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10/11/2022 | FRANCE | N°458629

France | France, Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 10 novembre 2022, 458629


Vu la procédure suivante :

Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Melun de condamner l'Etat à lui verser la somme de 6 446 euros représentant celle qu'elle aurait dû percevoir au titre des indemnités forfaitaires d'éducation. Par un jugement n° 1706467 du 5 novembre 2019, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20PA00037 du 23 septembre 2021, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par Mme D... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 nov

embre 2021 et 22 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mm...

Vu la procédure suivante :

Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Melun de condamner l'Etat à lui verser la somme de 6 446 euros représentant celle qu'elle aurait dû percevoir au titre des indemnités forfaitaires d'éducation. Par un jugement n° 1706467 du 5 novembre 2019, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20PA00037 du 23 septembre 2021, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par Mme D... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 novembre 2021 et 22 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme D... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de l'éducation ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 70-738 du 12 août 1970 ;
- le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ;
- le décret n° 91-468 du 14 mai 1991 ;
- le décret n° 2007-632 du 27 avril 2007 ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de Mme D... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juge du fond que Mme D..., professeure d'éducation physique, ayant été victime de trois accidents du travail, a été déclarée définitivement inapte à ses fonctions à compter du 1er septembre 2009 à la suite d'un avis émis par le comité médical départemental le 9 décembre 2010. Elle a alors bénéficié d'un reclassement et a été affectée, à compter du 1er septembre 2011, au sein d'un collège pour y exercer les fonctions de conseiller principal d'éducation qu'elle a continué à assurer jusqu'au 1er septembre 2017, date de son admission à la retraite. Par courrier du 10 avril 2017, elle a sollicité le versement de l'indemnité forfaitaire d'éducation bénéficiant aux conseillers principaux d'éducation. Sa demande ayant été implicitement rejetée par la rectrice de l'académie de Créteil, Mme D... a demandé au tribunal administratif de Melun de condamner l'Etat à lui verser la somme de 6 446 euros, correspondant aux indemnités qu'elle aurait dû, selon elle, percevoir pour la période du 1er janvier 2012 au 31 août 2017. Par jugement du 5 novembre 2019 le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Mme D... se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel contre ce jugement.

2. Aux termes de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes / En vue de permettre ce reclassement, l'accès à des corps d'un niveau supérieur, équivalent ou inférieur est ouvert aux intéressés, quelle que soit la position dans laquelle ils se trouvent, selon les modalités retenues par les statuts particuliers de ces corps, en exécution de l'article 26 ci-dessus et nonobstant les limites d'âge supérieures, s'ils remplissent les conditions d'ancienneté fixées par ces statuts. (...) ".

3. Aux termes de l'article 1er du décret du 12 août 1970 relatif au statut particulier des conseillers principaux d'éducation : " Les conseillers principaux d'éducation forment un corps classé dans la catégorie A prévue à l'article 29 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat. Ses membres sont nommés par arrêté du ministre chargé de l'éducation. " Aux termes de l'article 4 de ce même décret : " Sous l'autorité du chef d'établissement et éventuellement de son adjoint, les conseillers principaux d'éducation exercent leurs responsabilités éducatives dans l'organisation et l'animation de la vie scolaire, organisent le service et contrôlent les activités des personnels chargés des tâches de surveillance. / Ils sont associés aux personnels enseignants pour assurer le suivi individuel des élèves et procéder à leur évaluation. En collaboration avec les personnels enseignants et d'orientation, ils contribuent à conseiller les élèves dans le choix de leur projet d'orientation ".

4. Aux termes, enfin, de l'article 1er du décret du 14 mai 1991 instituant une indemnité forfaitaire en faveur des conseillers principaux et des conseillers d'éducation relevant du ministre chargé de l'éducation, et des personnels non titulaires exerçant les mêmes fonctions : " Une indemnité forfaitaire non soumise à retenues pour pension est allouée à compter du 1er septembre 1990 aux conseillers principaux relevant du ministre chargé de l'éducation et exerçant les fonctions définies à l'article 4 du décret du 12 août 1970 modifié susvisé, ainsi qu'aux personnels non titulaires exerçant les mêmes fonctions ".

5. Il résulte des dispositions du décret du 14 mai 1991 citées au point précédent que l'indemnité forfaitaire prévue par ce décret doit être versée aux conseillers principaux d'éducation ainsi qu'aux agents non titularisés dans ce corps qui exercent les mêmes fonctions. Le critère d'éligibilité au versement de cette indemnité est ainsi l'exercice des fonctions, indépendamment de la titularisation dans le corps des conseillers principaux d'éducation. Ce versement ne peut par suite être regardé, pour ce qui concerne les personnels titulaires, comme réservé aux membres du corps des conseillers principaux d'éducation.

6. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que Mme D..., agent titulaire du corps des professeurs d'éducation physique, a exercé les fonctions de conseiller principal d'éducation pendant la période du 1er septembre 2011 au 1er septembre 2017, date de son admission à la retraite. Par suite, la cour a commis une erreur de droit en jugeant qu'elle ne remplissait pas les conditions pour bénéficier de l'indemnité forfaitaire prévue par le décret du 14 mai 1991.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que Mme D... est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :
--------------

Article 1er : L'arrêt du 23 septembre 2021 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : L'Etat versera à Mme D... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme B... D... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Délibéré à l'issue de la séance du 17 octobre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; M. Géraud Sajust de Bergues, Mme Anne Courrèges, M. Benoît Bohnert, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, conseillers d'Etat et M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 10 novembre 2022.
La présidente :
Signé : Mme Christine Maugüé

Le rapporteur :
Signé : M. Frédéric Gueudar Delahaye

La secrétaire :
Signé : Mme Nadine Pelat


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 10 nov. 2022, n° 458629
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric Gueudar Delahaye
Rapporteur public ?: M. Marc Pichon de Vendeuil
Avocat(s) : SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Formation : 7ème - 2ème chambres réunies
Date de la décision : 10/11/2022
Date de l'import : 16/11/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 458629
Numéro NOR : CETATEXT000046549505 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2022-11-10;458629 ?
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