La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/12/1998 | CJUE | N°C-374/96

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Florian Vorderbrüggen contre Hauptzollamt Bielefeld., 16/12/1998, C-374/96


Avis juridique important

|

61996J0374

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 16 décembre 1998. - Florian Vorderbrüggen contre Hauptzollamt Bielefeld. - Demande de décision préjudicielle: Finanzgericht Düsseldorf - Allemagne. - Prélèvement supplémentaire sur le lait - Quantité de référence spécifique - Octroi

définitif - Conditions. - Affaire C-374/96.
Recueil de jurisprudence 1998 p...

Avis juridique important

|

61996J0374

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 16 décembre 1998. - Florian Vorderbrüggen contre Hauptzollamt Bielefeld. - Demande de décision préjudicielle: Finanzgericht Düsseldorf - Allemagne. - Prélèvement supplémentaire sur le lait - Quantité de référence spécifique - Octroi définitif - Conditions. - Affaire C-374/96.
Recueil de jurisprudence 1998 page I-08385

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

Agriculture - Organisation commune des marchés - Lait et produits laitiers - Prélèvement supplémentaire sur le lait - Attribution de quantités de référence exemptes du prélèvement - Producteurs ayant suspendu leurs livraisons au titre du régime de primes de non-commercialisation ou de reconversion - Octroi définitif d'une quantité de référence spécifique - Condition relative à une date limite pour la reprise effective des livraisons - Compétence d'exécution conférée à la Commission - Dépassement -
Absence

(Traité CE, art. 43, § 3, et 145; règlements du Conseil n_ 804/68, art. 5 quater, et n_ 857/84, art. 3 bis, § 3, première phrase; règlement de la Commission n_ 1546/88, art. 3 bis, § 3, al. 1)

Sommaire

N'est pas invalide, du fait de l'incompétence de la Commission, l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89, fixant les modalités d'application du prélèvement supplémentaire sur le lait visé à l'article 5 quater du règlement n_ 804/68, en ce qu'il requiert, pour l'attribution d'une quantité de référence spécifique définitive aux producteurs ayant souscrit un engagement de non-commercialisation en vertu du règlement n_ 1078/77, en
plus des conditions posées par l'article 3 bis, paragraphe 3, première phrase, du règlement du Conseil n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 1639/91, que les producteurs concernés aient repris effectivement les livraisons avant le 29 mars 1990.

En effet, conformément au système de répartition des compétences prévu à l'article 145 du traité, l'article 5 quater, paragraphe 7, du règlement n_ 804/68 autorise la Commission à poser des conditions supplémentaires pour l'octroi des quantités de référence, pour autant que celles-ci, d'une part, respectent les règles d'application fixées par le Conseil lui-même dans le règlement n_ 857/84 et, d'autre part, assurent le bon fonctionnement du régime des quantités de référence, conditions auxquelles
satisfait la réglementation en cause.

Parties

Dans l'affaire C-374/96,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE, par le Finanzgericht Düsseldorf (Allemagne) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Florian Vorderbrüggen

et

Hauptzollamt Bielefeld,

une décision à titre préjudiciel sur la validité de l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement (CEE) n_ 1546/88 de la Commission, du 3 juin 1988, fixant les modalités d'application du prélèvement supplémentaire visé à l'article 5 quater du règlement (CEE) n_ 804/68 (JO L 139, p. 12), tel qu'inséré par le règlement (CEE) n_ 1033/89 de la Commission, du 20 avril 1989 (JO L 110, p. 27),

LA COUR

(deuxième chambre),

composée de MM. G. Hirsch (rapporteur), président de chambre, G. F. Mancini et R. Schintgen, juges,

avocat général: M. P. Léger,

greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. Dierk Booß, conseiller juridique principal, en qualité d'agent, assisté de Mes Hans-Jürgen Rabe, Georg M. Berrisch et Marco Núñez Müller, avocats au barreau de Bruxelles,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de M. Vorderbrüggen, représenté par Me Mechtild Düsing, avocat à Münster, et de la Commission, représentée par Me Marco Núñez Müller, à l'audience du 11 juin 1998,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 17 septembre 1998,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par ordonnance du 13 novembre 1996, parvenue à la Cour le 26 novembre suivant, le Finanzgericht Düsseldorf a posé, en application de l'article 177 du traité CE, une question relative à la validité de l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement (CEE) n_ 1546/88 de la Commission, du 3 juin 1988, fixant les modalités d'application du prélèvement supplémentaire visé à l'article 5 quater du règlement (CEE) n_ 804/68 (JO L 139, p. 12), tel qu'inséré par le règlement (CEE) n_ 1033/89 de
la Commission, du 20 avril 1989 (JO L 110, p. 27).

2 Cette question a été soulevée dans le cadre d'un litige opposant M. Vorderbrüggen, producteur de lait, au Hauptzollamt Bielefeld (ci-après le «HZA Bielefeld») au sujet du refus de ce dernier de lui attribuer une quantité de référence spécifique définitive, au motif qu'il n'avait pas repris la production de lait en temps utile.

Le cadre réglementaire

3 Le secteur du lait et des produits laitiers, qui est régi par le règlement (CEE) n_ 804/68 du Conseil, du 27 juin 1968, portant organisation commune des marchés dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 148, p. 13), étant caractérisé par une production excédentaire, le règlement (CEE) n_ 1078/77 du Conseil, du 17 mai 1977, instituant un régime de primes de non-commercialisation du lait et des produits laitiers et de reconversion de troupeaux bovins à orientation laitière (JO L 131, p.
1), a notamment prévu, afin de réduire l'offre, un système de primes au profit des agriculteurs qui renoncent à commercialiser du lait et des produits laitiers provenant de leur exploitation ou qui reconvertissent leurs troupeaux bovins à orientation laitière vers la production de viande.

4 Eu égard à la persistance d'un déséquilibre entre l'offre et la demande dans le secteur laitier, un régime de prélèvement supplémentaire a été introduit par le règlement (CEE) n_ 856/84 du Conseil, du 31 mars 1984, modifiant le règlement n_ 804/68 (JO L 90, p. 10), et par le règlement (CEE) n_ 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, portant règles générales pour l'application du prélèvement visé à l'article 5 quater du règlement n_ 804/68 (JO L 90, p. 13). Selon cet article 5 quater du règlement n_
804/68, tel qu'inséré par le règlement n_ 856/84, un prélèvement supplémentaire est dû pour des quantités de lait qui dépassent une quantité de référence à déterminer soit d'après la quantité de lait ou d'équivalent lait livrée par un producteur, soit d'après la même quantité achetée par un acheteur pendant une année de référence. Selon la formule adoptée par l'Allemagne, c'est le producteur qui est redevable du prélèvement.

5 Un producteur qui avait contracté, pour une période incluant l'année de référence, un engagement en vertu du règlement n_ 1078/77 n'a pas eu de production pendant l'année de référence, en sorte qu'il n'a pas pu obtenir une quantité de référence dans le cadre du régime initial.

6 Par les arrêts du 28 avril 1988, Mulder (120/86, Rec. p. 2321), et Von Deetzen (170/86, Rec. p. 2355), la Cour a dit pour droit que le règlement n_ 857/84, tel que complété par le règlement (CEE) n_ 1371/84 de la Commission, du 16 mai 1984, fixant les modalités d'application du prélèvement supplémentaire visé à l'article 5 quater du règlement n_ 804/68 (JO L 132, p. 11), est invalide dans la mesure où il ne prévoit pas l'attribution d'une quantité de référence aux producteurs n'ayant pas livré de
lait pendant l'année de référence retenue par l'État membre concerné.

7 Pour donner suite à ces deux arrêts, le règlement (CEE) n_ 764/89 du Conseil, du 20 mars 1989, modifiant le règlement n_ 857/84 (JO L 84, p. 2), a inséré un nouvel article 3 bis dans le règlement n_ 857/84 prévoyant, sous certaines conditions, qu'une quantité de référence spécifique serait octroyée à cette catégorie de producteurs appelés communément les «producteurs SLOM».

8 S'agissant d'une attribution définitive d'une quantité de référence spécifique, l'article 3 bis, paragraphe 3, du règlement n_ 857/84, dans sa version résultant du règlement n_ 764/89, disposait initialement:

«Si, dans un délai de deux ans à compter du 29 mars 1989, le producteur peut prouver, à la satisfaction de l'autorité compétente, qu'il a effectivement repris les ventes directes et/ou les livraisons et que ces ventes directes et/ou ces livraisons ont atteint au cours des douze derniers mois un niveau égal ou supérieur à 80 % de la quantité de référence provisoire, la quantité de référence spécifique lui est attribuée définitivement...»

9 L'article 3 bis, paragraphes 1 et 2, du règlement n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 764/89, ayant été invalidé par les arrêts du 11 décembre 1990, Spagl (C-189/89, Rec. p. I-4539), et Pastätter (C-217/89, Rec. p. I-4585), le règlement n_ 857/84 a été, en conséquence, modifié par le règlement (CEE) n_ 1639/91 du Conseil, du 13 juin 1991 (JO L 150, p. 35). Dans ces conditions, l'article 1er, II, sous c), de ce dernier règlement a également modifié le paragraphe 3 de cette disposition du
règlement n_ 857/84 de la manière suivante:

«Si, dans un délai de deux ans à compter du 29 mars 1989 ou, dans le cas visé au dernier alinéa du paragraphe 1, à compter du 1er juillet 1991, sous réserve que le régime du prélèvement supplémentaire soit prolongé, le producteur peut prouver, à la satisfaction de l'autorité compétente, qu'il a effectivement repris les ventes directes et/ou les livraisons et que ces ventes directes et/ou ces livraisons ont atteint au cours des douze derniers mois un niveau égal ou supérieur à 80 % de la quantité de
référence provisoire, la quantité de référence spécifique lui est attribuée définitivement...»

10 Le règlement n_ 1546/88, adopté en remplacement du règlement n_ 1371/84, a été lui-même modifié à la suite des arrêts Mulder et Von Deetzen, précités, par le règlement n_ 1033/89.

11 L'article 3 bis, paragraphe 3, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89, prévoit, en ce qui concerne les producteurs SLOM:

«Selon des modalités à déterminer par l'État membre, le producteur apporte la preuve à l'autorité compétente, avant le 29 mars 1991, qu'il a effectivement repris des ventes directes et/ou des livraisons de lait depuis au moins douze mois.

Le niveau des ventes directes de lait ou de produits laitiers et/ou le niveau des livraisons de lait au cours des douze derniers mois précédant la présentation de la preuve est déterminé par l'autorité compétente en tenant compte de l'évolution du rythme de production dans l'exploitation du producteur, des conditions saisonnières et de toute circonstance exceptionnelle...»

L'affaire au principal

12 M. Vorderbrüggen a pris, en sa qualité de producteur de lait, un engagement de non-commercialisation de lait au titre du règlement n_ 1078/77, pour une période venant à expiration le 25 septembre 1985.

13 Sur sa demande du 28 juin 1989, l'autorité compétente lui a certifié, par une attestation délivrée le 1er août suivant, qu'il remplissait les conditions d'attribution de la quantité de référence spécifique provisoire sollicitée.

14 Après qu'il a repris la production de lait le 23 août 1990, la laiterie coopérative compétente l'a informé, par lettre du 29 août 1990, du niveau de sa quantité de référence spécifique provisoire.

15 Le 12 juillet 1991, le HZA Bielefeld lui a indiqué que la détermination d'une quantité de référence spécifique définitive était subordonnée, en application de l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89, à la reprise de la production laitière avant le 29 mars 1990.

16 Dans ces conditions, le HZA Bielefeld a, par décision du 25 septembre 1991, rejeté la demande d'attribution d'une quantité de référence spécifique définitive que M. Vorderbrüggen avait formulée le 27 août 1991 au motif qu'il n'avait pas repris la production de lait en temps utile.

17 Sa réclamation contre cette décision ayant été rejetée, le demandeur au principal a introduit un recours le 5 mars 1992 devant le Finanzgericht Düsseldorf.

18 A l'appui de son recours, il soutient en substance que l'article 3 bis, paragraphe 3, du règlement n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 1639/91, n'impose aucune date limite pour la première livraison. Étant donné que cette disposition ne prévoirait aucune condition supplémentaire dont dépendrait l'octroi d'une quantité de référence spécifique définitive, elle priverait l'article 3 bis, paragraphe 3, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89, de toute base
légale.

19 Le demandeur au principal prétend ensuite que l'article 155 du traité CE n'attribue pas compétence à la Commission pour adopter l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89.

20 En dernier lieu, le demandeur au principal considère que son droit à une quantité de référence définitive découle de l'article 1er, II, sous c), du règlement n_ 1639/91, qui lui serait applicable du fait de son entrée en vigueur le 28 mars 1991.

21 Le HZA Bielefeld soutient, en revanche, que l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89, est valide dès lors que l'article 189 du traité CE autorise la Commission à adopter les règlements nécessaires à l'accomplissement de sa mission et qu'il lui incombe, dans le cadre de cette mission, de veiller, en raison de l'article 155 du traité, à l'application des dispositions prises par les institutions communautaires en vertu du
traité.

22 La Commission aurait bénéficié d'un transfert de compétence de la part du Conseil, en vertu de l'esprit et de l'objet de l'article 3 bis, paragraphe 4, deuxième alinéa, premier membre de phrase, du règlement n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 1639/91. Même en cas d'invalidité de l'article 3 bis, paragraphe 3, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89, l'article 3 bis, paragraphe 3, dernière phrase, du règlement n_ 857/84, modifié, exigerait, afin d'éviter tout
abus, que le producteur concerné ait eu une activité de production pendant une période de douze mois.

La question préjudicielle

23 Estimant que l'attribution d'une quantité de référence spécifique définitive n'est possible qu'en cas d'invalidité de l'article 3 bis, paragraphe 3, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89, le Finanzgericht Düsseldorf a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question suivante:

«L'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement (CEE) n_ 1546/88, tel que modifié par le règlement (CEE) n_ 1033/89, est-il valide, dans la mesure où cette disposition requiert, en plus des conditions de l'article 3 bis, paragraphe 3, première phrase, du règlement (CEE) n_ 857/84, tel que modifié par les règlements (CEE) n_ 764/89 et (CEE) n_ 1639/91, que le producteur ait repris effectivement des ventes directes et/ou des livraisons de lait depuis au moins douze mois?»

24 Par sa question, la juridiction nationale s'interroge sur la validité de l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89, en raison des doutes relatifs au pouvoir de la Commission de subordonner l'attribution définitive d'une quantité de référence spécifique à la condition que le producteur ait effectivement repris des ventes directes et/ou des livraisons de lait depuis au moins douze mois.

Sur l'interprétation de l'article 3 bis, paragraphe 3, du règlement n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 1639/91

25 Avant de statuer sur le point de savoir si l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89, est invalide du fait de l'incompétence de la Commission, il y a lieu de vérifier si cette disposition ne peut pas recevoir une interprétation conforme à l'article 3 bis, paragraphe 3, première phrase, du règlement n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 1639/91 (voir arrêt du 27 janvier 1994, Herbrink, C-98/91, Rec. p. I-223, point
9).

26 En effet, la Commission a notamment soutenu que l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 1546/88, modifié, n'ajoute rien aux dispositions matérielles de l'article 3 bis, paragraphe 3, première phrase, du règlement n_ 857/84, modifié, et que ces deux dispositions ont la même teneur normative en ce qui concerne la fixation d'une date limite pour la première livraison.

27 En vue d'une attribution définitive d'une quantité de référence spécifique, l'article 3 bis, paragraphe 3, première phrase, du règlement n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 1639/91, pose deux conditions. D'une part, le producteur doit apporter la preuve qu'il a repris les livraisons entre le 29 mars 1989 et le 29 mars 1991; d'autre part, le niveau des livraisons doit avoir atteint, au cours des douze derniers mois, un niveau égal ou supérieur à 80 % de la quantité de référence
provisoire.

28 Ainsi que l'a relevé M. l'avocat général au point 41 de ses conclusions, cette dernière exigence, à savoir qu'un certain niveau de ventes ait été réalisé au cours des douze derniers mois, n'impose nullement l'obligation de reprendre les livraisons au plus tard au début de cette période, à savoir au plus tard le 29 mars 1990. En effet, la période de douze mois est destinée à permettre d'apprécier, en vue de l'octroi d'une quantité de référence spécifique définitive, le niveau que la production de
lait du producteur qui le sollicite a effectivement atteint par rapport à une production autorisée.

29 Dès lors, l'article 3 bis, paragraphe 3, première phrase, du règlement n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 1639/91, ne vise pas le début des livraisons dans le cadre d'une attribution d'une quantité de référence spécifique et ne peut être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une reprise des livraisons après cette date.

30 Si l'interprétation de l'article 3 bis, paragraphe 3, du règlement n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 1639/91, ne fait ainsi pas apparaître que cette disposition impose à un producteur le respect d'une date limite pour la reprise des ventes au-delà de laquelle il ne serait plus admis à recevoir une quantité de référence spécifique définitive, elle ne permet pas non plus de considérer cette disposition comme une habilitation autorisant la Commission à fixer une telle date de reprise à
l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89.

Sur la compétence de la Commission

31 A cet égard, il convient de rappeler que, si, en vue d'instituer une organisation commune de marché dans un secteur donné, l'article 43, paragraphe 3, du traité CE attribue compétence au Conseil, ce dernier peut, en vertu de l'article 145 du traité CE, soit conférer à la Commission les compétences d'exécution des règles qu'il établit, soit se réserver le droit d'exercer directement des compétences d'exécution.

32 Ainsi, l'article 145 du traité habilite le Conseil et, par délégation, la Commission à édicter des dispositions de même nature pour assurer l'application d'une réglementation déterminée.

33 Partant, le Conseil fixe, en vertu de l'article 5 quater, paragraphe 6, du règlement n_ 804/68, tel qu'inséré par le règlement n_ 856/84, «les règles générales pour l'application du présent article, et notamment celles relatives à la détermination des quantités de référence ainsi que le montant des prélèvements», tandis que la Commission arrête, selon l'article 5 quater, paragraphe 7, du même règlement, «les modalités d'application ... selon la procédure visée à l'article 30».

34 Conformément à ce système de répartition des compétences, le Conseil ayant édicté les règles générales pour l'application du règlement n_ 857/84, la Commission a réglé les modalités d'application du règlement n_ 1546/88, règlements qui ont été modifiés en dernier lieu à la suite des arrêts Mulder et Von Deetzen, précités, en vue d'intégrer les producteurs SLOM au régime du prélèvement supplémentaire.

35 Sur le fondement de la distinction faite aux paragraphes 6 et 7 de l'article 5 quater du règlement n_ 804/68, modifié, entre les règles générales pour l'application comprenant notamment celles relatives à la détermination des quantités de référence et de référence spécifique qui figurent au règlement n_ 857/84 et les modalités d'application réservées à la Commission, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, la Commission est habilitée, dans l'exercice des compétences qui
lui sont conférées par le Conseil aux fins de la mise en oeuvre d'une organisation commune de marché dans le secteur agricole, à adopter toutes les modalités d'application nécessaires au bon fonctionnement du régime prévu, pour autant que celles-ci ne soient pas contraires à la réglementation de base ou à la réglementation d'application du Conseil (voir arrêt du 2 mai 1990, Hopermann, C-358/88, Rec. p. I-1687, point 8).

36 Dans ces limites, dès lors que le Conseil a fixé dans son règlement de base les règles essentielles de la matière envisagée, il peut déléguer à la Commission le pouvoir général d'en arrêter les modalités d'application sans avoir à préciser les éléments essentiels des compétences déléguées et, pour ce faire, une disposition rédigée dans des termes généraux fournit une base d'habilitation suffisante (arrêt du 27 octobre 1992, Allemagne/Commission, C-240/90, Rec. p. I-5383, point 41).

37 Par conséquent, l'article 5 quater, paragraphe 7, du règlement n_ 804/68, tel qu'inséré par le règlement n_ 856/84, autorise la Commission à poser des conditions supplémentaires pour autant que celles-ci, d'une part, respectent les règles d'application fixées par le Conseil lui-même dans le règlement n_ 857/84 et, d'autre part, assurent le bon fonctionnement du régime des quantités de référence.

38 Dans la mesure où rien ne fait apparaître que les conditions énoncées par le Conseil à l'article 3 bis, paragraphe 3, première phrase, du règlement n_ 857/84, tel que modifié par le règlement n_ 1639/91, sont exhaustives, cette disposition n'exclut dès lors pas que la Commission puisse les compléter en prévoyant d'autres exigences compatibles avec celles-ci. La date limite du 29 mars 1991 que fixe l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le
règlement n_ 1033/89, remplit ce dernier critère de compatibilité, ainsi que l'a relevé M. l'avocat général au point 71 de ses conclusions.

39 Une telle exigence supplémentaire d'une durée minimale de reprise des livraisons est également nécessaire pour assurer le bon fonctionnement du régime des quotas laitiers.

40 Selon le quatrième considérant du règlement n_ 1033/89, des règles de procédure, dont la fixation de délais, doivent être établies pour que la mise en oeuvre des dispositions de l'article 3 bis du règlement n_ 857/84 se fasse dans des conditions qui assurent le respect des droits et obligations de l'ensemble des parties intéressées.

41 Or, l'exigence d'une date limite permet de concilier l'extension inéluctable de la production de lait par l'inclusion des producteurs SLOM dans le régime du prélèvement supplémentaire avec le souci, mentionné au cinquième considérant du règlement n_ 764/89, de ne pas compromettre la fragile stabilité régnant sur le marché des produits laitiers.

42 En effet, afin d'éviter des manoeuvres spéculatives consistant à reprendre la production pour obtenir une quantité de référence spécifique définitive dans le seul but de sa commercialisation par une vente à autrui, l'existence d'une date limite, comme celle en cause en l'espèce, confère une certaine garantie du sérieux de la volonté et de la capacité réelle du bénéficiaire visé par le régime SLOM de reprendre la production.

43 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre que l'examen de la question posée n'a révélé aucun élément de nature à affecter la validité de l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 1546/88, tel qu'inséré par le règlement n_ 1033/89, pour autant que cette disposition exige la reprise effective des livraisons de lait avant le 29 mars 1990.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

44 Les frais exposés par la Commission, qui a soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR

(deuxième chambre),

statuant sur la question à elle soumise par le Finanzgericht Düsseldorf, par ordonnance du 13 novembre 1996, dit pour droit:

L'examen de la question posée n'a révélé aucun élément de nature à affecter la validité de l'article 3 bis, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement (CEE) n_ 1546/88 de la Commission, du 3 juin 1988, fixant les modalités d'application du prélèvement supplémentaire visé à l'article 5 quater du règlement (CEE) n_ 804/68, tel qu'inséré par le règlement (CEE) n_ 1033/89 de la Commission, du 20 avril 1989, pour autant que cette disposition exige la reprise effective des livraisons de lait avant le 29
mars 1990.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : C-374/96
Date de la décision : 16/12/1998
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Finanzgericht Düsseldorf - Allemagne.

Prélèvement supplémentaire sur le lait - Quantité de référence spécifique - Octroi définitif - Conditions.

Agriculture et Pêche

Produits laitiers


Parties
Demandeurs : Florian Vorderbrüggen
Défendeurs : Hauptzollamt Bielefeld.

Composition du Tribunal
Avocat général : Léger
Rapporteur ?: Hirsch

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1998:604

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award