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09/11/2022 | FRANCE | N°465076

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 09 novembre 2022, 465076


Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le tribunal administratif de Caen, sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, de sa décision du 6 janvier 2022 constatant l'absence de dépôt du compte de campagne de Mme C... B... et M. A... B..., candidats au premier tour des élections départementales qui s'est déroulé le 20 juin 2021 dans le canton de Flers 1 (Orne). Par un jugement n° 2200639 du 13 mai 2022, ce tribunal a déclaré les intéressés inéligibles pour une durée d'un an à compter d

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Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le tribunal administratif de Caen, sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, de sa décision du 6 janvier 2022 constatant l'absence de dépôt du compte de campagne de Mme C... B... et M. A... B..., candidats au premier tour des élections départementales qui s'est déroulé le 20 juin 2021 dans le canton de Flers 1 (Orne). Par un jugement n° 2200639 du 13 mai 2022, ce tribunal a déclaré les intéressés inéligibles pour une durée d'un an à compter de la date à laquelle ce jugement serait devenu définitif.

Par une requête, enregistrée le 16 juin 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... et M. B... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la saisine de la Commission nationale de comptes de campagne et des financements politiques.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sébastien Jeannard, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Arnaud Skzryerbak, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 6 janvier 2022, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a constaté l'absence de dépôt de leur compte de campagne par Mme B... et M. B..., candidats ayant recueilli 3,58 % des suffrages exprimés au premier tour des élections départementales qui s'est déroulé le 20 juin 2021 dans la circonscription de Flers-1 (Orne). Saisi par cette commission sur le fondement de l'article L. 52-15 du même code, le tribunal administratif de Caen a, par un jugement du 13 mai 2022, déclaré les intéressés inéligibles pour une durée d'un an. Mme B... et M. B... relèvent appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : " I.- Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement des dépenses électorales prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne lorsqu'il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s'il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8 et selon les modalités prévues à l'article 200 du code général des impôts. (...) / II.- Au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes accompagné des justificatifs de ses recettes, notamment d'une copie des contrats de prêts conclus en application de l'article L. 52-7-1 du présent code, ainsi que des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte. (...)".

3. Aux termes du troisième alinéa de l'article L. 52-15 du même code : " Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, la commission saisit le juge de l'élection. "

4. Enfin, aux termes de l'article L. 118-3 du même code : " Lorsqu'il relève une volonté de fraude ou un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible : / 1° Le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12 ; / (...) L'inéligibilité mentionnée au présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. Toutefois, elle n'a pas d'effet sur les mandats acquis antérieurement à la date de la décision. / En cas de scrutin binominal, l'inéligibilité s'applique aux deux candidats du binôme. (...) "

5. En dehors des cas de fraude, le juge de l'élection ne peut prononcer l'inéligibilité d'un candidat sur le fondement de ces dispositions que s'il constate un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales. Il lui incombe à cet effet de prendre en compte l'ensemble des circonstances de l'espèce et d'apprécier s'il s'agit d'un manquement caractérisé à une règle substantielle relative au financement des campagnes électorales et s'il présente un caractère délibéré.

6. Il est constant que Mme B... et M. B..., qui ont obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés, n'ont pas déposé de compte de campagne. S'ils font valoir que ce manquement était dû à la difficulté d'ouvrir un compte bancaire, ils n'établissent ni les démarches qu'ils auraient entreprises en temps utile ni les refus qu'ils auraient essuyés de la part des établissements sollicités. Par suite, ces circonstances ne sont pas de nature à justifier la méconnaissance des dispositions précitées du code électoral, qui constitue, eu égard à l'absence d'ambiguïté de la règle applicable, un manquement grave et délibéré à une obligation substantielle relative au financement des campagnes électorales. C'est dès lors à bon droit que le tribunal administratif de Caen a déclaré Mme B... et M. B... inéligibles pour une durée d'un an.

7. Il résulte de ce qui précède que leur requête doit dès lors être rejetée.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mme B... et M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme C... B... et M. A... B..., à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Orne.

Délibéré à l'issue de la séance du 20 octobre 2022 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et M. Sébastien Jeannard, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 9 novembre 2022.

La présidente :

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

Le rapporteur :

Signé : M. Sébastien Jeannard

La secrétaire :

Signé : Mme Anne Lagorce

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 09 nov. 2022, n° 465076
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sébastien Jeannard
Rapporteur public ?: M. Arnaud Skzryerbak

Origine de la décision
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 09/11/2022
Date de l'import : 13/11/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 465076
Numéro NOR : CETATEXT000046547963 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2022-11-09;465076 ?
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