La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/10/2022 | FRANCE | N°441459

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 20 octobre 2022, 441459


Vu la procédure suivante :

La société Airporc a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1822185 du 10 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 20LY00635 du 30 avril 2020, le premier vice-président de la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel de la société Airporc contre ce jugement. <

br>
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 26 juin e...

Vu la procédure suivante :

La société Airporc a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1822185 du 10 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 20LY00635 du 30 avril 2020, le premier vice-président de la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel de la société Airporc contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 26 juin et 15 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Airporc demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son préambule ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Saby, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Airporc ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Airporc exerçait une activité d'élevage de porcs, au sein d'un groupe fiscalement intégré au sens de l'article 223 A du code général des impôts dont la société des Etablissements Verdannet était la société mère. A la suite d'une vérification de comptabilité de la société Airporc portant sur ses exercices clos en 2012, 2013 et 2014, l'administration fiscale a procédé au rehaussement de ses résultats imposables. Une demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés acquittées par sa société mère a été adressée par la société Airporc à l'administration fiscale, qui a rejeté sa réclamation par une décision du 7 février 2018. La société Airporc a porté le litige devant le tribunal administratif de Grenoble par une demande transmise, par ordonnance du 6 avril 2019 du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, au tribunal administratif de Lyon, lequel l'a rejetée, par un jugement du 10 décembre 2019. La société Airporc se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 30 avril 2020 par laquelle le premier vice-président de la cour administrative d'appel a rejeté son appel formé contre ce jugement.

2. D'une part, aux termes de l'article 223 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'imposition en litige : " Une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 p. 100 au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés du groupe (...). Chaque société du groupe est tenue solidairement au paiement de l'impôt sur les sociétés, de l'imposition forfaitaire annuelle et du précompte et, le cas échéant, des intérêts de retard, majorations et amendes fiscales correspondantes, dont la société mère est redevable, à hauteur de l'impôt et des pénalités qui seraient dus par la société si celle-ci n'était pas membre du groupe ". Il résulte de ces dispositions que lorsqu'une imposition supplémentaire a été acquittée par la société mère d'un groupe fiscalement intégré, la société filiale n'est plus susceptible de se voir réclamer le paiement de cette imposition en sa qualité de débiteur solidaire et qu'à défaut d'un mandat que lui aurait régulièrement confié la société mère, elle n'est, par suite, pas recevable à contester l'imposition dont il s'agit.

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 197-3 du livre des procédures fiscales : "'Toute réclamation doit à peine d'irrecevabilité : (...) c) Porter la signature manuscrite de son auteur'; à défaut l'administration invite par lettre recommandée avec accusé de réception le contribuable à signer la réclamation dans un délai de trente jours'; / (...)'". Aux termes de l'article R. 197-4 du même livre : "'Toute personne qui introduit ou soutient une réclamation pour autrui doit justifier d'un mandat régulier. Le mandat doit, à peine de nullité, être produit en même temps que l'acte qui l'autorise ou enregistré avant l'exécution de cet acte. / Toutefois, il n'est pas exigé de mandat des avocats inscrits au barreau ni des personnes qui, en raison de leurs fonctions ou de leur qualité, ont le droit d'agir au nom du contribuable. Il en est de même si le signataire de la réclamation a été mis personnellement en demeure d'acquitter les impositions mentionnées dans cette réclamation. (...)'". Aux termes de l'article R. 200-2 du même livre : "'(...) Les vices de forme prévus aux a, b, et d de l'article R. 197-3 peuvent, lorsqu'ils ont motivé le rejet d'une réclamation par l'administration, être utilement couverts dans la demande adressée au tribunal administratif. / Il en est de même pour le défaut de signature de la réclamation lorsque l'administration a omis d'en demander la régularisation dans les conditions prévues au c du même article ". Il résulte de ces dispositions que si une réclamation présentée par une personne qui n'a ni qualité ni mandat pour le faire est irrecevable, ce vice de forme peut, en l'absence de demande de régularisation adressée par l'administration dans les conditions prévues au c) de l'article R. 197-3 du livre des procédures fiscales, être régularisé par le contribuable dans sa demande devant le tribunal administratif. Cette régularisation est donc possible jusqu'à l'expiration du délai imparti au contribuable pour présenter cette demande. En revanche, après l'expiration de ce délai, l'irrecevabilité de la réclamation préalable présentée à l'administration et, par conséquent, celle de la demande contentieuse, ne peuvent plus être régularisées, quand bien même l'administration n'aurait pas invité le contribuable à le faire. Une telle irrecevabilité doit être relevée d'office par le juge, y compris pour la première fois en appel si elle n'a pas été relevée en première instance.

4. Enfin, aux termes de l'article R. 612-1 du code de justice administrative : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. (...) La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. (...) " Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours peuvent, (...) par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, ainsi que cela a été rappelé au point 1, que les cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés résultant des rehaussements entrepris à l'égard de la société Airporc ont été mises à la charge de la société Etablissements Verdannet, seule redevable de l'imposition. Si la société Airporc n'était pas recevable, à défaut de mandat de la société Etablissements Verdannet, à demander auprès de l'administration fiscale, comme elle l'a fait, la décharge de l'imposition litigieuse que cette dernière avait spontanément acquittée en sa qualité de société mère d'un groupe fiscalement intégré au sens de l'article 223 A du code général des impôts, et que sa demande enregistrée devant le tribunal administratif a été présentée par " la SAS Airporc représentée par la Société des Etablissements Verdannet, elle-même représentée par son Président " et " assistée de Me Lagneaux ", il ressort également des pièces du dossier soumis aux juges du fond que cette demande n'a pas été présentée par la société Airporc pour le compte de la société des Etablissements Verdannet. Dès lors, les premiers juges n'étaient pas tenus de l'inviter à régulariser le vice attaché à l'absence de mandat donné par la société mère, dans les conditions prévues à l'article R. 612-1 du code de justice administrative, dont les dispositions, citées au point 4, ne s'appliquent pas, au demeurant, à une telle irrégularité insusceptible, comme il a été dit au point 3, d'être couverte après l'expiration du délai de recours. Par suite, le premier vice-président de la cour administrative d'appel de Lyon a pu, sans méconnaître le sens et la portée des écritures de première instance, ni entacher son ordonnance d'aucune erreur de droit ou de qualification juridique des faits qui lui étaient soumis, ni porter atteinte, en tout état de cause, au droit à un recours effectif garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et les stipulations des articles 6 § 1 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, rejeter, comme manifestement dépourvue de fondement la requête d'appel de la société Airporc, aux motifs que la société Airporc n'avait jamais prétendu, avant de saisir la cour administrative d'appel, agir au nom et pour le compte de la société tête de groupe, et que l'irrecevabilité née de son absence d'intérêt à agir devait être soulevée d'office par les premiers juges sans que ces derniers aient à l'inviter préalablement à produire un mandat de la société des Etablissements Verdannet.

6. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la société Airporc doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Airporc est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Airporc et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 29 septembre 2022 où siégeaient : M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat, présidant ; M. Polge, conseiller d'Etat et M. Olivier Saby, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 20 octobre 2022.

Le président :

Signé : M. Thomas Andrieu

Le rapporteur :

Signé : M. Olivier Saby

La secrétaire :

Signé : Mme Laurence Chancerel


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 441459
Date de la décision : 20/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 20 oct. 2022, n° 441459
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Saby
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO et GOULET

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:441459.20221020
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award