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31/10/2022 | FRANCE | N°464417

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 31 octobre 2022, 464417


Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Appart'City a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer, en application du plafonnement prévu par l'article 1647 B sexies du code général des impôts, la réduction des cotisations supplémentaires de contribution économique territoriale auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 à 2014.

Par un jugement nos 1803898, 1805823 du 25 mai 2020, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20TL02423 du 30 mars 2022, la cour administrative d'appel de Toulous

e a rejeté l'appel formé par la société Appart'City contre ce jugement.

Par un pou...

Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Appart'City a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer, en application du plafonnement prévu par l'article 1647 B sexies du code général des impôts, la réduction des cotisations supplémentaires de contribution économique territoriale auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010 à 2014.

Par un jugement nos 1803898, 1805823 du 25 mai 2020, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20TL02423 du 30 mars 2022, la cour administrative d'appel de Toulouse a rejeté l'appel formé par la société Appart'City contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 27 mai, 10 août et 3 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, la société Appart'City demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une intervention, enregistrée le 3 octobre 2022, le syndicat national des résidences de tourisme et appart'hôtels (SNRT) demande que le Conseil d'Etat fasse droit aux conclusions du pourvoi, en se référant aux moyens qu'il soulève.

Par un mémoire distinct et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 10 août, 1er et 20 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Appart'City demande au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, à l'appui de son pourvoi, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 5e alinéa du b) du 4 du I de l'article 1586 sexies du code général des impôts.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision du Conseil constitutionnel n° 2009-599 DC du 29 décembre 2009 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François-René Burnod, auditeur,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la société Appart'city ;

Considérant ce qui suit :

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

2. Aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa version applicable aux années en litige : " I. Sur demande du redevable effectuée dans le délai légal de réclamation prévu pour la cotisation foncière des entreprises, la contribution économique territoriale de chaque entreprise est plafonnée en fonction de sa valeur ajoutée. Cette valeur ajoutée est (...) b) Pour les autres contribuables, celle définie à l'article 1586 sexies (...) ". Le 4 du I de l'article 1586 sexies du même code, dans sa version applicable aux années d'imposition en litige, prévoit que : " La valeur ajoutée est égale à la différence entre : a) D'une part, le chiffre d'affaires (...) / b) Et, d'autre part : (...) - les services extérieurs diminués des rabais, remises et ristournes obtenus, à l'exception des loyers ou redevances afférents aux biens corporels pris en location ou en sous-location pour une durée de plus de six mois (...) ; toutefois, lorsque les biens pris en location par le redevable sont donnés en sous-location pour une durée de plus de six mois, les loyers sont retenus à concurrence du produit de cette sous-location (...) ".

3. La société Appart'City soutient que les dispositions précitées du cinquième alinéa du b) du 4. du I de l'article 1586 sexies du code général des impôts, en ce qu'elles soumettent à un traitement fiscal différent les sociétés ayant la qualité de locataire intermédiaire selon qu'elles parviennent ou non à donner en sous-location pour une durée supérieure à six mois les biens dont elles sont locataires, portent atteinte au principe d'égalité devant la loi garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et au principe d'égalité devant les charges publiques garanti par l'article 13 de cette même Déclaration.

4. Toutefois, le Conseil constitutionnel a, dans les motifs et le dispositif de sa décision n° 2009-599 DC du 29 décembre 2009, déclaré conforme à la Constitution l'article 1586 sexies du code général des impôts, à la seule exception des mots : " et la contribution carbone sur les produits énergétiques " figurant au vingt et unième alinéa de son paragraphe I et des mots : " et de la contribution carbone sur les produits énergétiques " figurant au dix-septième alinéa de son paragraphe VI. Aucun changement de circonstances survenu depuis cette décision n'est de nature à justifier que la conformité de ces dispositions à la Constitution soit à nouveau examinée par le Conseil constitutionnel.

5. Il n'y a pas lieu, dès lors, de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité invoquée au Conseil constitutionnel.

Sur les autres moyens du pourvoi :

6. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".

7. Pour demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque, la société Appart'City soutient que la cour administrative d'appel de Toulouse :

- l'a entaché d'irrégularité, faute pour sa minute de comporter l'ensemble des signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- a méconnu le cinquième alinéa du b) du 4. du I de l'article 1586 sexies du code général des impôts en jugeant que les loyers afférents aux biens pris en location et donnés en sous-location n'étaient déductibles, dans la limite du produit de cette sous-location, de la valeur ajoutée servant au plafonnement de la contribution économique territoriale qu'à la condition que ces biens aient été effectivement sous-loués pour une durée de plus de six mois ;

- a méconnu le principe d'égalité devant la loi en interprétant ces dispositions comme imposant que ces mêmes biens soient effectivement sous-loués pendant une durée de six mois ;

- à titre subsidiaire, a commis une erreur de droit et a donné aux faits de l'espèce une inexacte qualification juridique en ne tenant pas compte, pour apprécier le caractère effectif de la sous-location des biens en cause, des périodes durant lesquelles ces biens, bien que proposés à la sous-location, n'ont pas trouvé preneur pour des raisons indépendantes de sa volonté ;

- a commis une erreur de droit en jugeant que la durée de sous-location effective de ces mêmes biens devait être appréciée distinctement pour chaque appartement et non pour la résidence de tourisme dans son ensemble ;

- a donné aux faits de l'espèce une inexacte qualification juridique et dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en jugeant que le tableau récapitulatif des " taux effectifs d'occupation " des résidences et les extractions de son logiciel d'exploitation ne permettaient pas de déterminer si les biens en cause avaient été effectivement sous-loués pour une durée de plus de six mois ;

8. Aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Appart'City.

Article 2 : Le pourvoi de la société Appart'City n'est pas admis.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Appart'City et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et à la Première ministre.

Délibéré à l'issue de la séance du 20 octobre 2022 où siégeaient : M. Pierre Collin, président de chambre, présidant ; M. Hervé Cassagnabère, conseiller d'Etat et M. François-René Burnod, auditeur-rapporteur.

Rendu le 31 octobre 2022.

Le président :

Signé : M. Pierre Collin

Le rapporteur :

Signé : M. François-René Burnod

La secrétaire :

Signé : Mme Sandrine Mendy


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 31 oct. 2022, n° 464417
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François-René Burnod
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI, REBEYROL

Origine de la décision
Formation : 8ème chambre
Date de la décision : 31/10/2022
Date de l'import : 02/11/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 464417
Numéro NOR : CETATEXT000046511546 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2022-10-31;464417 ?
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