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08/10/2015 | FRANCE | N°14MA00111

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 08 octobre 2015, 14MA00111


Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 2014, présentée pour la commune de Mougins, représentée par son maire en exercice, domicilié ...cedex, par la Selarl d'avocats Neveu Charles et associés ; la commune de Mougins demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202743 du 19 novembre 2013 du tribunal administratif de Nice qui l'a condamnée, à la demande de la compagnie Aviva assurances, subrogée en application de l'article L. 121-12 du code des assurances dans les droits du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Panoramic situé sur la colline de la Colle à M

ougins, à verser à cette compagnie d'assurances la somme de 294 762,07...

Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 2014, présentée pour la commune de Mougins, représentée par son maire en exercice, domicilié ...cedex, par la Selarl d'avocats Neveu Charles et associés ; la commune de Mougins demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202743 du 19 novembre 2013 du tribunal administratif de Nice qui l'a condamnée, à la demande de la compagnie Aviva assurances, subrogée en application de l'article L. 121-12 du code des assurances dans les droits du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Panoramic situé sur la colline de la Colle à Mougins, à verser à cette compagnie d'assurances la somme de 294 762,07 euros, assortie des intérêts capitalisés, eu égard à sa part de responsabilité retenue à 25 %, en réparation des dommages causés à cette copropriété par le glissement de terrain intervenu le 9 décembre 1990 sur le chemin communal du Ferrandou ;

2°) de rejeter la demande de la compagnie Aviva assurances ;

3°) de condamner la compagnie Aviva assurances à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Mougins soutient que :

* c'est à tort que les premiers juges ont rejeté l'exception de prescription quadriennale en application de la loi du 31 décembre 1968, dès lors que l'action introduite devant le tribunal de grande instance de Grasse en octobre 1998 par le syndicat de copropriétaires était prescrite eu égard à la faculté pour l'assureur de connaître, dès le dernier accedit en 1993 de l'expertise ordonnée par le juge judiciaire et sans attendre le dépôt du rapport de l'expert le 23 octobre 1995, l'origine du dommage ou de disposer d'indications suffisantes selon lesquelles le dommage pourrait être imputable à la commune ;

* la compagnie Aviva ne peut donc se prévaloir de cette procédure devant le juge judiciaire pour introduire en août 2012 devant le tribunal administratif de Nice une action indemnitaire dirigée contre la commune de Mougins ;

* en tout état de cause, si la Cour estimait que le délai de prescription a commencé à courir après le dépôt du rapport de l'expert soit le 1er janvier 1996, la demande de l'assureur était dirigée en 1998 contre la commune en raison de la création de la ZAC et de la délivrance des permis de construire délivrés par la commune sur une zone instable, donc sur le fondement d'une cause juridique différente de celle opposée en août 2012 devant le tribunal administratif de Nice pour responsabilité sans faute pour dommages de travaux publics subis par un tiers ;

* cette demande fondée sur une cause juridique distincte ne peut ainsi interrompre le délai de prescription ;

* c'est aussi à tort que les premiers juges ont estimé que la commune avait commis une faute en ne réalisant pas un ouvrage de soutènement sur son domaine public, le chemin de Ferrandou, pour éviter les glissements de terrain ;

* l'expert ne conclut pas à la faute de la commune pour ne pas avoir réalisé cet ouvrage de soutènement ;

Vu, enregistré le 28 mars 2014, le mémoire présenté pour la compagnie Aviva assurances, venant aux droits de la société Abeille assurances, représentée par ses représentants légaux en exercice, par la Selarl d'avocats Lefebvre - Reibell et associés, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la commune à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

L'assureur fait valoir que :

* le maire, à défaut de produire une délibération du conseil municipal de la commune de Mougins déléguant au maire le pouvoir d'interjeter appel du jugement litigieux, n'a pas qualité pour agir au nom de la commune et la requête de la commune est donc irrecevable ;

* Aviva établit avoir financé à hauteur de 1 179 048,30 euros les désordres subis par la copropriété à la suite de ce glissement de terrain ;

* c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté l'exception de prescription quadriennale opposée par la commune ;

* le point de départ du délai de prescription est la date à laquelle la victime est en mesure de connaître l'origine du dommage, soit en l'espèce le 1er janvier 1996 après le dépôt du rapport de l'expert le 23 octobre 1995, qui révèle l'origine des dommages au syndicat des copropriétaires ;

* mais ce délai a été interrompu par la saisine par le syndicat de copropriétaires en octobre 1998 du tribunal de grande instance de Grasse pour obtenir la condamnation notamment de la commune à l'indemniser ;

* cette procédure a interrompu ce délai de prescription jusqu'au premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée, soit en l'espèce le 1er janvier 1998, eu égard à l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 29 novembre 2007 ;

* dans cette instance, la responsabilité de la commune était expressément recherchée pour notamment ne pas avoir effectué les travaux confortatifs après le premier glissement de terrain survenu en 1984, soit sur le fondement de la même cause juridique que celle soulevée plus tard devant le juge administratif ;

* ce délai a été à nouveau interrompu par la demande en référé déposée devant le tribunal administratif de Nice par Aviva assurances le 8 septembre 2008, qui a trait au fait générateur de la créance, à savoir le glissement de terrain du 9 décembre 1990, dont se prévaut Aviva à l'égard de la commune ;

* le délai de prescription n'était ainsi pas expiré le 2 août 2012 lors de la saisine du tribunal administratif de Nice par Aviva assurances ;

* sur la responsabilité de la commune, le rapport de l'expert du 23 octobre 1995 affirme que l'instabilité du versant à l'origine du glissement de terrain intervenu le 9 décembre 1990 provient de l'inexécution d'ouvrages confortatifs de soutènement et de drainage en partie inférieure du versant, imputable à Escota en ce qui concerne l'autoroute et à la commune de Mougins en ce qui concerne le chemin communal du Ferrandou ;

* la commune ne conteste pas sérieusement en appel ces conclusions ;

* par jugement définitif du 13 mars 2012, le tribunal administratif a estimé que l'origine des désordres provenait pour moitié de la faute des constructeurs de la copropriété de l'ensemble immobilier le Panoramic, en partie haute du site, notamment par l'apport de remblais pour aménager la plate-forme de la piscine qui ont chargé la crête du talus et ont réactivé les glissements de terrain et pour l'autre moitié, de l'inexécution des ouvrages confortatifs de nature à engager à parts égales la responsabilité de la commune et d'Escota ;

* à défaut d'avoir formé tierce opposition, ce jugement est opposable à la commune ;

* c'est donc à bon droit que par le jugement attaqué, les premiers juges ont estimé que la commune était responsable à hauteur de 25 % et qu'elle devait lui rembourser, compte tenu de ce partage, la somme de 294 762,07 euros ;

Vu, enregistré le 1er juillet 2014, le mémoire présenté pour la commune de Mougins, représentée par son maire en exercice, par la Selarl d'avocats Neveu - Charles et associés, qui persiste dans ses précédentes écritures et soutient en outre que :

* sa requête d'appel est recevable ;

* la demande de l'assureur fondée en 1998 sur la responsabilité de la commune au titre des articles 1382 et 1384 du code civil, celles fondées en 2003 sur l'article 1384 de ce code et en 2012 sur la responsabilité sans faute pour dommages de travaux publics n'ont pas pu interrompre le délai de prescription ;

* à supposer même que ce délai ait été interrompu et qu'il a recommencé à courir le 1er janvier 2008, l'action engagée par l'assureur devant le tribunal administratif de Nice le 2 août 2012 était prescrite ;

* les premiers juges ont estimé à tort que ce délai a été à nouveau interrompu par la demande en référé déposée devant le tribunal administratif de Nice par Aviva assurances le 8 septembre 2008, alors que cette procédure n'est pas relative à la demande indemnitaire formée le 2 août 2012 devant le juge administratif ;

* l'assureur dans son dernier mémoire d'appel, renonce à engager la responsabilité sans faute de la commune au profit de la seule responsabilité pour faute ;

* le jugement définitif du 13 mars 2012 du tribunal administratif est revêtu de l'autorité relative de chose jugée ;

* les deux experts s'accordent à dire que seul un écran de protection qui aurait dû être édifié par les constructeurs de l'ensemble immobilier Le Panoramic aurait empêché tout glissement en amont et que l'absence de réalisation d'écran en aval par la commune est sans incidence sur les désordres survenus à la copropriété Le Panoramic ;

Vu, enregistré le 23 mars 2015, le mémoire présenté pour la compagnie Aviva assurances, venant aux droits de la société Abeille assurances, représentée par ses représentants légaux en exercice, par la Selarl d'avocats Lefebvre Reibell et associés, qui persiste dans ses précédentes écritures et fait valoir en outre que :

* la Cour statuera ce que de droit sur la recevabilité de l'appel de la commune ;

* c'est la pluralité de causes indissociables tant en amont qu'en aval du versant qui a contribué à la survenance du seul sinistre ;

* le fait que ni la commune, ni Escota n'aient réalisé à ce jour les travaux confortatifs préconisés par l'expert en partie basse du versant n'établit pas que la responsabilité de la commune n'est pas engagée ;

Vu la lettre du 19 juin 2015 informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative que la Cour est susceptible de soulever d'office l'irrégularité du jugement attaqué pour ne pas avoir statué sur la dévolution définitive des frais d'expertise du 17 janvier 2011 ;

Vu la réception le 2 juillet 2015 des pièces demandées à la compagnie Aviva assurances par la Selarl d'avocats Lefebvre Reibell et associés ;

Vu le mémoire en communication de pièces présenté le 6 juillet 2015 pour la commune de Mougins par la Selarl d'avocats Neveu Charles et associés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des assurances ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 septembre 2015 :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me C...pour la commune de Mougins et de Me D... du cabinet Lefebvre pour la compagnie Aviva assurances ;

Vu, enregistrée le 23 septembre 2015, la note en délibéré présentée pour la compagnie Aviva assurances par la Selarl d'avocats Lefebvre Reibell et associés ;

Vu, enregistrée le 25 septembre 2015, la note en délibéré présentée pour la commune de Mougins par la Selarl d'avocats Neveu Charles et associés ;

1. Considérant que la SCI Le Panoramic a fait édifier au cours des années 1988-1990 un grand ensemble immobilier en copropriété à usage d'habitation composé de deux groupes d'immeubles de 120 logements, d'une piscine et d'espaces verts quartier des Bréguières à Mougins, sur un terrain surplombant l'autoroute A8 Esterel-Côte d'Azur dont le concessionnaire est la société Escota et faisant partie d'une zone d'aménagement concertée créée sur la commune de Mougins ; que la réalisation de cet ensemble était couverte par une police unique de chantier souscrite auprès de la société Abeille Paix, devenue la compagnie Aviva assurances ; que la réception des travaux concernant les immeubles et les voiries et réseaux divers a été prononcée le 22 octobre 1990 ; que le 9 décembre 1990, un important glissement de terrain a traversé le chemin communal du Ferrandou entraînant le talus autoroutier sur la chaussée de l'autoroute A 8, ce qui a interrompu la circulation sur l'autoroute ; que ce glissement a détruit divers espaces verts, les plages de la piscine en cours d'achèvement et une partie de la voie d'accès de la copropriété Le Panoramic ; que, saisi par la société Cameval qui avait réalisé les travaux de la ZAC, le juge des référés du tribunal de grande instance de Grasse a, par ordonnance du 11 décembre 1990, ordonné une expertise aux fins notamment que l'expert donne son avis sur l'origine et les causes du glissement de terrain, qu'il préconise les mesures d'urgence à mettre en oeuvre et qu'il décrive les travaux de remise en état ; que l'expert M. B...a déposé son rapport le 23 octobre 1995 ; qu'au vu d'un pré-rapport d'expertise du 21 mai 1991, la compagnie Aviva assurances a préfinancé les travaux confortatifs urgents préconisés par l'expert pour un premier montant de 970 194,39 euros ; qu'à la suite du dépôt du rapport de l'expert, le syndicat des copropriétaires Le Panoramic a assigné les différentes parties concernées par le sinistre et leurs assureurs pour les voir condamner in solidum à lui payer le montant des travaux à réaliser et indemniser son préjudice ; que, par jugement du 30 septembre 2003, le tribunal de grande instance de Grasse s'est notamment déclaré incompétent pour statuer sur les conclusions dirigées contre la commune de Mougins ; que la cour d'appel d'Aix-en-Provence a, par arrêt du 29 novembre 2007, confirmé ce jugement en tant que le juge judiciaire s'était déclaré incompétent ; que la compagnie Aviva assurances, subrogée dans les droits du syndicat des copropriétaires Le Panoramic, a alors saisi le 8 septembre 2008 le juge des référés du tribunal administratif de Nice aux fins d'ordonner une expertise ; que, par ordonnance du 1er décembre 2008, ce juge a ordonné une expertise afin notamment de chiffrer le coût de remise en état et de déterminer les préjudices subis par le syndicat des copropriétaires ; que la compagnie Aviva assurances, subrogée dans les droits du syndicat des copropriétaires Le Panoramic, a aussi saisi le 15 septembre 2008 le tribunal administratif de Nice d'une demande tendant à la condamnation de la société Escota à lui rembourser la somme totale de 1 179 048,30 euros au titre de l'ensemble des travaux confortatifs ordonnés par le juge judiciaire, outre les frais de l'expertise, et financés par l'assureur ; que l'expert M. A...a déposé son rapport le 17 janvier 2011 ; que, par jugement définitif du 13 mars 2012, le tribunal administratif de Nice a estimé que l'origine des désordres devait être regardée comme provenant pour moitié de la faute des constructeurs de l'ensemble immobilier le Panoramic et que pour la moitié restante, la responsabilité de la commune de Mougins et de la société Escota était engagée à parts égales ; qu'il a en conséquence condamné la société Escota, seule attaquée dans cette instance, à rembourser 25 % de cette somme, soit 294 762,07 euros à la compagnie Aviva ; que, pour obtenir une réparation complémentaire par la commune, la compagnie Aviva assurances, légalement subrogée dans les droits et actions du syndicat des copropriétaires de l'immeuble " Le Panoramic " à hauteur de la somme de 1 179 048,30 euros en application de l'article L. 121-12 du code des assurances, a le 2 août 2012 demandé la condamnation de la commune de Mougins sur le fondement, à titre principal, de la responsabilité sans faute et, à défaut, de la responsabilité pour faute, à lui verser, à due concurrence de sa part susmentionnée de responsabilité, la somme de 294 762,07 euros assortie des intérêts capitalisés, soit 25 % de la totalité des indemnités qu'elle a versées ; que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont fait droit à sa demande ;

Sur la fin de non recevoir opposée par la compagnie Aviva :

2. Considérant que la commune de Mougins produit une délibération du conseil municipal autorisant le maire à " (16 °) intenter au nom de la commune les actions en justice (...) dans les cas définis par le conseil municipal. " ; que le conseil municipal peut légalement donner au maire une délégation générale pour ester en justice au nom de la commune pendant la durée de son mandat ; que la commune produit aussi une décision du maire du 8 janvier 2014 signée par délégation par l'adjoint aux affaires juridiques décidant de faire appel du jugement du 19 novembre 2013 du tribunal administratif de Nice et désignant la Selarl d'avocats Neveu et Charles pour représenter la commune dans cette instance ; que, par suite, la fin de non recevoir opposée par la compagnie Aviva et tirée du défaut d'habilitation du maire à interjeter appel au nom de la commune doit être écartée ;

Sur la responsabilité :

3. Considérant que les premiers juges ont estimé d'une part, que la commune de Mougins était pour moitié responsable pour faute pour ne pas avoir réalisé sur la partie basse du terrain, sur le chemin communal du Ferrandou, un ouvrage confortatif ce qui aurait contribué à la survenance le 9 décembre 1990 du sinistre sur la partie haute du terrain où est situé l'ensemble immobilier Le Panoramic et que d'autre part, les constructeurs de l'ensemble immobilier étaient pour l'autre moitié responsables des désordres litigieux pour n'avoir pris aucune mesure confortative de cet ensemble, de nature à exonérer la responsabilité de la commune à hauteur de 75 % et ont ainsi mis à la charge de la commune 25 % de la réparation demandée, soit la somme de 294 762,07 euros ;

En ce qui concerne la responsabilité pour faute de la commune :

4. Considérant que l'expert ne mentionne dans son rapport aucun manquement de la commune pour n'avoir pas procédé aux travaux de réalisation d'un dispositif de soutènement dans l'emprise du chemin communal ; que la compagnie Aviva n'invoque aucune loi ou règlement rendant obligatoire la réalisation de tels travaux dont la méconnaissance par la commune constituerait une faute ; que l'assureur ne peut utilement invoquer le jugement du 13 mars 2012 du tribunal administratif de Nice qui retenait l'absence de réalisation d'un tel ouvrage sur le domaine public communal pour limiter les désordres litigieux survenus en 1990, dès lors que ce jugement n'est pas revêtu de l'autorité de chose jugée à l'égard de la commune qui n'était pas partie dans cette instance ;

En ce qui concerne la responsabilité sans faute de la commune à l'égard des tiers :

5. Considérant qu'il résulte du rapport de l'expert du 23 octobre 1995 que les immeubles de la copropriété Le Panoramic ont été construits pour partie sur d'anciennes carrières remblayées qui avaient été exploitées jusqu'en 1983 par la société Lisnard-Rance frères, dans une zone instable ; que deux glissements de terrain ont d'ailleurs eu lieu le 3 décembre 1959 et le 25 mai 1984 sur la partie inférieure du glissement litigieux survenu le 9 décembre 1990 qui concerne le versant situé en contrebas de la copropriété et que la construction de l'autoroute A8 en 1960 avait elle aussi provoqué des déformations de la zone sous forme de glissements ; que si les sociétés Escota et Lisnard-Rance, la direction départementale de l'équipement des Alpes-Maritimes et la commune de Mougins ont conclu le 26 mai 1984, dès la survenance du second glissement, une convention en vue de procéder à des travaux d'urgence, ces travaux simplement conservatoires n'ont pas permis de traiter de manière définitive les glissements de terrain ;

6. Considérant que l'homme de l'art explique dans son rapport le déroulement du glissement litigieux le 9 décembre 1990 en trois phases successives, d'abord un mouvement au droit du chemin du Ferrandou en bas de la pente vers 18 h 15, ensuite un important éboulement sur la voie Julia en haut de la pente vers 21 h et enfin, un effondrement de la voie Julia et une déstabilisation de la zone de la piscine vers 21 h 15 ; qu'il explique que le glissement litigieux est du à une pluralité de causes, d'un côté la non-réalisation, notamment par la commune, de travaux de soutènement à la base du versant avec maintien d'un équilibre précaire, d'un autre côté, la réalisation de travaux pour la réalisation de l'ensemble immobilier Le Panoramic avec la surcharge provoquée par les remblais de la plateforme de la piscine et de la nouvelle voie Julia sur la crête du glissement, qui ont modifié les profils d'équilibre et que ce phénomène de glissement a été déclenché par les pluies importantes tombées le jour du sinistre, aggravé par les ruptures survenues sur les réseaux d'eau pluviale et d'eau potable à partir du moment où le terrain a commencé à se décrocher ; que, toutefois, l'expert, en produisant notamment des plans identifiant les zones supérieures et inférieures du glissement de terrain et localisant les ouvrages privés endommagés de la résidence Le Panoramic, seuls en litige dans la présente instance, précise la portée des manquements des parties à l'origine des dégâts en fonction de leur zone de survenance ; qu'il indique que si la nouvelle voie Julia, la piscine et les réseaux avaient été implantés et réalisés en zone stable ou en zone instable mais avec des ouvrages confortatifs adaptés réalisés par les constructeurs de l'ensemble immobilier, il n'y aurait pas eu de glissement de terrain à l'amont du versant ; qu'il ajoute que si seule la zone à l'aval du versant avait été confortée par la commune avant le glissement de terrain, cette partie basse de la pente n'aurait certes pas été déstabilisée mais le glissement aurait eu lieu dans la partie amont du versant ; qu'ainsi la réalisation d'un confortement dans l'emprise du chemin communal n'aurait pas empêché le glissement du terrain dans la partie supérieure du talus, ni par suite la survenance des seuls dommages dont il est demandé réparation, à savoir le coût de la construction d'un mur de soutènement et d'une paroi berlinoise dans l'enceinte de la copropriété Le Panoramic ; que, dans ces conditions, la commune est fondée à soutenir que le lien de causalité direct entre l'inexécution d'un dispositif de soutènement sur le chemin du Ferrandou à l'aval du versant et la survenance d'un glissement de terrain dans la partie supérieure du talus ayant nécessité la réalisation de travaux confortatifs financés par la compagnie Aviva n'est pas établi ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont condamné la commune à indemniser la compagnie d'assurance ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'exception de prescription quadriennale opposée par la commune, que la commune de Mougins est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges l'ont condamnée à verser à la compagnie Aviva assurances la somme de 294 762,07 euros assortie des intérêts capitalisés ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que la commune de Mougins, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamnée à verser quelque somme que ce soit à la compagnie Aviva assurances au titre des frais d'instance non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la compagnie Aviva assurances à verser à la commune de Mougins la somme de 2 000 euros au titre de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 19 novembre 2013 du tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : La demande de la compagnie Aviva assurances est rejetée.

Article 3 : La compagnie Aviva assurances versera à la commune de Mougins la somme de 2 000 euros à au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Mougins et à la compagnie Aviva assurances.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2015, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- Mme Carassic, première conseillère,

- MmeE..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2015.

La rapporteure,

M-C. CARASSICLe président,

T. VANHULLEBUS

La greffière,

D. GIORDANO

La République mande et ordonne au préfet des Alpes-Maritimes en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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N° 14MA00111 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA00111
Date de la décision : 08/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02-03-02 Travaux publics. Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics. Lien de causalité. Absence.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : SELARL NEVEU, CHARLES et ASSOCIES - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-10-08;14ma00111 ?
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