Cour de cassation de Belgique
Arret
2501
NDEG P.11.1339.F
I. B. C., A., M.,
II. C. C.-H.i, ayant pour conseil Maitre Catherine Lechanteur, avocat aubarreau de Liege,
III. R. Y., F., A., G.,
ayant pour conseils Maitre Jean-Yves Marichal, avocat au barreau de Liege,et Ingrid Thelen, avocat au barreau de Bruxelles,
IV. P. P., E., A., G.,
ayant pour conseil Maitre Pierre Pichault, avocat au barreau de Liege,
prevenus,
demandeurs en cassation,
contre
S. G., domicilie à Liers, rue des Eglantiers, 24,
partie civile,
defendeur en cassation.
I. la procedure en cassation
Les pourvois sont diriges contre un arret rendu le 14 juin 2011 par lacour d'appel de Liege, chambre correctionnelle.
Les deuxieme, troisieme et quatrieme demandeurs invoquent respectivementdeux, trois et un moyens, chacun dans un memoire annexe au present arret,en copie certifiee conforme.
Le conseiller Pierre Cornelis a fait rapport.
L'avocat general Damien Vandermeersch a conclu.
II. la decision de la cour
A. Sur le pourvoi de C. B., en tant qu'il est dirige contre la decision decondamnation rendue sur l'action publique exercee à sa charge :
Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ont eteobservees et la decision est conforme à la loi.
B. Sur le pourvoi de C.-H. C., en tant qu'il est dirige contre la decisionde condamnation rendue sur l'action publique exercee à sa charge :
Sur le premier moyen :
Cite devant le tribunal correctionnel du chef d'attentat à la pudeur,detention arbitraire et harcelement, le demandeur a ete acquitte par lepremier juge et, sur appel de la partie civile et du procureur du Roi, ila ete condamne du chef des deux dernieres preventions par la courd'appel.
Pris de la violation des droits de la defense, le moyen reproche àl'arret de condamner le demandeur du chef de detention arbitraire alorsque le ministere public avait declare abandonner cette prevention tant enpremiere instance qu'en degre d'appel.
Le ministere public ne peut dessaisir les juges de l'action qu'il leur asoumise et, partant, ne peut se desister de l'appel qu'il a interjetecontre un jugement correctionnel.
Les juges d'appel ont enonce que le ministere public avait estime devoirabandonner les poursuites du chef de cette prevention eu egard à lacirconstance que, selon lui, le fait reproche faisait partie du contextedu harcelement reproche au demandeur. Ils ont egalement considere que cetabandon ne constituait qu'un avis, lequel ne pouvait dessaisir la courd'appel de la connaissance des faits qui lui ont ete deferes par lescitations originaires dans la limite des appels interjetes.
Statuant sur une prevention dont ils etaient legalement saisis et dont ledemandeur etait averti par la citation à comparaitre devant le juge dufond, les juges d'appel n'ont pas viole les droits de la defense.
Le moyen ne peut etre accueilli.
Sur le deuxieme moyen :
Quant à la premiere branche :
Le moyen soutient que l'arret viole le principe de la legalite desincriminations en condamnant le demandeur du chef de detention arbitrairesans constater l'element moral de l'infraction.
Est coupable de cette infraction celui qui a conscience du caractereobjectivement illegal de la privation de liberte, en maniere telle que songeste presente un caractere arbitraire.
A l'appui d'un temoignage, l'arret considere que le demandeur ne pouvaitignorer que maintenir une personne durant une demi-heure en profitant deson etat de faiblesse constituait une atteinte inacceptable à sa liberteet engendrant des angoisses dans son chef.
Par ces considerations, l'arret retient la participation consciente dudemandeur à l'acte objectivement illegal pour lequel il est poursuivi.
Les juges d'appel ont ainsi legalement justifie leur decision quant àl'element moral du delit.
Le moyen ne peut etre accueilli.
Quant à la seconde branche :
Le demandeur soutient d'abord que les juges d'appel n'ont pu deduire deleurs constatations que les faits de harcelement qui lui etaient reprochesavaient un caractere incessant ou repetitif.
Contrairement à ce qu'affirme le moyen, l'arret ne fonde pas seulement lacondamnation du demandeur sur deux faits commis au cours d'une periode desix ans, mais constate qu'il a participe à de nombreux faits commis parle troisieme demandeur ou pose des actes isoles qui, ensemble et enconnaissance de cause, constituent un comportement habituel deharcelement.
Reposant sur une lecture incomplete de l'arret, le moyen, à cet egard,manque en fait.
Le demandeur fait ensuite grief à l'arret de ne pas constater l'elementmoral de cette prevention.
La cour d'appel a considere qu'il apparaissait des declarations desprevenus, dont le demandeur, que ceux-ci connaissaient l'importance deleurs agissements ainsi que les repercussions qu'ils pouvaient avoir surle defendeur, et qu'ils savaient en consequence que les faits, « par larepetition frequente à l'egard d'un meme destinataire dont ilsconnaissaient la personnalite, constituaient un ensemble de perturbationsqui depassaient de loin la notion de bizutage ou d'actes de potaches, maisaffectaient gravement la tranquillite de l'interesse ».
Repondant aux conclusions du demandeur, ces considerations motiventregulierement et justifient legalement la decision des juges d'appel.
Dans cette mesure, le moyen ne peut etre accueilli.
Le controle d'office
Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ont eteobservees et la decision est conforme à la loi.
C. Sur le pourvoi d'Y. R., en tant qu'il est dirige contre la decision decondamnation rendue sur l'action publique exercee à sa charge :
Sur le premier moyen :
Le demandeur soutient qu'en application de l'article 442bis du Code penal,la cour d'appel aurait du declarer les poursuites irrecevables à defautde plainte de la personne qui se pretendait harcelee.
L'arret enonce que le defendeur a depose plainte le 13 avril 2004.
Critiquant l'appreciation en fait des juges d'appel ou exigeant pour sonexamen une verification d'elements de fait, pour laquelle la Cour est sanspouvoir, le moyen est irrecevable.
Sur le deuxieme moyen :
Le moyen reproche à l'arret de confisquer une piece à conviction qu'ildeclare appartenir au demandeur et avoir servi à la commission despreventions retenues à sa charge, alors que ces deux motifs sontinexacts.
Critiquant l'appreciation en fait des juges d'appel ou exigeant pour sonexamen une verification d'elements de fait, pour laquelle la Cour est sanspouvoir, le moyen est irrecevable.
Sur le troisieme moyen :
Le demandeur soutient que les juges d'appel n'ont pas legalement decideque les faits commis par lui avaient un caractere incessant et repetitifconstituant un comportement habituel de harcelement.
Il appartient au juge qui statue sur des poursuites du chef de harcelementd'apprecier en fait la realite de l'atteinte à la tranquillite de lavictime, la gravite de cette atteinte, le lien de causalite entre cecomportement et ladite atteinte ainsi que la connaissance que l'auteuravait ou devait avoir des consequences de son comportement.
Il revient toutefois à la Cour de verifier si, des faits qu'il aconstates, le juge a pu deduire que ce comportement etait incessant ourepetitif.
L'arret enonce que :
- le demandeur ne conteste pas ce qu'il appelle des « blagues » ;
- les prevenus savaient que, meme si certains faits, pris isolementauraient pu etre qualifies de jeux, leur repetition à l'egard d'undestinataire dont ils connaissaient la personnalite constituait unensemble de perturbations depassant de loin la notion de bizutage oud'actes de potaches, mais affectaient gravement la tranquillite dudefendeur ;
- le caractere repete des actes decrits aux pages 13 et 14 de l'arret lorsde l'examen de la prevention de coups ou blessures volontaires demontre lavolonte de harceler le defendeur ;
- le demandeur a reconnu à l'audience trois autres episodes ;
- les actes reproches ne sont pas des faits isoles sur une trentained'annees, mais des actes repetes et nombreux commis au cours d'une periodedebutant en 1998, à l'epoque ou le harcelement est devenu punissable, ets'achevant le 13 avril 2004.
Les juges d'appel ont pu deduire de ces considerations que le comportementdu demandeur avait le caractere habituel requis pour constituerl'infraction de harcelement.
Le moyen ne peut etre accueilli.
Le controle d'office
Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ont eteobservees et la decision est conforme à la loi.
D. Sur le pourvoi de P.P., en tant qu'il est dirige contre la decision decondamnation rendue sur l'action publique exercee à sa charge :
Sur le moyen :
Quant à la premiere branche :
Le demandeur soutient que sa condamnation du chef de harcelement estillegale des lors qu'elle repose sur un fait unique.
L'arret ne declare pas le demandeur coupable sur le fondement des deuxfaits mentionnes au moyen, mais constate qu'il a participe à l'executionde nombreux faits commis par le troisieme demandeur ou pose des faitsisoles qui, ensemble et en connaissance de cause, constituent uncomportement habituel de harcelement.
Reposant sur une lecture incomplete de l'arret, le moyen manque en fait.
Quant à la deuxieme branche :
Contrairement à ce qu'affirme le moyen, la cour d'appel n'a pas fondel'existence de l'element moral de l'infraction sur la seule affirmationfaite par le demandeur à l'expert.
La cour d'appel a considere qu'il apparaissait des declarations desprevenus, dont le demandeur, que ceux-ci connaissaient l'importance deleurs agissements ainsi que les repercussions qu'ils pouvaient avoir surle defendeur, et qu'ils savaient en consequence que les faits, « par larepetition frequente à l'egard d'un meme destinataire dont ilsconnaissaient la personnalite, constituaient un ensemble de perturbationsqui depassaient de loin la notion de bizutage ou d'actes de potaches, maisaffectaient gravement la tranquillite de l'interesse ».
Reposant sur une lecture incomplete de l'arret, le moyen manque en fait.
Quant à la troisieme branche :
Le demandeur soutient que l'arret declare etabli le harcelement sur labase exclusive d'elements subjectifs propres au defendeur.
Ainsi qu'il apparait de la reponse à la deuxieme branche, les jugesd'appel ne se sont pas fondes sur la seule perception du defendeur pourapprecier la gravite de l'atteinte à sa tranquillite, mais sur lescirconstances du harcelement et les rapports entre les auteurs ducomportement harcelant et la victime.
Reposant sur une lecture incomplete de l'arret, le moyen manque en fait.
Le controle d'office
Les formalites substantielles ou prescrites à peine de nullite ont eteobservees et la decision est conforme à la loi.
B. En tant que les pourvois sont diriges contre les decisions rendues surl'action civile exercee par le defendeur contre les demandeurs :
Les demandeurs ne font valoir aucun moyen specifique.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette les pourvois ;
Condamne chacun des demandeurs aux frais de son pourvoi.
Lesdits frais taxes en totalite à la somme de deux cent vingt-cinq eurosonze centimes dus dont I) sur le pourvoi de C. B. : cinquante-six eurosvingt-huit centimes, II) sur le pourvoi de C.-H. C. : cinquante-six eurosvingt-huit centimes, III) sur le pourvoi d'Y.R. : cinquante-six eurosvingt-huit centimes, et IV) sur le pourvoi de P. P.: cinquante-six eurosvingt-sept centimes.
Ainsi juge par la Cour de cassation, deuxieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient Frederic Close, president de section, Benoit Dejemeppe, PierreCornelis, Gustave Steffens et Franc,oise Roggen, conseillers, et prononceen audience publique du vingt-cinq avril deux mille douze par FredericClose, president de section, en presence de Damien Vandermeersch, avocatgeneral, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.
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| F. Gobert | F. Roggen | G. Steffens |
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| P. Cornelis | B. Dejemeppe | F. Close |
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25 AVRIL 2012 P.11.1339.F/9