LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° T 22-80.696 F-B
N° 00013
ODVS
4 JANVIER 2023
CAS. PART. PAR VOIE DE RETRANCH. SANS RENVOI
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 4 JANVIER 2023
M. [S] [J] et la société [2] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Riom, chambre correctionnelle, en date du 26 janvier 2022, qui, pour homicide involontaire, a condamné le premier à six mois d'emprisonnement avec sursis et la seconde à 80 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [S] [J], les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société [1], devenue la société [2], et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Joly, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Après le décès d'[I] [T], salarié de la société [1], devenue la société [2] (la société), alors qu'il intervenait sur une ligne à haute tension, M. [S] [J] et la société ont été déclarés coupables du chef susvisé par le tribunal correctionnel.
3. Les prévenus et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen présenté pour M. [J] et sur le moyen présenté pour la société [2]
4. Il ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le second moyen présenté pour M. [J] et sur le moyen relevé d'office et mis dans le débat
Enoncé des moyens
5. Le moyen présenté pour M. [J] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré, par arrêt confirmatif, M. [J] et la société [2] solidairement responsables du préjudice subi par Mme [W] et Mme [E] [T], alors « que selon l'article L. 451-1 du Code de la sécurité sociale, aucune action en réparation du préjudice causé par un accident du travail ne peut, en dehors des cas prévus par ce texte, être exercée conformément au droit commun, par la victime contre l'employeur ou ses préposés ; qu'en retenant la responsabilité solidaire de M. [J], préposé de la société [2], pour le préjudice des ayants-droits de la victime, qu'elle condamnait pour homicide par imprudence, la cour d'appel a méconnu l'article L. 451-1 du code de procédure pénale. »
6. Le moyen relevé d'office et mis dans le débat est pris de la violation de l'article L. 451-1 du code de la sécurité sociale et critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement ayant déclaré M. [J] et la société solidairement responsables du préjudice subi par [O] [T].
Réponse de la Cour
7. Les moyens sont réunis.
Vu l'article L. 451-1 du code de la sécurité sociale :
8. Selon ce texte, aucune action en réparation du préjudice causé par un accident du travail ne peut, en dehors des cas qu'il prévoit, être exercée conformément au droit commun, par la victime contre l'employeur et ses préposés.
9. Pour confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la société et M. [J] solidairement responsables du préjudice subi par les parties civiles, l'arrêt attaqué énonce que, par application des dispositions des articles L. 411-1 et L. 451-1 du code de la sécurité sociale, l'action en réparation des ayants droit que sont Mme [M] [W], conjointe du défunt, et [E] et [O], ses enfants, ne peut pas être exercée sur le fondement du droit commun et relève du pôle social.
10. En l'état de ces énonciations, alors que la juridiction répressive, qui n'a pas compétence pour se prononcer sur la responsabilité civile de l'employeur de la victime et de son préposé, ne peut que déclarer recevable la constitution de partie civile des ayants droit de la victime, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
11. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
Sur le pourvoi formé par la société [2] :
REJETTE le pourvoi ;
Sur le pourvoi formé par M. [J] :
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Riom, en date du 26 janvier 2022, en ses seules dispositions ayant déclaré la société [2] et M. [J] solidairement responsables du préjudice subi par Mme [W] en son nom personnel et en sa qualité de responsable légale de son fils mineur et par Mme [E] [T], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
FIXE à 2 500 euros la somme que la société [2] devra payer à M. [J] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Riom, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre janvier deux mille vingt-trois.