Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La polyclinique Vauban a demandé au tribunal administratif de Lille l'annulation de la décision du 14 janvier 2013 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé Nord-Pas-de-Calais lui a infligé une sanction financière d'un montant de 70 000 euros.
Par un jugement n° 1301516 du 1er avril 2015, le tribunal administratif de Lille a annulé cette décision.
Procédure devant la cour :
Par un recours, enregistré le 14 août 2015, le ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lille du 1er avril 2015 ;
2°) de rejeter la demande présentée par la polyclinique Vauban devant le tribunal administratif de Lille.
Il soutient que les médecins contrôleurs n'ont pas apprécié la pertinence des soins réalisés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mars 2016, la polyclinique Vauban conclut au rejet du recours et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le directeur de l'agence régionale de santé n'a pas saisi la commission de contrôle dans le délai d'un mois ;
- la preuve d'un manquement aux règles de facturation n'est pas apportée ;
- les médecins contrôleurs ont apprécié la pertinence des soins en méconnaissance des dispositions du code de la sécurité sociale ;
- les décisions médicales ne relèvent pas de la responsabilité de l'établissement ;
- la sanction n'est pas justifiée par la gravité et le caractère réitéré des manquements ;
- la sanction prononcée présente un caractère disproportionné ;
- l'administration ne pouvait lui appliquer une double sanction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laurent Domingo, premier conseiller,
- les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la polyclinique Vauban.
1. Considérant que la polyclinique Vauban a fait l'objet, du 16 au 19 novembre 2009, d'un contrôle externe de la facturation des séjours de l'année 2008 classés dans les groupes homogènes de malades (GHM) 24M11Z (gastroentérites et affections diverses du tube digestif), 24M10Z (cardiologie), 24M36Z (divers motifs de recours aux soins) et les GHM avec extension " W " (séjours avec complications ou morbidités associées) ; qu'à l'issue de ce contrôle, le directeur général de l'Agence régionale de santé du Nord-Pas-de-Calais a engagé une procédure de sanction financière à l'encontre de la Polyclinique Vauban au titre de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale ; que le ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes relève appel du jugement du 1er avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 14 janvier 2013 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé du Nord-Pas-de-Calais a, au terme de cette procédure, infligé à la polyclinique Vauban une sanction financière d'un montant de 70 000 euros ;
2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale : " Les établissements de santé sont passibles, après qu'ils ont été mis en demeure de présenter leurs observations, d'une sanction financière en cas de manquement aux règles de facturation fixées en application des dispositions de l'article L. 162-22-6, d'erreur de codage ou d'absence de réalisation d'une prestation facturée " ;
3. Considérant que ces dispositions permettent au directeur général d'une agence régionale de santé de prendre à l'encontre d'un établissement de santé une sanction financière lorsqu'un contrôle externe de la tarification à l'activité réalisé dans cet établissement met en évidence des manquements aux règles de facturation fixées en application des dispositions de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale, des erreurs de codage ou des absences de réalisation d'une prestation facturée ; que ce contrôle, qui porte sur la régularité et la sincérité de la facturation, exclut tout contrôle de la pertinence des soins apportés par les établissements de santé à leurs patients ; qu'ainsi, le contrôle des modalités de la facturation ne saurait avoir ni pour objet, ni pour effet de remettre en cause le bien-fondé des actes médicaux et des prescriptions médicales réalisés ;
4. Considérant que s'il ressort des termes de la décision attaquée que, pour prendre la sanction en litige, le directeur général de l'agence régionale de santé du Nord-Pas-de-Calais s'est fondé sur la circonstance que, pour chacune des catégories de séjours contrôlés, la polyclinique Vauban avait commis des erreurs de codage et des manquements aux règles de facturation, il résulte toutefois des éléments mentionnés dans le rapport de synthèse établi à la suite du contrôle précité que les médecins en charge du contrôle de la polyclinique Vauban ont porté à plusieurs reprises, notamment à propos des actes effectués dans le service des urgences ne relevant pas médicalement d'une prise en charge en hospitalisation de courte durée mais justifiant d'un " ATU ", une appréciation sur la pertinence des soins dispensés ; qu'il en a été de même dans la partie du rapport consacré aux " constats supplémentaires " ; que ces éléments de fait sont corroborés par les listes des anomalies constatées dans les dossiers contrôlés, annexées à la décision du 14 janvier 2013, qui mentionnent pour plusieurs dossiers des séjours classés dans les groupes " gastroentérites et affections diverses du tube digestif ", " cardiologie " et " divers motifs de recours aux soins ", l'existence d'une " prestation non médicalement justifiée ", qui a servi en fait de fondement à la remise en cause de la politique de facturation appliquée par l'établissement de santé ; que le ministre n'établit pas que les manquements ainsi relevés ne correspondraient pas à un contrôle de la pertinence des soins prescrits par les médecins de la polyclinique ; que de tels manquements ne sont pas au nombre de ceux que le directeur général de l'agence régionale de santé du Nord-Pas-de-Calais pouvait retenir pour prendre une sanction sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale ; que c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont annulé, pour ce motif, la décision du 14 janvier 2013 ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 14 janvier 2013 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé Nord-Pas-de-Calais a infligé à la polyclinique Vauban une sanction financière d'un montant de 70 000 euros ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la polyclinique Vauban et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à la polyclinique Vauban une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et à la polyclinique Vauban.
Copie sera adressée au directeur général de l'agence régionale de santé Nord-Pas-de-Calais-Picardie.
Délibéré après l'audience du 21 juin 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Michel Hoffmann, président de chambre,
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- M. Laurent Domingo, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 juillet 2016.
Le rapporteur,
Signé : L. DOMINGOLe président de chambre,
Signé : M. B...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Marie-Thérèse Lévèque
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N°15DA01390