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20/09/2018 | FRANCE | N°18DA00497

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 20 septembre 2018, 18DA00497


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 14 janvier 2018 par lesquelles le préfet du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et d'enjoindre au préfet de procéder à un nouvel examen de sa situation en lui délivrant sans délai une autorisation provisoire de

séjour, sous astreinte de 152,45 euros par jour de retard.

Par un jugement n...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 14 janvier 2018 par lesquelles le préfet du Pas-de-Calais lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et d'enjoindre au préfet de procéder à un nouvel examen de sa situation en lui délivrant sans délai une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 152,45 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1800391 du 23 janvier 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé les décisions du 14 janvier 2018 par lesquelles le préfet du Pas-de-Calais a fait obligation de quitter le territoire français sans délai à M.C..., a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et lui a enjoint de procéder à un nouvel examen de la situation de M.C..., en lui délivrant, dans l'attente de réexamen, une autorisation provisoire de séjour.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mars 2018, le préfet du Pas-de-Calais demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M.C....

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (CE) n° 1987/2006 du 20 décembre 2006 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Cassara, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant algérien né le 5 août 1991, a été interpellé par les services de la police nationale à Coquelles, sur l'emprise du lien fixe transmanche. Par décisions du 14 janvier 2018, le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français, sans délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Le préfet du Pas-de-Calais relève appel du jugement du 23 janvier 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé ces décisions.

Sur le motif d'annulation du jugement attaqué :

2. Il ressort du jugement attaqué que, pour annuler l'arrêté en litige, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a estimé qu'en considérant que M. C...a été mis à même de formuler des observations écrites alors qu'il n'en a pas eu la possibilité et qu'il n'a pas été averti qu'il pouvait recourir à un interprète pour ce faire, le préfet du Pas-de-Calais a privé l'intéressé d'une garantie et qu'au surplus, il n'est pas démontré que les observations que M. C... aurait pu faire valoir, en particulier s'agissant des années durant lesquelles il a séjourné en Allemagne où, selon ses déclarations à l'audience, il aurait été admis provisoirement au séjour jusqu'en février 2018, n'auraient pas exercé d'influence sur la décision prise, l'autorité préfectorale ayant alors pu édicter une décision de remise dans ce pays plutôt qu'une obligation de quitter le territoire français et que, dans ces conditions, M. C...est fondé à soutenir que la décision querellée lui faisant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité, et à en demander l'annulation pour ce motif, ainsi que l'annulation des décisions subséquentes par lesquelles il a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français.

3. Le droit d'être entendu, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne et consacrés par la Charte des droits fondamentaux, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne.

4. Toutefois, l'intéressé a pu, le 14 janvier 2018, présenter ses observations qui ont été consignées dans un procès-verbal d'audition établi par un agent de police judiciaire à la suite de son interpellation. Il a été interrogé sur son âge, sa nationalité et son identité, qu'il avait tenté de dissimuler, ayant été trouvé en possession d'une carte nationale d'identité appartenant à un tiers, sur les conditions de son entrée et de son séjour sur le territoire français ainsi que sur sa situation personnelle et familiale en France et dans son pays d'origine. En particulier, M. C...s'est aussi exprimé au sujet de sa situation en Allemagne ainsi que de ses moyens d'existence. Il a également été avisé du fait qu'il pouvait faire l'objet, notamment, de mesures d'éloignement, d'assignation à résidence ou de placement en rétention et d'interdiction de retour sur le territoire français, et a été mis à même de présenter des observations sur cette éventualité. M.C..., en outre, n'établit, ni même n'allègue, qu'il aurait disposé d'autres informations tenant à sa situation personnelle qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise à son encontre la mesure d'éloignement contestée et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à l'édiction d'une telle mesure. Il ne ressort ainsi ni de la décision attaquée, ni de ce procès-verbal, ni des autres pièces du dossier que le préfet du Pas-de-Calais n'aurait pas mis à même l'intéressé de présenter des observations écrites et ne lui aurait pas permis, sur sa demande, de faire valoir des observations orales. Dans ces conditions, M. C...n'a pas été privé du droit d'être entendu et de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision en litige. Dès lors, le préfet du Pas-de-Calais est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a retenu ce motif pour annuler la décision attaquée et, par voie de conséquence, la décision fixant le pays de destination et celle interdisant le retour sur le territoire français.

5. Il appartient, toutefois, à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C...devant le tribunal administratif de Lille.

Sur les moyens communs aux décisions attaquées :

6. Eu égard au caractère réglementaire des arrêtés de délégation de signature, soumis à la formalité de publication, le juge peut, sans méconnaître le principe du caractère contradictoire de la procédure, se fonder sur l'existence de ces arrêtés alors même que ceux-ci ne sont pas versés au dossier. Par un arrêté n° 2017-10-124 du 1er septembre 2017, publié le même jour au recueil spécial n° 80 des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Pas-de-Calais a donné délégation à M. A...D..., sous-préfet de Calais, à l'effet de signer, notamment, les décisions contestées. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions en litige, qui manque en fait, doit être écarté.

7. Les décision contestées portant obligation de quitter les territoire français, sans délai de départ volontaire et fixant le pays de destination, dont la motivation n'est pas stéréotypée et qui n'ont pas à faire état de l'ensemble des éléments de fait caractérisant la situation de l'intéressé, comportent les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et qui permettent à M. C...de les discuter et au juge de les contrôler. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de ces décisions doivent être écartés.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Il ressort des pièces du dossier que l'entrée en France de M. C...est très récente, l'intéressé ayant été présent en France depuis seulement une semaine selon ses déclarations à la date de l'arrêté attaqué. Il est dépourvu de toute attache privée ou familiale en France, à supposer même que deux de ses tantes y résideraient et alors qu'il ne donne aucune précision sur la régularité de leur séjour, et ne dispose, par ailleurs, ni de ressources propres, ni d'un logement sur le territoire national, et n'a pas, au demeurant, justifié de telles attaches et d'un droit au séjour en Allemagne où il aurait suivi une formation. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour de M.C..., l'obligation de quitter le territoire français en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît ainsi pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. M. C... ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir du principe de non-refoulement énoncé notamment par l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, dont le paragraphe 1 stipule qu'" aucun des Etats contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ", dès lors que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas pour objet de déterminer le pays à destination duquel il sera renvoyé et n'a pas pour effet de le contraindre à retourner dans son pays d'origine. Pour le même motif, le requérant ne saurait utilement se prévaloir des risques auxquels il se dit exposé en Algérie à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

10. Ainsi qu'il a été dit au point 4, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal d'audition de M. C... par les services de police le 14 janvier 2018, que celui-ci aurait manifesté l'intention de demander l'asile en France, ou qu'il aurait été empêché de le faire. L'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre n'a, dès lors, pas méconnu le droit constitutionnel de l'asile.

11. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, M. C...n'a pas sollicité l'asile en France au cours de son audition par les services de police. Interrogé sur d'éventuelles démarches administratives dans d'autres Etats membres de l'Union européenne, il a répondu n'en avoir effectué aucune. Il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir, en tout état de cause, que le préfet du Pas-de-Calais aurait commis une erreur de droit en lui faisant obligation de quitter le territoire français sans tenir compte de son besoin de protection internationale.

12. Il ne ressort pas des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce pour les motifs énoncés au point 8, l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. C...serait entachée d'une erreur manifeste commise par le préfet du Pas-de-Calais dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle.

13. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français est illégale.

Sur la décision portant refus de délai de départ volontaire :

14. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 13 que M. C...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision portant refus de délai de départ volontaire.

15. Aux termes des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) ".

16. Il ressort des pièces du dossier que M. C...ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Dès lors, il entre dans le champ des dispositions citées au point précédent qui permettent au préfet du Pas-de-Calais de l'obliger à quitter le territoire français sans délai. Il ne se prévaut d'aucune circonstance particulière qui aurait justifié de lui octroyer un délai de départ volontaire. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

17. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de délai de départ volontaire est illégale.

Sur la décision fixant le pays de destination :

18. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 13, que M. C...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.

19. M. C...soutient qu'il encourt des risques en cas de retour en Algérie en raison de ses opinions politiques, après avoir critiqué publiquement le régime algérien. Il aurait été arrêté deux fois pas les services de renseignement, interrogé et menacé, alors qu'il était étudiant en sciences politiques. Toutefois, il n'établit pas, par les pièces du dossier, le caractère réel, personnel et actuel des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine. Il n'a au demeurant, pas demandé l'asile en Allemagne, pendant qu'il y séjournait, depuis 2013 selon ses déclarations, ou en France et dans les pays qu'il a traversés. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

20. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination est illégale.

Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

21. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4, 13 et 17, que M. C...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de la décision lui refusant un délai de départ volontaire à l'encontre de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français.

22. Aux termes du point 1 de l'article 42 du règlement (CE) n° 1987/2007 du 20 décembre 2006 : " Les ressortissants de pays tiers qui font l'objet d'un signalement introduit en vertu du présent règlement sont informés conformément aux articles 10 et 11 de la directive 95/46/CE. Cette information est fournie par écrit, avec une copie de la décision nationale, visée à l'article 24, paragraphe 1, qui est à l'origine du signalement, ou une référence à ladite décision ".

23. Il résulte des termes de l'article 2 de l'arrêté contesté que le préfet du Pas-de-Calais a informé M. C...qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. L'article 4 du même arrêté communique à l'intéressé diverses informations relatives à l'identité du responsable du traitement, les finalités de celui-ci et les conditions dans lesquelles il peut exercer un droit d'accès et de rectification aux données qui le concernent. Dès lors, M. C...n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas reçu l'information prévue par les dispositions citées au point précédent, circonstance qui serait, au demeurant, sans influence sur la légalité de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français elle-même.

24. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

25. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.

26. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifient sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

27. La décision par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a fait interdiction à M. C...de revenir sur le territoire français pour une durée d'un an mentionne le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle fait état de son entrée irrégulière sur le territoire français et du caractère récent de son séjour irrégulier, ainsi que de la circonstance qu'il n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, et n'est pas motivée par une menace pour l'ordre public que constituerait sa présence. Par suite, la décision attaquée, qui comporte l'ensemble des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde et répond aux exigences rappelées aux point précédents, est suffisamment motivée.

28. Il ressort des pièces du dossier que M. C...est entré irrégulièrement sur le territoire français et y séjournait, selon ses déclarations lors de son audition par les services de police, depuis seulement une semaine, lorsqu'il a été interpellé. Il ne se prévaut d'aucune attache privée et familiale en France, à l'exception de deux tantes à propos desquelles il ne donne aucune précision sur la régularité de leur séjour, et indique que son objectif était de gagner le Royaume-Uni. En outre, notamment pour les motifs exposés au point 19, aucune circonstance humanitaire ne justifiait qu'il ne fasse pas l'objet d'une interdiction de retour d'un an. Par suite, en prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, le préfet du Pas-de-Calais n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard des dispositions citées au point 24 et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

29. Il résulte de tout ce qui précède qu'aucun des moyens soulevés par M. C...à l'encontre de l'arrêté préfectoral n'est fondé. Par suite, le préfet du Pas-de-Calais est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé les décisions en litige et a enjoint au préfet du Pas-de-Calais de procéder à un nouvel examen de la situation de M. C...et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 23 janvier 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Lille est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...E...C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Pas-de-Calais.

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N°18DA00497


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA00497
Date de la décision : 20/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Hervé Cassara
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-09-20;18da00497 ?
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