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13/03/2025 | FRANCE | N°24PA02021

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 1ère chambre, 13 mars 2025, 24PA02021


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 décembre 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2400644/3-3 du 9 avril 2024, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.





Procédur

e devant la Cour :



Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 4 mai, 21 juillet et 9 septemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 décembre 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2400644/3-3 du 9 avril 2024, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 4 mai, 21 juillet et 9 septembre 2024, Mme B... A... C... A..., représentée par Me Helalian demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2400644/3-3 du 9 avril 2024 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 décembre 2023 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de refus de séjour est entachée de défaut d'examen et d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 422-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour qui la fonde.

Le préfet de police a produit un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2025, postérieurement à la clôture de l'instruction, qui n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention conclue entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République gabonaise relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Paris le 2 décembre 1992 ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République gabonaise relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au co-développement, signé à Libreville le 5 juillet 2007 ;

- le code de l'éducation ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 12 mai 2011 fixant la liste des diplômes au moins équivalents au master pris en application du 2° de l'article R. 311-35 et du 2° de l'article R. 313-37 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Irène Jasmin-Sverdlin a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A... C... A..., ressortissante gabonaise née le 31 décembre 1996, est entrée en France le 9 septembre 2014, à l'âge de 17 ans et 8 mois et a été titulaire, du 25 mars 2015 au 28 février 2023, de titres de séjour en qualité d'étudiante. Le 15 mars 2023, elle a sollicité son admission au séjour sur le fondement des articles L. 422-8 et L. 422-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 11 décembre 2023, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... C... A... relève appel du jugement du 9 avril 2024 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 422-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise" autorise l'étranger à exercer une activité professionnelle salariée jusqu'à la conclusion de son contrat ou l'immatriculation de son entreprise. " et aux termes de l'article L. 422-10 du même code : " L'étranger titulaire d'une assurance maladie qui justifie soit avoir été titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " délivrée sur le fondement des articles L. 422-1, L. 422-2 ou L. 422-6 et avoir obtenu dans un établissement d'enseignement supérieur habilité au plan national un diplôme au moins équivalent au grade de master ou figurant sur une liste fixée par décret, soit avoir été titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " passeport talent-chercheur " délivrée sur le fondement de l'article L. 421-14 et avoir achevé ses travaux de recherche, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise " d'une durée d'un an dans les cas suivants : / 1° Il entend compléter sa formation par une première expérience professionnelle, sans limitation à un seul emploi ou à un seul employeur ; / 2° Il justifie d'un projet de création d'entreprise dans un domaine correspondant à sa formation ou à ses recherches. ".

3. En application de l'article 2.2 de l'accord franco-gabonais susvisé : " Une autorisation provisoire de séjour d'une durée de validité de neuf mois renouvelable une fois est délivrée au ressortissant gabonais qui, ayant achevé avec succès, dans un établissement d'enseignement supérieur habilité au plan national, un cycle de formation conduisant à la licence professionnelle ou à un diplôme au moins équivalent au master, souhaite compléter sa formation par une première expérience professionnelle. Pendant la durée de cette autorisation, son titulaire est autorisé à chercher et, le cas échéant, à exercer un emploi en relation avec sa formation et assorti d'une rémunération au moins égale à une fois et demie la rémunération mensuelle minimale en vigueur en France. A l'issue de la période de validité de l'autorisation provisoire de séjour, l'intéressé pourvu d'un emploi ou titulaire d'une promesse d'embauche, satisfaisant aux conditions ci-dessus, est autorisé à séjourner en France pour l'exercice de son activité professionnelle, sans que soit prise en considération la situation de l'emploi. ". L'article 12 de la convention conclue le 2 décembre 1992 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République gabonaise stipule que : " Les dispositions de la présente convention ne font pas obstacle à l'application des législations respectives des deux Parties contractantes sur l'entrée et le séjour des étrangers sur tous les points non traités par la convention ". Pour apprécier la condition relative à l'achèvement avec succès, dans un établissement d'enseignement supérieur habilité au plan national, d'un cycle de formation conduisant à la licence professionnelle ou à un diplôme au moins équivalent au master prévue par l'accord du 5 juillet 2007, il y a lieu, s'agissant d'un point non traité par cet accord, d'appliquer les dispositions de l'article D. 422-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, selon lesquelles : " La liste mentionnée aux articles L. 422-10 et L. 422-14 comprend : 1° Les diplômes de niveau I labellisés par la Conférence des grandes écoles ; 2° Le diplôme de licence professionnelle ", celles de l'article D. 612-33 du code de l'éducation, aux termes desquelles : " Les diplômes sanctionnant une formation du deuxième cycle de l'enseignement supérieur conduisent à l'attribution du grade master dans les conditions prévues par les articles D. 612-34 à D. 612-36-4 ", celles de l'article D. 612-34 du même code, qui fixent la liste des diplômes dont les titulaires ont, de plein droit, le grade de master et de se référer en outre à l'arrêté du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche du 19 juillet 2023 fixant la liste des établissements d'enseignement supérieur techniques privés et consulaires autorisés à délivrer un diplôme visé par la ministre chargée de l'enseignement supérieur et pouvant conférer le grade de licence ou de master à leurs titulaires.

4. D'une part, Mme A... C... A... soutient que le préfet de police n'a pas procédé à un examen complet de sa situation, dès lors que la décision de refus de titre de séjour ne mentionne pas qu'elle disposait d'une demande d'autorisation de travail présentée par la société Deloitte le 11 octobre 2023. Il ressort toutefois des termes de l'arrêté litigieux que le préfet s'est fondé, pour refuser de délivrer à Mme A... C... A... un titre de séjour en qualité d'étudiante, sur le fait que le diplôme de la requérante n'était pas reconnu comme au moins équivalent au master. Par suite, Mme A... C... A... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de police, qui n'était pas tenu de mentionner l'ensemble des éléments de fait relatifs à sa situation, n'a pas procédé à un examen sérieux et complet de son dossier avant de prendre la décision de refus de titre de séjour en litige.

5. D'autre part, Mme A... C... A... fait valoir qu'elle est titulaire d'un MBA (master of business administration ou maîtrise en administration des affaires) " droit des affaires internationales - spécialisation conformité et gestion des risques " qui lui a été délivré le 1er mars 2023 par l'Ecole Supérieure Libre des Sciences Commerciales appliquées (ESLSCA). Toutefois, il est constant que ce diplôme ne fait pas partie des diplômes mentionnés à l'article D. 612-34 du code de l'éducation, ni d'ailleurs dans la liste fixée par l'arrêté du 12 mai 2011 susvisé et ne constitue pas un diplôme de niveau I labellisé par la Conférence des grandes écoles, ni un diplôme de licence professionnelle. En outre, l'ESLSCA ne figure pas dans la liste arrêtée le 19 juillet 2023 par le ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche. La circonstance que ce diplôme est un diplôme du second degré universitaire de niveau " Bac + 5 ", comme l'est un master, ne permet pas de le regarder, pour l'application des stipulations précitées du 2.2 de l'article 2 de l'accord franco-gabonais, comme étant au moins équivalent au master au sens de ces stipulations. Au demeurant, Mme A... C... A... ne peut utilement se prévaloir d'un certificat de scolarité daté du 12 janvier 2024 pour son inscription à l'INSEEC en " MSc Risk Management, Contrôle et Compliance Expert " en audit, contrôle et conseil. En conséquence, Mme A... C... A... n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour serait entachée d'erreur d'appréciation au regard des stipulations et dispositions précitées.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Mme A... C... A... soutient qu'elle vit en France depuis 2014, qu'elle est entrée régulièrement sur le territoire national à l'âge de 17 ans et qu'elle y a suivi son parcours universitaire. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante, célibataire et sans charge de famille, serait dépourvue d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine. Dans ces conditions, la décision attaquée ne portant pas atteinte disproportionnée au droit de Mme A... C... A... au respect de sa vie privée et familiale, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. En dernier lieu, les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par Mme A... C... A... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision d'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... C... A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'annulation, d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... C... A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... C... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 6 février 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- M. Stéphane Diémert, président-assesseur,

- Mme Irène Jasmin-Sverdlin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 mars 2025.

La rapporteure,

I. JASMIN-SVERDLINLe président,

I. LUBEN

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 24PA02021 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24PA02021
Date de la décision : 13/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Irène JASMIN-SVERDLIN
Rapporteur public ?: M. GOBEILL
Avocat(s) : HELALIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-13;24pa02021 ?
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