « la loi du 21 juin 1999 », et débattue contradictoirement lors de l’audience publique de ce jour.

En effet, force est de constater que cette requête tendant à l’obtention d’un sursis à exécution est adressée au tribunal siégeant en composition collégiale (« Plaise au tribunal »), auquel elle demande par ailleurs la réformation de la décision entreprise, et non au Président de ce même tribunal, alors que conformément à l’article 11, paragraphe (3), de la loi du 21 juin 1999 une demande de sursis à exécution est à présenter par requête distincte au président du tribunal qui a une compétence exclusive pour statuer sur lesdites demandes. Il s’ensuit qu’une demande de sursis adressée à la formation collégiale du tribunal administratif doit entraîner une décision d’incompétence de ce dernier1, sans qu’il n’existe de possibilité de renvoi devant le président du tribunal2.

La requête sous analyse ayant été adressée erronément dans son dispositif au tribunal administratif siégeant dans sa formation collégiale, ce dernier devrait se déclarer incompétent, tandis que le soussigné doit se considérer comme n’ayant pas été valablement saisi, ce qui entraine l’irrecevabilité de la requête3.

La demande de modification formulée oralement par le requérant à l’audience ne saurait être accueillie. En effet, le respect des exigences de forme et de contenu de la requête introductive d’instance s’apprécie au jour de l’introduction du recours, toute insuffisance d’un élément essentiel y relatif constituant un vice entachant la requête introductive d’instance, qui ne saurait être régularisé en cours d’instance4.

Il échet ensuite, à titre éminemment superfétatoire, de rappeler qu’en vertu de l’article 11, (2) de la loi du 21 juin 1999, le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux.

1 Trib. adm. 27 octobre 1999, n° 11595, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 590.

2 Trib. adm. 14 octobre 1999, n° 11574, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 589.

3 Cour adm. 16 mai 2024, n° 50168C 4 Trib. adm. 6 janvier 1999, n° 10357 et 10844, confirmé par Cour adm. 14 octobre 1999, 11126C ; trib. adm. 3 février 1999,10598 et 10833, Pas. adm. 2023, V° Procédure contentieuse, n° 377.

L’institution d’une mesure provisoire devant rester une procédure exceptionnelle, puisque qu’elle constitue une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère, de sorte que le juge statuant au provisoire est en droit d’attendre du rédacteur de la requête, avocat et partant professionnel de la postulation, un acte de procédure intelligible et cohérent, ne requérant pas une analyse poussée aux seules fins de comprendre la finalité et l’argumentation de la requête.

Force est à cet égard d’abord de constater que le requérant se borne à affirmer être exposé à un risque de préjudice, lequel serait tant grave que définitif, du fait qu’il ne pourrait plus exercer son activité professionnelle.

Or, la preuve de la gravité du préjudice implique en principe que le requérant donne concrètement des indications concernant la nature et l’ampleur du préjudice prévu, et qui démontrent le caractère difficilement réparable du préjudice5.

La seule allégation d’un préjudice, non autrement précisé et étayé, est insuffisante, l’exposé du préjudice grave et définitif ne pouvant se limiter à un exposé théorique, se cantonner à la seule évocation de précédents ou encore consister en des considérations générales. Dans un souci de garantir le caractère contradictoire des débats, le juge du provisoire ne peut de surcroît avoir égard qu’aux arguments contenus dans la requête et doit écarter les éléments développés par le conseil de la partie requérante, pour la première fois, à l’audience6.

Etant donné que la condition de l’existence d’un risque de préjudice grave et définitif, condition devant être cumulativement remplie avec celle de moyens sérieux pour prononcer une mesure provisoire, n’est pas respectée, le recours sous analyse est à rejeter pour ne pas être fondé.

Il convient par ailleurs et en tout état de cause de relever que tel que mis en exergue par la délégué du gouvernement, il résulte du dossier administratif, et plus particulièrement du procès-verbal relatif aux déclarations effectuées par l’ancien employeur du requérant devant la Commissions des taxis, que le requérant avait été licencié et était en congé avant la date de la décision contestée, de sorte à n’avoir plus exercé d’activité salariée, du moins auprès de cette société de taxis, depuis plus de deux mois et demi précédant la Commission des taxis, de sorte que le requérant, indépendamment de la décision critiquée, est actuellement dans l’impossibilité de poursuivre son activité professionnelle : le préjudice tel qu’indiqué, à défaut de toute autre précisions, ne saurait dès lors être considéré comme en lien direct avec l’arrêté ministériel déféré et ne saurait être pris en compte pour l’obtention de la mesure provisoire sollicitée.

Ce n’est qu’à titre éminemment superfétatoire et aux seules fins de permettre au requérant d’analyser la pertinence et l’opportunité de maintenir son recours devant les juges du fond et d’éviter une condamnation à une indemnité de procédure, que le soussigné procédera de manière très sommaire à l’examen du caractère sérieux des moyens avancés devant les juges du fond.

5 Trib. adm. prés. 9 février 2018, n° 40722 ; trib. adm. prés. 9 janvier 2019, n° 42178.

6 Trib. adm. prés. 18 mars 2019, n° 42408 ; trib. adm. prés. 6 mars 2019, n° 42437 ; trib. adm. prés. 29 mars 2019, n° 42551 ; trib. adm. prés. 5 avril 2019, n° 42600 ; trib. adm. prés. 5 juillet 2019, n° 43204 ; trib. adm. prés. 9 juillet 2019, n° 43163 ; trib. adm. prés. 2 décembre 2019, n° 43812.

A cet égard, un examen sommaire de la décision ministérielle permet de déceler que celle-ci a été prise à l’égard de Monsieur (A) « pour infraction et violation des articles 7, 8 et 16 susvisés de la loi du 5 juillet 2016 portant organisation des services de taxis ».

Une analyse sommaire de ces dispositions permet de retenir que la décision de retrait est, à première vue, motivée par le fait que Monsieur (A) ne satisferait plus aux exigences d’honorabilité requises, l’article 8, paragraphe 1er de la loi du 5 juillet 2016 portant organisation des services de taxis précisant que « L’honorabilité du conducteur de taxi s’apprécie sur base de ses antécédents judiciaires qui résultent de son casier judiciaire ».

En toute logique, une décision de retrait ne pourrait, légalement, pas se justifier par une altercation verbale entre le conducteur de taxis et un tiers ou, tel qu’allégué par le requérant, parce que le conducteur de taxis n’aurait pas consommé dans un établissement d’hébergement et de restauration mais y aurait consommé ses propres aliments, la loi exigeant, manifestement, que l’honorabilité du conducteur de taxi s’apprécie sur base de ses antécédents judiciaires qui résultent de son casier judiciaire.

Or, à cet égard, une analyse sommaire du dossier administratif tel que versé aux débats révèle l’inscription au casier judiciaire du requérant de deux condamnations pénales coulées définitives, à savoir d’une première condamnation par le tribunal correctionnel de et à Luxembourg en date du 20 juin 2019 à une peine de 24 mois de prison assortie d’un sursis partiel de 12 mois pour des faits de faux en écriture, usage de faux, tentative d’escroquerie et blanchiment, et une seconde condamnation, datant du 11 novembre 2021, tribunal correctionnel de et à Luxembourg, à une peine de 24 mois d’emprisonnement dont 12 mois avec sursis partiel, pour des faits de faux en écritures publiques, usage de faux, et pour avoir sciemment fait une déclaration fausse en vue d’obtenir une subvention, indemnité ou autre allocation à charge de l’Etat ainsi que pour avoir, suite à une déclaration fausse, reçu une subvention, indemnité ou autre allocation à laquelle il n’a pas droit, de sorte que l’honorabilité du requérant paraît pouvoir être sérieusement mise en doute.

Cette conclusion au provisoire n’est pas énervée par l’argument du requérant selon lequel sa première condamnation pénale était nécessairement connue des services du ministère au moment de la délivrance de sa carte de conducteur de taxis le … ; en effet, d’une part, si les faits ayant donné lieu à cette première condamnation datent certes du 8 septembre 2016, la condamnation date quant à elle du 20 juin 2019 et ne figurait pas sur le bulletin n° 2 du casier judiciaire, consulté, tel que résultant du dossier administratif, par les services du ministère le 19 décembre 2016. En tout état de cause, la seule condamnation pénale du 11 novembre 2021 paraît suffisante pour mettre en cause l’honorabilité du requérant, l’article 8, paragraphe 2 de la loi du 5 juillet 2016 portant organisation des services de taxis précisant que « Les exigences en matière d’honorabilité sont satisfaites, en particulier si le conducteur de taxi n’a pas fait l’objet d’une condamnation pénale coulée en force de chose jugée prononçant une peine d’emprisonnement d’au moins six mois pour vol, escroquerie, abus de confiance, atteinte volontaire à l’intégrité de la personne, agression sexuelle ou infraction à la législation sur les stupéfiants », de sorte qu’a contrario, une condamnation pénale coulée en force de chose jugée prononçant une peine d’emprisonnement comme en l’espèce de 24 mois pour avoir, moyennant une déclaration fausse, reçu une aide à laquelle il n’a avait pas droit, doit être considérée comme ébranlant sérieusement son honorabilité.

Les moyens du requérant, consistant à vouloir minimiser son comportement lors et suite à son altercation avec le veilleur de nuit de l’auberge de jeunesse d’…, et à vouloir oralement dénier toute pertinence aux inscriptions figurant à son casier judiciaire, manquent donc manifestement de pertinence et ne sauraient être considérés comme suffisamment sérieux pour justifier la mesure provisoire sollicitée.

Le requérant est partant à débouter de sa demande en institution d’une mesure provisoire, aucune des conditions afférentes n’étant manifestement remplie.

Par ces motifs, le soussigné, président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique, rejette la demande en obtention d’un sursis à exécution, condamne le requérant aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 3 février 2025 par Marc Sünnen, président du tribunal administratif, en présence du greffier en chef Xavier Drebenstedt.

s. Xavier Drebenstedt s. Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 3 février 2025 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Numéro d'arrêt : 52297R
Date de la décision : 03/02/2025

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2025
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2025-02-03;52297r ?

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