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16/04/2024 | FRANCE | N°23BX01696

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 5ème chambre, 16 avril 2024, 23BX01696


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2021 par lequel le maire de Mézos a accordé à la société ADS un permis de construire pour la construction d'un bâtiment comprenant quatre logements, sur les parcelles cadastrées section AE nos 280, 281, 283, 288 et 293 situées au lieu-dit Faroy à Mézos.



Par un jugement n°2200122 du 20 avril 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.
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Procédure devant la cour :



Par une requête et des pièces complémentaires enregistrées l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2021 par lequel le maire de Mézos a accordé à la société ADS un permis de construire pour la construction d'un bâtiment comprenant quatre logements, sur les parcelles cadastrées section AE nos 280, 281, 283, 288 et 293 situées au lieu-dit Faroy à Mézos.

Par un jugement n°2200122 du 20 avril 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces complémentaires enregistrées les 22 et 29 juin 2023, M. A..., représenté par Me Lonné, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2200122 du tribunal administratif de Pau du 20 avril 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2021 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mézos la somme de 1 500 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a intérêt à agir contre l'arrêté attaqué ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme dès lors que la notice paysagère jointe au dossier de demande de permis de construire est insuffisante, notamment s'agissant de l'impact du projet sur son environnement ;

- le projet est de nature à créer une sujétion parfaitement disproportionnée pour le fonds servant à ce qui avait été originellement prévu ; ce contentieux relève certes du juge civil mais conduira nécessairement à ce que le projet se retrouve sans accès ;

- le chemin d'accès est insuffisant pour desservir le projet qui consiste en la construction de 4 logements et suppose donc le passage de plus d'une dizaine de véhicules supplémentaires ; des travaux sont ainsi nécessaires, or aucune permission de voierie n'a été sollicitée ; les prescriptions sous couvert desquelles le permis litigieux a été délivré ne permettent pas de pallier ces insuffisances dès lors qu'elles dépendent pour certaines de la bonne volonté des tiers, notamment s'agissant de l'enlèvement des boîtes aux lettres ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article 1 du règlement de la zone UD du plan local d'urbanisme (PLU) de Mézos dès lors que, compte tenu de ses caractéristiques, il heurte la tranquillité, la commodité et la bonne tenue du voisinage ; de manière générale, il est incompatible avec le règlement d'une zone d'habitat dispersé qui s'oppose, de manière intrinsèque, à l'accueil d'un projet d'habitat groupé de 4 logements.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 août 2023, la commune de Mézos, représentée par Me Logeais, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'appelant la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, la demande de première instance était irrecevable :

--- en l'absence d'accomplissement des formalités de notification prévues par les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

--- à défaut d'intérêt à agir du requérant.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er septembre 2023, la société civile immobilière (SCI) ADS, représentée par Me Darzacq, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'appelant la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable car tardive ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 4 juillet 2023 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 1er février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Gueguein, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 2 août 2021, la société civile immobilière (SCI) ADS a déposé une demande de permis de construire pour la réalisation d'un bâtiment de quatre logements, pour une surface de plancher totale de 332 m², sur un terrain situé lieu-dit Faroy à Mézos (Landes). Par arrêté du 22 novembre 2021, le maire de Mézos a délivré à la société pétitionnaire l'autorisation sollicitée. M. A..., voisin immédiat du projet et propriétaire du fonds servant à la desserte du projet, a demandé l'annulation de cet arrêté. Par jugement du 20 avril 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 20 avril 2023.

Sur la légalité de l'arrêté du 22 novembre 2021 :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; (...)".

3. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

4. Le requérant soutient que la notice paysagère jointe au dossier de demande de permis de construire est insuffisante s'agissant de l'impact du projet sur son environnement, ce qui aurait empêché le service instructeur d'apprécier le rendu d'un tel projet dans un paysage resté jusqu'alors à l'état naturel. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la notice descriptive indique les caractéristiques du projet, et notamment ses dimensions et le parti architectural retenu consistant en une construction " bois avec bardage vertical ". Elle précise que " le terrain est totalement plat et planté de quelques pins et chênes verts ", que " les arbres seront conservés sauf au niveau de l'emprise de la construction " et qu'il " n'est pas prévu de clôtures ni portail ". Y sont joints un plan de masse reportant l'ensemble de ces éléments et plusieurs photographies des lieux, représentant de manière détaillée l'environnement proche comme lointain, avant et après construction, permettant au service instructeur de porter une appréciation sur l'insertion du projet dans son environnement. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le dossier de permis de construire en litige méconnaitrait les dispositions de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Mézos, applicable à la zone UD : " Les constructions et installations doivent être desservies par des voies dont les caractéristiques correspondent à la destination de l'immeuble et permettent, notamment, l'accès permanent en tout temps des véhicules de secours et de lutte contre l'incendie. / Les accès devront être aménagés de façon à garantir la sécurité des utilisateurs de la voie publique. / (...) ". Aux termes de l'article 682 du code civil : " Le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner ".

6. D'une part, le permis de construire, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme. Dès lors, l'autorité compétente et, en cas de recours, le juge administratif doivent, pour l'application des règles d'urbanisme relatives à la desserte et à l'accès des engins d'incendie et de secours, s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie.

7. D'autre part, l'administration ne peut assortir une autorisation d'urbanisme de prescriptions qu'à la condition que celles-ci, entraînant des modifications sur des points précis et limités et ne nécessitant pas la présentation d'un nouveau projet, aient pour effet d'assurer la conformité des travaux projetés aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.

8. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'acte de propriété notarié en date du 30 août 2010 produit par le requérant, que le terrain de ce dernier est grevé d'une servitude de passage " sur une bande de terrain de six mètres de largeur, prise, à partir de la route départementale n° 167, le long de la limite ouest du terrain " au profit du terrain d'assiette du projet en litige. Si le requérant admet en appel que la question de la portée et de la validité de cette servitude de passage, dont l'existence n'est pas contestée, relève du juge judiciaire, il maintient que ce chemin, qui permet de desservir le projet depuis la voie publique, est insuffisant et que sa suffisance ne peut être, légalement, conditionnée à des travaux hypothétiques.

9. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le permis de construire en litige a été accordé sous réserve des prescriptions émises par le service départemental d'incendie et de secours dans son avis du 21 octobre 2021 et de celles émises par le conseil départemental, UTD Morcenx, dans son avis du 22 octobre 2021 relatives aux caractéristiques de la voie d'accès existante. Il ressort de ces avis que, d'une part, la voie d'accès au projet devra respecter une largeur minimale de 3 mètres et une portance correspondant au passage des véhicules de secours et d'incendie, et d'autre part, qu'un aménagement doit être réalisé au niveau de l'accès à la route départementale n° 167 (RD 167) consistant dans le déplacement de boites aux lettres, qui en l'état réduisent la largeur de croisement des véhicules. Par suite, sans qu'il puisse être utilement soutenu que ces travaux sont conditionnés à l'accord de tiers ou qu'aucune permission de voirie n'a été encore sollicitée par la pétitionnaire, il ressort des pièces du dossier que ces prescriptions, qui portent sur des points précis et limités, ont pour effet d'assurer la suffisance de la voie de desserte conformément aux dispositions précitées de l'article 3 du règlement de la zone UD du PLU de Mézos. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la desserte serait insuffisante pour assurer le passage d'une dizaine de véhicules supplémentaires, induit par le projet, doit être écarté.

10. En troisième lieu, la zone UD est définie par le règlement du PLU de Mézos comme une " zone de périphérie de centre bourg, de faible densité, à caractère principal d'habitat et d'activités, dans laquelle domine le caractère discontinu des constructions ". En outre, l'article 1er du même règlement interdit notamment " les constructions ou installations qui, par leur nature sont incompatibles avec la sécurité, la tranquillité, la commodité ou la bonne tenue du voisinage ".

11. Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que, quand bien même il consiste en la construction d'un bâtiment collectif de quatre logements d'une surface de plancher de 332 m², le projet, qui se présente de plain-pied, entièrement recouvert de bardage en bois, et qui s'implante sur un terrain arboré d'environ 4800 m², serait de nature à porter atteinte à la sécurité, à la tranquillité, à la commodité ou à la bonne tenue du voisinage ou à remettre en cause le caractère de la zone dans lequel il s'implante. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la demande de première instance, invoquée à titre subsidiaire en appel, et sur la fin de non-recevoir opposée par la société pétitionnaire en défense, que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 22 novembre 2021.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Mézos, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par le requérant à ce titre. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du requérant une somme de 1 500 euros à verser au même titre à la commune de Mézos, et une somme de 1 500 euros à verser à la société ADS.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera une somme de 1 500 euros à la commune de Mézos au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : M. A... versera une somme de 1 500 euros à la société ADS au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la société ADS et à la commune de Mézos.

Délibéré après l'audience du 26 mars 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Sébastien Ellie, premier conseiller,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 avril 2024.

La rapporteure,

Héloïse C...

La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au préfet des Landes en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX01696


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01696
Date de la décision : 16/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Héloïse PRUCHE-MAURIN
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : SELARL LAURE DARZACQ

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-16;23bx01696 ?
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