La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/04/2024 | FRANCE | N°21BX02843

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 5ème chambre, 16 avril 2024, 21BX02843


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'association La Demeure Historique, l'association Sepanso Dordogne, l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac, la société B... Enterprises inc. et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2018 par lequel la préfète de la Dordogne a délivré au département de la Dordogne une autorisation unique sur le fondement de l'article L. 214-3 du code de l'environneme

nt pour la réalisation des travaux et l'exploitation des aménagements du contournement ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association La Demeure Historique, l'association Sepanso Dordogne, l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac, la société B... Enterprises inc. et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2018 par lequel la préfète de la Dordogne a délivré au département de la Dordogne une autorisation unique sur le fondement de l'article L. 214-3 du code de l'environnement pour la réalisation des travaux et l'exploitation des aménagements du contournement du bourg de Beynac-et-Cazenac sur le territoire des communes de Castelnaud-la-Chapelle, Vézac et Saint-Vincent-de-Cosse.

Par des jugements n° 1800744, 1800970 et 1801193 du 9 avril 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté préfectoral du 29 janvier 2018 et a enjoint au département de la Dordogne de procéder à la démolition des éléments de construction déjà réalisés et à la remise en état des lieux.

Par un arrêt n° 19BX02327, 19BX02367, 19BX02369, 19BX02378, 19BX02421, 19BX02422, 19BX02423, 19BX02424 du 10 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté les requêtes du département de la Dordogne tendant à l'annulation des jugements n°s 1800744, 1800970 et 1801193 du tribunal administratif de Bordeaux du 9 avril 2019, a enjoint au département de la Dordogne d'engager le processus de démolition des éléments construits hors des berges et du lit de la Dordogne dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et de procéder à l'ensemble des opérations de démolition des éléments construits de l'ouvrage de contournement et de remise en état des lieux dans un délai global de douze mois à compter de la notification de cet arrêt et a mis à la charge du département de la Dordogne le versement à la société B... Enterprises inc, à Mme B... et à M. G..., pris ensemble, d'une somme globale de 1 500 euros, à l'association Sepanso Dordogne et à l'Association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac, prises ensemble, d'une somme globale de 1 500 euros et à l'Association de sauvegarde de la vallée de la Dordogne, d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure d'exécution :

Par un arrêt n° 21BX02843, 21BX02844, 21BX02845 du 7 juillet 2022, la cour, statuant sur les requêtes de l'association La demeure historique, d'une part, de l'association Sepanso Dordogne et de l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac, d'autre part, et de la société B... Enterprises inc., de Mme D... B... et de M. E... G..., enfin, a :

- prononcé une astreinte définitive à l'encontre du département de la Dordogne s'il ne justifiait pas avoir, dans les six mois suivant la notification de l'arrêt, engagé le début des travaux de démolition ordonnés par la cour dans son arrêt du 10 décembre 2019 et fixé le taux de cette astreinte définitive à 3 000 euros par jour, à compter de l'expiration du délai de six mois suivant la notification de l'arrêt, jusqu'au début effectif des travaux,

- prononcé une astreinte à l'encontre du département de la Dordogne s'il ne justifiait pas avoir, dans les douze mois suivant la notification de l'arrêt, procédé à la réalisation de l'ensemble des travaux de démolition et à la remise en état des lieux et fixé le taux de cette astreinte à 5 000 euros par jour, à compter de l'expiration du délai de douze mois suivant la notification de l'arrêt, jusqu'à l'achèvement des travaux,

- et mis à la charge du département de la Dordogne le versement de la somme de 1 500 euros à l'association La Demeure Historique, de la somme de 1 500 euros globalement à l'association Sepanso Dordogne et à l'association de défense de la vallée de la Dordogne- Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac, et de la somme de 1 500 euros globalement à la société B... Enterprises inc., à Mme B... et à M. G... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un arrêt n° 21BX02843, 21BX02844, 21BX02845, 23BX01074 du 4 juillet 2023, la cour, statuant sur les requêtes de l'association La demeure historique, d'une part, de l'association Sepanso Dordogne et de l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac, d'autre part, et de la société B... Enterprises inc., de Mme D... B..., de M. E... G... et de M. et Mme F..., enfin, a

- mis à la charge du département de la Dordogne le versement à l'association La demeure historique de la somme de 163 000 euros, à l'association Sepanso Dordogne et à l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac de la somme de 163 000 euros et, enfin, à la société B... Enterprises inc., à Mme B..., à M. G... et à M. et Mme F..., de la somme de 163 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte définitive prononcée à l'article 1er de l'arrêt du 7 juillet 2022 ;

- maintenu le taux des astreintes prononcées par l'arrêt du 7 juillet 2022 à 3 000 euros et à 5 000 euros par jour de retard ;

- mis à la charge du département de la Dordogne deux sommes de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- rejeté le surplus des conclusions des requérants ;

- et rejeté les conclusions du département de la Dordogne tendant à la suspension des mesures prescrites par les articles 1er et 2 de l'arrêt de la cour du 7 juillet 2022 jusqu'à ce que les services de l'Etat achèvent l'instruction du nouveau projet poursuivi et à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

I°) Instance n° 21BX02843

Par un mémoire enregistré le 2 octobre 2023, le département de la Dordogne, représenté par Me Zinamsgvarov, porte à la connaissance de la juridiction des procès-verbaux de constat des 10 juillet, 30 août et 7 septembre 2023.

Il soutient que :

- ces documents constatent l'exécution en régie des travaux de démolition ;

- le dossier de consultation des entreprises a été repris pour permettre d'engager les travaux en régie afin de s'affranchir des délais de la commande publique ;

- la démolition ordonnée pose toujours les difficultés dont il a été précédemment fait état : des aléas et risques environnementaux très forts, un délai global de 28 mois minimum à 40 mois maximum, hors aléas, pour respecter les procédures à mettre en œuvre, le pont-rail des Milandes qui n'est toujours pas la propriété de la collectivité et un coût de démolition compris entre 9,4 et 14,6 millions d'euros TTC.

Par un mémoire enregistré le 1er décembre 2023, le département de la Dordogne, représenté par Me Zinamsgvarov, porte à la connaissance de la juridiction des procès-verbaux de constat des 18 septembre, 26 octobre et 10 novembre 2023.

Il soutient que :

- ces documents constatent l'exécution en régie des travaux de démolition qui ont débuté le 10 juillet 2023 ;

- le dossier de consultation des entreprises a été repris pour permettre d'engager les travaux ;

- la démolition ordonnée pose toujours les difficultés dont il a été précédemment fait état : des aléas et risques environnementaux très forts mis en avant par une expertise du Cerema, l'impossibilité de respecter les délais compte tenu de l'obligation de respecter la procédure de la commande publique, le pont-rail des Milandes qui n'est toujours pas la propriété de la collectivité mais pour lequel un protocole d'accord est en cours.

Par un mémoire enregistré le 19 janvier 2024, l'association La demeure historique, représentée par le cabinet Briard, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande la liquidation à son profit de l'astreinte définitive et de l'astreinte provisoire prononcées par l'arrêt du 7 juillet 2022, la majoration du taux de l'astreinte provisoire et sa fixation à 10 000 euros et la mise à la charge du département de la Dordogne de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucune mesure effective d'exécution n'a été prise par le département ; il résulte d'un constat d'huissier que seuls de menus travaux de réouverture de la route départementale 53 ont été réalisés ;

- les difficultés invoquées par le département, tenant aux risques environnementaux, à la propriété du pont-rail des Milandes, au caractère irréaliste du délai de 12 mois fixé par la cour et au coût de la démolition ne caractérisent pas un cas fortuit ni la force majeure mais sont inopérantes et ne tendent qu'à remettre en cause le bien-fondé des mesures prescrites et les délais fixés ; comme l'a jugé la cour précédemment, le département dispose des informations nécessaires pour engager les travaux ;

- le département fait preuve d'un mauvais vouloir persistant ; il a adopté un nouveau projet de boucle multimodale empruntant le même tracé que le projet annulé ce qui traduit une stratégie dilatoire et ses élus ont pris publiquement position contre les décisions de justice intervenues ;

- la non-exécution des mesures prescrites et le retard considérable accumulé depuis l'arrêt du 10 décembre 2019 justifient que l'astreinte provisoire soit portée à 10 000 euros par jour de retard ;

- il y a lieu de liquider les astreintes au profit des requérants ayant œuvré contre le projet pour la défense de l'environnement et du cadre de vie en Dordogne ; une liquidation à leur profit est de nature à inciter le département à exécuter l'arrêt de la cour.

Par un mémoire enregistré le 9 mars 2024 et un mémoire en production de pièces enregistré le 21 mars 2024, le département de la Dordogne, représenté par Me Zinamsgvarov, déclare persister dans ses précédentes conclusions.

Il soutient que :

- en ce qui concerne l'astreinte définitive, l'exécution matérielle des travaux de démolition a été engagée de manière effective ; la RD 53 a été rendue totalement impropre à son usage ; seuls l'arase des terrassements et son réglage de hauteur variable restent en place ; le département s'est ainsi conformé à l'injonction qui lui était faite, la juridiction ayant précisé qu'il était loisible à la collectivité de déterminer l'ordre dans lequel les ouvrages seraient démolis ; les autres travaux nécessitaient de passer par une procédure de commande publique ;

- en ce qui concerne l'astreinte provisoire, les parties adverses ne sont pas fondées à réfuter les circonstances ayant empêché l'exécution complète des travaux dans le délai imparti ; l'annulation du projet ne fait pas obstacle à ce que le département remplisse sa mission de satisfaire l'intérêt général en initiant un nouveau projet de création d'une boucle multimodale d'accès sécurisé aux deux rives de la vallée de la Dordogne ; il ne s'agit pas du même projet ;

- compte tenu de la santé financière de certaines associations, et notamment la Sepanso, l'affectation du produit des astreintes aux requérants conduirait à un enrichissement sans cause ; contrairement à ce qu'ils soutiennent, ils n'ont pas engagé des frais importants ; une affectation au budget de l'Etat ne poserait pas de difficulté dès lors que l'Etat n'est pas le débiteur des astreintes ; en tout état de cause, l'astreinte n'est pas destinée à couvrir les frais irrépétibles.

II°) Instance n° 21BX02844

Par un mémoire enregistré le 2 octobre 2023, le département de la Dordogne, représenté par Me Zinamsgvarov, porte à la connaissance de la juridiction des procès-verbaux de constat des 10 juillet, 30 août et 7 septembre 2023.

Il soutient que :

- ces documents constatent l'exécution en régie des travaux de démolition ;

- le dossier de consultation des entreprises a été repris pour permettre d'engager les travaux en régie afin de s'affranchir des délais de la commande publique ;

- la démolition ordonnée pose toujours les difficultés dont il a été précédemment fait état : des aléas et risques environnementaux très forts, un délai global de 28 mois minimum à 40 mois maximum, hors aléas, pour respecter les procédures à mettre en œuvre, le pont-rail des Milandes qui n'est toujours pas la propriété de la collectivité et un coût de démolition compris entre 9,4 et 14,6 millions d'euros TTC.

Par un mémoire enregistré le 1er décembre 2023, le département de la Dordogne, représenté par Me Zinamsgvarov, porte à la connaissance de la juridiction des procès-verbaux de constat des 18 septembre, 26 octobre et 10 novembre 2023.

Il soutient que :

- ces documents constatent l'exécution en régie des travaux de démolition qui ont débuté le 10 juillet 2023 ;

- le dossier de consultation des entreprises a été repris pour permettre d'engager les travaux ;

- la démolition ordonnée pose toujours les difficultés dont il a été précédemment fait état : des aléas et risques environnementaux très forts mis en avant par une expertise du Cerema, l'impossibilité de respecter les délais compte tenu de l'obligation de respecter la procédure de la commande publique, le pont-rail des Milandes qui n'est toujours pas la propriété de la collectivité mais pour lequel un protocole d'accord est en cours.

Par des mémoires enregistrés le 3 janvier 2024 et le 24 janvier 2024, l'association Sepanso Dordogne et l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac, représentées par Me Maginot, demandent la liquidation des astreintes prononcées par l'arrêt du 7 juillet 2022, la fixation à 10 000 euros du nouveau taux de l'astreinte provisoire prononcée à l'article 2 de l'arrêt et la mise à la charge du département de la Dordogne de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- malgré la précédente condamnation au titre de la liquidation de l'astreinte provisoire, le département persiste à ne pas exécuter l'arrêt de la cour ; il a, à plusieurs reprises, déposé des demandes d'autorisation pour son projet alors que la cour a jugé que l'autorisation n'était pas régularisable ; par délibération du 22 mai 2023, il a adopté une déclaration d'intention au titre de l'article L. 121-18 du code de l'environnement en vue de lancer la procédure de concertation préalable portant sur un projet identique, appelé " boucle multimodale ", reprenant l'intégralité des ouvrages du projet initial annulé et y adjoignant la réouverture saisonnière d'une halte ferroviaire avec un parking ; il a constitué une provision de près de 2 millions d'euros pour le règlement des astreintes ; il ne fait aucun doute qu'il ne démolira pas les ouvrages ;

- elles produisent le constat d'un commissaire de justice du 17 janvier 2024 constatant l'absence de toute exécution de travaux de démolition ;

- à supposer que le département ait engagé les travaux le 10 juillet 2023, cette date est tardive et la liquidation de l'astreinte définitive se justifie ; en tout état de cause, le département s'est borné à engager la remise en service de la route départementale 53 sans avoir commencé les travaux de démolition ;

- s'agissant de l'astreinte définitive, les travaux n'ayant pas été engagés, sa liquidation se justifie ; la remise en service de la RD 53 est provisoire et réversible ; les matériaux ont été conservés en vue de la reconstruction de la nouvelle voie ; le département ne justifie pas de la passation d'un marché en vue de la démolition ; la procédure de passation a été lancée sous réserve de l'épuisement de toutes les actions qui rendraient possible la réutilisation des ouvrages ; les difficultés invoquées ne constituent pas un cas fortuit ou un cas de force majeure ;

- le refus d'exécution et le comportement du département justifient que le taux de l'astreinte provisoire soit porté à 10 000 euros ;

- pour éviter que le département, avec le soutien et le concours de l'État, ne fasse obstacle à l'exécution de l'arrêt de la cour, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 911-8 du code de justice administrative.

Par un mémoire enregistré le 9 mars 2024 et un mémoire en production de pièces enregistré le 21 mars 2024, le département de la Dordogne, représenté par Me Zinamsgvarov, déclarer persister dans ses précédentes conclusions.

Il soutient que :

- en ce qui concerne l'astreinte définitive, l'exécution matérielle des travaux de démolition a été engagée de manière effective ; la RD 53 a été rendue totalement impropre à son usage ; seuls l'arase des terrassements et son réglage de hauteur variable restent en place ; le département s'est ainsi confirmé à l'injonction qui lui était faite, la juridiction ayant précisé qu'il était loisible à la collectivité de déterminer l'ordre dans lequel les ouvrages seraient démolis ; les autres travaux nécessitaient de passer par une procédure de commande publique ;

- en ce qui concerne l'astreinte provisoire, les parties adverses ne sont pas fondées à réfuter les circonstances ayant empêché l'exécution complète des travaux dans le délai imparti ; l'annulation du projet ne fait pas obstacle à ce que le département remplisse sa mission de satisfaire l'intérêt général en initiant un nouveau projet de création d'une boucle multimodale d'accès sécurisé aux deux rives de la vallée de la Dordogne ; il ne s'agit pas du même projet ;

- compte tenu de la santé financière de certaines associations, et notamment la Sepanso, l'affectation du produit des astreintes aux requérants conduirait à un enrichissement sans cause ; contrairement à ce qu'ils soutiennent, ils n'ont pas engagé des frais importants ; une affectation au budget de l'Etat ne poserait pas de difficulté dès lors que l'Etat n'est pas le débiteur des astreintes ; en tout état de cause, l'astreinte n'est pas destinée à couvrir les frais irrépétibles.

III°) Instance n° 21BX02845

Par des mémoires enregistrés le 17 juillet 2023, le 28 septembre 2023, le 13 février 2024 et le 20 mars 2024, la société B... Enterprises inc., Mme D... B... et M. E... G..., représentés par Me Lepage, demandent dans le dernier état de leurs conclusions la liquidation partielle de l'astreinte définitive, la fixation du taux de cette astreinte à 6 000 euros, la liquidation de l'astreinte provisoire, la fixation du taux de cette astreinte à 10 000 euros, le versement à leur profit d'un tiers de la somme correspondante et la mise à la charge du département de la Dordogne du versement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'inexécution se poursuit après la liquidation de l'astreinte provisoire, de sorte qu'une nouvelle liquidation doit intervenir et que le taux de l'astreinte doit être augmenté à 6 000 euros par jour ;

- aucun commencement d'exécution n'est intervenu au 10 juillet 2023 ni ultérieurement ; les seuls travaux réalisés ont consisté à remettre l'ancienne route en circulation ; l'absence de commencement des travaux a été constatée par un commissaire de justice ; les travaux de rabotage et de creusement de la chaussée sont superficiels et réversibles ; au vu des derniers éléments produits par le département, les travaux ont commencé au mieux le 26 octobre 2023 mais sont réversibles ;

- au vu de l'inexécution totale de l'arrêt de la cour à l'expiration du délai fixé, l'astreinte provisoire doit également être liquidée et son taux augmenté à 10 000 euros par jour ;

- le département ne compte pas débuter les travaux après attribution du marché, la délibération du 4 octobre 2023 prévoyant l'adoption d'une nouvelle délibération préalable à l'engagement des travaux pouvant porter atteinte aux espèces protégées ; la cour a déjà répondu aux arguments du département tenant à une impossibilité matérielle de réaliser les travaux ; de plus, le département ne fait état d'aucune circonstance postérieure à la décision du 10 décembre 2019 qui ferait obstacle à l'exécution de cette décision ; le département n'établit pas la réalité de démarches pour régler la question du radier du pont-rail, à supposer qu'il existe une difficulté sur ce point ; en tout état de cause, cette difficulté n'empêchait pas la réalisation des travaux portant sur d'autres parties d'ouvrages ; les risques pour la sécurité des personnes et l'environnement invoqués ne sont qu'hypothétiques ; de plus, cette argumentation tend à remettre en cause le bien-fondé des mesures prescrites et le département ne peut pas se prévaloir de ce qu'il a sciemment décidé de poursuivre les travaux malgré les recours pendants ; ce sont ces travaux qui ont fragilisé le toit calcaire de la nappe phréatique ; il n'est pas établi que les procédures de la commande publique étaient inadaptées pour répondre aux obligations de démolition ; le département, de plus, a délibérément retardé l'application de ces procédures et a subordonné l'autorisation des travaux à l'épuisement de toutes les voies permettant d'utiliser les ouvrages existants ; les risques techniques mis en avant sont identifiés depuis plusieurs années ; le juge de l'exécution ne peut remettre en cause le délai imparti pour la démolition ni le principe de la démolition en prenant en compte le nouveau projet dont le département fait état, qui traduit la volonté de la collectivité de poursuivre le projet de contournement routier ; l'identité des deux projets ne fait pas de doute ;

- la liquidation peut légitimement être prononcée au bénéfice des requérants, dans un but d'égalité des armes et de reconnaissance de leur action en vue de faire respecter l'autorité de la chose jugée ; ils ont fait établir plusieurs constats par des commissaires de justice, ont fait appel à des experts et ont dû exposer des frais d'avocat qui ne sont pas couvert par les sommes allouées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; les allégations du département quant à un enrichissement sans cause sont totalement infondées ; rien ne fait obstacle à ce que la liquidation intervienne au profit de personnes physiques ; seule une partie de la somme liquidée pourrait revenir au budget de l'Etat ; de plus l'Etat, chargé de pourvoir à l'exécution de la décision de justice, n'a pas mis en œuvre les pouvoirs dont il dispose à cette fin.

Par des mémoires enregistrés le 7 septembre 2023 et le 27 février 2024, Mme F..., représentée par Me Franceschini, demande à la cour de liquider les astreintes prononcées à l'encontre du département, de porter à 10 000 euros le taux journalier de l'astreinte provisoire et de mettre à la charge du département de la Dordogne le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à l'échéance fixée par la cour, aucun travaux de démolition n'a été réalisé ; le département n'a pas réellement démarré les travaux de démolition prescrits, seuls des travaux provisoires et réversibles ayant été exécutés ;

- si le département a lancé une procédure de marché de travaux, les travaux n'interviendront que dans les conditions fixées par la délibération du 4 octobre 2023, ces conditions étant liées à l'épuisement des voies juridiques rendant possible l'utilisation de tout ou partie des infrastructures à démolir ;

- l'inexécution de la décision ne provient pas d'un cas fortuit ou de force majeure, mais de la seule volonté du département ;

- compte tenu de l'entente notoire entre le département et l'Etat, il n'y a pas lieu d'appliquer les dispositions de l'article L. 911-8 du code de justice administrative relatives à l'affectation de tout ou partie de l'astreinte au budget de l'Etat.

Par un mémoire enregistré le 2 octobre 2023, le département de la Dordogne, représenté par Me Zinamsgvarov, porte à la connaissance de la juridiction des procès-verbaux de constat des 10 juillet, 30 août et 7 septembre 2023.

Il soutient que :

- ces documents constatent l'exécution en régie des travaux de démolition ;

- le dossier de consultation des entreprises a été repris pour permettre d'engager les travaux en régie afin de s'affranchir des délais de la commande publique ;

- la démolition ordonnée pose toujours les difficultés dont il a été précédemment fait état : des aléas et risques environnementaux très forts, un délai global de 28 mois minimum à 40 mois maximum, hors aléas, pour respecter les procédures à mettre en œuvre, le pont-rail des Milandes qui n'est toujours pas la propriété de la collectivité et un coût de démolition compris entre 9,4 et 14,6 millions d'euros TTC.

Par un mémoire enregistré le 22 novembre 2023 et un mémoire en production de pièces enregistré le 1er décembre 2023, le département de la Dordogne, représenté par Me Zinamsgvarov, conclut au rejet de la demande de liquidation de l'astreinte provisoire ou, subsidiairement, à ce que cette liquidation soit prononcée uniquement jusqu'au 10 juillet 2023, à la suppression de l'astreinte provisoire, au prononcé d'une nouvelle astreinte dont le taux et le délai seront adaptés aux circonstances ou, subsidiairement à la liquidation de cette astreinte à un taux réduit et, en tout état de cause, à ce que le produit des astreintes soit affecté au budget de l'Etat et à la mise à la charge de chacun des requérants de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient les mêmes moyens que ceux soutenus dans son mémoire enregistré le 2 octobre 2023 et soutient, en outre, que :

- de nouveaux procès-verbaux de constat des 18 septembre, 26 octobre et 10 novembre 2023 confirment l'exécution des travaux ;

- la difficulté tenant à la propriété du pont-rail des Milandes a été révélée postérieurement à la décision de la cour et constitue un élément nouveau justifiant que la cour revienne sur sa décision dès lors que l'exécution des mesures prescrites l'exposerait à commettre des infractions pénales liées à la destruction d'un bien appartenant à autrui ;

- il a manifesté sa volonté d'exécuter la décision de la cour en engageant, dès le mois de janvier 2020 la procédure d'appel d'offres pour le choix du maître d'œuvre et en recherchant le mode opératoire le moins dangereux pour l'environnement malgré les délais irréalistes qui lui ont été impartis notamment pour respecter les règles de sécurité imposant de travailler en période d'étiage ; le dossier de consultation des entreprises a été actualisé et l'avis d'appel public à la concurrence a été publié le 14 novembre 2023 ; un protocole est en projet de signature pour permettre la démolition sur l'ouvrage du pont-rail des Milandes ; une expertise du Cerema confirme l'existence de risques pour l'environnement s'agissant des ouvrages réalisés dans le lit de la Dordogne ; ces circonstances justifient, sinon la suppression de l'astreinte, une modulation de l'astreinte ;

- le nouveau projet de boucle multimodale doit être pris en compte ; dans sa délibération du 3 février 2023, l'assemblée départementale a précisé que la démolition était subordonnée à l'épuisement des procédures qui rendraient impossible l'utilisation des infrastructures non encore démolies ;

- au cas où les astreintes seraient liquidées, le produit sera affecté au budget de l'Etat pour éviter un enrichissement sans cause de personnes physiques et morales de droit privé à but lucratif.

Par un mémoire enregistré le 9 mars 2024 et un mémoire en production de pièces enregistré le 21 mars 2024, le département de la Dordogne, représenté par Me Zinamsgvarov, déclarer persister dans ses précédentes conclusions.

Il soutient que :

- en ce qui concerne l'astreinte définitive, l'exécution matérielle des travaux de démolition a été engagée de manière effective ; la RD 53 a été rendue totalement impropre à son usage ; seuls l'arase des terrassements et son réglage de hauteur variable restent en place ; le département s'est ainsi confirmé à l'injonction qui lui était faite, la juridiction ayant précisé qu'il était loisible à la collectivité de déterminer l'ordre dans lequel les ouvrages seraient démolis ; les autres travaux nécessitaient de passer par une procédure de commande publique ;

- en ce qui concerne l'astreinte provisoire, les parties adverses ne sont pas fondées à réfuter les circonstances ayant empêché l'exécution complète des travaux dans le délai imparti ; l'annulation du projet ne fait pas obstacle à ce que le département remplisse sa mission de satisfaire l'intérêt général en initiant un nouveau projet de création d'une boucle multimodale d'accès sécurisé aux deux rives de la vallée de la Dordogne ; il ne s'agit pas du même projet ;

- compte tenu de la santé financière de certaines associations, et notamment la Sepanso, l'affectation du produit des astreintes aux requérants conduirait à un enrichissement sans cause ; contrairement à ce qu'ils soutiennent, ils n'ont pas engagé des frais importants ; une affectation au budget de l'Etat ne poserait pas de difficulté dès lors que l'Etat n'est pas le débiteur des astreintes ; en tout état de cause, l'astreinte n'est pas destinée à couvrir les frais irrépétibles.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,

- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public,

- et les observations de Me Maginot, représentant l'association Sepanso Dordogne et l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac, de Me Jeannel, représentant la société B... Enterprises inc., Mme D... B... et M. E... G..., de Me Franceschini, représentant Mme F..., de Me Zinamsgvarov, représentant le département de la Dordogne, de M. C..., maître d'œuvre, pour le département de la Dordogne, de M. A..., de la direction des routes du département de la Dordogne et de M. G....

Des notes en délibéré ont été enregistrées dans les instances 21BX02843, 21BX02844 et 21BX02845 le 27 mars 2023, présentées pour le département de la Dordogne par Me Zinamsgvarov.

Une note en délibéré a été enregistrée dans l'instance 21BX02845 le 3 avril 2024, présentée pour la société B... Enterprises inc et Mme D... B... par Me Lepage.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. / Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée ". Aux termes de l'article L. 911-8 du même code : " La juridiction peut décider qu'une part de l'astreinte ne sera pas versée au requérant. / Cette part est affectée au budget de l'Etat ". Il résulte de ces dispositions que l'astreinte a pour finalité de contraindre la personne qui s'y refuse à exécuter les obligations qui lui ont été assignées par une décision de justice et, ainsi, à respecter l'autorité de la chose jugée. Sa liquidation a pour objet de tirer les conséquences du refus ou du retard mis à exécuter ces obligations. En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive de la décision, la juridiction procède, en vertu de l'article L. 911-7 du code de justice administrative, à la liquidation de l'astreinte. Le juge de l'exécution saisi, sur le fondement de ces dispositions, aux fins de liquidation d'une astreinte précédemment prononcée n'a pas le pouvoir de remettre en cause les mesures décidées par le dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution est demandée. Enfin, en vertu du premier alinéa de l'article L. 911-8 de ce code, la juridiction a la faculté de décider, afin d'éviter un enrichissement indu, qu'une fraction de l'astreinte liquidée ne sera pas versée au requérant, le second alinéa prévoyant que cette fraction est alors affectée au budget de l'État.

2. L'association La Demeure Historique, l'association Sepanso Dordogne, l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac, la société B... Enterprises inc. et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2018 par lequel la préfète de la Dordogne a délivré au département de la Dordogne une autorisation unique sur le fondement de l'article L. 214-3 du code de l'environnement pour la réalisation des travaux et l'exploitation des aménagements du contournement du bourg de Beynac-et-Cazenac sur le territoire des communes de Castelnaud-la-Chapelle, Vézac et Saint-Vincent-de-Cosse. Par un arrêt n° 19BX02327, 19BX02367, 19BX02369, 19BX02378, 19BX02421, 19BX02422, 19BX02423, 19BX02424 du 10 décembre 2019, la cour a rejeté les requêtes du département de la Dordogne tendant à l'annulation des jugements du tribunal administratif de Bordeaux du 9 avril 2019 prononçant l'annulation de l'arrêté préfectoral du 29 janvier 2018 et a enjoint au département de la Dordogne d'engager le processus de démolition des éléments construits hors des berges et du lit de la Dordogne dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et de procéder à l'ensemble des opérations de démolition des éléments construits de l'ouvrage de contournement et de remise en état des lieux dans un délai global de douze mois à compter de la notification de cet arrêt. Saisie de demandes en exécution de l'association La demeure historique, d'une part, de l'association Sepanso Dordogne et de l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac, d'autre part, et de la société B... Enterprises inc., de Mme D... B... et de M. E... G..., de troisième part, la cour, après ouverture de procédures juridictionnelles, par un arrêt n° 21BX02843, 21BX02844, 21BX02845 du 7 juillet 2022, a, en premier lieu, prononcé une astreinte définitive de 3 000 euros par jour à l'encontre du département de la Dordogne s'il ne justifiait pas avoir, dans les six mois suivant la notification de l'arrêt, engagé le début des travaux de démolition ordonnés par la cour dans son arrêt du 10 décembre 2019 et, en second lieu, prononcé une astreinte provisoire de 5 000 euros par jour à l'encontre du département de la Dordogne s'il ne justifiait pas avoir, dans les douze mois suivant la notification du présent arrêt, procédé à la réalisation de l'ensemble des travaux de démolition et à la remise en état des lieux. Une nouvelle procédure en exécution engagée par la société B... Enterprises inc., Mme B... et M. G... a donné lieu à l'ouverture d'une procédure juridictionnelle sous le n° 23BX01074. Par arrêt du 4 juillet 2023, la cour, joignant ces demandes n° 21BX02843, 21BX02844, 21BX02845 et 23BX01074 relatives à l'exécution de la même décision de justice, a procédé à la liquidation partielle de l'astreinte définitive au taux journalier de 3 000 euros au profit des personnes mentionnées ci-dessus ayant engagé des procédures d'exécution.

Sur la liquidation de l'astreinte définitive :

3. Ainsi qu'il a été dit précédemment, une astreinte définitive de 3 000 euros par jour a été prononcée à l'encontre du département de la Dordogne s'il ne justifiait pas avoir, dans les six mois suivant la notification de l'arrêt, engagé le début des travaux de démolition et cette astreinte a fait l'objet d'une première liquidation provisoire le 4 juillet 2023. Postérieurement à cette première liquidation, le département de la Dordogne a produit plusieurs procès-verbaux de constat établis par un commissaire de justice, les 10 juillet 2023, 30 août 2023, 7 septembre 2023, 18 septembre 2023, 26 octobre 2023 et 10 novembre 2023, justifiant selon lui de l'engagement des travaux de démolition. Il résulte de l'instruction et notamment de la teneur de ces procès-verbaux que le 26 octobre 2023, il a été constaté par un commissaire de justice que des engins de chantier étaient en cours d'intervention et avaient débuté le rabotage de la nouvelle voie créée dans le cadre du projet de contournement. Les constats antérieurs au 26 octobre 2023 ne relatent en revanche que des opérations préparatoires et la remise en circulation de l'ancienne route départementale n° 53, après remise en état, sans constatations quant à la démolition matérielle des nouveaux ouvrages. Il résulte également de l'instruction et notamment des procès-verbaux de constat établis par un commissaire de justice les 9 octobre 2023, 5 décembre 2023 et 17 janvier 2024, produits par les requérants, que la remise en service de l'ancienne voie a été réalisée sans remise en état des fossés et accotements sur une grande partie de l'itinéraire, que les bordures sont enherbées et pas entretenues, que l'enrobé est dégradé (gravillons, niveau de la route irrégulier, absence de marquage et de signalisation) et que les tronçons de la nouvelle voie n'ont fait, dans un premier temps, l'objet que d'un rabotage de surface, la couche de stabilisation ayant été laissée en place et que le chantier de travaux ne s'est pas poursuivi entre le 5 décembre 2023 et le 17 janvier 2024, date à laquelle le commissaire de justice a constaté un état des travaux identique à celui du 5 décembre 2023 et l'absence de tout engin sur les lieux. Toutefois, le département produit une note du cabinet Egis, maître d'œuvre, du 8 mars 2024 affirmant que les travaux de déconstruction réalisés à cette date portaient sur la démolition des couches de roulement, de liaison, de base, de fondation et de forme et que reste seulement à réaliser la remise en état des emprises à l'identique, notamment par remblaiement et revégétalisation des surfaces. Les constatations d'un commissaire de justice dans un constat du 13 mars 2024 produit par les requérants, relatives à la granulomérie des couches rencontrées sur le site, et accompagnées de l'attestation d'un retraité, ingénieur des travaux publics, ne sont pas de nature à remettre totalement en cause les affirmations du cabinet Egis quant à la nature des travaux effectivement réalisés. En admettant même que la totalité des couches de forme et de fondation n'aurait pas été encore entièrement déposée, il peut être considéré que l'essentiel de la structure de la voirie l'a été. Si l'organe délibérant du département a, le 17 juillet 2023, autorisé le président à engager les travaux de démolition tout en poursuivant " en parallèle les démarches permettant l'instruction et la validation par les services de l'Etat du nouveau projet de création d'une boucle multimodale d'accès aux 2 rives de la Dordogne ... conformément à la délibération ... du 3 février 2023 autorisant M. le Président du Conseil départemental à engager toutes les procédures pour mener à bien ce projet d'aménagement global ", les travaux ainsi engagés doivent être regardés comme effectifs, quand bien même le département serait susceptible de reconstruire la voie détruite. Ainsi, le département pouvant être regardé comme ayant réellement engagé le début des travaux de démolition, il y a lieu de procéder à la liquidation définitive de l'astreinte définitive.

4. La somme correspondant à la liquidation de l'astreinte définitive au taux de 3 000 euros à compter du 21 juin 2023, lendemain de l'audience à laquelle a été appelée l'affaire ayant donné lieu à la précédente liquidation, s'établit, au 25 octobre 2023, veille du jour auquel il est justifié du début effectif des travaux, à raison de 127 jours, à 381 000 euros.

Sur la liquidation partielle de l'astreinte provisoire :

5. Comme il a été dit, par un arrêt du 7 juillet 2022, la cour a prononcé une astreinte provisoire de 5 000 euros par jour à l'encontre du département de la Dordogne s'il ne justifiait pas avoir, dans les douze mois suivant la notification de l'arrêt, procédé à la réalisation de l'ensemble des travaux de démolition et à la remise en état des lieux. Le département, qui a reçu notification de l'arrêt le 8 juillet 2022, ne justifie pas et ne soutient d'ailleurs pas avoir procédé à l'ensemble des travaux de démolition et de remise en état des lieux. Il soutient, en revanche, s'être heurté à des difficultés qui rendaient impossible le respect de l'échéance fixée et avoir engagé toutes les démarches qu'il était en mesure de réaliser, compte tenu de ces difficultés, du délai trop court qui lui a été imparti et du nouveau projet de boucle multimodale qu'il a adopté.

6. Le nouveau projet du département de boucle multimodale empruntant le même tracé que le projet initial ne peut être retenu comme une circonstance de nature à expliquer légitimement le retard pris dans l'exécution des travaux de démolition et de remise en état ordonnés dès lors que ce projet n'est pas autorisé. Au demeurant, la cour, dans son arrêt du 10 décembre 2019 portant annulation des autorisations et injonction de démolition et remise en état, a jugé que l'illégalité résultant de la méconnaissance de l'article L. 411-2 du code de l'environnement relatif à la préservation des espèces protégées n'était pas susceptible de régularisation et aucun élément ne permet d'estimer, en l'état de l'instruction, que le nouveau projet, qui traduit une volonté de la collectivité de maintenir les ouvrages en vue de leur utilisation, pourrait être autorisé dans le respect de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Le coût des travaux de démolition et de remise en état, bien qu'important, n'est pas, comme la cour l'a jugé dans son arrêt du 10 décembre 2019, de nature à entraîner une atteinte excessive à l'intérêt général qui s'attache à la démolition des ouvrages et à la remise en état des lieux. Ce coût ne peut donc pas non plus, par lui-même, justifier le retard considérable mis à commencer l'exécution de ces travaux ni l'absence de tout travaux autres que ceux relatifs à la démolition de la nouvelle voirie. Il résulte en revanche de l'instruction que des démarches juridiques ont été accomplies. Il y a lieu de tenir compte à ce titre de l'établissement d'un projet de protocole avec SNCF Réseau notamment pour régler la question de la propriété de l'ouvrage du pont-rail des Milandes, des démarches juridiques réalisées pour l'actualisation du dossier de consultation des entreprises en vue du marché de démolition totale des ouvrages et de remise en état des lieux, et de la publication de l'avis d'appel public à la concurrence le 14 novembre 2023 relatif aux travaux de démolition et remise en état, après que des études complémentaires concernant les risques techniques aient été réalisées, notamment par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema). Pour tenir compte de ces démarches, ainsi que des difficultés techniques concernant la démolition notamment des ouvrages situés dans le lit et sur les rives de la Dordogne, d'ailleurs soulignées par le Cerema, il y a lieu de liquider l'astreinte provisoire à un taux réduit à 4 000 euros par jour, sans préjudice du taux de liquidation qui sera ultérieurement retenu en cas de retard persistant dans l'exécution de l'arrêt de la cour.

7. La somme correspondant à la liquidation partielle de l'astreinte provisoire au taux de 4 000 euros à compter du 8 juillet 2023, date de l'échéance du délai de douze mois imparti par l'arrêt du 7 juillet 2022, s'établit, au jour de l'audience ayant précédé le présent arrêt, à raison de 263 jours, à 1 052 000 euros.

Sur les bénéficiaires des astreintes :

8. Compte tenu du montant total de ces astreintes, de 1 433 000 euros, et afin d'éviter un enrichissement indu, il convient dans les circonstances de l'espèce de n'allouer aux requérants qu'une fraction de 500 000 euros de la somme à liquider et, en application des dispositions précitées de l'article L. 911-8 du code de justice administrative, d'affecter l'autre fraction, soit 933 000 euros, au budget de l'Etat. Eu égard aux actions des associations requérantes en faveur de l'environnement et du cadre de vie et à la part active prise par la société B... Enterprises inc., Mme B... et M. G... dans le suivi de l'exécution de l'arrêt de la cour, notamment en faisant procéder à des constatations par commissaire de justice, il y a lieu d'ordonner le versement de 200 000 euros à l'association La demeure historique, de 200 000 euros à l'association Sepanso Dordogne et à l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac et de 100 000 euros à la société B... Enterprises inc., à Mme B... et à M. G.... En revanche, il n'y a pas lieu d'ordonner un versement à ce titre à Mme F... qui a présenté des conclusions propres dans cette instance sans assortir ses conclusions de précisions notamment quant à ses actions en faveur de la sauvegarde de l'environnement et du cadre de vie, alors qu'elle s'était auparavant jointe à l'action de la société B... Enterprises inc., de Mme B... et de M. G....

Sur les conclusions tendant à l'augmentation du taux de l'astreinte :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu, en l'état de l'instruction et sans préjudice des décisions ultérieures de la cour, d'augmenter le taux de l'astreinte provisoire prononcée à l'article 2 de l'arrêt du 7 juillet 2022.

Sur les frais d'instance :

10. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du département de la Dordogne le versement à l'association La demeure historique de la somme de 1 500 euros, le versement à l'association Sepanso Dordogne et à l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac de la somme globale de 1 500 euros et le versement à la société B... Enterprises, à Mme B... et à M. G... de la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, en revanche, de faire droit aux conclusions présentées sur ce fondement par Mme F.... Ces dispositions font par ailleurs obstacle à ce que soit mis à la charge des requérants, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, le versement au département de la Dordogne de la somme qu'il demande au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le département de la Dordogne versera à l'association La demeure historique la somme de 200 000 euros, à l'association Sepanso Dordogne et à l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac la somme de 200 000 euros, à la société B... Enterprises inc., à Mme B... et à M. G..., la somme de 100 000 euros et à l'Etat la somme de 933 000 euros au titre de la liquidation définitive de l'astreinte définitive prononcée par l'article 1er de l'arrêt n°21BX02843, 21BX02844, 21BX02845 du 7 juillet 2022 et de la liquidation partielle de l'astreinte provisoire prononcée par l'article 2 du même arrêt.

Article 2 : Le taux de l'astreinte provisoire prononcée par l'arrêt n°21BX02843, 21BX02844, 21BX02845 du 7 juillet 2022 demeure fixé à 5 000 euros par jour de retard.

Article 3 : Le département de la Dordogne versera à l'association La demeure historique la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le département de la Dordogne versera à l'association Sepanso Dordogne et à l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac la somme globale de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le département de la Dordogne versera à la société B... Enterprises inc., à Mme B... et à M. G... la somme globale de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des requérants est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié au département de la Dordogne, à l'association La demeure historique, à l'association Sepanso Dordogne, à l'association de défense de la vallée de la Dordogne - Saint-Vincent-de-Cosse - Beynac - Fayrac - Vézac, à la société B... Enterprises inc., à Mme D... B..., à M. E... G..., à Mme F... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Il en sera adressé copie au ministère public près la Cour des comptes, en application de l'article R. 921-7 du code de justice administrative.

Copie pour information en sera adressée au préfet de la Dordogne.

Délibéré après l'audience du 26 mars 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Sébastien Ellie, premier conseiller,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 avril 2024.

Le premier assesseur

Sébastien Ellie

La présidente-rapporteure,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX02843, 21BX02844, 21BX02845, 23BX01074


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02843
Date de la décision : 16/04/2024
Type de recours : Exécution décision justice adm

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : ADAMAS - AFFAIRES PUBLIQUES;ADAMAS - AFFAIRES PUBLIQUES;ADAMAS - AFFAIRES PUBLIQUES;HUGLO LEPAGE AVOCATS SAS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-16;21bx02843 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award