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19/05/2023 | LUXEMBOURG | N°44442

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 19 mai 2023, 44442


Tribunal administratif N° 44442 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:44442 4e chambre Inscrit le 18 mai 2020 Audience publique du 19 mai 2023 Recours formé par …, … contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de finances communales

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44442 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mai 2020 par la sociét

é anonyme Schiltz & Schiltz SA, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg et...

Tribunal administratif N° 44442 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:44442 4e chambre Inscrit le 18 mai 2020 Audience publique du 19 mai 2023 Recours formé par …, … contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes et une décision du ministre de l’Intérieur en matière de finances communales

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44442 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 mai 2020 par la société anonyme Schiltz & Schiltz SA, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg et ayant son siège social à L-1610 Luxembourg, 24-26 avenue de la Gare, immatriculée au registre de commerce et des sociétés sous le numéro B 220251, représentée aux fins des présentes par Maître Jean-Louis Schiltz, avocat à la Cour, assisté de Maître Charles Hurt, avocat à la Cour, tous deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de …, établie à … sise à L-…, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation (i) d’une décision N°… du 19 février 2020 du directeur de l'administration des Contributions directes prise sur base des articles 7, paragraphe (2) et 9 de la loi modifiée du 1er mars 1952 modifiant certaines dispositions relatives aux impôts directs et (ii) d’une décision du ministre de l'Intérieur et ses annexes du 6 mars 2020 intitulée « Finances communales - Décompte 2019 et plan de paiement 2020 » ;

Vu le mémoire en réponse de Maître Albert Rodesch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, représentant l’Etat du Grand-Duché du Luxembourg, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 15 octobre 2020 ;

Vu l’ordonnance rendue le 12 novembre 2020 par le président de la quatrième chambre du tribunal administratif, recevant en la forme et déclarant justifiée la requête tendant à la prorogation du délai pour le dépôt du mémoire en réplique introduite par Maître Jean-Louis Schiltz au nom de … et prorogeant le délai pour déposer le mémoire en réplique ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 16 décembre 2020 par la société anonyme Schiltz & Schiltz SA, préqualifiée, au nom de …, préqualifiée ;

Vu le mémoire en duplique de Maître Albert Rodesch, préqualifié, déposé au greffe du tribunal administratif en date du 15 janvier 2021 ;

Vu l’avis du tribunal administratif du 9 décembre 2020 autorisant les parties à déposer un mémoire supplémentaire ;

1Vu le mémoire supplémentaire déposé le 3 février 2021 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme Schiltz & Schiltz SA, préqualifiée, au nom de …, préqualifiée ;

Vu le mémoire supplémentaire déposé le 18 février 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Albert Rodesch, préqualifié, représentant l’Etat du Grand-Duché du Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision directoriale et l’acte ministériel critiqués ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Charles Hurt, en remplacement de Maître Jean-Louis Schiltz, et Maître Albert Rodesch en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 5 octobre 2021.

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Le directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après désigné par « le directeur », émit en date du 19 février 2020 la décision N°… concernant la participation directe au produit de l’impôt commercial communal perçu en 2019 par … et l’affectation au Fonds de dotation global des communes, ladite décision étant libellée comme suit :

« (…) Vu les articles 7(2) et 9 de la loi modifiée du 1er mars 1952 modifiant certaines dispositions relatives aux impôts directs ;

Vu les rentrées fiscales de l'impôt commercial communal du pays s'élevant en 2019 à 1.135.678.998,48 € ;

Vu les rentrées fiscales de l'impôt commercial communal s'élevant en 2019 à … € au profit de votre commune ;

Vu la population totale du pays en 2019 calculée par l'Institut national de la statistique et des études économiques du Grand-Duché de Luxembourg s'élevant à 613.894 habitants et la population de votre commune en 2019 calculée par l'Institut national de la statistique et des études économiques du Grand-Duché de Luxembourg s'élevant à … habitants ;

Considérant le montant de … € correspondant à 35% du produit en impôt commercial communal généré sur le territoire de votre commune en 2019 ;

Considérant le montant de … € correspondant à 35% de la moyenne nationale par habitant des recettes en impôt commercial communal multipliée avec la population de votre commune.

Par ces motifs, La participation directe de votre commune au produit en impôt commercial communal généré en 2019 sur le territoire de votre commune s'élève à … € ;

Le montant de 15.598.004,07 € est affecté au Fonds de dotation globale des communes.(…) ».

2 Par courrier du 6 mars 2020, le ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », transmit au bourgmestre de …, « le décompte de l’année 2019 relatif aux recettes provenant du Fonds de dotation globale des communes (FDGC), la participation directe au produit de l’Impôt commercial communal (ICC) et le montant de la contribution de … au Fonds de l’emploi (FdE) » avec annexes explicatives quant aux calculs, s’élevant à un montant de … euros, auquel une compensation de … euros fut rajoutée au motif que le décompte de l’année 2019 fut inférieur à celui de l’année 2015.

Par requête inscrite sous le numéro 44442 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 18 mai 2020, …, ci-après désignée par « l’administration communale », a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation (i) de la décision directoriale précitée N°… du 19 février 2020 ainsi que (ii) de l’acte précité du ministre du 6 mars 2020.

I. Quant à la recevabilité du recours 1) Recours principal en réformation et subsidiaire en annulation dirigé à l’encontre de la décision du directeur N°… du 19 février 2020 L’article 7, alinéa 2 de la loi modifiée du 1er mars 1952 modifiant certaines dispositions relatives aux impôts directs, ci-après désignée par « la loi du 1er mars 1952 », dispose ce qui suit : « La répartition de l’impôt commercial communal aux communes prévue à l’article 9 est déterminée par le directeur de l’Administration des contributions directes.

Contre cette décision, un recours est ouvert au tribunal administratif, qui statuera comme juge du fond. », de sorte que le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation dirigé à l’encontre de la décision déférée du directeur du 19 février 2020.

Il n’y a dès lors pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

A titre liminaire, la partie gouvernementale soulève un moyen d’irrecevabilité, en ce qu’elle estime que le libellé du recours serait obscur dès lors que l’administration communale aurait introduit un recours en réformation à l’encontre de la décision déférée sans la moindre précision quant à la teneur de la réformation. Elle explique que, dans le cadre d’un recours en réformation, à la différence d’un recours en annulation, le juge devrait vider le fond du litige, soit en confirmant la décision incriminée, soit en substituant sa propre décision à celle de l’administration. Elle estime que ce ne serait qu’en présence d’un vice de procédure que le juge de la réformation pourrait se limiter à annuler la décision. Elle est encore d’avis que si le tribunal était amené à annuler, dans le cadre de la réformation, la décision déférée, « l’intégralité de l’échafaudage fiscal complexe de l’ICC, voire du financement des communes et du FdE » serait ébranlée, sans que le tribunal ne puisse prendre une décision se substituant à celle de l’administration des Contributions directes. Une telle décision aurait, par ailleurs, « (…) des conséquences incommensurables pour les communes lésées alors qu'elle modifierait radicalement la répartition des recettes provenant de l'ICC entre les diverses communes, raison pour laquelle il eût été impérieux de préciser exactement l'objet du recours en réformation ».

Par ailleurs, elle donne à considérer que s’il serait vrai qu’un demandeur peut invoquer des moyens d’annulation à l’appui d’un recours en réformation, il appartiendrait au juge de substituer dans ce cas une nouvelle décision conforme à l’interprétation commandée de la loi.

3 La partie étatique met encore en exergue le fait que, selon elle, une décision d’annulation ne pourrait intervenir qu’après avoir mis en intervention toutes les communes « indirectement mais gravement lésées par pareille décision dans la mesure où leurs intérêts [seraient] totalement opposés à ceux de la [demanderesse] », dès lors que la décision déférée leur procurerait un avantage direct par l’application de la péréquation, de sorte qu’elles auraient un intérêt évident à la solution du litige, la partie étatique relevant encore que l’impôt commercial communal serait un impôt communal et le rôle de l’Etat devrait se limiter à celui d’encaisser. Dès lors, il conviendrait d’ordonner la mise en intervention de « toutes les commune intéressées, c’est-à-dire celles qui bénéficient d’un système de péréquation depuis la loi de 1952 ».

La partie étatique poursuit que les droits de la défense de l’Etat seraient atteints, puisqu’il ne serait pas en mesure de « distiller », à partir de la demande formulée par la commune, le contenu de la décision que celle-ci souhaiterait voir prendre en lieu et place de celle attaquée, l’Etat affirmant en tout cas ne pas être en mesure de prendre position par rapport à une décision à prendre par le tribunal en substitution de celle de l’administration, pareille décision n’ayant pas été suggérée dans le recours.

Ainsi, en l’absence d’indication de l’objet de la réformation, mis à part « l’annulation » des décisions litigieuses, la partie étatique fait valoir que le recours en réformation à l’encontre de la décision directoriale serait irrecevable, sinon nul.

Dans son mémoire en réplique, la demanderesse invoque un jugement du tribunal administratif du 31 janvier 2020, inscrit sous le numéro 41195 du rôle, rendu antérieurement entre les mêmes parties et ayant le même objet que le recours sous examen, à travers lequel, d’une part, la partie étatique aurait été débouté de son moyen d’irrecevabilité, respectivement de nullité pour libellé obscur, et, d’autre part, la demande de mise en intervention des communes intéressées formulée par la partie étatique aurait été rejetée.

Dans son mémoire en duplique, la partie gouvernementale reprend en substance ses contestations antérieures quant au moyen tiré du libellé obscur de la requête introductive d’instance.

Quant à sa demande de voir mettre en intervention toutes les communes ayant un intérêt au présent litige, l’Etat insiste sur la circonstance que le jugement à intervenir dans le présent litige, dans l’hypothèse où il donnerait gain de cause à la demanderesse, aurait nécessairement un impact sur les autres communes, dans la mesure où un tel jugement devrait conduire, d’une part, à l’attribution de fonds à la demanderesse au-delà de ceux lui octroyés selon le système de péréquation actuellement en place, et, d’autre part, à la réduction subséquente des fonds des autres communes lesquelles, pour certaines, seraient, dans ce cas, dans l’impossibilité de payer leurs dépenses courantes et n’auraient plus de réserves financières pour leurs projets d’infrastructures élémentaires.

Dans leurs mémoires supplémentaires respectives, les parties n’ont plus pris position par rapport aux moyens d’irrecevabilité du recours dirigé contre la décision directoriale litigieuse, respectivement de mise en intervention des communes bénéficiaires du système actuel de péréquation.

Si, dans une matière où un recours en réformation est prévu, le demandeur peut limiter 4son recours en demandant au juge administratif de ne pas épuiser son pouvoir de réformation, mais de restreindre son contrôle aux seules questions de légalité d’une décision litigieuse et de l’annuler, encore faut-il que cette demande soit présentée en bonne et due forme et que l’intérêt à agir du demandeur reste vérifié par rapport à cette demande1.

Le tribunal relève de prime abord que l’intérêt à agir de la commune n’est pas contesté en cause et qu’il est manifeste, dans la mesure où sa situation financière est directement affectée par la décision directoriale.

Le tribunal constate encore que la commune entend principalement voir annuler, dans le cadre du recours en réformation, la décision déférée, la commune s’étant d’ailleurs limitée dans la requête introductive d’instance à invoquer des moyens d’annulation, fondés sur la contrariété à la Constitution des dispositions légales sur lesquelles la décision du directeur repose sans formuler de demande en réformation.

Dans ces conditions, le tribunal est amené à retenir que la commune a valablement pu limiter, dans le cadre du recours en réformation prévu par la loi, son recours à l’annulation de la décision déférée, la demande en annulation étant directement liée aux questions de constitutionnalité soulevées dans le cadre du fond du recours.

Le moyen d’irrecevabilité pour cause de libellé obscur est partant à rejeter pour ne pas être fondé, étant donné, par ailleurs, que les droits de la défense de la partie gouvernementale ne se trouvent pas lésés en l’espèce, cette dernière ayant pu identifier les actes déférés et prendre position sur le fond quant aux différents moyens invoqués à son encontre.

Cette conclusion n’est pas énervée par l’allégation de la partie gouvernementale selon laquelle une éventuelle annulation de la décision déférée par le tribunal de céans pour non-

conformité à la Constitution serait de nature à modifier le paysage législatif mis en place dans le cadre de la répartition des recettes provenant de l’impôt commercial communal, ci-après défini par « ICC », entre les diverses communes et le système de péréquation élaboré sur ce fondement, dès lors qu’aucun vice de constitutionnalité ne saurait être de nature à être couvert ni par l’écoulement d’un certain laps de temps ni par des considérations de pure opportunité politique.

Le recours principal en réformation, en ce que la commune se limite à solliciter l’annulation de la décision du directeur du 19 février 2020 dans le cadre de ce recours en réformation, est dès lors recevable dans cette mesure, pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

Cette conclusion n’est pas non plus énervée par la requête formulée par la partie gouvernementale visant la mise en intervention de toutes les communes concernées par la péréquation, dès lors qu’il est manifeste que la décision déférée revêt un caractère intuitu personae à l’égard de l’administration communale et que dans le cas d’une éventuelle annulation par le tribunal de céans, elle serait renvoyée à son auteur compétent. En tout état de cause, l’affirmation de la partie gouvernementale suivant laquelle d’autres communes auraient des intérêts totalement opposés à ceux de la demanderesse n’est pas non plus de nature à justifier la mise en intervention desdites communes, dans la mesure où si le tribunal devait, le cas échéant, annuler la décision déférée, suite à un arrêt à intervenir de la Cour 1 Trib. adm. 5 octobre 2017, n°40203 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en réformation, n° 3 et les autres référénces y citées.

5constitutionnelle ayant retenu la non-conformité à la Constitution des dispositions légales mises en cause par la demanderesse, il appartiendrait, tout d’abord, au pouvoir législatif d’amender le cadre légal relatif au système de péréquation litigieux, afin que le directeur puisse prendre, pour l’année d’imposition concernée, une nouvelle décision laquelle pourrait, en conséquence, faire l’objet d’un recours contentieux de la part des communes se sentant lésées par ce nouveau système de répartition de fonds.

2) Recours principal en réformation et subsidiaire en annulation dirigé à l’encontre de la décision du ministre du 6 mars 2020 intitulée « Finances communales -

Décompte 2019 et plan de paiement 2020 ».

Conformément à l’article 2 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », le tribunal statue sur les recours dirigés pour incompétence, excès de pouvoir, violation de la loi ou les formes destinées à protéger les intérêts privés, contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible d’après les lois et règlements.

Etant donné qu’aucun autre recours n’est admissible d’après les lois et règlements en la présente matière que celui prévu par l’article 2 de la loi du 7 novembre 1996, le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation dirigé à l’encontre de l’acte du ministre du 6 mars 2020 et que seul un recours en annulation a pu être introduit en l’espèce.

A titre liminaire, la partie gouvernementale a soulevé un moyen d’irrecevabilité du recours pour autant qu’il est dirigé contre le courrier précité du ministre du 6 mars 2020, au motif que celui-ci ne contiendrait aucune décision susceptible d’un recours, s’agissant d’une lettre à laquelle serait jointe une note explicative ayant un contenu informationnel se fondant sur la décision précitée du directeur du 19 février 2020.

L’administration communale fait valoir, dans son mémoire en réplique, que le moyen d’irrecevabilité de la partie étatique aurait déjà été rejeté par le tribunal administratif dans son jugement, précité, du 31 janvier 2020, lequel aurait retenu que la décision ministérielle litigieuse constituerait un acte individuel de nature à faire grief en ce qu’il appartiendrait au ministre de répartir les fonds issus du Fonds de dotation globale des communes, ci-après désigné par « le FDGC », suivant les critères retenus à l’article 3 de la loi du 14 décembre 2016 portant création d’un Fonds de dotation globale des communes, ci-après désignée par « la loi du 14 décembre 2016 ».

La partie étatique, dans son mémoire en duplique, réitère son moyen d’irrecevabilité en insistant sur le fait que le ministre n’aurait fait que respecter la loi au vu des données lui fournies par l’administration des Contributions directes, de sorte que le courrier ministériel ne constituerait qu’une information et que le recours dirigé à son encontre devrait être déclaré irrecevable.

L'article 2 de la loi du 7 novembre 1996 limite l'ouverture d'un recours devant les juridictions administratives notamment aux conditions cumulatives suivant lesquelles l'acte litigieux doit constituer une décision administrative, c'est-à-dire émaner d'une autorité administrative légalement habilitée à prendre des décisions unilatérales obligatoires pour les administrés et qu'il doit s'agir d'une véritable décision, affectant les droits et intérêts de la 6personne qui la conteste2.

Pour qu’un recours contentieux dirigé contre un acte individuel soit recevable, il est exigé que cet acte comprenne un élément décisionnel et que celui-ci soit de nature à faire grief au recourant3.

L’article 5, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016 dispose comme suit :

« Après la fin de l’année, le ministre ayant l’Intérieur dans ses attributions détermine, sur base des dispositions des articles 2 et 3, les participations définitives ainsi que leur répartition entre les communes et verse aux communes les sommes ainsi fixées, déduction faite des sommes avancées en vertu du paragraphe 1er du présent article. » Il ressort de la disposition susvisée que la détermination des participations définitives au FDGC ainsi que leur répartition entre les communes relève de la compétence du ministre.

Etant donné que le ministre pose un acte individuel à caractère décisionnel consistant en la répartition entre les communes des avances, certes préalablement déterminées par le ministre ayant les Finances dans ses attributions, selon les dispositions des articles 2 et 3 de la loi du 14 décembre 2016, le courrier déféré du ministre constitue bien un acte individuel de nature à faire grief à l’administration communale dès lors qu’il contient un élément décisionnel tenant aux participations définitives et leur répartition entre les communes, de même qu’il détermine le montant de la contribution de l’administration communale au Fonds pour l’Emploi, lesdits éléments décisionnels ne pouvant manifestement pas se qualifier de simple information4.

Partant, le moyen d’irrecevabilité est à rejeter pour ne pas être fondé.

Aucun autre moyen d’irrecevabilité n’ayant été soulevé, le recours subsidiaire en annulation est recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

II.Quant au fond Discussion A titre liminaire, le tribunal relève que les décisions déférées sont liées dès lors que la décision du ministre repose sur celle du directeur quant à la détermination du montant annuel revenant à chaque commune dans le cadre du FDGC, de sorte que pour les besoins de la discussion juridique, lesdites décisions seront examinées conjointement par le tribunal.

En premier lieu, la demanderesse observe que la décision directoriale est principalement fondée sur l’article 9 de la loi du 1er mars 1952. Elle estime qu’étant donné que ledit article tel que modifié par la loi du 14 décembre 2016 prévoirait « une simple participation » d’une commune à l’ICC généré sur son territoire qui constituerait pourtant une ressource propre, ledit article violerait le prescrit tant de l’article 9.1. de la Charte européenne de l’autonomie locale du 15 octobre 1985, approuvée par la loi du 18 mars 1987, ci-après 2 Trib. adm. 6 octobre 2004, n° 16533 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Actes administratifs n° 5 et les autres références y citées.

3 Cour adm. 28 septembre 2017, n° 39389C du rôle, Pas adm. 2022, V° Actes administratifs n° 8.

4 Ce qui était le cas sous l’empire du règlement grand-ducal modifié du 20 avril 1962 réglant en matière d’impôt commercial, les ventilations et la participation des communes de résidence des salariés, voir en ce sens trib. adm.

15 janvier 2019 n° 39509 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu s’agissant d’un en l’espèce d’un autre texte légal.

7désignée par « la Charte », que de celui de l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution, de sorte à encourir l’annulation. Elle fait valoir que la décision ministérielle se basant sur la décision directoriale devrait subir le même sort. Dans ce contexte, elle demande au tribunal de surseoir à statuer en attendant la réponse de la Cour constitutionnelle à la question préjudicielle suivante, lui soumise par le jugement, précité, du tribunal administratif du 31 janvier 2020 :

« L'article 9 de la loi du 1er mars 1952 en ce qu'il prévoit une simple « participation » des communes à l'ICC qui est une ressource propre des communes, est-il conforme à l'article 9.1. de la Charte et partant à l'article 107 (1) de la Constitution? » En deuxième lieu, la demanderesse soutient que même à admettre qu'une commune puisse simplement « participer » à une ressource qui lui serait pourtant propre, il faudrait néanmoins constater que le mécanisme de participation à l'ICC prévu par l'article 9 de la loi du 1er mars 1952 serait lui-même contraire tant à l'article 9.1. qu'aux articles 3.1. et 9.2. de la Charte. En effet, elle est d’avis qu’en limitant la participation directe des communes à un maximum de 35% et en privant celles-ci ainsi au minimum de 65 %, du produit de l’ICC, à savoir la principale ressource générée sur leur territoire, l'article 9 de la loi du 1er mars 1952 porterait atteinte à l'autonomie financière des communes, telle que consacrée par la Charte et par l'article 107, paragraphe (1) de la Constitution. En l’espèce, et abstraction faite des redressements opérés, la commune affirme avoir généré en 2019 un produit au titre de l’impôt commercial communal de … euros, dont une proportion de seulement 10 % lui reviendrait.

Elle conclut que la décision directoriale serait à annuler pour être fondée sur une disposition légale contraire à la Constitution et qu’il devrait en être de même pour la décision ministérielle dans la mesure où elle serait fondée sur la décision directoriale. Elle cite, à cet égard, l’article 3.1. de la Charte définissant l’autonomie communale et se réfère à l’interprétation donnée dans le rapport explicatif de l’article 9.1. de la Charte, pour conclure que ces dispositions impliqueraient une autonomie financière des communes protégée par l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution, tout en renvoyant à un arrêt de la Cour constitutionnelle du 8 décembre 2017, inscrit sous le numéro 00131 du registre.

Dans ce contexte, elle demande au tribunal de surseoir à statuer en attendant la réponse de la Cour constitutionnelle à la question préjudicielle suivante, lui soumise par le jugement, précité, du tribunal administratif du 31 janvier 2020 : « L'article 9 de la loi du 1er mars 1952 en ce qu'il limite la participation directe d'une commune à l'ICC généré sur son territoire à un maximum de 35 pour cent emportant par-là même un dessaisissement d'un minimum de 65 pour cent des recettes en ICC générées sur son territoire, est-il conforme à l'article 107 (1) de la Constitution lu à la lumière des articles 3.1., 9.1. et 9.2. de la Charte ?».

En troisième lieu, la demanderesse, tout en se référant toujours à l’arrêt, précité, de la Cour constitutionnelle du 8 décembre 2017, développe son argument et s’interroge sur la question de savoir si une ressource propre des communes pourrait être affectée à un fonds étatique tel le FDGC. Dans ce contexte, elle demande au tribunal de surseoir à statuer en attendant la réponse de la Cour constitutionnelle à la question préjudicielle suivante, lui soumise par le jugement, précité, du tribunal administratif du 31 janvier 2020 :

« L'article 9 de la loi du 1er mars 1952 en ce qu'il porte affectation à un fonds budgétaire étatique d'une ressource propre d'une commune, tel l'ICC et dont la commune doit pouvoir librement disposer dans l'exercice de ses compétences d'après les dispositions de 8l'article 9.1. de la Charte, est-il conforme à l'article 107 (1) de la Constitution lu à la lumière de l'article 9.1. de la Charte ? ».

En quatrième lieu, elle fait plaider que même à admettre qu'une partie de l'ICC généré sur le territoire communal puisse être affectée au FDGC, il n’en demeurerait pas moins que l'article 9 de la loi du 1er mars 1952, en prévoyant une affectation d'au moins 65 % de l'ICC au FDGC, entraînerait une dénaturation de l'ICC qui serait une ressource propre d'une commune.

En s’appuyant sur la définition du paragraphe 1er de la loi modifiée du 1er décembre 1936 concernant l’impôt commercial, dite « Gewerbesteuergesetz », et des critères distinctifs de l’impôt dégagés par la jurisprudence, elle estime que l’ICC ainsi diminué ne pourrait plus servir les objectifs fixés par la définition d’un impôt. Elle en conclut que l’article 9 de la loi du 1er mars 1952 violerait l’article 9.1. de la Charte et l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution. Dans ce contexte, elle demande également au tribunal de surseoir à statuer en attendant la réponse de la Cour constitutionnelle à la question préjudicielle suivante, lui soumise par le jugement, précité, du tribunal administratif du 31 janvier 2020 :

« L'article 9 de la loi du 1er mars 1952 en ce qu'il prive les communes au profit du FDGC de 65 pour cent au moins de l'ICC généré sur leur territoire, est-il conforme à l'article 107 (1) de la Constitution lu à la lumière de l'article 9.1. de la Charte ? ».

En cinquième lieu, elle étoffe son argumentation sur le caractère dénaturé de l’ICC à la lumière des dispositions de la loi du 14 décembre 2016 en s’appuyant sur l’avis du Conseil d’Etat du 15 novembre 2016 relatif au projet de loi portant création du FDGC5, précité, et en insistant sur le fait que suite à l’introduction de la loi du 14 décembre 2016, l’ICC aurait perdu sa nature d’impôt communal et serait devenu une ressource distribuée par le FDGC au même titre que d’autres impôts selon des critères incitatifs dont notamment celui du nombre de logements sociaux, de sorte à ne plus constituer une ressource dont les communes pourraient librement disposer, mais qui serait la contrepartie du respect d’une politique prédéterminée par l’Etat. En se référant à l’article 9.7. de la Charte, elle critique que ce serait la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence qui serait remise en cause par les dispositions légales critiquées, de sorte que l’article 3, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016 serait contraire aux articles 9.5. et 9.7. de la Charte. Dans ce contexte, elle demande encore au tribunal de surseoir à statuer en attendant la réponse de la Cour constitutionnelle à la question préjudicielle suivante, lui soumise par le jugement, précité, du tribunal administratif du 31 janvier 2020 : « La loi du 14 décembre 2016 et en particulier l'article 3 paragraphe (2) de cette loi en ce qu'il prévoit comme critère de répartition des fonds du FDGC - dont à titre principal l'ICC - des critères incitatifs dont le nombre de logements sociaux, est-il conforme à l'article 107 (1) de la Constitution lu à lumière des articles 9.1., 9.5. et 9.7. de la Charte ? ».

Enfin, la commune fait valoir qu’aux termes de la décision du ministre du 6 mars 2020, le montant de … euros lui attribué comme participation au FDGC, diminué de la participation directe à l'ICC telle qu'arrêtée par la décision litigieuse, serait ensuite amputé de sa participation au Fonds pour l'Emploi, laquelle serait déterminée en fonction des règles établies à l'article 8 de la loi du 30 juin 1976 telle que modifiée par la loi du 14 décembre 2016. En l’espèce, cette contribution s'élèverait à un total de … euros, montant qui serait prélevé sur les recettes au titre de l’ICC.

5 Doc. Parl. N° 70362, Chambre des Députés, Session ordinaire 2015-2016 9Or, l'affectation d'une partie de l'ICC, impôt propre revenant de plein droit au secteur communal, à une entité étatique telle le Fonds pour l'emploi violerait l'article 9.1. de la Charte et par-là également l'article 107, paragraphe (1) de la Constitution, de sorte que sa contribution au Fonds pour l'emploi à hauteur de … euros encourrait l'annulation dans la mesure où elle serait fondée sur une disposition légale contraire à l'article 107, paragraphe (1) de la Constitution. Dans ce contexte, elle demande également au tribunal de surseoir à statuer en attendant la réponse de la Cour constitutionnelle à la question préjudicielle suivante, lui soumise par le jugement, précité, du tribunal administratif du 31 janvier 2020 : « L'article 8 de la loi du 30 juin 1976 en ce qu'il porte affectation à une entité étatique d'une ressource propre d'une commune, tel l'ICC, dont elle doit pouvoir librement disposer dans l'exercice de ses compétences d'après les dispositions de l'article 9.1. de la Charte, est-il conforme à l'article 107 (1) de la Constitution lu à la lumière de l'article 9.1. de la Charte ? ».

Dans sa réponse, la partie étatique conclut au rejet du moyen fondé sur la contrariété à la Constitution, lue à la lumière de la Charte, des dispositions légales à la base des décisions déférées, pris en ses différentes branches, tout en prenant position par rapport aux critiques de la demanderesse quant à la constitutionalité des dispositions légales incriminées et par rapport aux différentes questions préjudicielles suggérées.

A titre liminaire, le tribunal relève qu’encore que les deux décisions sont soumises à des recours de nature différente, à savoir l’une à un recours en réformation et l’autre à un recours en annulation et qu’en principe, le pouvoir de contrôle du tribunal est différent pour ces deux types de recours, et dans la mesure où (i) lesdites décisions sont liées dès lors que la décision du ministre repose sur celle du directeur quant à la détermination du montant annuel revenant à chaque commune dans le cadre du FDGC et (ii) les critiques principales de la demanderesse s’adressent aux bases légales des décisions critiquées, qui, d’après elle, seraient contraires à la Constitution lue à la lumière de la Charte, la demanderesse invoquant ainsi exclusivement des moyens de légalité dans le cadre du recours en réformation, de sorte que dans le cadre de ce volet du recours, le contrôle du tribunal s’effectue en tant que contrôle de la légalité - à l’instar du recours en annulation dirigé contre la décision du ministre - sur base de la situation de fait et de droit telle qu’elle a existé au jour où le directeur a statué eu égard également au principe de l’annualité de l’impôt, le tribunal est, pour les besoins de la discussion juridique lui soumise par la demanderesse, amené (i) à examiner lesdites décisions conjointement et (ii) sur base de la situation de fait et de droit telle qu’elle a existé au jour où le directeur, respectivement le ministre, ont statué.

Force est au tribunal de constater que le litige soumis à son examen concerne les modalités du nouveau régime de financement des communes, tel que mis en place par la loi du 14 décembre 2016 adoptée dans le cadre de la réforme des finances communales, et qui remplace le FCDF par le FDGC. Aux termes des dispositions idoines de la loi du 14 décembre 2016, à côté de tous les actifs qui étaient anciennement recueillis par le FCDF, le FDGC, qui est un fonds budgétaire étatique, collecte en sus les recettes de l’ICC destinées à être réparties entre toutes les communes, selon des critères en partie incitatifs - tel notamment, le nombre de logements sociaux – conformément à l’article 3, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 20166.

6 L’article 3 paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016 dispose, dans sa version applicable au courant de l’année d’imposition concernée, comme suit :

Le Fonds de dotation globale des communes est réparti suivant les règles suivantes:

1. Une dotation forfaitaire graduelle en fonction de la population est allouée aux communes à raison de 0 euros pour les communes comptant moins de 1 000 habitants et à raison de 300 000 euros pour les communes 10 Il y a lieu de relever que la décision du directeur est fondée sur l’article 7, alinéa 2 de la loi du 1er mars 19527 tel que reproduit dans son intégralité plus en avant et sur l’article 9 de la loi du 1er mars 1952 qui dispose comme suit : « La participation directe d’une commune au produit en impôt commercial communal généré sur son territoire équivaut au montant le plus bas entre 35 pour cent de ce produit et 35 pour cent de la moyenne nationale par habitant des recettes en impôt commercial communal multiplié avec la population de la commune. Le montant restant est affecté au Fonds de dotation globale des communes. ».

Les dispositions précitées définissent les modalités de la participation directe des communes au produit de l’ICC généré sur leur territoire.

Force est encore de relever qu’à côté de cette participation directe suivant les critères de l’article 9 de la loi du 1er mars 1952, le montant non affecté directement est transmis au FDGC pour être ensuite réparti entre toutes les communes du pays suivant les dispositions de l’article 3, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016, cité ci-avant.

C’est dans ce contexte qu’est à situer la décision du ministre, qui, quant à elle, est fondée sur l’article 5, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016, qui donne compétence au comptant au moins 3 000 habitants. Pour les communes dont la population se situe entre 1 000 et 2 999 habitants, la dotation augmente graduellement de 150 euros par habitant supplémentaire à partir d’une population de 1 000 habitants.

2. Le solde est réparti à raison de:

a) 82 pour cent entre les communes d’après la population ajustée, l’ajustement étant défini en fonction de critères d’aménagement du territoire et de densité et effectué avec la somme des pourcentages définis comme suit :

i) Quant aux critères d’aménagement du territoire, la population de la Ville de Luxembourg est augmentée à raison de 45 pour cent, celle de la Ville d’Esch-sur-Alzette à raison de 25 pour cent et celles des villes de Differdange, de Dudelange, d’Echternach, de Grevenmacher, de Remich, de Vianden et de Wiltz, de même que celle des communes de Clervaux, de Junglinster, de Mersch, de Redange-sur-Attert et de Steinfort à raison de 5 pour cent.

ii) Quant à la densité, l’ajustement de la population se situe dans un intervalle de -5 pour cent à 5 pour cent en appliquant une progression linéaire sur l’intervalle de densité allant de 0 à 2 000 habitants par km2.

Pour les communes où la densité dépasse les 2 000 habitants par km2 l’ajustement est effectué avec 5 pour cent.

Aux termes de la présente loi, on entend par « densité », le ratio entre la population et la superficie totale de la commune en km2.

b) 3 pour cent entre les communes d’après le nombre d’emplois salariés.

c) 9 pour cent entre les communes d’après l’indice socio-économique, cet indice servant de pondération à la population de la commune, le montant distribué étant éventuellement augmenté selon les modalités prévues sous d).

d) Un maximum de 1 pour cent entre les communes d’après leur nombre de logements sociaux à raison de 1 500 euros par logement, le reste éventuel étant ajouté au montant prévu sous c). En cas de dépassement du maximum, le montant par logement est réduit à 1 pour cent au prorata du dépassement. La déclaration annuelle du nombre des logements sociaux est présentée au ministre de l’Intérieur pour le 31 décembre au plus tard de l’année en question sous la forme d’un relevé certifié exact par le collège des bourgmestre et échevins. À défaut, les logements sociaux de la commune ne sont pas pris en compte pour la répartition de la part du Fonds de dotation globale des communes au titre du point d). Une part trop perçue sur déclaration erronée ou fausse est à rembourser.

e) 5 pour cent entre les communes d’après la superficie totale ajustée des communes, l’ajustement de la superficie totale de la commune étant situé dans l’intervalle allant de -25 pour cent à 75 pour cent en appliquant une progression linéaire sur l’intervalle du ratio des zones urbanisées allant de 0 habitant par km2 à 6 000 habitants par km2. Pour les communes où ce ratio dépasse les 6 000 habitants par km2, l’ajustement s’effectue avec 75 pour cent.

7 La décision du directeur faisant référence par erreur à l’article 7, paragraphe (2) de la loi du 1er mars 1952 et non à son alinéa 2.

11ministre pour déterminer les participations définitives des communes sur base des articles 2 et 3 de la même loi, de même que pour leur répartition entre les communes.

De l’entendement du tribunal, les parties à l’instance sont d’accord pour retenir que les décisions critiquées résultent d’une application des dispositions légales précitées, application qui n’est sous l’aspect de son premier moyen pas critiquée en tant que telle par la demanderesse, celle-ci estimant toutefois que les bases légales des décisions attaquées, à savoir l’article 9 de la loi du 1er mars 1952, de même que l’article 3, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016, ensemble l’article 8 de la loi du 30 juin 1976, seraient contraires à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière de la Charte, de sorte que les décisions critiquées devraient encourir l’annulation de ce fait.

Les parties sont en désaccord sur la question de savoir si le libellé de l’article 9 précité est conforme ou non à l’article 107 de la Constitution qui dispose que « (1) Les communes forment des collectivités autonomes, à base territoriale, possédant la personnalité juridique et gérant par leurs organes leur patrimoine et leurs intérêts propres. (…) », cet article devant être lu à la lumière du prescrit de l’article 9 de la Charte rédigé comme suit :

« 1. Les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l’exercice de leurs compétences.

2. Les ressources financières des collectivités locales doivent être proportionnées aux compétences prévues par la Constitution ou la loi.

3. Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d’impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi.

4. Les systèmes financiers sur lesquels reposent les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible dans la pratique, l’évolution réelle des coûts de l’exercice de leurs compétences.

5. La protection des collectivités locales financièrement plus faibles appelle la mise en place de procédures de péréquation financière ou des mesures équivalentes destinées à corriger les effets de la répartition inégale des sources potentielles de financement ainsi que des charges qui leur incombent. De telles procédures ou mesures ne doivent pas réduire la liberté d’option des collectivités locales dans leur propre domaine de responsabilité.

6. Les collectivités locales doivent être consultées, d’une manière appropriée, sur les modalités de l’attribution à celles-ci des ressources redistribuées.

7. Dans la mesure du possible, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent pas être destinées au financement de projets spécifiques. L’octroi de subventions ne doit pas porter atteinte à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence.

8. Afin de financer leurs dépenses d’investissement, les collectivités locales doivent avoir accès, conformément à la loi, au marché national des capitaux. ».

La demanderesse s’interroge encore sur la question de savoir si ledit article 9 de la loi du 1er mars 1952 est conforme au prescrit de l’article 3.1 de la Charte qui dispose comme suit : « Par autonomie communale, on entend le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques ».

12Enfin, par rapport plus spécifiquement à la légalité de la décision du ministre, la demanderesse s’interroge sur la conformité à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution lu à la lumière de l’article 9.1. de la Charte, de l’article 8 de la loi du 30 juin 1976, tel que modifié par la loi du 14 décembre 2016, qui dispose comme suit : « 1. La contribution totale des communes au Fonds de l’emploi est fixée à 2 pour cent du montant total des communes en impôt commercial.

2. La participation de chaque commune au Fonds de l’emploi se compose de deux contributions:

a) Une première contribution se fait par les communes dont la moyenne des recettes combinées par population ajustée dépasse de 10 pour cent au moins la moyenne nationale par population ajustée, la population ajustée étant définie à l’article 3, paragraphe 2, point 2, lettre a) de la loi portant création d’un Fonds de dotation globale des communes. La contribution correspond au montant de ce dépassement jusqu’à concurrence du montant défini à l’article 8, paragraphe 1er. Si la somme de tous les dépassements excède le montant précité, la contribution de chaque commune est réduite proportionnellement afin que les communes en question contribuent le montant défini à l’article 8, paragraphe 1er.

b) Si la somme des premières contributions des communes est insuffisante pour couvrir le montant défini à l’article 8, paragraphe 1er, une deuxième contribution s’effectue afin de combler la différence comme suit:Cette deuxième contribution incombe à l’ensemble des communes. Le pourcentage de participation de chaque commune à la deuxième contribution correspond à la part de ses recettes combinées dans les recettes combinées du pays.

Aux termes du présent paragraphe, on entend par «recettes combinées» la somme des recettes provenant du Fonds de dotation globale des communes et des recettes de la participation directe d’une commune au produit en impôt commercial communal.

3. Une contribution supplémentaire d’un maximum de 12 millions d’euros pour l’ensemble des communes est versée au Fonds de l’emploi exclusivement par des communes déterminées qui perçoivent des montants d’impôt commercial dépassant proportionnellement de façon substantielle la moyenne du pays. La participation de chaque commune au Fonds de l’emploi est déduite des recettes du Fonds de dotation globale des communes et versée directement au Fonds de l’emploi. Un règlement grand-ducal fixe les modalités de calcul de la contribution supplémentaire.».

C’est dans ce contexte que la demanderesse sollicite du tribunal de sursoir à statuer et d’attendre l’arrêt de la Cour constitutionnelle par rapport aux six questions préjudicielles, dont le libellé a été repris ci-avant, soumises à cette dernière à travers le jugement, précité, du tribunal administratif du 31 janvier 2020.

Pour justifier la saisine de la Cour constitutionnelle, le tribunal administratif avait relevé dans le jugement précité que le régime introduit par la loi du 14 décembre 2016 relatif au FDGC repose sur le principe de participation des communes à leurs recettes en ICC dont les modalités sont décrites à l’article 9 de la loi du 1er mars 1952 pour être ensuite réparties selon les modalités prévues à l’article 3, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016 et constaté que (i) la question de la compatibilité de ce régime à l’article 107 de la Constitution, lu à la lumière de la Charte, resterait ouverte, l’article 9, précité, constituant, notamment, la base légale sur laquelle les décisions déférées dans cette affaire, - tout comme celles visées 13par le présent recours -, ont été directement et indirectement adoptées, (ii) l’examen de cette question lui serait indispensable pour lui permettre d’exercer ses missions de juge de l’annulation dans le cadre du recours en réformation introduit contre la décision du directeur ayant déterminé la participation des deux communes concernées au FDGC, respectivement dans le cadre du recours en annulation dirigé à l’encontre de la décision du ministre concernant le décompte afférent, la participation directe au produit de l’ICC et le montant de la contribution au Fond pour l’Emploi, (iii) en soulevant cette problématique, la demanderesse, dans cette affaire, s’était interrogée à cinq reprises sur la compatibilité du régime mis en place par la loi du 14 décembre 2016 avec l’article 107 de la Constitution, lu à la lumière des dispositions idoines de la Charte, et a encore mis en cause, dans son recours contre la décision ministérielle y litigieuse et en dehors du cadre de l’article 9 de la loi du 1er mars 1952 en tant que base légale des décisions déférées, la compatibilité de l’article 8 de la loi du 30 juin 1976 avec l’article 107 de la Constitution, lu à la lumière des dispositions concernées de la Charte, (iv) la Cour constitutionnelle n’avait pas encore pu statuer sur des questions ayant le même objet, et avait de la sorte jugé les questions posées comme n’étant, a priori, pas dénuées de tout fondement et comme étant un préalable pour lui permettre de toiser la question de la légalité des décisions basées sur lesdites dispositions légales.

Dans deux arrêts du 13 novembre 2020, inscrits sous le numéro 00156 et 00157 du registre, et rendus à la suite des jugements précités du 31 janvier 2020, la Cour constitutionnelle a retenu ce qui suit :

« dit que par rapport à la première question, l’article 9 de la loi modifiée du 1er mars 1952 modifiant certaines dispositions relatives aux impôts directs, est conforme à l’article 107, paragraphe 1, de la Constitution, lu à la lumière de l’article 9.1. de la Charte européenne de l’autonomie locale du 15 octobre 1985, approuvée par la loi du 18 mars 1987;

dit que la deuxième question, telle que formulée, est irrecevable ;

dit que par rapport à la troisième question, l’article 9 de ladite loi du 1er mars 1952 est conforme à l’article 107, paragraphe 1, de la Constitution, lu à la lumière des articles 9.1.

et 9.5. de la Charte européenne de l’autonomie locale ;

dit que par rapport à la quatrième question, l’article 9 de ladite loi du 1er mars 1952 est conforme à l’article 107, paragraphe 1, de la Constitution, lu à la lumière des articles 9.1.

et 9.5. de la Charte européenne de l’autonomie locale ;

dit que par rapport à la cinquième question, l’article 3, paragraphe 2, de la loi du 14 décembre 2016 portant création d’un fonds de dotation globale des communes est conforme à l’article 107, paragraphe 1, de la Constitution, lu à la lumière des articles 9.1., 9.5. et 9.7. de la Charte européenne de l’autonomie locale ;

dit que par rapport à la sixième question, l’article 8 de la loi modifiée du 30 juin 1976 portant dotation d’un fonds de chômage est conforme à l’article 107, paragraphe 1, de la Constitution, lu à la lumière des articles 9.1. et 9.5. de la Charte européenne de l’autonomie locale ; ».

En substance, la Cour Constitutionnelle a motivé ces conclusions par la considération que le principe de l’autonomie communale n’a pas un caractère absolu en ce qu’il est appelé à fonctionner dans un cadre plus large, à savoir au niveau national, de sorte que l’impôt perçu 14par les entités étatiques dans l’intérêt d’une commune en tant que ressource propre peut ne pas revenir intégralement à cette commune, à condition que celle-ci continue à disposer de ressources propres suffisantes. Elle a encore relevé que le principe de l’autonomie communale se dédouble du principe de solidarité entre communes afin de permettre à des communes financièrement plus faibles de fonctionner de manière autonome dans le cadre des compétences leur déférées par la Constitution et les lois et que cette solidarité ne peut pas fonctionner sans l’apport des collectivités locales financièrement plus fortes, dont le produit de l’ICC généré sur leur territoire est proportionnellement parmi les plus élevés compte tenu de la moyenne nationale, constat qui a amené la Cour constitutionnelle à retenir que c’est justement la protection des collectivités locales plus faibles qui appelle la mise en place de procédures de péréquation financière ou de mesures équivalentes destinées à corriger la répartition inégale des sources potentielles de financement entre communes, dont l’ICC, compte tenu des charges leur incombant, l’article 9.5. de la Charte consacrant justement le système de la péréquation financière auquel participe la mise en place du FDGC. La Cour constitutionnelle a encore souligné que les communes financièrement plus fortes, devant abandonner une partie consistante du produit de l’ICC généré sur leur territoire, doivent toutefois garder la liberté d’option leur revenant en raison du principe de l’autonomie communale dans le cadre de leur propre domaine de responsabilité au sens dudit article 9.5..

Sur base de ces considérations, elle a jugé comme conforme à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière de l’article 9.1. et 9.5. de la Charte, l’article 9 de la loi du 1er mars 1952, et a dès lors rejeté les première et troisième questions préjudicielles lui soumises.

Elle a encore déclaré irrecevable la deuxième question préjudicielle lui soumise, en soulignant que si certes l’article 9 de la loi du 1er mars 1952 limite la participation directe d’une commune au produit de l’ICC généré sur son territoire au plus bas des montants entre 35 pour cent du produit des recettes et 35 pour cent de la moyenne nationale par habitant des recettes en ICC multipliées avec la population de la commune, il ne fallait pas perdre de vue que le montant non affecté directement est transmis au FDGC pour être réparti entre toutes les communes, plus particulièrement suivant les dispositions de l’article 3 de la loi du 14 décembre 2016, de sorte que c’est ce total généré par la participation directe et le montant réparti à partir du FDGC qui dégage le pourcentage revenant finalement à une commune par rapport au produit de l’ICC généré sur son territoire, la Cour constitutionnelle ayant réitéré sous cet aspect la prise en compte du principe de solidarité entre communes. Elle a conclu que dans la mesure où la question lui soumise se limitait à ne prendre en considération que le seul pourcentage de la participation directe des communes à partir d’une des branches prévues à l’article 9 de la loi du 1er mars 1952, sans considérer la part perçue à partir du FDGC et sans mise en perspective avec les besoins découlant de l’exercice autonome de leurs compétences par les communes, la question manquait de caractère pertinent et était à déclarer irrecevable.

Par rapport à la quatrième question lui soumise, la Cour constitutionnelle a retenu que dans la mesure où l’article 9 de la loi du 1er mars 1952 n’est pas contraire au principe de l’autonomie communale tel que consacré par l’article 107, paragraphe (1), de la Constitution, lu à la lumière des articles 9.1. et 9.5. de la Charte, et dans la mesure où le système de péréquation financière auquel participe le FDGC a été reconnu en son principe comme étant conforme au principe de l’autonomie communale en raison de sa conformité à l’article 9.5. de la Charte qui le prévoit expressément, l’article 9 de la loi du 1er mars 1952, par rapport à la question de la privation des communes par rapport à l’ICC généré sur leur territoire, est également conforme à l’article 107, paragraphe (1), de la Constitution, lu à la lumière des articles 9.1. et 9.5. de la Charte.

15En ce qui concerne la cinquième question, la Cour constitutionnelle a jugé que dans la mesure où les critères inscrits dans la loi du 14 décembre 2016 et en particulier à son article 3, paragraphe (2), s’inscrivent, au regard du principe constitutionnel de l’autonomie communale, dans le cadre des attributions des communes et de l’exercice de leurs compétences visées par la Charte, de même que dans le cadre des axes prioritaires de la politique économique nationale y visée, le caractère incitatif d’un critère, tel notamment le critère du nombre de logements sociaux, non seulement est conforme au principe d’autonomie communale, mais encore tend à le garantir. Dans ce contexte, le tribunal doit relever que bien que la question soumise à la Cour constitutionnelle a visé l’article 3, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016, dans sa version antérieure à la modification opérée à travers la loi du 26 avril 2019 concernant le budget des recettes et des dépenses de l’État pour l’exercice 2019, ci-après désignée par « la loi du 26 avril 2019 », ce constat n’emporte pas à conséquence en l’espèce, dans la mesure où la question, telle que libellée par la demanderesse, vise exclusivement les critères incitatifs de répartition des fonds du FDGC, et plus particulièrement celui lié au nombre de logements sociaux prévu à l’article 3, paragraphe (2), point 2), d) de la loi du 14 décembre 2016, lequel n’a pas été modifié par la prédite loi du 26 avril 2019.

Enfin, s’agissant de la sixième question, la Cour constitutionnelle a retenu qu’en prévoyant à côté du système de péréquation financière des mécanismes équivalents en vue d’atteindre le but de solidarité entre communes y affiché, l’article 9.5. de la Charte implique que résiduellement une partie des fonds du FDGC peut être affectée à une entité étatique, même en provenance d’une ressource propre d’une commune, telle l’ICC, lorsque cette entité étatique a comme mission de soulager, en droit ou en fait, les communes dans l’exercice de leurs compétences. Ainsi, dans une optique de solidarité, cette fois-ci à l’encontre des habitants des communes, et dans une optique de lutte contre la pauvreté et de préservation des bases minimales d’existence financière, dans un esprit de dignité humaine conforme à l’article 11, paragraphe (1) de la Constitution, le principe de contribution des communes au Fonds pour l’Emploi à partir de montants prélevés sur l’ICC, tel qu’inscrit à l’article 8 de la loi du 30 juin 1976, a été jugé conforme à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière des articles 9.1. et 9.5. de la Charte.

Le tribunal rappelle qu’aux termes de l’article 6 de la loi modifiée du 27 juillet 1997 portant organisation de la Cour Constitutionnelle, ci-après désignée par « la loi du 27 juillet 1997 »:

« Lorsqu’une partie soulève une question relative à la conformité d’une loi à la Constitution devant une juridiction de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif, celle-ci est tenue de saisir la Cour Constitutionnelle.

Une juridiction est dispensée de saisir la Cour Constitutionnelle lorsqu’elle estime que :

a) une décision sur la question soulevée n'est pas nécessaire pour rendre son jugement;

b) la question de constitutionnalité est dénuée de tout fondement ;

c) la Cour Constitutionnelle a déjà statué sur une question ayant le même objet. (…) ».

Il résulte de la disposition légale qui précède que la connaissance des questions de constitutionnalité des normes législatives appartient exclusivement à la Cour constitutionnelle. Ce n’est que si une des exceptions prévues à l’article 6, alinéa 2, de la loi précitée est donnée, qu’une juridiction peut se dispenser de poser une question de conformité 16à la Constitution, à savoir si elle estime a) qu’une décision sur la question soulevée n’est pas nécessaire pour rendre son jugement, b) que la question de constitutionnalité est dénuée de tout fondement, et c) que la Cour constitutionnelle a déjà statué sur une question ayant le même objet.

C’est justement le dernier cas de figure qui se trouve vérifié en l’espèce, dans la mesure où les questions préjudicielles par rapport auxquelles la demanderesse souhaite obtenir une réponse de la Cour constitutionnelle sont exactement les mêmes que celles dont avait été saisie ladite Cour à travers le jugement précité du 31 janvier 2020, étant relevé que dans l’affaire ayant donné lieu à ce jugement, le tribunal était saisi, à l’instar de la présente affaire, d’un recours dirigé contre la décision du directeur ayant fixé à l’égard de la demanderesse la participation directe de celle-ci au produit en ICC pour une année déterminée et portant affectation de sommes au FDGC et contre une décision du ministre prise sur le même fondement que celle attaquée à travers le présent recours, les deux décisions visées ayant porté sur l’année 2017.

Au regard des réponses apportées par la Cour constitutionnelle aux questions que la demanderesse entend voir trancher, le tribunal est dès lors en tout état de cause dispensé, en application de l’article 6, alinéa 2, point c) de la loi du 27 juillet 1997, de saisir celle-ci des mêmes questions, de sorte que les demandes afférentes sont rejetées.

Ensuite, en ce qui concerne la question du bien-fondé du moyen d’annulation présenté par la demanderesse, pris en ses six branches, et fondé sur une contrariété des articles 9 de la loi du 1er mars 1952, 3, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016 et 8 de la loi du 30 juin 1976 à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière des dispositions pertinentes de la Charte, force est de constater que (i) dans la mesure où ledit moyen d’annulation, pris en ses différentes branches, repose exclusivement sur le reproche d’une non-conformité alléguée des bases légales des décisions litigieuses par rapport à la Constitution, lue à la lumière de la Charte et (ii) au regard de la solution apportée par la Cour constitutionnelle aux six questions préjudicielles lui soumises, identiques à celles que la demanderesse a soulevées, - à savoir, conformément à la motivation reprise ci-avant, le constat que les dispositions légales incriminées sont conformes à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière des dispositions pertinentes de la Charte, respectivement que la deuxième question manque de pertinence -, le tribunal ne peut que rejeter les moyens d’annulation en question, la non-conformité des bases légales des décisions litigieuses par rapport à la Constitution, lue à la lumière des dispositions pertinentes de la Charte, ne se trouvant pas vérifiée tel que cela résulte des enseignements de la Cour constitutionnelle.

Dans son mémoire en réplique, la demanderesse rebondit par rapport à la deuxième question préjudicielle soumise à la Cour constitutionnelle, question que celle-ci a déclarée irrecevable pour poser trois nouvelles questions préjudicielles.

Ainsi, elle fait, tout d’abord, valoir que les articles 9 de la loi du 1er mars 1952 et 3, paragraphe (2), point 2), a) de la loi du 14 décembre 2016, pris ensemble, seraient contraires à l'article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière des articles 3.1., 9.1. et 9.2. de la Charte, alors que le système en place, au niveau de la répartition de l’ICC et de la dotation issue du FDGC, ne tiendrait pas compte des besoins des communes découlant de l’exercice autonome de leurs compétences, ni à la base, ni dans le cadre de la politique économique nationale.

17La demanderesse explique, dans ce cadre, que l'article 9 de la loi du 1er mars 1952 lierait la part propre de l'ICC des communes au plus bas de deux montants obtenus sur base d'un exercice purement arithmétique sans prendre en compte ni les compétences des communes, ni la politique économique nationale, et correspondant soit à 35 % du produit de l'ICC généré sur le territoire de la commune, soit à 35 % de la moyenne nationale de l'ICC à ajuster en fonction de la population.

En l'espèce, un tel calcul aurait eu pour conséquence qu'au titre de l'année fiscale 2019, la demanderesse ne se serait vu attribuer qu’un solde de … euros, soit environ 10% du montant total de … euros généré en ICC sur son territoire, solde qui ne lui permettrait pas de fixer ses priorités en matière de dépenses, tel qu'exigé par l'article 9.1. de la Charte.

Quant à la dotation reçue par les communes de la part du FDGC, la demanderesse critique le fait qu’en vertu de l'article 3, paragraphe (2), point 2. a) et e) de la loi du 14 décembre 2016, d’une part, 82 % du solde du FDGC seraient répartis d'après le critère de la « population ajustée », notion qui ne serait pas définie par une quelconque disposition légale, et, d’autre part, 5% du solde du FDGC seraient répartis d'après la surface totale ajustée des communes, soit, dans les deux cas, des critères démographiques et géographiques sans lien avec les besoins découlant de l'exercice autonome des compétences des communes, de sorte à ne pas passer « (…) le « test » de la proportionnalité nécessaire entre les ressources financières ainsi allouées, d'une part, et les compétences des communes, d'autre part (…) ».

Lesdits critères seraient surtout étrangers à toute considération tenant à la politique économique nationale, de sorte que l'article 3 de la loi du 14 décembre 2016 serait contraire à l'article 107 de la Constitution lu à la lumière des articles 3.1., 9.1. et 9.2. de la Charte.

Dans ce contexte et pour autant que de besoin, la demanderesse conclut qu’il incomberait au tribunal de surseoir à statuer et de saisir la Cour constitutionnelle de la question préjudicielle suivante :

« Prenant en compte (i) pour les communes dont l'ICC est supérieur à la moyenne nationale, la participation directe correspondant à 35 % de la moyenne nationale de l'ICC appliquée au nombre d'habitants prévue par l'article 9 de la loi du 1er mars 1952 et sachant que (ii) la part revenant à la Commune au titre du FDGC est indispensable pour assurer à la Commune son autonomie au sens de l'article 9.1. de la Charte, l'article 3 paragraphe (2) point 2. lettres a) et e) de la loi du 14 décembre 2016 et l'article 9 de la loi du 1er mars 1952 en ce que :

- l'article 9 de la loi du 1er mars 1952 limite la part de l'ICC relaissée à la commune à 35 % selon les préceptes repris ci-dessus, soit 35 % de la moyenne nationale pour les communes dont l'ICC est supérieur à la moyenne nationale et en même temps - l'article 3 paragraphe (2) point 2. lettres a) et e) de la loi du 14 décembre 2016 retient que 82 % du solde du FDGC sont distribués en fonction de critères de la population (de surcroit « ajustés ») et 5 % en fonction de la superficie et prenant en compte les critères économiques pour 13 % seulement, sont-ils conformes à l'article 107 (1) de la Constitution lu à la lumière des articles 3.1., 9.1. et 9.2. de la Charte ? ».

18 La demanderesse soutient ensuite que l'article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016 serait, de manière isolée, contraire à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière des articles 4.4., 9.1. et 9.2. de la Charte, en ce que ledit article prévoirait, pour répartir 82 % du solde du FDGC attribué aux communes, le critère de la « population ajustée », critère qui ne serait pas retraçable, respectivement pas suffisamment précis.

La demanderesse argumente, dans ce cadre, que le critère de la « population ajustée », prévu à l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016, serait uniquement défini « en fonction de critères d'aménagement du territoire et de densité », sans autres précisions, de sorte qu’il s’agirait d’un critère purement arithmétique, non proportionnel au nombre de résidents, non lié aux besoins découlant de l'exercice autonome par les communes de leurs compétences et étranger à la politique économique nationale.

Ainsi, l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016 resterait en défaut de définir les critères permettant de procéder à des ajustements au titre des populations de chaque commune, les critères à la base des pourcentages particuliers applicables aux villes de Luxembourg, d'Esch-sur-Alzette, de Differdange, de Dudelange, d'Echternach, de Grevenmacher, de Remich, de Vianden et de Wiltz, de même qu'aux communes de Clervaux, de Junglinster, de Mersch, de Redange-sur-Attert et de Steinfort, respectivement d'éventuels autres critères d'aménagement du territoire.

La demanderesse se prévaut encore, dans ce contexte, de l’arrêt, précité, de la Cour constitutionnelle du 8 décembre 2017 ayant retenu que l'article 8, paragraphe (3) de la loi modifiée du 30 juin 1976 portant création d'un fonds pour l'emploi, ci-après désignée par « la loi du 30 juin 1976 », était contraire à l'article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière des articles 4.4., 9.1. et 9.2. de la Charte pour ne pas avoir été suffisamment précis quant aux modalités de détermination des communes devant procéder au paiement d’une contribution supplémentaire, conclusion qui devrait, par analogie, également s’imposer au sujet de l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016.

Dans ce contexte et pour autant que de besoin, la demanderesse sollicite de saisir la Cour constitutionnelle de la question préjudicielle suivante :

« L'article 3 paragraphe (2) point 2. lettre a) de la loi du 14 décembre 2016 en ce qu'il prévoit que 82 pour cent du solde du FDGC sont répartis d'après la «population ajustée », elle-même déterminée (i) en fonction de critères d'aménagement du territoire non autrement définis, ni précisés et (ii) de pourcentages préétablis applicables (iii) seulement à certaines villes et communes et pas d'autres (iv) sans pour autant prévoir de critères retraçables et suffisamment précis pour établir l'ajustement, est-il conforme à l'article 107 (1) de la Constitution lu à la lumière des articles 4.4., 9.1. et 9.2. de la Charte ? ».

Sur base des mêmes considérations, telles que développées dans le cadre de son moyen tiré d’une contrariété de l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016 à l'article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière des articles 4.4., 9.1. et 9.2. de la Charte, la demanderesse fait ensuite valoir que l’article 8, paragraphe (2) de la loi du 30 juin 1976 serait contraire aux mêmes dispositions constitutionnelle et conventionnelles, en ce que ledit article se référerait à la notion de « population ajustée », dans le cadre de la détermination de la première contribution des communes au Fonds pour l’Emploi, tout en 19précisant que ladite notion ne serait définie ni par la loi du 14 décembre 2016 ni par la loi du 30 juin 1976. Elle sollicite, pour autant que de besoin, de soumettre une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle libellée comme suit :

« L'article 8 paragraphe 2 de la loi du 30 juin 1976 en ce qu'il prévoit qu'une première contribution au Fonds de l'emploi est déterminée d'après la « population ajustée », elle-même déterminée (i) en fonction de critères d'aménagement du territoire non autrement définis, ni précisés et (ii) de pourcentages préétablis applicables seulement à certaines villes et communes et pas d'autres (iii) sans pour autant prévoir de critères retraçables et suffisamment précis pour établir l'ajustement, est-il conforme à l'article 107 (1) de la Constitution lu à la lumière des articles 4.4., 9.1. et 9.2. de la Charte ? ».

La partie demanderesse fait finalement valoir que l'article 3 paragraphe (2) point 2.

lettre a) point i. de la loi du 14 décembre 2016, en fixant les critères à la base des pourcentages particuliers applicables à certaines villes et communes, violerait l’article 10bis de la Constitution pour opérer une différenciation dépourvue de toute justification objective entre les communes, de sorte qu’elle sollicite encore de soumettre une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle libellée comme suit :

« L'article 3 paragraphe (2) point 2. lettre a) point i. de la loi du 14 décembre 2016 en ce qu'il prévoit un traitement différent voire privilégié pour certaines communes et les résidents qu'elles représentent, mais pas pour d'autres - sans pour autant établir en fonction de quels critères cette différentiation est établie -, est-il conforme à l'article 10bis de la Constitution ».

La partie étatique, dans son mémoire en duplique, conclut principalement à l’irrecevabilité, sinon au rejet des nouvelles questions préjudicielles proposées par la demanderesse, dans son mémoire en réplique, dans la mesure où elles viseraient les mêmes dispositions légales que les questions préjudicielles ayant donné lieu aux arrêts, précités, de la Cour constitutionnelle du 13 novembre 2020 et dans la mesure où il serait évident que la Cour constitutionnelle ne pourrait - à moins de se contredire - arriver à des conclusions différentes par rapport à celles des arrêts du 13 novembre 2020. Tout en admettant que la loi du 27 juillet 1997 ne prévoirait pas expressément « l'irrecevabilité » d'une question à laquelle il fut déjà antérieurement répondu, la partie étatique estime que la demande de saisine de la Cour constitutionnelle devrait être déclarée non fondée.

Par rapport à la première question préjudicielle que la demanderesse propose de soumettre à la Cour constitutionnelle dans le cadre de son mémoire en réplique, la partie étatique conclut encore à l’irrecevabilité de celle-ci au motif qu’elle serait « (…) inintelligible, complexe et brouillée (…) », en ce qu’elle mélangerait deux dispositions légales distinctes, de sorte à être sans intérêt pour ne pas pouvoir donner lieu à une réponse claire de la Cour constitutionnelle. Par ailleurs, ladite question viserait deux dispositions légales différentes, de sorte à violer l’article 6 de la loi du 27 juillet 1997 imposant de ne saisir la Cour constitutionnelle que de questions visant à chaque fois « une loi ».

En ordre subsidiaire, la partie étatique soutient que le tribunal devrait être dispensé de soumettre ladite question préjudicielle proposée par la demanderesse, à la Cour constitutionnelle et visant l’article 9 de la loi du 1er mars 1952, dans la mesure où ladite Cour, à travers sa réponse aux questions 1, 3 et 4 dans ses arrêts du 13 novembre 2020, aurait déjà retenu la constitutionnalité de ladite disposition légale. La même conclusion serait à retenir au 20sujet de l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016, article qui aurait été modifié par la loi du 26 avril 2019, pour inclure désormais les critères d’aménagement du territoire et de densité ayant antérieurement été précisés par le règlement grand-ducal du 14 décembre 2016 portant exécution de la loi du 14 décembre 2016, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 14 décembre 2016 », modification légale qui n’aurait rien changé au cadre légal préexistant, mais qui aurait, au contraire, renforcé la sécurité juridique.

Dans un deuxième ordre de subsidiarité, la partie étatique conclut à l’irrecevabilité de la première question préjudicielle pour être basée sur une affirmation contraire à la réalité, en l’occurrence que la part attribuée à la demanderesse au titre du FDGC lui serait indispensable pour assurer son autonomie au sens de l’article 9.1. de la Charte. La partie étatique critique finalement la demanderesse pour affirmer, même après les arrêts de la Cour constitutionnelle du 13 novembre 2020, devoir recourir à l’emprunt afin de réaliser ses priorités en matière de dépenses.

La partie étatique fait ensuite valoir que le tribunal serait manifestement dispensé à soumettre la deuxième et la troisième nouvelles questions à la Cour constitutionnelle, étant donné que celle-ci, à travers ses arrêts du 13 novembre 2020, aurait retenu que l’article 3, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016, dans sa version antérieure à la modification opérée par la loi du 26 avril 2019, serait conforme à la Constitution.

A titre subsidiaire et dans l’hypothèse où la notion de « population ajustée » n’aurait pas encore été déclarée conforme à la Constitution, la partie étatique explique que le coût des missions d'une commune dépendrait proportionnellement de la taille de sa population, de sorte que la distribution du FDGC selon le critère de la population serait essentielle. Dans ce contexte, elle fait valoir qu’il existerait une corrélation quasi-linéaire entre les dépenses ordinaires de fonctionnement d'une commune, tels que notamment les frais de fonctionnement des écoles primaires, les frais en personnel communal ou l'entretien de la voirie communale, et la taille de sa population. Ainsi, à travers la loi du 14 décembre 2016, le législateur aurait opté pour la distribution de 82% du FDGC en fonction de la population ajustée de la commune, afin de garantir aux communes un financement adéquat de leurs missions, conformément à l'article 9 de la Charte.

Cependant, selon la partie étatique, une telle répartition ne serait pas praticable pour les villes de Luxembourg et d'Esch-sur-Alzette au regard de leur taille tellement élevée et de leur offre de services tellement différente des autres communes, notamment dans la catégorie « Loisirs, sports, culture et cultes », respectivement « Logements et équipements collectifs », d’où la nécessité de procéder à des ajustements des taux, sans lesquels les communes en question seraient substantiellement dans l’incapacité d’assumer leurs fonctions nationales.

Enfin, des arguments similaires expliqueraient l'ajustement de 5% pour les 12 autres centres de développement et d'attraction, ci-après désignés par « CDA ».

Par ailleurs, au lieu d’opter pour un financement encore plus renforcé en fonction de la « population ajustée », le législateur aurait notamment retenu qu’entre 9 et 10% du FDGC seraient distribués en fonction de l'indice socio-économique, afin de pondérer l’incidence du critère lié à la population d’une commune, ce choix étant tant logique, pour impliquer une variation plus faible entre les différentes communes, que politique.

La partie étatique réfute encore les contestations de la demanderesse quant à l'usage de la superficie totale ajustée comme critère de distribution du FDGC, alors que les communes à 21grande superficie auraient certains coûts plus élevés que d'autres, notamment pour l'entretien des infrastructures et de la voirie vicinale.

La partie étatique fournit encore des explications extensives sur les CDA, notion introduite par le programme directeur d’aménagement du territoire et défini dans la loi du 14 décembre 2016, qui aurait établi une distinction hiérarchique des différentes communes en fonction de leur niveau de centralité et aurait ainsi déterminé les CDA, à savoir les communes censées se développer davantage d'un point de vue démographique et économique. La loi du 14 décembre 2016 aurait ensuite repris trois niveaux de CDA, à savoir plus particulièrement les CDA d'ordre supérieur, en l’occurrence la Ville de Luxembourg qui regrouperait des équipements et des services publics d'envergure nationale, voire européenne, les CDA d'ordre moyen, en l’occurrence la commune d’Esch-sur-Alzette, qui constituerait un lieu d'implantation privilégié des équipements et des services publics déconcentrés dans une optique de répartir le développement économique et éviter une concentration excessive des développements autour de la Ville de Luxembourg et finalement les CDA d'ordre régional qui constitueraient des lieux de concentration de services et de commerces pour garantir la fonction d'approvisionnement pour leurs arrière-pays respectifs. Les CDA formeraient un système cohérent et seraient classés hiérarchiquement, suivant leur importance et leur performance pour tenir compte de la réalité nationale. Selon la partie étatique, la localisation de ces centres de développement et d'attraction serait essentielle pour garantir une répartition équilibrée des ressources humaines et des activités économiques et socioculturelles sur l'ensemble du territoire national, ce système sous-entendant qu'un CDA d'ordre supérieur remplirait implicitement toutes les fonctions d'un CDA d'ordre moyen et qu'il en serait de même d'un CDA d'ordre moyen par rapport au CDA régional.

Sur base de l’ensemble de ces considérations, la partie étatique soutient que la notion de « population ajustée » serait clairement circonscrite et reposerait sur des données factuelles liées aux considérations d'aménagement du territoire.

L'Etat se rapporte ensuite à prudence de justice quant à la recevabilité en la forme de la quatrième question posée alors qu'elle viserait à voir déclarer une disposition légale, en l'espèce l'article 3 paragraphe (2), point 2. a).i. de la loi du 14 décembre 2016 non-conforme à l'article 10bis de la Constitution.

L'Etat soutient encore que la question telle que posée serait irrecevable pour se baser sur un prétendu traitement différent et non objectivement justifié de certaines communes par rapport à d'autres, ce qui ne serait pas le cas, la demanderesse étant encore, selon la partie étatique, restée en défaut d’expliciter un tel traitement « privilégié ».

Par ailleurs, la question préjudicielle litigieuse serait à rejeter pour défaut de pertinence, dans la mesure où il n'existerait pas de traitement inégalitaire entre les différentes communes. En effet, la situation des communes spécifiquement mentionnées dans la disposition légale litigieuse ne serait pas comparable à celle des autres communes non mentionnées, dont ferait partie la demanderesse. Même à supposer que la situation des deux types de communes serait comparable, la partie étatique argumente que la différence de traitement procèderait d'une différenciation rationnellement justifiée se trouvant dans un rapport raisonnable de proportionnalité avec les buts poursuivis, tout en renvoyant à ses développements concernant les notions de « population ajustée » et de « CDA ».

Dans son mémoire supplémentaire, la demanderesse conclut au rejet des moyens 22d’irrecevabilité soulevés par l’Etat concernant les questions préjudicielles formulées dans le mémoire en réplique, en argumentant que lesdites questions n’auraient pas encore fait l’objet d’un contrôle de constitutionnalité, et plus particulièrement l'article 3, paragraphe (2), point 2), a) et e) de la loi du 14 décembre 2016 mettant en place des « critères » répartissant 87% des fonds issus du FDGC en fonction de critères démographiques et géographiques fondés sur un calcul purement arithmétique, lequel devrait être analysé ensemble avec l'article 9 de la loi du 1er mars 1952, afin de permettre une mise en perspective dans le cadre de la politique économique nationale avec les besoins découlant de l'exercice autonome des compétences des communes. Dans ce contexte, la demanderesse fait encore valoir que tant l’article 3, paragraphe (2), point 2), a) de la loi du 14 décembre 2016 que l'article 8 paragraphe (2) de la loi du 30 juin 1976 resteraient en défaut de définir précisément le critère de la population ajustée déterminée en fonction de critères liées à l'aménagement du territoire, question qui n’aurait pas non plus fait l'objet d'un contrôle de constitutionnalité.

La demanderesse en conclut que les questions préjudicielles posées dans son mémoire en réplique seraient recevables, tout en précisant que lesdites questions se situeraient dans la suite de la réponse donnée par la Cour constitutionnelle, dans ses arrêts, précités, du 13 novembre 2020 à la deuxième question préjudicielle lui déférée.

Quant à la première question préjudicielle posée dans son mémoire en réplique, la demanderesse réfute encore l’argumentation étatique selon laquelle ladite question serait à déclarer irrecevable pour être basée sur deux lois distinctes, en faisant valoir que la Cour constitutionnelle, à travers ses arrêts, précités, du 13 novembre 2020, aurait expressément mis l’accent sur une lecture combinée des deux dispositions légales litigieuses, la demanderesse précisant encore que le libellé de ladite question, lequel indiquerait avec précision les dispositions législatives et constitutionnelles visées, serait conforme aux exigences de la loi du 27 juillet 1997. Par ailleurs, la demanderesse conteste que la première question posée serait irrecevable en ce qu'elle contiendrait une affirmation « contraire à la réalité », à savoir que la part revenant à la Commune au titre du FDGC serait indispensable pour assurer à la Commune son autonomie au sens de l'article 9.1. de la Charte. Or, conformément aux arrêts de la Cour constitutionnelle du 13 novembre 2020, ladite part du FDGC serait à prendre en considération, ce que les dispositions lacunaires de la loi du 14 décembre 2016 ne permettraient pas de faire.

Quant au fond, la demanderesse relève, tout d’abord, que bien que les dispositions du règlement grand-ducal du 14 décembre 2016, quant à la notion de la « population ajustée », auraient été intégrées, à travers la loi du 26 avril 2019, à l’article 3, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016, ceci ne permettrait toujours pas de cerner, de manière précise, ladite notion, ainsi que les critères sur lesquelles celle-ci serait basé. Dans ce contexte, la demanderesse conteste encore les développements étatiques par rapport à la notion de la « population ajustée » quant aux dépenses ordinaires des communes en fonction de leur population et quant à la situation des villes de Luxembourg et d’Esch-sur-Alzette, dont le traitement privilégié devrait être justifié par des critères objectivement retraçables contenus dans une loi.

Elle réfute ensuite l’analyse étatique basée sur le programme directeur d’aménagement du territoire, ci-après désigné par le « PDAT », pour établir une hiérarchie entre les CDA, alors que le PDAT ne concernerait pas les finances communales, ne serait, par ailleurs, pas opérationnel et serait dépourvu de valeur juridique contraignante pour ne constituer qu’un instrument d’orientation pour les autorités, tel que cela aurait été retenu dans un jugement du 23tribunal administratif du 17 juin 2020, inscrit sous le numéro 42073 du rôle. Dans ce contexte, la demanderesse se prévaut encore de l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 8 décembre 2017 pour faire valoir qu’un mécanisme de distribution des fonds issus du FDGC devrait être déterminable à partir du texte de loi sur base des conditions et modalités suffisamment précises fixées dans la loi, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce au regard de la circonstance que le PDAT serait dépourvu de valeur juridique contraignante, de sorte à confirmer les inconstitutionnalités mises en avant dans son mémoire en réplique, tant en ce qui concerne l'article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016, qu’en ce qui concerne l'article 8, paragraphe (2) de la loi du 30 juin 1976, telles que visées par les deuxième, troisième et quatrième questions préjudicielles.

Dans son mémoire supplémentaire, l’Etat insiste sur le fait que la Cour constitutionnelle, à travers les arrêts, précités, du 13 novembre 2020, aurait retenu la constitutionnalité de l’article 3, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016, ainsi que de l’article 9 de la loi du 1er mars 1952, sous tous leurs aspects, de sorte que les questions préjudicielles afférentes devraient être déclarées irrecevables.

L’Etat fournit encore, dans un souci d’exhaustivité, des informations complémentaires par rapport au critère de répartition du FDGC ayant trait à la « superficie totale ajustée » des communes, en argumentant que des communes à grande superficie auraient nécessairement certains coûts plus élevés, tel que notamment pour l’entretien des infrastructures et de la voie vicinale. La partie étatique met encore en cause, dans ce contexte, l’intérêt à agir de la demanderesse quant à la suppression de la notion de la « population ajustée », dans la mesure où une telle suppression n’aurait aucun impact sur les finances de la demanderesse.

Quant à la critique de la demanderesse selon laquelle les moyens mis à sa disposition seraient insuffisants pour assurer son autonomie, la partie étatique soutient que la répartition des fonds publics serait une prérogative politique nationale essentielle laquelle ne se ferait pas de manière arbitraire, mais serait clairement décrite dans les dispositions légales pertinentes fondées sur le PDAT.

Quant au fond, la partie étatique, après s’être référée aux développements de ses mémoires en réponse et en duplique, estime que la notion de « population ajustée » ne devrait pas être davantage explicitée dans la loi pour être conforme à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution. Par ailleurs, le PDAT devrait, contrairement à l’argumentation de la demanderesse, pouvoir être pris en considération, la partie étatique relevant encore, dans ce cadre, que le jugement du tribunal administratif du 17 juin 2020, inscrit sous le numéro 42073 du rôle, sur lequel la demanderesse se base, aurait été réformé par un arrêt de la Cour administrative du 12 janvier 2021, inscrit sous le numéro 44684C du rôle. La partie étatique précise finalement que le critère d’aménagement du territoire de l’article 3, paragraphe (2) de la loi du 14 décembre 2016 relèverait de choix politiques, le article étant conforme à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution pour constituer un cadre de règles objectives et retraçables figurant dans une loi.

Quant aux moyens développés par la demanderesse, dans son mémoire en réplique, le tribunal doit d’emblée relever que les moyens d’irrecevabilité soulevées par la partie étatique sont tous à rejeter pour manquer de fondement.

Ainsi, concernant, tout d’abord, le moyen d’irrecevabilité de l’ensemble des nouvelles questions préjudicielles posées par la demanderesse dans son mémoire en réplique au motif 24que les dispositions légales y visées auraient déjà été soumises à la Cour constitutionnelle, le tribunal doit constater qu’une telle argumentation a davantage trait à la pertinence, respectivement au bien-fondé desdites questions, dont l’analyse est à effectuer par rapport à l’article 6 de la loi du 27 juillet 1997, sans viser leur recevabilité. Cette même conclusion est à retenir concernant l’argumentation étatique consistant à conclure à l’irrecevabilité de questions préjudicielles au seul motif qu’elles reposeraient sur des circonstances factuelles prétendument non-avérées.

Le tribunal doit encore rejeter le moyen d’irrecevabilité soulevé par la partie étatique concernant la question préjudicielle visant les articles 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016 et l’article 9 de la loi du 1er mars 1952, en ce que ladite question porterait simultanément deux dispositions légales, ce qui, selon la partie étatique, serait prohibé en vertu de l’article 6 de la loi du 27 juillet 1997. En effet, le moyen d’irrecevabilité ainsi soulevé repose sur une lecture erronée de l’article 6 de la loi du 27 juillet 1997 aux termes duquel « « Lorsqu’une partie soulève une question relative à la conformité d’une loi à la Constitution devant une juridiction, celle-ci est tenue de saisir la Cour Constitutionnelle.

Une juridiction est dispensée de saisir la Cour Constitutionnelle lorsqu’elle estime que :

- une décision sur la question soulevée n’est pas nécessaire pour rendre son jugement ;

- la question de constitutionnalité est dénuée de tout fondement ;

- la Cour Constitutionnelle a déjà statué sur une question ayant le même objet.

Si une juridiction estime qu’une question de conformité d’une loi à la Constitution se pose et qu’une décision sur ce point est nécessaire pour rendre son jugement, elle doit la soulever d’office après avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations. », disposition légale qui concerne, de manière générale, le principe, ainsi que les exceptions de saisine de la Cour constitutionnelle de la part des juridictions saisies de questions de conformité des lois à la Constitution, sans véhiculer une prohibition de soumettre à la Cour constitutionnelle une question préjudicielle portant simultanément sur plusieurs dispositions légales, procédé d’ailleurs déjà expressément admis par la Cour constitutionnelle à plusieurs reprises8. Au vu des considérations qui précèdent, il n’y a pas non plus lieu d’accueillir le moyen relatif à un éventuel libellé obscur de la première question préjudicielle complémentaire.

Le moyen d’irrecevabilité soulevé par la partie étatique quant à l’intérêt à agir de la demanderesse de soulever la question préjudicielle relative à l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016 par rapport à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière des articles 4.4., 9.1. et 9.2. de la Charte, encourt également le rejet, alors que l’argumentation de la partie étatique a trait non pas à l’intérêt à agir de la demanderesse d’introduire un recours à l’encontre des décisions déférées, lequel lui a été reconnu par le tribunal, mais à l’intérêt à invoquer un moyen, étant précisé qu’un demandeur peut, en principe développer tout moyen utile à l’effet de contester la légalité de l’acte valablement déféré au tribunal, en invoquant même des moyens qui seraient étrangers à sa situation juridique individuelle9.

8 Notamment à titres d’exemples non-exhaustifs récents : Cour constit., nos 166, respectivement 175 du registre, des 4 juin 2021, respectivement 9 décembre 2022.

9 Trib. adm. prés., 9 novembre 2015, n° 37082 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 38 et les autres références y citées.

25 Il y a finalement lieu de rejeter le moyen tiré du fait que la partie étatique s’est rapportée à prudence de justice quant à la recevabilité de la quatrième question préjudicielle proposée par la demanderesse, étant donné que bien qu’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions. Dès lors, étant donné que la partie étatique est restée en défaut de préciser dans quelle mesure la quatrième question préjudicielle serait à déclarer irrecevable, le moyen d’irrecevabilité ainsi soulevé encourt le rejet, étant relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’irrecevabilité d’ordre public qui serait à soulever d’office.

Quant au fond et à titre liminaire, force est de rappeler qu’en ce qui concerne la loi applicable au litige sous examen, bien que le tribunal est en l’espèce saisi d’un recours en réformation lui attribuant la compétence de refaire - indépendamment de la légalité -

l'appréciation de l'administration, en tenant compte des changements en fait et en droit intervenus depuis la date de la prise de la décision litigieuse et se plaçant au jour où lui-même est appelé à statuer pour apprécier la situation juridique et factuelle du litige lui soumis10, il y a lieu de relever que les décisions déférées ont trait à des impôts directs, de sorte à être soumis au principe de l’annualité de l’impôt de l’article 100 de la Constitution impliquant que le juge de la réformation doit appliquer au litige la loi telle qu’elle était en vigueur au moment où le fait générateur de l’impôt en cause est survenu11, de sorte à appliquer en l’espèce la loi du 14 décembre 2016, dans sa version suite à la modification opérée par la loi du 26 avril 2019, alors que les décisions litigieuses visent la participation de la demanderesse à l’ICC, ainsi que le FDGC de l’année 2019.

Force est ensuite au tribunal de rappeler que conformément à l’article 6, alinéa 1er de la loi du 27 juillet 1997, la connaissance des questions de constitutionnalité de normes législatives appartient exclusivement à la Cour constitutionnelle. Ce n’est que si une des exceptions prévues à l’article 6, alinéa 2, de la même loi, est donnée, qu’une juridiction peut se dispenser de poser une question de conformité à la Constitution, à savoir si elle estime a) qu’une décision sur la question soulevée n’est pas nécessaire pour rendre son jugement, b) que la question de constitutionnalité est dénuée de tout fondement, et c) que la Cour constitutionnelle a déjà statué sur une question ayant le même objet.

Encore que l’article 6, alinéa 2 de la loi du 27 juillet 1997 dispose qu’une juridiction est dispensée de saisir la Cour constitutionnelle d’une question de constitutionnalité si elle « estime » qu’une des trois exceptions y énoncées est donnée, il ne s’agit en l’occurrence pas d’un droit discrétionnaire, mais il faut que l’exception soit avérée.

En ce qui concerne la première question préjudicielle proposée par la demanderesse dans son mémoire en réplique et visant l’article 9 de la loi du 1er mars 1952, ensemble avec l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016, lesquelles seraient contraires à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière des articles 3.1., 9.1. et 9.2. de la Charte, pour prévoir une participation des communes à l’ICC, respectivement 10 Cour adm., 6 mai 2008, n° 23341C du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en réformation, n° 12 et les autres références y citées.

11 Trib. adm., 4 février 2013, n° 29865 du rôle, conf. par Cour adm., 3 octobre 2013, n° 32192C du rôle, Pas.

adm. 2022, V° Impôts, n° 22 et l’autre référence y citée.

26une dotation de la part du FDGC selon des critères purement arithmétiques ne tenant pas compte des besoins des communes découlant de l’exercice autonome de leurs compétences, force est au tribunal de constater que ladite question se base sur une hypothèse factuelle, par ailleurs non établie en cause, en ce que la demanderesse se limite à affirmer que les critères de répartition de l’ICC, ainsi que du solde du FDGC auraient pour conséquence que les communes seraient privées de ressources propres suffisantes ne leur permettant pas de fonctionner conformément aux exigences de l’autonomie communale, sans que la demanderesse n’ait soumis au tribunal un quelconque élément probant soutenant une telle affirmation, ayant déjà été à l’origine de la deuxième et de la quatrième questions préjudicielles soumises à la Cour constitutionnelle dans le cadre de ses arrêts, précités, du 13 novembre 2020.

Force est, dans ce cadre, au tribunal de relever que la Cour constitutionnelle, tout en ayant déclaré irrecevable la deuxième question lui soumise visant à vérifier la constitutionnalité de l’article 9, paragraphe (1) de la loi du 1er mars 1952 limitant la participation directe d’une commune à l’ICC généré sur son territoire à un maximum de 35 %, au motif que la formulation de ladite question n’avait pris en compte ni le fait que les communes perçoivent également une part de leurs ressources du FDGC, ni le principe de solidarité entre les communes, ni avait mis le montant perçu avec les besoins découlant de l’exercice autonome de leurs compétences, a néanmoins également retenue, en réponse à la quatrième question lui soumise, qu’une disposition légale prévoyant que 65% des revenus générés sur le territoire d’une commune au titre de l’ICC sont déférés au FDGC, ce qui implique que la commune en question ne dispose plus, dans un premier temps, que du solde restant de 35%, est conforme au principe constitutionnel de l’autonomie communale.

Bien que la question ayant fait l’objet des arrêts, précités, du 13 novembre 2020, n’avait visé que l’article 9 de la loi du 1er mars 1952, tandis que la question actuellement litigieuse englobe également l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016, le point litigieux est, dans les deux cas, le reproche d’une privation des communes, à travers la fixation de pourcentages trop importants tant au niveau de l’ICC que du FDGC, des ressources leur nécessaires pour satisfaire à leurs besoins découlant de l’exercice autonome de leurs compétences, question par rapport à laquelle le tribunal doit retenir, au regard des considérations qui précèdent, que la Cour constitutionnelle a déjà répondu à celle-ci, de sorte que la question préjudicielle n’a pas lieu d’être posée et le moyen y relatif encourt partant d’ores et déjà le rejet.

Quant à la deuxième et à la troisième question préjudicielle proposées par la demanderesse dans son mémoire en réplique, il y a, tout d’abord, lieu de relever que contrairement à l’argumentation de la partie étatique, la Cour constitutionnelle à travers ses arrêts du 13 novembre 2020 n’a pas déjà répondu aux prédites questions visant l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016, respectivement l’article 8, paragraphe (2) de la loi du 30 juin 1976.

Le tribunal doit plus particulièrement constater que la cinquième question soumise à la Cour constitutionnelle n’avait trait qu’à la validité des critères incitatifs comme critère de répartition des fonds du FDGC, critères prévus à l’article 3, paragraphe (2), point 2. d) de la loi du 14 décembre 2016, dont le nombre de logements sociaux, sans viser le critère de la « population ajustée » de l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016.

27Dans le même ordre d’idées, il y a lieu de relever que la sixième question préjudicielle traitée par les arrêts précités du 13 novembre 2020 visait exclusivement la constitutionnalité de l’article 8 de la loi du 30 juin 1976 par rapport à la seule circonstance que ledit article porte affectation d’une ressource propre d’une commune, telle l’ICC, à une entité étatique, sans que ladite question n’avait trait au fait que ledit article, pour déterminer la participation de chaque commune au Fonds pour l’Emploi, fait référence au critère de la « population ajustée » de l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016.

Aux termes de l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016, « 82 pour cent entre les communes d’après la population ajustée, l’ajustement étant défini en fonction de critères d’aménagement du territoire et de densité et effectué avec la somme des pourcentages définis comme suit :

i) Quant aux critères d’aménagement du territoire, la population de la Ville de Luxembourg est augmentée à raison de 45 pour cent, celle de la Ville d’Esch-sur-Alzette à raison de 25 pour cent et celles des villes de Differdange, de Dudelange, d’Echternach, de Grevenmacher, de Remich, de Vianden et de Wiltz, de même que celle des communes de Clervaux, de Junglinster, de Mersch, de Redange-sur-Attert et de Steinfort à raison de 5 pour cent.

ii) Quant à la densité, l’ajustement de la population se situe dans un intervalle de -5 pour cent à 5 pour cent en appliquant une progression linéaire sur l’intervalle de densité allant de 0 à 2 000 habitants par km2. Pour les communes où la densité dépasse les 2 000 habitants par km2, l’ajustement est effectué avec 5 pour cent. Aux termes de la présente loi, on entend par « densité », le ratio entre la population et la superficie totale de la commune en km2. » et en vertu de l’article 8, paragraphe (2) a) de la loi du 30 juin 1976 « La participation de chaque commune au Fonds de l’emploi se compose de deux contributions:

a) Une première contribution se fait par les communes dont la moyenne des recettes combinées par population ajustée dépasse de 10 pour cent au moins la moyenne nationale par population ajustée, la population ajustée étant définie à l’article 3, paragraphe 2, point 2, lettre a) de la loi portant création d’un Fonds de dotation globale des communes. La contribution correspond au montant de ce dépassement jusqu’à concurrence du montant défini à l’article 8, paragraphe 1er. Si la somme de tous les dépassements excède le montant précité, la contribution de chaque commune est réduite proportionnellement afin que les communes en question contribuent le montant défini à l’article 8, paragraphe 1er. ».

Il convient ensuite de préciser que les articles 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016, et 8, paragraphe (2) a) de la loi du 30 juin 1976 ont, tous les deux, trait aux ressources communales pour viser, d’une part, les critères de répartition du FDGC, respectivement, d’autre part, la participation des communes au Fonds pour l’Emploi, sur base, en ce qui concerne les dispositions légales spécifiquement incriminées, du critère de la « population ajustée ».

Dans ce contexte, le tribunal doit d’emblée rejeter les questions de constitutionnalité, telles que proposées par la demanderesse, au sujet des articles 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016 et 8, paragraphe (2) a) de la loi du 30 juin 1976 par rapport à l’article 107, paragraphe (1) de la Constitution, lu à la lumière des articles 4.4., 9.1. et 9.2. de la Charte, lesquelles tablent sur la prémisse erronée que les critères y prévues, d’une part, ne seraient pas suffisamment précis en ne fournissant, selon la demanderesse, pas de définitions 28des critères d’aménagement du territoire respectivement de densité, et, d’autre part, ne fourniraient pas d’explications quant aux pourcentages particuliers retenus pour certaines communes.

Force est, en effet, au tribunal de relever que les modalités du critère de la « population ajustée », contrairement à l’argumentation de la demanderesse, sont précisément déterminées à travers l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016 et sont axés sur des données objectives à savoir la population de la commune concernée par rapport à la population nationale et la surface du territoire communal concerné par rapport au territoire national, de sorte à porter sur l’aménagement du territoire et sur la densité de population. De plus, il échet de constater que les critères de répartition du FDGC ont encore été explicités dans le commentaire de l’article 3 du projet de loi n°7036 portant création d’un Fonds de dotation globale des communes12 par un exemple chiffré de répartition, explications qui peuvent être reprises en l’espèce, bien que les critères de répartition furent initialement fixés par l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016 par renvoi au règlement grand-ducal du 14 décembre 2016, dans la mesure où les dispositions dudit règlement ont été, intégralement et à l’identique, repris directement à l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016, à travers la modification de ce dernier par la loi du 26 avril 2019.

Il suit des considérations qui précèdent que le mécanisme litigieux de répartition des fonds issus du FDGC, respectivement de contribution au Fonds de l’emploi, tel que ressortant de l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016 et, par ricochet, de l’article 8, paragraphe (2) a) de la loi du 30 juin 1976, est manifestement déterminable à partir desdits articles sur base des conditions et modalités suffisamment précises y fixées.

Le tribunal doit encore réfuter l’argumentation de la demanderesse selon laquelle l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016 resterait en défaut de fournir des justifications quant aux pourcentages particuliers appliqués à certaines communes, respectivement que le PDAT, invoqué par la partie étatique, ne saurait asseoir les critères de répartition des fonds issus du FDGC, étant donné, d’une part, que la demanderesse reste en défaut d’invoquer une quelconque base légale exigeant que la justification d’une disposition légale déterminée devrait figurer directement dans le corps du texte légal lui-même, et, d’autre part, que la partie étatique ne s’est pas prévalu, en l’espèce, du PDAT en tant que base légale des décisions déférées, mais comme explication factuelle à la base des pourcentages particuliers retenus par l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016 pour certaines communes nommément désignées, explication factuelle que l’Etat a encore explicité par des données concrètes.

Concernant la mise en balance d’une discrimination injustifiée de certaines communes par rapport à d’autres, en raison de pourcentages particuliers retenus par l’article 3, paragraphe (2), point 2. a) de la loi du 14 décembre 2016, le tribunal tient de prime abord à rappeler que la mise en œuvre de la règle constitutionnelle d’égalité suppose que les catégories de personnes entre lesquelles une discrimination est alléguée se trouvent au départ dans une situation comparable au regard de la mesure critiquée, ce qui n’est pas le cas en l’espèce au regard des explications factuelles fournies par la partie étatique et non autrement contestées par la demanderesse 12 Doc. Parl. N° 70362, Chambre des Députés, Session ordinaire 2015-2016.

29Ainsi, la question relative à une prétendue rupture de l’égalité devant la loi du fait de la distinction entre différentes communes doit être considérée comme étant manifestement dénuée de tout fondement, pour tabler sur la prémisse erronée que les différentes situations seraient comparables.

Sur base de l’ensemble des considérations qui précèdent, le tribunal doit rejeter l’ensemble des moyens de la demanderesse et ce sans devoir soumettre à la Cour constitutionnelle les questions préjudicielles suggérées par la demanderesse, en application de l’article 6, alinéa 2, point b), de la loi du 27 juillet 1997.

Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme le recours principal en réformation introduit à l’encontre de la décision N° … du directeur de l’administration des Contributions directes du 19 février 2020 concernant la participation de … au produit de l’impôt communal commercial généré en 2019 ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation dirigé contre ladite décision ;

se déclare incompétent pour connaître du recours principal en réformation introduit à l’encontre de la décision du ministre de l'Intérieur et ses annexes du 6 mars 2020 intitulée « Finances communales - Décompte 2019 et plan de paiement 2020 » ;

reçoit en la forme, le recours subsidiaire en annulation dirigé contre ladite décision ;

au fond, les déclare non justifiés partant en déboute ;

condamne la demanderesse aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 19 mai 2023 par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, premier juge, Michèle Stoffel, premier juge, en présence du greffier Paulo Aniceto Lopes.

s. Paulo Aniceto Lopes s. Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 19 mai 2023 Le greffier du tribunal administratif 30


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : 44442
Date de la décision : 19/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/05/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-05-19;44442 ?

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