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26/09/2007 | FRANCE | N°05/16051

France | France, Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 26 septembre 2007, 05/16051


3ème chambre 3ème section
Assignation du :31 Octobre 2005

JUGEMENT rendu le 26 Septembre 2007

DEMANDERESSE

Société MICROSOFT CORPORATIONOne Microsoft WayREDMOND (état de Washington) U.S.A.

représentée par SCP AUGUST et DEBOUZY, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P438
DÉFENDERESSE
S.A.R.L. PC LOG15 rue Brochant75017 PARIS

représentée par Me Richard FIXLER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire D0923
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision Agnès THAUNAT, Vice-PrésidentMichèle PICARD

, Vice-Président,
assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision

DEBATS
A l'audien...

3ème chambre 3ème section
Assignation du :31 Octobre 2005

JUGEMENT rendu le 26 Septembre 2007

DEMANDERESSE

Société MICROSOFT CORPORATIONOne Microsoft WayREDMOND (état de Washington) U.S.A.

représentée par SCP AUGUST et DEBOUZY, avocats au barreau de PARIS, vestiaire P438
DÉFENDERESSE
S.A.R.L. PC LOG15 rue Brochant75017 PARIS

représentée par Me Richard FIXLER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire D0923
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision Agnès THAUNAT, Vice-PrésidentMichèle PICARD, Vice-Président,
assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision

DEBATS
A l'audience du 25 Juin 2007 tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé en audience publiqueContradictoireen premier ressort

FAITS ET PROCEDURE
La société MICROSOFT CORPORATION crée des logiciels relatifs à des systèmes d'exploitation de type "Windows" et des logiciels d'application ("Word"," Excel", "Outlook"...) qu'elle commercialise dans le monde entier avec la fourniture obligatoire d'une licence d'utilisation, d'un certificat d'authenticité, d'un guide de démarrage, d'un manuel de l'utilisateur, d'une carte de garantie, le tout dans un conditionnement spécifique.

La société MICROSOFT CORPORATION est titulaire de la marque "Microsoft" déposée le 16 octobre 1989 et enregistrée auprès de l'INPI sous le numéro 1 555 513 notamment pour des " programmes d'ordinateurs mémorisés..."et régulièrement renouvelée. Elle exploite cette marque, l'appose par intégration dans ses logiciels (visible à l'installation et au démarrage) ainsi que sur tous les supports des logiciels qu'elle commercialise ainsi que sur les documents qui les accompagnent (emballages, modes d'emploi, certificats de garantie, certificats d'authenticité ...).
La société PC LOG a pour activité selon l'extrait Kbis du registre du commerce produits aux débats : " l'achat la vente en gros ou détail de matériel bureautique informatique de mobilier de bureau de fournitures d'accessoires et de tout autre produits ou matériels s'y rapportant, maintenance, formation."
Apprenant que la société PC LOG proposait à ses clients la fourniture sans licence de logiciels Microsoft, ainsi qu'il résulte d'une attestation de Madame A..., la société demanderesse a fait procéder les 26, 27 et 29 juillet à un constat d'huissier sur requête dans les locaux de la société PC LOG à Paris 17ème, 19 rue Brochant.
Par acte d'huissier de justice en date du 31 octobre 2005,la société MICROSOFT CORPORATION a assigné la société PC LOG devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de marques et de droits d'auteur.
Par dernières conclusions communiquées le 24 octobre 2006,la société MICROSOFT CORPORATION demande au tribunal de :au visa des articles L122-6, L335-2 et suivants, L713-2, L716-1 et suivants du code de propriété intellectuelle, 1382 et 1384 alinéa 5 du code civil,

constater que la société MICROSOFT CORPORATION est auteur des logiciels WORD 2003, EXCEL 2003, ACCESS 2003, POWER POINT 2003 et OUTLOOK 2003 qu'elle commercialise,

dire et juger que la reproduction par la société PC LOG des logiciels édités par la société MICROSOFT CORPORATION sans son autorisation sont illicites et constituent une contrefaçon des droits d'auteur de ces logiciels au sens des dispositions combinées des articles L122– 6 et L335-2 code de propriété intellectuelle,

constater que la société MICROSOFT CORPORATION est propriétaire de la marque "MICROSOFT" enregistrée auprès de l'INPI sous le numéro 1 555 513,
dire et juger que la reproduction et l'usage par la société défenderesse de la marque MICROSOFT sans son autorisation sont illicites et constituent une contrefaçon de ladite marque au sens de l'article L716-1 du code de propriété intellectuelle,
dire et juger que la défenderesse en proposant l'installation gratuite de logiciels et en installant gratuitement des logiciels contrefaisants ceux édités parla société MICROSOFT CORPORATION ainsi que sa marque, a commis des agissements parasitaires et constitutifs de concurrence déloyale à l'égard de la société Microsoft Corporation engageant sa responsabilité civile,
en conséquence,
condamner la société PC LOG à lui payer la somme de 75 780 euros en réparation de son préjudice matériel relevant de la contrefaçon de ses droits d'auteur sur ses logiciels et de sa marque MICROSOFT,
condamner la défenderesse à lui payer la somme de 36.000 euros en réparation de son préjudice moral lié à la contrefaçon de ses droits d'auteur de ses logiciels,
condamner la société PC LOG à lui payer la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice résultant du parasitisme et de concurrence déloyale lui étant imputable à son détriment,
ordonner la cessation immédiate par la défenderesse de ses agissements illicites, sous astreinte de 1500 euros par infraction commise à compter de la signification du jugement à intervenir,
ordonner la publication de la décision à intervenir, en intégralité ou par extrait, dans deux publications périodiques, l'une dans la presse nationale, l'autre dans la presse régionale, au choix de la société demanderesse et aux frais de la société défenderesse dans la limite de la somme de 6000 euros TTC pour la première publication et dans celle de la somme de 3.500 euros pour la seconde,
condamner la société PC LOG à lui payer la somme de 2000 Euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
ordonner l'exécution provisoire,
condamner la société PC LOG aux entiers dépens en ce compris les frais du constat de Maître Busy, huissier de Justice, avec distraction au profit de la SCP AUGUST et DEBOUSY, en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Par dernières conclusions communiquées le 13 mars 2006, la société PC LOG demande au tribunal de :
prendre acte du fait qu'elle reconnaît ses erreurs,
fixer la préjudice de MICROSOFT à sa valeur réelle,
lui accorder compte tenu des difficultés réelles et avérées qu'elle rencontre, les plus larges délais de paiement conformément à l'article 1244-1 du code civil,
statuer avec modération sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile .
MOTIFS DE LA DECISION
* Sur la contrefaçon de marque :
La société MICROSOFT reproche à la société défenderesse des actes de contrefaçon de sa marque MICOSOFT sur le fondement des dispositions de l'article L.713-2 du Code de la propriété intellectuelle aux termes duquel " Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire :a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que : « formule, façon, système, imitation, genre, méthode», ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement;b) La suppression ou la modification d'une marque régulièrement apposée."

Il résulte du constat d'huissier et de l'attestation Madame Géraldine A... du 14 février 2005 que la société PC LOG propose à ses clients acquéreurs d'ordinateurs de leur installer moyennant un coût réduit ou gratuitement et sans licence les logiciels Word, Excel, Power, Access, Publisher composant le Pack Office ainsi que le logiciel Windows XP, afin de réduire le coût d'achat de leur ordinateur. Les deux pièces produites montrent qu'il s'agit d'une pratique habituelle de cette société, même si celle-ci s'en défend.
Ces actes constituent d'une part une contrefaçon de marque par suppression, les clients ne recevant pas les éléments accompagnant les logiciels tels les emballages, CD Rom d'installation, licence, manuel d'utilisation....
Ces actes constituent également des actes de contrefaçon par reproduction du fait de l'affichage sur les écrans d'ordinateur de la marque lors du démarrage.
* Sur la contrefaçon des droits d'auteur :

La société MICROSOFT fait valoir que la contrefaçon décrite ci-dessus constitue également une contrefaçon de ses droits d'auteur sur les logiciels installés sans licence par la défenderesse.
Aux termes des dispositions de l'article L.122-6 du Code de la propriété intellectuelle "(...) le droit d'exploitation appartenant à l'auteur d'un logiciel comprend le droit d'effectuer et d'autoriser : 1o La reproduction permanente ou provisoire d'un logiciel en tout ou partie par tout moyen et sous toute forme (...)2o (...)3o La mise sur le marché à titre onéreux ou gratuit, y compris la location, du ou des exemplaires d'un logiciel par tout procédé (...)" .

En installant moyennant un coût réduit ou gratuitement sans fournir de licence les logiciels composant le Pack Office, Microsoft Excel, Microsoft Outlook et Microsoft Word ainsi que Windows XP, la société PC LOG a commis des actes de contrefaçon des droits d'auteur de la société MICROSOFT sur ces logiciels.
* Sur la concurrence déloyale :
La société MICROSOFT fait valoir que l'intégration de l'objet de la contrefaçon dans le processus commercial des la société PC LOG constitue des actes de concurrence déloyale distincts des actes de contrefaçon.
Le tribunal note que cette pratique de la société PC LOG ne constitue pas un fait distinct des actes de contrefaçon qui lui sont reprochés.
En outre le tribunal observe qu'il résulte tant de l'attestation que du procès verbal d'huissier que l'installation du pack office sans licence n'est pas proposé ab initio mais seulement si le client insiste, dès lors le grief de concurrence déloyale et parasitaire n'est pas établi.
Il convient en conséquence de débouter la société MICROSOFT de ses demandes à ce titre.

* Sur les mesures réparatrices :

Outre les mesures d'interdiction d'usage qui seront prononcées, la société MICROSOFT sollicite le paiement de la somme de 75.780 euros en réparation de son préjudice matériel résultant des actes de contrefaçon, la somme de 36.000 euros en réparation du préjudice moral résultant des actes de contrefaçon de la marque et la somme de 36.000 euros en réparation du préjudice moral résultant de la contrefaçon de ses droits d'auteur.

Le tribunal relève que les actes de contrefaçon reprochées à la société défenderesse lui ont causé un préjudice commercial certain constitué par un manque à gagner. Il convient cependant de prendre en compte pour apprécier ce préjudice le fait qu'il existe d'autres logiciels sur le marché concurrents de ceux de la société MICROSOFT et que le manque à gagner est donc inférieur à celui calculé par elle, du fait que les clients ne se seraient pas reportés automatiquement sur les logiciels MICROSOFT s'ils avaient dû les acheter.
Compte tenu de ces éléments le tribunal estime le préjudice matériel subi à la somme de 33.600 euros.
En ce qui concerne le préjudice moral subi du fait de la contrefaçon de marque, il y a lieu de relever que le fait de proposer l'installation moyennant un coût réduit ou gratuitement et sans licence des logiciels revêtus de la marque contribue sans aucun doute à la déprécier aux yeux des consommateurs.
Le préjudice d'atteinte à la marque sera donc fixé à la somme de 7.500 euros.
En ce qui concerne les atteintes au droit moral d'auteur résultant des actes de contrefaçon le tribunal constate que le droit de paternité est respecté du fait de l'affichage du nom du logiciel au démarrage de l'ordinateur et qu'aucune altération n'est alléguée. Il n'y a donc pas atteinte au droit moral de la société MICROSOFT sur ses logiciels.
Enfin, il sera fait droit à la demande de publication dans les termes du dispositif de la présente décision a titre de dommages et intérêts complémentaires.
*Sur les délais
La société PC LOG sollicite l'octroi de délai compte tenu de sa situation financière difficile. Elle ne produit cependant aucun justificatif de ses dires. Dès lors cette demande doit être rejetée.
* Sur l'exécution provisoire :
Il convient de l'ordonner afin de faire cesser le préjudice résultant des actes de contrefaçon.

* Sur l'article 700 :

La société MICROSOFT sollicite le paiement de la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Il serait inéquitable de laisser à sa charge les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens. Il lui sera en conséquence alloué la somme de 2.000 euros de ce chef.
PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL,
Statuant publiquement, en premier ressort et par jugement contradictoire,
Dit que la société PC LOG a commis des actes de contrefaçon par reproduction et par suppression de la marque MICROSOFT no1 555 513 en installant des logiciels de cette marque moyennant un coût réduit sans autorisation et sans licence au préjudice de la société MICROSOFT CORPORATION,
Dit que la société PC LOG a commis des actes de contrefaçon de droits d'auteur sur les logiciels Microsoft Excel, Microsoft Word, Microsoft Outlook, Microsoft Power Pöint et Microsoft Access en les installant moyennant un coût réduit sans autorisation et sans licence au préjudice de la société MICROSOFT CORPORATION,
Déboute la société MICROSOFT CORPORATION de sa demande au titre de la concurrence déloyale et parasitaire,
Ordonne à la société PC LOG de cesser ces actes illicites sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à compter de la signification de la présente décision,
Dit que le tribunal se réserve la liquidation des astreintes ainsi ordonnées en application de l'article 35 de la loi du 9 juillet 1991,
Condamne la société PC LOG à payer à la société MICROSOFT CORPORATION la somme de 33.600 euros en réparation de son préjudice matériel résultant des actes de contrefaçon et de marque,

Condamne la société PC LOG payer à la société MICROSOFT CORPORATION la somme de 7.500 en réparation du préjudice résultant de l'atteinte à la marque MICROSOFT,
Déboute la société MICROSOFT de sa demande d'indemnisation résultant de son préjudice moral du fait de la contrefaçon des droits d'auteur,
Déboute la société PC LOG de sa demande de délai,
Autorise la société MICROSOFT CORPORATION à faire publier le dispositif de la présente décision dans deux revues, journaux ou périodiques de son choix et aux frais de la défenderesse, sans que le coût total de ces insertions n'excède, à la charge de celle-ci, la somme de 3.500 euros HT par insertion,
Déboute la société MICROSOFT CORPORATION du surplus de ses demandes,
Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,
Condamne la société PC LOG à payer à la société MICROSOFT CORPORATION la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
Condamne la société PC LOG aux dépens, en ce compris le coût du constat d'huissier, avec distraction au profit de la SCP AUGUST et DEBOUZY en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Fait à PARIS le 26 septembre 2007.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Marie-Aline PIGNOLET Elisabeth BELFORT


Synthèse
Tribunal : Tribunal de grande instance de Paris
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 05/16051
Date de la décision : 26/09/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.grande.instance.paris;arret;2007-09-26;05.16051 ?
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